Cass. crim., 14 juin 2001, n° 00-30.026
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme de la Lance
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Celice, Blancpain, Soltner, SCP Delaporte, Briard, Me Ricard.
LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par : - La société X, - la société Y, - La société Z contre l'ordonnance rendue par le président du Tribunal de grande instance de Lorient, en date du 24 novembre 1999, qui a autorisé des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à effectuer des opérations de visite et de saisie de documents, en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles prohibées ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - Vu les mémoires produits ; - I - Sur le pourvoi formé par les sociétés X et Y : - Sur le premier moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé des visites dans les locaux professionnels des sociétés SMCT, Z, X et SNC ; "aux motifs que Jean-Claude Le Teno, directeur régional, chef de la brigade interrégionale d'enquêtes des Pays de Loire, Centre, Bretagne et Poitou-Charentes a désigné Jean-François Chamant, inspecteur principal à Nantes, également titulaire d'un grade prévu à l'article 1er du décret du 2 août 1995 et en tant que fonctionnaire de catégorie A, également habilité au sens de l'article 2 de l'arrêté du 22 janvier 1993, pour le représenter auprès du Tribunal de grande instance de Lorient ; que la présente requête est ainsi recevable ; "alors, d'une part, que la requête tendant à l'autorisation de pratiquer des perquisitions doit être présentée par un agent nominativement habilité par le ministre chargé de l'économie ; que nul ne peut donner mandat pour saisir le président du tribunal à un fonctionnaire qui n'est pas lui-même nominativement habilité ; qu'ainsi l'ordonnance attaquée, qui se borne à indiquer que Jean-François Chamant, inspecteur principal, est fonctionnaire de catégorie A, agissant en vertu d'un mandat délivré par Jean-Claude Le Teno, sans constater que Jean-François Chamant était nominativement habilité par le ministre chargé de l'économie, se trouve privée de base légale au regard de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; "alors, d'autre part, que les fonctionnaires habilités agissent dans le ressort territorial du service auquel ils sont affectés ; que l'ordonnance attaquée qui se borne à indiquer que Jean-François Chamant lui ayant présenté la requête est inspecteur à Nantes, dans le département de la Loire-Atlantique, sans constater que ce fonctionnaire était territorialement compétent pour saisir le président du Tribunal de grande instance de Lorient aux fins de perquisitions dans des entreprises situées dans le ressort de ce tribunal, est privée de base légale au regard des articles 45 et 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et de l'article 5 de l'arrêté du 22 janvier 1993" ;
Attendu que, Jean-François Chamant n'étant intervenu que pour remettre au président la requête en autorisation de visite domiciliaire dont Jean-François Le Teno était l'auteur, c'est en la personne de ce dernier que devaient être réunies les qualités exigées par les articles 45 et 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 devenus les articles L. 450-1 et L. 450-4 du Code de commerce ; que le moyen est donc inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé des visites dans les locaux professionnels des sociétés SMCT, Z, X et SNC ; "aux motifs que "les faits qui viennent d'être relevés à la suite de l'examen de la requête et de ses annexes susvisées nous permettent de présumer des pratiques prohibées en application de l'ordonnance du 1er décembre 1986, mais que la portée de ces présomptions doit être précisée au regard des qualifications prévues par l'article 7, points 2 et 4, de l'ordonnance précitée ; que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a été informée par l'inspection générale des finances et le contrôle général des armées du comportement des entreprises sous-traitantes de la DCN qui laissent supposer des agissements anticoncurrentiels contraires au droit de la concurrence ; qu'il ressort clairement du courrier précédemment décrit et conjointement rédigé par l'inspection générale des finances et le contrôle général des armées que le projet industriel de construction de deux plate-formes pétrolières SFX 1 et SFX 2 a fait l'objet d'un contrat entre