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Décisions

Ministre de l’Économie, 4 juin 1996, n° FCEC9610339Y

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ÉCONOMIE

Défendeur :

Conseil des parties

Ministre de l’Économie n° FCEC9610339Y

4 juin 1996

Maître,

Par lettre du 4 avril 1996, vous avez notifié l'acquisition, par la société United Parts France, filiale du groupe néerlandais United Parts Group NV, de 100 p. 100 du capital de la société anonyme de droit français Sofrattol.

Cette opération, en tant qu'elle emporte transfert de propriété et de jouissance de la totalité des biens, droits et obligations de la société Sofrattol, constitue une concentration au sens de l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.

Elle n'est pas contrôlable au regard des seuils en valeur absolue définis par l'article 38 de l'ordonnance. En effet, le nouvel ensemble réalisera en France un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 7 milliards de francs.

Il convient de rechercher si le seuil en valeur relative prévu par ce même article est atteint, ce qui impose de définir le marché pertinent.

Les entreprises concernées produisent toutes deux des réservoirs à carburant pour véhicules industriels, engins agricoles et engins de travaux publics.

Bien que les réservoirs à carburant pour véhicules industriels remplissent la même fonction que ceux destinés aux voitures particulières et utilitaires légers, ils n'en présentent pas moins des caractéristiques différentes (contenance, longévité...).

Indépendamment de ces éléments, l'analyse tant de la demande que de l'offre permet de considérer que ces deux catégories de produits constituent des marchés distincts.

Du point de vue de la demande :

La demande de réservoirs dépend directement du nombre de véhicules produits. Or, Si les constructeurs automobiles produisent quotidiennement plus de 1 000 exemplaires d'un modèle de voitures déterminé, il en va différemment des fabricants de véhicules industriels. Ceux-ci produisent dans le même temps entre 50 et 100 véhicules d'un même modèle. Par ailleurs, contrairement à l'automobile, où tous les véhicules du même type sont automatiquement dotés du même réservoir, les véhicules industriels peuvent être équipés de réservoirs différents afin de répondre à la demande de l'utilisateur final.

La demande des fabricants de véhicules industriels porte donc sur une très petite quantité et cela même sur les séries les plus longues comme les camions, où les constructeurs proposent à leur clientèle différentes options de réservoirs.

Du point de vue de l'offre :

Les fabricants de réservoirs pour véhicules industriels ne sont pas producteurs de réservoirs pour véhicules particuliers, ce qui s'explique notamment par les différences de process industriels.

Ainsi, il y a lieu de considérer que l'opération affecte le marché de la production et de la commercialisation de réservoirs à carburants pour véhicules industriels, engins agricoles et de travaux publics.

La société Sofrattol détenant à elle seule 41.9 p. 100 de ce marché, la présente concentration est contrôlable.

Bien que United Parts France ne soit pas présente sur le marché français, cette opération n'est pas totalement neutre pour la concurrence dans la mesure où l'acheteur est présent sur le même marché de produits dans différents pays européens. En outre, le projet de la société mère de développer ses ventes en France conduira, à court terme, à augmenter sensiblement cette part de marché.

Cette opération n'est cependant pas de nature à porter atteinte au fonctionnement du marché, et ce pour les raisons suivantes :

- l'équilibre concurrentiel de ce marché est en fait principalement assuré par la puissance d'achat des constructeurs qui mettent en concurrence des fournisseurs très largement dépendants de leurs clients. Ainsi, Sofrattol a réalisé, en 1995, 79,5 p. 100 de son chiffre d'affaires avec un seul constructeur ;

- les constructeurs ne sont pas privés d'alternative dans la mesure où il subsiste en Europe d'autres fournisseurs de taille non négligeable ;

- pour l'heure, les marchés sont plutôt de dimension nationale, comme l'indique la partie notifiante. Toutefois, même si les constructeurs privilégient la proximité de l'offre, ils n'hésitent pas à faire jouer la concurrence entre offreurs situés sur le marché européen ;

- on observe depuis cinq ans une baisse des prix des réservoirs liée à la concurrence, exercée notamment par des concurrents profitant d'une monnaie faible, et à la pression des acheteurs sur le niveau des prix. L'ouverture croissante des marchés semble indiquer que cette situation ne pourra être remise en cause par l'opération ;

- il n'existe pas de réelles barrières à l'entrée sur ce marché. En effet, il ne s'agit pas de produits de haute technicité, les techniques de fabrication ne sont couvertes par aucun brevet et les dépenses de publicité sont inexistantes.

Dans ces conditions et compte tenu de ces considérations, je vous informe que je n'ai pas l'intention de saisir le Conseil de la concurrence.

Je vous prie d'agréer, maître, l'assurance de ma considération distinguée.