Ministre de l’Économie, 21 juillet 1995, n° ECOC9510202Y
MINISTRE DE L’ÉCONOMIE
Lettre
PARTIES
Demandeur :
MINISTRE DE L'ÉCONOMIE
Défendeur :
Président de la société Total Raffinage Distribution
MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES
Monsieur le président,
Par lettre du 16 janvier 1995, vous avez notifié le rachat par la société Total Raffinage Distribution ou l'une de ses filiales de la participation détenue par le groupe Bolloré Technologies dans le capital de la société Dépôts Pétroliers de Fos (DPF). Le dossier de notification a été complété par une lettre du 23 janvier 1995.
Saisi de cette opération le 23 mars 1995, le Conseil de la concurrence a rendu le 20 juin 1995 l'avis ci-joint.
Je partage l'analyse du Conseil sur les effets que cette opération est susceptible d'avoir sur la concurrence et sur sa contribution au progrès économique.
Je considère avec lui que l'accès aux capacités de stockage de DPF dans des conditions satisfaisantes revêt une importance particulière pour les négociants indépendants et les sociétés de commerce de grande surface qui, en 1994, ont assuré ensemble plus de 80 p. 100 des sorties de produits stockés vers le marché intérieur.
Je constate, par ailleurs, que la modification de la structure du capital de DPF est de nature à permettre à Total Raffinage Distribution de faire adopter de nouvelles conditions de tarification et de mise à disposition des capacités de stockage susceptibles d'induire une réduction des possibilités d'importation des négociants indépendants et des sociétés de commerce de grande surface ou de renchérir leurs coûts de stockage. Ce constat se trouve renforcé par le fait, d'une part, que Total Raffinage Distribution et Elf détiendraient, après l'opération, la majorité du capital de DPF, d'autre part, qu'une augmentation des coûts de stockage aurait une incidence plus forte sur les conditions d'exploitation des utilisateurs non actionnaires car ceux-ci ne bénéficieraient pas des éventuelles remontées de profit des actionnaires de DPF.
Pour ces motifs, l'opération me paraît comporter des risques réels d'atteinte à la concurrence. Au vu des informations recueillies lors de l'instruction de cette affaire, cette atteinte n'est pas compensée par une contribution suffisante au progrès économique.
Cependant, j'observe, avec le Conseil de la concurrence,que les risques d'atteinte à la concurrence n'existent que dans la mesure où les négociants indépendants et les sociétés de commerce de grande surface ne disposent pas, pour le stockage de leurs produits dans la zone desservie par DPF, de solution alternative équivalente. C'est la raison pour laquelle certains opérateurs envisagent la création d'un nouveau dépôt offrant une alternative.
Un tel dépôt ne pouvant raisonnablement être réalisé dans un délai inférieur à trois ans, il convient donc de maintenir pendant ce délai les conditions d'une concurrence effective sur le marché de la distribution des produits pétroliers.
Je considère que votre lettre d'engagement du 20 juillet 1995 répond à cet objectif. En conséquence, j'approuve la présente opération.
L'analyse qui m'a conduit à cette décision et qui porte sur le rachat par Total Raffinage Distribution de la participation du groupe Bolloré Technologies dans le capital de DPF ne saurait bien entendu préjuger de l'appréciation qui pourrait être faite du comportement futur des principaux actionnaires de DPF, notamment au regard des dispositions des articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'assurance de ma considération distinguée.