l'acheteur, SEDCO FOREX, et la société DCN INTERNATIONAL (DCN-I) qui est une direction de la délégation générale à l'armement du ministère de la défense ; que la DCN-I, dont le statut juridique est de droit privé, a pour mission de démarcher les clients à l'étranger et de signer les contrats notamment à l'export ; qu'elle s'est liée par un contrat avec la DCN (direction des constructions navales), autre direction de la délégation générale à l'armement pour mener à bien la phase industrielle de ce projet ; que selon les termes de cet accord, la DCN est le maître d'œuvre industriel de ce contrat, confiant la mission à son service des achats de consulter les entreprises et de sélectionner les sous-traitants pour les travaux non réalisés par les établissements de la DCN, localisés à Brest et Lorient ; que chacun de ces deux établissements de la DCN ont des travaux distincts à réaliser puisque les deux flotteurs babord des deux plate-formes sont réalisés à Brest, les deux autres strictement identiques étant fabriqués à Lorient ; qu'enfin ce dernier établissement en raison de capacités industrielles non disponibles, notamment en spécialité "coque", est contraint de recourir à la sous-traitance d'entreprises extérieures à la DCN ; que pour confier la réalisation des travaux aux entreprises sous-traitantes, trois consultations ont dû être lancées à partir du 28 janvier 1998 comme l'indique le rapport de mai 1998 de la DCN de Lorient communiqué en pièce 1 du bordereau du 22 octobre 1999 ; qu'en ce qui concerne la première consultation, cinq sociétés sont dûment informées du projet de construction ACH, SMCT, GEC/Alsthom/Leroux naval, CMN et Leroux et Loz Technologies ; que toutefois CMN transmet son dossier de consultation à X, qui répond ainsi que GEC/ Alsthom/Leroux naval et SMCT ; que SIEM, sous-traitant de Leroux et Lotz technologies remet une offre partielle alors que Leroux et Lotz technologies ne remet pas d'offres tout comme l'entreprise ACH ; que la DCN à la suite de l'examen des offres procède à une seconde consultation où à nouveau quatre sociétés sont consultées SMCT, GEC/Alsthom/ Leroux naval, X, Leroux et Lotz technologies; que trois seulement, les mêmes que celles du premier tour, déposent une offre ; que la DCN en raison des propositions élevées de ces entreprises doit procéder à une troisième consultation en élargissant la concurrence ; qu'ainsi huit sociétés sont approchées Tissot, Sorenam, CMP, Eiffel, Ponticelli, X, SMCT et GEC/Alsthom/ Leroux naval ; que pour autant, seules trois entreprises, les mêmes que précédemment, répondent par une offre conforme ; que lors de la conclusion des contrats, ce sont ces entreprises SMCT et Z (ALN) ainsi qu'X en groupement avec SNC, qui sont déclarées bénéficiaires de commandes de travaux ; qu'il apparaît ainsi que lors de ces trois consultations, trois mêmes entreprises ou groupement d'entreprises répondent de façon satisfaisante alors même que l'un d'entre eux X n'a pas été initialement consulté par la DCN et qu'il n'est intervenu qu'à la suite de la transmission du dossier de consultation par la CMN consultée par la DCN à cette occasion ; qu'en définitive, les travaux sont confiés à trois entreprises ou groupement d'entreprises sans que d'autres tentent de les obtenir en remettant une offre satisfaisante ; que de tels comportements sont de nature à présumer la concertation prohibée par l'article 7 de l'ordonnance susvisée et qu'il convient de qualifier ; que s'agissant du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée, que la fixation du prix de la construction des flotteurs des deux plate-formes n'apparaît pas avoir bénéficié du libre jeu de la concurrence ; que les propositions des entreprises se sont avérées élevées au regard d'un autre marché de la DCN à Brest ; qu'en effet le montant des flotteurs qui sont réalisés à Lorient, est supérieur de 31,7 % à celui des flotteurs réalisés à Brest ; que seulement trois entreprises ou groupement d'entreprises déposent des offres satisfaisantes à l'occasion des trois consultations sur les dix consultées par la DCN ; que les offres sont élevées dans leur montant et n'ont été diminuées qu'après notification d'une partie du contrat ou en phase finale de négociation que lors de ces trois consultations ces trois entreprises n'ont manifestement pas cherché à se rapprocher des souhaits de la DCN qui leur signifiait à plusieurs reprises