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Décisions

Ministre des Finances, 16 avril 1996, n° FCEC9610125Y

MINISTRE DES FINANCES

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DES FINANCES

Défendeur :

Directeur de la société Vetarvor

Ministre des Finances n° FCEC9610125Y

16 avril 1996

MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX FINANCES ET AU COMMERCE EXTÉRIEUR

Monsieur le directeur,

Par lettre en date du 16 février 1996, vous m'avez notifié le rapprochement entre les sociétés Cavegat, Covely, Savenor, Vetarvor et Alcyon dans le secteur de la distribution de produits vétérinaires.

Cette opération, en tant qu'elle emporte transfert de propriété et de jouissance des biens, droits et obligations des sociétés Cavegat, Covely, Savenor et Vetarvor au profit d'Alcyon, constitue une concentration au sens de l'article 39 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Cette concentration n'est pas contrôlable au regard des seuils en valeur absolue prévus par l'article 38 de l'ordonnance précitée, le nouvel ensemble réalisant en France un chiffre d'affaires inférieur à 7 milliards de francs. Il convient donc de rechercher si le seuil en valeur relative prévu par ledit article est atteint, ce qui impose de définir le ou les marchés pertinents.

Les médicaments vétérinaires, le matériel médico-chirurgical et les aliments pour animaux répondent chacun à des besoins spécifiques. Le fait que leur distribution propre soit pour partie assurée par les mêmes intervenants ne fait pas obstacle à ce que chaque catégorie de produits soit regardée comme constituant un marché spécifique.

En ce qui concerne le marché du matériel, le nouvel ensemble représentera environ 25 p. 100 des ventes réalisées par la voie des grossistes. Toutefois, j'observe, d'une part, que seule une partie de ce matériel fait l'objet d'une distribution en gros, d'autre part, que les vétérinaires, à qui ce matériel est destiné, peuvent s'adresser directement aux 250 fournisseurs présents sur le marché. Ce marché étant nécessairement plus vaste que celui des ventes par grossistes, le seuil en valeur relative n'est donc pas atteint. Il en est de même s'agissant des aliments pour animaux de compagnie, Alcyon ne détenant que 1 p. 100 du marché.

Il en va différemment s'agissant de la distribution en gros des médicaments vétérinaires, et ce d'autant qu'il convient de distinguer les différents circuits de distribution.

En l'espèce, il existe trois circuits : la distribution à destination des cabinets vétérinaires, les filières agricoles à destination des groupements d'éleveurs et les répartiteurs pharmaceutiques qui, pour leur part, se bornent à approvisionner les pharmaciens.

S'il existe une substituabilité partielle entre ces différents circuits (les grossistes à destination des vétérinaires approvisionnant le cas échéant les pharmaciens), il n'en demeure pas moins que ces trois circuits s'adressent pour l'essentiel à des demandeurs différents. Aussi constituent-ils autant de marchés distincts.

Le nouvel ensemble, qui réalise près de 30 p. 100 des ventes totales de médicaments vétérinaires, représente sur le marché à destination des cabinets vétérinaires une part d'environ 45 p. 100. L'opération est donc contrôlable.

En l'espèce, quels que soient les marchés concernés, cette concentration n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, compte tenu des éléments énoncés ci-après.

Le fait de devenir le principal opérateur du marché de gros ne peut conduire Alcyon à s'affranchir de la concurrence effective des autres distributeurs de gros qui détiennent chacun une part de marché non négligeable.

Les fabricants de médicaments vétérinaires disposent d'une réelle puissance économique dans la mesure où ils appartiennent, pour la plupart, à de grands groupes. Ce fait est de plus renforcé par la concentration de l'offre entre un faible nombre d'opérateurs. Même s'ils ont cessé les activités de distribution qu'ils exerçaient auparavant, ils demeurent des concurrents potentiels puisqu'ils ont toujours la capacité de distribuer directement leurs produits aux vétérinaires.

En outre, il apparaît que les vétérinaires, qui constituent la clientèle des distributeurs de gros, disposent à la lois d'une compétence technique et d'une liberté de commande propres à contrebalancer la position des grossistes sur le marché.

De surcroît, le marché affecté par la présente opération demeure contestable. Au demeurant, certains grossistes étrangers, qui détiennent déjà de fortes positions sur leur marché respectif, ne cachent pas leur ambition de pénétrer le marché français, lequel représente 28 p. 100 du marché européen.

Enfin, l'opération doit permettre d'améliorer la productivité du réseau et de renforcer ainsi la compétitivité de la distribution française, nécessaire à son développement.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, je vous informe qu'il n'est pas dans mon intention de saisir le Conseil de la concurrence de cette opération. Je vous demande de me notifier toute nouvelles opération de concentration à laquelle le groupe Alcyon pourrait participer, quelle qu'en soit la forme.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le directeur, l'assurance de mes considérations distinguée.