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Décisions

Ministre de l’Économie, 24 mars 2000, n° ECOC0000187Y

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ÉCONOMIE

Défendeur :

Conseil des sociétés Koyo et PSA-KSDSE

Ministre de l’Économie n° ECOC0000187Y

24 mars 2000

MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE

Maître,

Par dépôt d'un dossier dont il a été accusé réception le 28 janvier 2000, vous avez notifié la création d'une filiale commune entre PSA Peugeot Citroën (PSA) et Koyo Seiko Co Ltd (KOYO), dans le secteur des mécanismes de direction.

PSA a créé une filiale ad hoc (KSDSE) dans laquelle seront transférés les actifs de ses sites de production de Dijon et Saint-Etienne. Koyo prendra dans un premier temps une participation de 51 % dans KSDSE, qui sera portée par étape à 85 % fin 2002.

PSA est une société anonyme de droit français au capital de 272 822 520 Euro. Elle a réalisé en 1998 un chiffre d'affaires de 33 milliards d'Euros, dont 11 milliards en France.

Koyo est une société de droit japonais cotée aux bourses de Tokyo et d'Osaka. Elle a réalisé en 1998 un chiffre d'affaires de 1,9 milliard d'Euros, dont 282 millions en France.

Koyo est active en Europe dans les secteurs des roulements à billes, des pompes électriques et à engrenage et des mécanismes de direction, via sa filiale française SMI, détenue à 84 % par Koyo et 16 % par Renault.

Dans la mesure où elle emporte changement de contrôle de KDSE, l'opération constitue une concentration au sens de l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.

Compte tenu des chiffres d'affaires réalisés en France par le groupe Koyo en 1998, les seuils de chiffres d'affaires prévus à l'article 38 de l'ordonnance susvisée ne sont pas franchis. Il convient donc de définir les marchés pertinents.

Malgré la diversité des technologies employées (direction à vérin sorti, direction à vérin parallèle, direction mécanique, direction électrique), on peut considérer qu'il existe un seul marché des équipements de direction pour automobiles.En effet, ces différentes technologies sont substituables et la plupart des opérateurs sont capables de mettre en œuvre la plupart de ces techniques. A terme, il est vraisemblable que la direction électrique remplacera la direction hydraulique et tous les fournisseurs de direction travaillent sur cette technologie. En ce domaine, TRW, concurrent des parties, détient une avance significative, couverte par un brevet expirant pour l'Europe en 2002.

Il n'y a pas lieu non plus de distinguer entre un marché de première monte et un marché de remplacement, le remplacement des mécanismes de direction demeurant exceptionnel et constituant une activité marginale pour les opérateurs du marché.

Le marché pertinent concerné par l'opération est donc le marché des mécanismes de direction pour automobiles.

Le seuil visé à l'article 38 de l'ordonnance susvisée est franchi, les parties ayant réalisé plus de 25 % des ventes en France sur le marché pertinent concerné. L'opération est contrôlable.

Les coûts de transports sont relativement faibles pour ces produits(environ 3 %). Les droits de douane sont nuls au sein de l'Union européenne, ainsi que pour les produits en provenance des pays de l'Est et de la Turquie.

Les composants pour automobiles ont généralement un prix similaire à travers l'Europe, puisqu'ils sont soumis à une négociation centralisée pour chacun des constructeurs, qui disposent de sites de production en plusieurs endroits de l'Union européenne.Les constructeurs s'approvisionnent sur la base d'appels d'offre européens, voire mondiaux. Les opérateurs livrent l'ensemble du marché européen à partir d'un nombre limité de sites de production.

La Commission européenne a eu l'occasion de se prononcer à de nombreuses reprises sur des opérations du même type dans le secteur de l'équipement automobile. Elle relève notamment qu'il n'existe pas de barrières techniques ou douanières au commerce intracommunautaireet que les coûts de transport et la gestion des stocks en flux tendus ne font pas obstacle à une concurrence entre fournisseurs au niveau au moins européen, indépendamment de la localisation de leurs unités de production (1). Elle note également que les constructeurs automobiles tendent de plus en plus à se fournir sur une base mondiale et insiste sur le fait que la proximité de l'équipementier est un facteur qui n'est plus déterminant dans le choix d'un fournisseur (2).

La dimension géographique du marché pertinent est donc au moins européenne, sans qu'il soit nécessaire de la définir plus précisément.

Sur le marché européen des systèmes de direction pour automobiles, la part de marché de Koyo est de 24 %, son principal concurrent, TRW, détenant 33 % du marché. A l'issue de l'opération, avec l'apport de la partie externalisée de PSA, la nouvelle entité détiendra 33 % du marché. Le volume global du marché augmentant, par externalisation de transactions internes, TRW verra sa part de marché ramenée à 29 %, ZF à 15 %, Visteon à 12 % et Delphi à 9 %.

L'opération ne modifie donc pas notablement la physionomie du marché.

En outre, la nouvelle entité sera confrontée à des concurrents ayant une large palette d'activités dans le secteur de l'équipement automobile, alors qu'elle-même ne sera active que sur le marché des équipements de direction.

Les constructeurs automobiles, eux-mêmes très concentrés, disposent sur ce marché d'un important pouvoir de négociation.Ce pouvoir est renforcé par le fait que 20 à 25 % de la production de systèmes de direction est encore réalisée en interne par les constructeurs automobiles.

De nouvelles entrées sont envisageables sur ce marché, soit par externalisation de la production encore réalisée en interne par les constructeurs, soit par l'arrivée sur le marché, en association avec des équipementiers, d'entreprises spécialisées dans les moteurs électriques ou l'électronique.Ces entreprises pourraient développer une activité centrée sur les systèmes de direction électriques, qui sont appelés à se développer rapidement.

Afin d'accompagner l'opération d'externalisation, PSA s'est engagé à poursuivre pendant [trois à huit ans] son approvisionnement auprès de Koyo pour [...] types de référence. [...]. Cet accord a pour conséquence de rigidifier le marché pour une durée de [trois à huit ans]. Il est cependant nécessaire pour PSA de sécuriser ses approvisionnements et pour Koyo de disposer d'un carnet de commandes garanti pendant le temps nécessaire à la diversification du portefeuille de clientèle de KSDSE. Le temps nécessaire à un changement de fournisseur de systèmes de direction pour automobiles est estimé à environ cinq ans. En conséquence, ce volet de l'accord entre PSA et Koyo peut être considéré comme accessoire à l'opération de concentration.

Il résulte de ces éléments quel'opération de concentration entre Koyo et PSA n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement d'une position dominante sur le marché concerné.Je vous informe qu'il n'est donc pas dans mon intention de saisir le Conseil de la concurrence de cette opération.

Nota. - A la demande des parties notifiantes, des informations relatives au secret des affaires ont été occultées et la part de marché exacte remplacée par une fourchette plus générale.

Ces informations relèvent du "secret d'affaires", en application de l'article 28 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié par le décret n° 95-916 du 9 août 1995, avant-dernier alinéa.

(1) Affaire n° IV/M. 1196 du 24 juin 1998 - Johnson Control/Becker.

(2) Affaire n° IV/M. 1462 du 11 mars 1999 - TRW/Lucas Varity.