son désaccord vis-à-vis d'offres de prix considérées comme trop élevées ; qu'ainsi de tels comportements sont observés lors de la première consultation en même temps que l'absence de remises d'offres par les autres entreprises sollicitées par la DCN, ACH et Leroux et Lotz technologies ou la remise d'offre partielle par SIEM, sous-traitant de Leroux et Lotz technologies; que finalement seuls les blocs 502 et 602 et les ponts 312 et 412 sont confiés à l'entreprise SMCT ; que la DCN de Lorient est contrainte de lancer, le 6 mars 1998, une seconde consultation pour la totalité des travaux à l'exception de ceux confiés à SMCT ; qu'en dépit d'un contexte d'urgence caractérisé compte tenu des contraintes de délai de livraison, la DCN de Lorient considère que les offres de prix reçues ne sont toujours pas satisfaisantes en raison de leur montant élevé ; que, tandis que Leroux et Lotz technologies à nouveau consulté ne remet pas d'offre, la DCN sollicite à l'issue de cette consultation auprès de SMCT, GEC/LNI (ALN) et X, seuls sous-traitants à avoir remis une offre, une nouvelle demande d'effort commercial par le biais d'une visioconférence intervenue le 31 mars 1998 ; que les effets de cette demande expresse de réduction de prix sont peu significatifs si nous nous référons aux tableaux relatifs principalement à l'état des offres négociées au 31 mars et 2 avril 1998 dans le document cité en pièce 4 du bordereau du 22 octobre 1999 susvisé ; qu'à cet égard, les réductions consenties par les sous-traitants sont imputables à la seule société SMCT, en attente de notification d'un contrat pour les blocs 502 et 602 et les ponts 312 et 412 ; que ces minorations de prix portent seulement sur les travaux pour lesquels SMCT est en attente de notification du contrat ; que les efforts de réduction des coûts de la SMCT à la lecture du tableau reproduit en pièce 4 du bordereau sont limités à la seule plate-forme SFX 1 et conduisent à une minoration limitée de 317 KF sur une proposition globale initiale pour la plate-forme SFX 1 de 6 215 KF, soit une baisse de 5,1 % ; que parallèlement sur la totalité des autres lots soumis au libre jeu de la concurrence, tant X qu'ALN ne proposent pas de réduction de prix, même minime ; qu'ainsi l'entreprise GEC/LNI (ALN) ne souhaite pas modifier ses prix alors qu'elle a déposé une offre pour les blocs et ponts 102, 202, 902, A02 et B02 pour une somme totale de 11 909 KF comme le mentionne le tableau reproduit en pièce 4 du bordereau ; de même, que la société X dont l'offre de prix pour les blocs et ponts 302, 402, 112, 212, 512 et 612 s'élève, au 31 mars 1999, à 11 529 KF ; qu'insatisfaite du déroulement des négociations et du niveau toujours élevé des prix, la DCN de Lorient décide de procéder à un "élargissement de la concurrence" par le lancement d'une nouvelle et troisième consultation à la date du 24 avril 1998, en excluant une nouvelle fois les blocs et ponts 502, 602, 312 et 412 ; qu'à cet effet sont informées également les sociétés Tissot, Sorenam, CMP, Eiffel et Ponticelli ; que trois entreprises sollicitées, Tissot, Eiffel et Ponticelli ne remettent pas d'offre, seule la société SORENAM remettant une offre sommaire pour les blocs 302 et 402, et les ponts 512 et 612 ; que l'offre de l'entreprise SORENAM est considérée comme ne présentant pas les garanties nécessaires et qu'elle est écartée ; que la DCN se retrouve, une nouvelle fois, devant la situation suivante à chacun des blocs et ponts à fabriquer, correspond une et une seule offre de prix de l'une des trois sociétés, SMCT, GEC/LNI (ALN) ou X ; qu'aucune de ces entreprises ne juge utile de présenter une offre de prix sur des travaux pour lesquels elle s'était auparavant abstenue ; que les minorations de prix enfin obtenues à l'issue de cette troisième consultation restent particulièrement limitées, comme l'indiquent les tableaux faisant référence à l'état des offres négociées au 31 mars, 2 avril et 8 mai 1998 dans la pièce 4 du bordereau du 22 octobre 1999 ; qu'ainsi, entre le 2 avril et le 8 mai 1998, la baisse de prix consentie par ALN est respectivement de 2,6 % et 2,2 % pour chacune des plate-formes sur la totalité des travaux chiffrés dans les tableaux décrits ci- dessus ; que celle consentie par ACB est limitée exclusivement au pont 112, soit une réduction de 10,2 % et 14,8 % pour ce travail sur les plate-formes SFX l et 2, mais seulement de 