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Décisions

Ministre de l’Économie, 2 février 2000, n° ECOC0000185Y

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ECONOMIE

Défendeur :

Conseil de la société Wagon Industrial Holdings

Ministre de l’Économie n° ECOC0000185Y

2 février 2000

MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE

Maître,

Par dépôt d'un dossier dont il a été accusé réception le 2 décembre 1999, vous avez notifié l'acquisition par la société de droit anglais Wagon Industrial Holdings SA (ci-après Wagon) de la société de droit français Aries croissance SA (ci-après Aries).

Le groupe Wagon exerce son activité dans les domaines des pièces automobiles, de l'ingénierie de précision et des produits d'entreposage. En 1998, ce groupe a réalisé un chiffre d'affaires de 3,64 milliards de francs dont 400 millions de francs en France.

La société Aries croissance SA appartient au groupe Aries qui exerce son activité dans la sous-traitance industrielle autour de trois pôles : " plastique ", " métal " et " mécanismes ". En 1998, cette société a réalisé un chiffre d'affaires de 1,1 milliard de francs dont la quasi-totalité est réalisée en France.

L'opération emporte transfert de propriété ou de jouissance sur les biens, droits et obligations de la société Aries croissance SA. Elle constitue donc une concentration au sens de l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.

Les seuils de chiffres d'affaires prévus à l'article 38 de l'ordonnance susvisée ne sont pas franchis. Il convient donc de définir les marchés pertinents.

Le marché pertinent est celui du dispositif de guidage pour vitres de véhicules. Les châssis et les éléments de structure de portes emboutis ou profilés ne peuvent pas être inclus dans le périmètre du marché pertinent. En effet leur production est assurée directement par les constructeurs automobiles, contrairement aux dispositifs de guidage pour vitres de véhicules. De ce fait, seule une minorité des appels d'offres passés par la clientèle ont pour objet la passation de commandes pour la porte entière, la mise en concurrence s'effectuant encore très largement au niveau de chaque équipement.

S'agissant de la dimension géographique de ce marché, il convient d'observer que la Commission européenne a eu l'occasion de se prononcer à de nombreuses reprises sur des opérations dans le secteur de l'équipement automobile. Elle relève notamment qu'il n'existe pas de barrières techniques ou douanières au commerce intracommunautaire et que les coûts de transport et la gestion des stocks en flux tendus ne font pas obstacle à une concurrence entre fournisseurs au niveau au moins européen, indépendamment de la localisation de leurs unités de production. Elle note également que les constructeurs automobiles tendent de plus en plus à se fournir sur une base mondiale et insiste sur le fait que la proximité de l'équipementier est un facteur qui n'est plus déterminant dans le choix d'un fournisseur. Enfin, elle a considéré qu'un marché (en l'espèce la fourniture de composants de tableaux de bord), bien que présentant encore de forts particularismes nationaux, devait cependant être considéré comme étant de dimension européenne, la structure de la demande étant appelée à évoluer dans les prochaines années.

En ce qui concerne la présente opération, les mêmes éléments (absence de barrières techniques et douanières, faiblesse des coûts de transport, attitude de la demande...) conduisent à partager l'analyse de la Commission européenne. Les acteurs de ce marché, notamment les principaux clients, ont confirmé le fait que le concurrence s'exerce au-delà du cadre des Etats.

Les parties représentaient, en France, en 1998, 31 % du marché français du dispositif de guidage pour vitres de véhicules. L'opération est, de ce fait, contrôlable.

L'objectif de l'opération est de permettre à Wagon de disposer des gammes et des moyens complémentaires que détient la société Aries dans le domaine de la technologie de la porte. Ainsi, elle sera le premier opérateur européen avec 33 % du chiffre d'affaires réalisé dans les ventes de dispositifs de guidage pour vitres de véhicules, soit, sur ce marché, environ deux fois plus que son plus proche concurrent.

L'opération n'est pas cependant de nature à porter atteinte à la concurrence pour les quatre raisons suivantes :

le nouveau groupe sera confronté en Europe à la présence de sept concurrents ayant des parts de marché supérieures à 5 % sur le marché de produit et constituant tous une alternative crédible pour la clientèle, c'est-à-dire disposant de la possibilité technique, économique et financière de répondre aux demandes des constructeurs. Ils ont ainsi tous acquis une solide réputation auprès de ces derniers en tant que prestataire habituel en matière de sous-traitance automobile ;

la clientèle est constituée d'un nombre restreint de grands groupes automobiles qui tirent de leur importance économique un pouvoir important de négociation. Elle passe, par ailleurs, ses commandes au moyen d'appels d'offres lui permettant d'être informée très efficacement de l'ensemble des opérateurs en mesure de répondre aux spécifications qu'elle a elle-même fixées ;

les barrières à l'entrée de ce marché ne sont pas insurmontables ni du point de vue technologique (il est possible d'acheter les équipements de production nécessaire à un tiers), ni du point de vue de la recherche-développement (les produits réalisés sont, en général, conçus par le client donneur d'ordre qui supporte, en conséquence, l'essentiel du coût de la recherche-développement) ;

si l'on tient compte de l'ensemble des éléments et assemblages utilisés dans les portes de véhicules légers, ces concurrents ont tous des positions supérieures à la société Wagon qui ne réalise que 4 % des ventes en France. Or si les éléments de guidage pour vitres de véhicules sont encore commandés de manière séparée, des exemples récents montrent que la clientèle pourrait chercher à l'avenir des opérateurs en mesure de fournir une prestation globale sur la porte. La société Wagon ne disposerait à cet égard d'aucun avantage déterminant de gamme.

En conséquence, je vous informe qu'il n'est donc pas dans mon intention de saisir le Conseil de la concurrence de cette opération, ni de la soumettre à des conditions particulières.