2,6 % et 3,6 % sur la totalité des travaux chiffrés dans les tableaux décrits ci-dessus ; qu'à l'issue d'ultimes négociations, le montant total des réductions obtenues de la part des sociétés GEC/LNI (ALN) et X s'élève à 1 800 KF hors taxe ; que pour autant cette minoration doit être avant tout analysée au regard des spécifications techniques revues à la baisse par la DCN de Lorient pour réduire les coûts, comme l'indique clairement la dernière page de son rapport ; qu'aucun des trois sous-traitants ne présentent d'offres de réduction de prix de manière isolée et compétitive ; que les seules baisses intervenues en cours de négociation sont le fait soit de la SMCT qui est dans l'attente de la notification d'une partie du contrat pour laquelle ses concurrents ne remettent pas d'offres, soit d'X et GEC/Z (ALN) en phase finale de négociation dans un contexte d'allégements techniques de la part de la DCN de Lorient ; qu'enfin les sous-traitants, professionnels du marché en cause, ne peuvent ignorer que les capacités industrielles de la DCN de Lorient sont insuffisantes, notamment en spécialité "coque" puisqu'ils ont été consultés et sujets à trois consultations consécutives qu'ils ne peuvent ignorer que le recours à des entreprises géographiquement éloignées est de nature à renchérir fortement les coûts et les délais d'un projet devant être conduit dans l'urgence pour éviter les pénalités de retard ; que les faits tels qu'ils viennent d'être énoncés permettent de présumer des pratiques prohibées au sens du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée ; que s'agissant du point 4 de l'article 7 de l'ordonnance précitée, que les entreprises attributaires du marché sont les suivantes SMCT pour les blocs 502 et 602 et les ponts 312 et 412 conformément au contrat L.98.13.286.00 et le bloc 712 suite au contrat L.98.13.310.00 ; Z (ex GEC/LNI) pour les blocs 102, 202, A02, B02 et 902 par contrat L.98.13.296.00 ; et enfin X associé avec SNC pour les blocs 302 et 402 et les ponts 512, 612, 112 et 212 par contrat L.98.13.29.500 ; que l'entreprise X est attributaire avec SNC alors qu'elle n'a pas été initialement consultée par la DCN mais intervient après transmission par la CMN du dossier de consultation ; que le comportement de cette entreprise a pour conséquence d'orienter le choix de la DCN pour l'attribution des travaux ; que les sept autres entreprises consultées, par ailleurs, n'ont rien obtenu en raison de l'absence de proposition ou de proposition non satisfaisante ; que lors du premier tour de consultation, à chaque bloc ou pont à réaliser correspond une et une seule réponse de la part de l'une ou l'autre des trois entreprises, SMCT, GEC/Alsthom/Leroux naval (ALN) ou X, à l'exception des blocs 302, 402, 502 et 602, qui font l'objet d'offres concurrentes de SMCT et X ; et attendu qu'aucun bloc ne reste sans réponse ; qu'au deuxième tour, cet élément de proposition concurrente sur quatre blocs disparaît dans la mesure où X ne remet plus d'offres pour les blocs 502 et 602 et que SMCT se retire également des blocs 302 et 402 ; que chacune des trois entreprises ne remet pas d'offres complémentaires sur de nouveaux blocs ou ponts alors qu'elles sont informées que chaque tâche à réaliser n'a suscité qu'une seule offre de la part des concurrents potentiels ; que cette situation de non concurrence (à chaque bloc ou pont correspond une et une seule réponse d'une des trois entreprises) s'est reproduite une nouvelle fois à l'issue de la tentative d'élargissement de la concurrence par la DCN de Lorient ; que par ailleurs le montant global des travaux à réaliser par chacun des trois sous-traitants ne révèle pas de profond déséquilibre au détriment ou au profit de l'un d'entre eux ; qu'ainsi l'examen du tableau daté du 17 mars 1998 concernant la plate-forme SFX 1, en pièce 2 du bordereau du 22 octobre 1999, indique respectivement les montants 10 949 KF/HT, 14 998 KF/HT et 14 300 KF/HT pour les sociétés SMCT, X et GEC/LNI (ALN) ; qu'au 8 mai 1998, selon les tableaux joints en pièce 4 du bordereau, les montants cumulés des travaux par chaque sous-traitant font état pour la plate-forme SFX 1 et selon les plans modifiés de la DCN d'offres de prix suivantes SMCT 8 753 KF, X 11 228 KF, GEC/LNI 11 662 KF ; que les contrats définitivement conclus mentionnent que le total des prestations à caractère définitif représente respectivement pour les trois sous-traitants SMCT, ALN et X, 20 166 613 F KF/HT, 26 469 027 F/HT et 28 247 218 F/HT ; que les attributions des blocs et ponts relatifs à la construction de deux flotteurs de deux plate-formes dans le cadre d'un contrat lancé par la DCN de Lorient apparaissent avoir fait l'objet d'une répartition prohibée au sens du point 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ; qu'ainsi la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article 7 points 2 et 4 de l'ordonnance susvisée que les entreprises consultées ou qui ont répondu nous apparaissent impliquées dans ces pratiques ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ; qu'il convient en conséquence de rechercher les lieux où se trouvent le plus vraisemblablement les documents nécessaires à l'apport de cette preuve ; que les entreprises SMCT, X en groupement avec SNC et ALN ont bénéficié tout particulièrement des pratiques mentionnées ci-dessous en étant attributaires des travaux ci-dessus cités ; qu'en outre existent des informations concordantes sur leur comportement ; que par ailleurs l'entreprise CMN semble avoir un rôle déterminant en transmettant le dossier de consultation à X, non consulté au lancement du premier tour de consultation ; que par conséquent, il est vraisemblable que les documents utiles à l'apport de la preuve se trouvent dans les locaux des entreprises SMCT, ALN, CMN, X et Société Y, agissant solidairement avec X pour la réalisation du contrat confié ; qu'il est utile en conséquence d'autoriser la visite et la saisie des documents dans les locaux de ces entreprises dont les adresses figurent dans les documents décrits ci-dessus" ; "alors, d'une part, que le président du tribunal doit vérifier que la demande d'autorisation est fondée ; que l'existence d' une entente au sens de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 suppose un concours de volontés présumé de la part des entreprises concernées ; qu'en estimant qu'une présomption d'une telle entente existait en l'espèce en se fondant sur les deux seules circonstances que trois sociétés ont présenté des offres satisfaisantes et que la Société X n'avait pas été initialement destinataire du dossier de consultation, circonstances qui ne permettent pas de caractériser l'existence d'une concertation, l'ordonnance attaquée est privée de base légale au regard des articles 7 et 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; "alors, d'autre part, que l'absence de concurrence ne suffit pas à présumer l'existence d'une entente ; qu'en se bornant à relever que le marché concerné n'avait pas donné lieu à une vive concurrence pour conclure à l'existence d'une présomption d'entente, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986" ;
Attendu que le président du tribunal, s'étant référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'Administration, a souverainement apprécié l'existence des présomptions d'agissements justifiant la mesure autorisée ;que le moyen n'est ainsi pas fondé ;
Sur le troisième moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé des visites dans les locaux professionnels des sociétés SMCT, Z, X et SNC ; "alors que l'ordonnance doit mentionner expressément que les enquêteurs devront faire connaître au président du tribunal de grande instance le jour et l'heure auxquels ils procéderont aux perquisitions afin que ce magistrat puisse prendre les mesures nécessaires pour exercer un contrôle effectif sur le déroulement et la régularité de celles-ci ; que faute d'avoir exigé des agents qu'ils informent le président du tribunal du jour et de l'heure de leur intervention, l'ordonnance a méconnu les exigences de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986" ;
Attendu que l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 450-4 du Code de commerce, n'exige pas que le président qui autorise une visite domiciliaire mentionne, à peine de nullité de son ordonnance, qu'il devra être informé de l'heure et de la date de la mesure autorisée ;que le moyen ne peut qu'être écarté ;
II - Sur le pourvoi formé par la société Z : - Sur le premier moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé Jean-Claude Le Teno, chef de la brigade interrégionale d'enquête des pays de Loire, Centre, Bretagne et Poitou-Charentes, à procéder ou faire procéder à des visites et saisies dans les locaux des sociétés SMCT à Saint-Nazaire (44600), Z à Paris (75016), Constructions Mécaniques de Normandie à Paris (75008), X et société Nouvelle Cherbourgeoise à Querqueville (50460), et donné commission rogatoire aux présidents des Tribunaux de grande instance de Saint-Nazaire, Cherbourg et Paris, sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, en vue de la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles à l'encontre notamment de la société Z ; "alors que le président d'un tribunal de grande instance ne peut reconnaître compétent pour faire prcéder, par voie de commission rogatoire, à des visites et saisies hors de son ressort qu'à la condition qu'une action simultanée soit nécessaire, pour la recherche de la preuve des agissements anticoncurrentiels présumés, dans différents ressorts ; qu'à défaut d'avoir constaté qu'une telle condition était en l'espèce réalisée, le président du Tribunal de grande instance de Lorient n'a pas légalement justifié sa compétence pour autoriser des visites et saisies domiciliaires dans des lieux situés hors de son ressort, à Saint-Nazaire, Paris et Cherbourg, et a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l'article 48 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986" ;
Attendu que l'ordonnance attaquée relève la nécessité d'une intervention simultanée en des lieux différents et multiples ; que le moyen manque en fait ;
Sur le second moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé des visites et saisies domiciliaires à l'encontre de la société Z, en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles présumées, prohibées par les points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, à l'occasion de la sous-traitance des travaux de construction des flotteurs de deux plates-formes pétrolières par l'établissement, sis à Lorient, de la Direction des Constructions Navales (DCN), direction de la Délégation Générale pour l'Armement du ministère de la Défense ; "aux motifs que "les faits relevés à la suite de l'examen de la requête et de ses annexes permettent de présumer des pratiques prohibées par l'article 7 points 2 et 4 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a été informée par l'Inspection Générale des Finances et le Contrôle Général des Armées du comportement des entreprises sous-traitantes de la DCN qui laissent supposer des agissements anticoncurrentiels contraires au droit de la concurrence ; que, selon les termes de l'accord conclu entre la DCN-I, société privée détenue par l'Etat, et la DCN, cette dernière est le maître d'œuvre industriel du contrat conclu entre Sedco Forex et DCN-I pour la construction de deux plates-formes pétrolières, son service d'achat ayant pour mission de consulter les entreprises et de sélectionner les sous-traitants pour les travaux non réalisés par les établissements de la DCN, localisés à Brest et à Lorient ; que chacun de ces deux établissements a des travaux distincts à réaliser, les deux flotteurs babord des deux plates-formes étant réalisés à Brest, les deux autres strictement identiques étant fabriqués à Lorient ; qu'enfin, ce dernier établissement en raison de capacités industrielles indisponibles, notamment en spécialité "coque", est contraint de recourir à la sous-traitance d'entreprises extérieures à la DCN ; que pour confier la réalisation de travaux aux entreprises sous- traitantes, trois consultations ont dû être lancées à partir du 28 janvier 1998 comme l'indique le rapport de mai 1998 de la DCN de Lorient communiqué en pièce 1 du bordereau du 22 octobre 1999 ; que lors de la conclusion des contrats de sous-traitance, ce sont les entreprises SMCT et Z (ALN) ainsi qu'X en groupement avec SNC, qui sont déclarées bénéficiaires des commandes de travaux ; qu'il apparaît ainsi que lors de ces trois consultations, trois mêmes entreprises ou groupement d'entreprises répondent de façon satisfaisante alors même que l'un d'entre eux, X, n'a pas été initialement consulté par la DCN et qu'il n'est intervenu qu'à la suite de la transmission du dossier de consultation par la CMN consultée par la DCN à cette occasion ; qu'en définitive les travaux sont confiésà trois entreprises ou groupement d'entreprises sans que d'autres tentent de les obtenir en remettant une offre satisfaisante ; que de tels comportements sont de nature à présumer la concertation prohibée par l'article 7 de l'ordonnance susvisée et qu'il convient de qualifier ; que s'agissant du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée, la fixation du prix de la construction des flotteurs des deux plates-formes n'apparaît pas avoir bénéficié du libre jeu de la concurrence ; que les propositions des entreprises se sont avérées élevées au regard d'un autre marché de la DCN à Brest ; qu'en effet, le montant des flotteurs réalisés à Lorient, est supérieur de 31,7 % à celui des flotteurs réalisés à Brest ; que seulement trois entreprises au groupement d'entreprises déposent des offres satisfaisantes à l'occasion des trois consultations sur les dix consultées par la DCN ; que les offres sont élevées dans leur montant et n'ont été dimnuées qu'après notification d'une partie du contrat ou en phase finale de négociation ; que lors de ces trois consultations, ces trois entreprises n'ont manifestement pas cherché à se rapprocher des souhaits de la DCN qui leur signifiait à plusieurs reprises son désaccord vis-à-vis d'offres de prix considérées comme trop élevées ; qu'ainsi de tels comportements sont observés lors de la première consultation en même temps que l'absence de remises d'offres par les autres entreprises sollicitées par la DCN, ACH et Leroux et Lotz technologies ou la remise d'offre partielle par SIEM, sous-traitant de Leroux et Lotz technologies; que finalement seuls les blocs 502 et 602 et les ponts 312 et 412 sont confiés à l'entreprise SMCT ; que la DCN de Lorient est contrainte de lancer, le 6 mars 1998, une deuxième consultation pour la totalité des travaux à l'exception de ceux confiés à SMCT ; qu'en dépit d'un contexte d'urgence caractérisé, compte tenu des contraintes de délai de livraison, la DCN de Lorient considère que les offres de prix reçues ne sont toujours pas satisfaisantes en raison de leur montant élevé ; qu'insatisfaite du déroulement des négociations et du niveau toujours élevé des prix, la DCN de Lorient décide de procéder à un "élargissement de la concurrence" par le lancement d'une nouvelle et troisième consultation à la date du 24 avril 1998, en excluant une nouvelle fois les blocs et ponts 502, 602, 312 et 412 ; qu'à cet effet sont informées également les sociétés Tissot, SORENAM, CMP, EIFFEL et PONTICELLI ; que trois entreprises sollicitées, Tissot, EIFFEL et PONTICELLI ne remettent pas d'offre, seule la société SORENAM remettant une offre sommaire pour les blocs 302 et 402 et les ponts 512 et 612 ; que l'offre de l'entreprise SORENAM est considérée comme ne présentant pas les garanties nécessaires et qu'elle est écartée ; qu'aucun des trois sous-traitants ne présente d'offres de réduction de prix de manière isolée et compétitive ; que les seules baisses intervenues en cours de négociation sont le fait soit de la SMCT qui est dans l'attente de la notification d'une partie du contrat pour laquelle ses concurrents ne remettent pas d'offres, soit d'X et GEC/Z (ALN) en phase finale de négociation dans un contexte d'allégements techniques de la part de la DCN de Lorient ; qu'enfin les sous-traitants, professionnels du marché en cause ne peuvent ignorer que les capacités industrielles de la DCN de Lorient sont insuffisantes, notamment en spécialité "coque puisqu'ils ont été consultés et sujets à trois consultations consécutives ; qu'ils ne peuvent ignorer que le recours à des entreprises géographiquement éloignées est de nature à renchérir fortement les coûts et les délais d'un projet devant être conduit dans l'urgence pour éviter les pénalités de retard ; que les faits tels qu'ils viennent d'être énoncés permettent de présumer des pratiques prohibées au sens du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée ; que s'agissant du point 4 de l'article 7 de cette ordonnance, l'entreprise X est attributaire avec SNC alors qu'elle n'a pas été initialement consultée par la DCN mais intervient après transmission par la CMN du dossier de consultation ; que le comportement de cette entreprise a pour conséquence d'orienter le choix de la DCN pour l'attribution des travaux ; que les sept autres entreprises consultées, par ailleurs, n'ont rien obtenu en raison de l'absence de proposition ou de proposition non satisfaisante ; que lors du premier tour de consultation à chaque bloc ou pont à réaliser correspond une et une seule réponse de la part de l'une ou l'autre des trois entreprises, SMCT, GEC/Alsthom/Leroux naval (ALN) ou X, à l'exception des blocs 302, 402, 502 et 602, qui font l'objet d'offres concurrentes de SMCT et X ; qu'aucun bloc ne reste sans réponse ; qu'au deuxième tout cet élément de proposition concurrente sur quatre blocs disparait dans la mesure où X ne remet plus d'offre pour les blocs 502 et 602 et que SMCT se retire également des blocs 302 et 402 ; que chacune des trois entreprises ne remet pas d'offres complémentaires sur de nouveaux blocs ou ponts alors qu'elles sont informées que chaque tâche à réaliser n'a suscité qu'une seule offre de la part des concurrents potentiels ; que cette situation de non concurrence (à chaque bloc ou pont correspond une et une seule réponse des trois entreprises) s'est reproduite une nouvelle fois à l'issue de la tentative d'élargissement de la concurrence par la DCN de Lorient ; que par ailleurs le montant global des travaux à réaliser par chacun des trois sous-traitants ne révèle pas de profond déséquilibre au détriment ou au profit de l'un d'entre eux ; qu'ainsi l'examen du tableau daté du 17 mars 1998 concernant la plate-forme SFX1, en pièce 2 du bordereau du 22 octobre 1999, indique respectivement les montants 10 949 KF/HT, 14 948 KF/HT et 14 300 KF/HT pour les sociétés SMCT, X et GEC/LNI (ALN) ; qu'au 8 mai 1998, selon les tableaux joints en pièce 4 du bordereau, les montants cumulés des travaux pour chaque sous- traitant font état pour la plate-forme SFX 1 et selon les plans modifiés de la DCN d'offres de prix suivantes SMCT : 8 753 KF, X / 11 228 KF, GEC/LNI : 11 662 KF ; que les contrats définitivement conclus mentionnent que le total des prestations à caractère définitif représente respectivement pour les trois sous-traitants SMCT, ALN et X, 20 166 613 F/HT, 26 469 027 F/HT et 28 247 218 F/HT ; que les attributions des blocs et ponts relatifs à la construction de deux flotteurs de deux plates-formes dans le cadre d'un contrat lancé par la DCN de Lorient apparaissent avoir fait l'objet d'une répartition prohibée au sens du point 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ; qu'ainsi, la portée des présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article 7 points 2 et 4 de l'ordonnance susvisée ; "alors qu'en application des dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les présomptions de pratiques anticoncurrentielles de nature à justifier une visite et saisie domiciliaire ne peuvent être exclusivement fondées sur des notes internes à l'administration, non corroborées par des éléments objectifs extérieurs à celle-ci, en particulier, lorsque cette même administration qui dispose du pouvoir de procéder à des visites domiciliaires en vue de la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles présumées, est en même temps la victime supposée de telles pratiques dans le cadre des contrats qu'elle a conclus ; qu'en l'espèce, il résulte de l'ordonnance attaquée que les éléments d'information communiqués au juge et retenus par lui consistent en une lettre de l'Inspection Générale des Finances et du Contrôle Général des Armées, en date du 22 octobre 1999, une note de la DCN Lorient du mois de mai 1998 et les trois contrats conclus entre la société DCN-I détenue en totalité par l'Etat et les sociétés SMCT, ALN et X ; qu'en fondant des présomptions de pratiques anticoncurrentielles sur des éléments d'information exclusivement internes à l'Administration, à la fois victime supposée desdites pratiques et auteur de la requête nécessaire à l'obtention de l'autorisation de procéder à des visites domiciliaires, le président du Tribunal de grande instance de Lorient a violé les dispositions du texte susvisé et de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ;
Attendu que, d'une part, l'ordonnance se fonde sur des documents émanant de l'inspection générale des finances et du contrôle général des armées et non de l'administration requérante ; que, d'autre part, la communication d'informations entre les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et d'autres services de l'Etat est prévue par l'article 51 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 450-7 du Code de commerce, qui dispose que les enquêteurs peuvent, sans se voir opposer le secret professionnel, accéder à tout document ou élément d'information détenu par les services et établissements de l'Etat et des autres collectivités publiques ;que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'ordonnance attaquée est régulière en la forme ;
Rejette les pourvois.