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Conseil Conc., 10 mai 1990, n° 90-MC-08

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Demande de mesures conservatoires présentée par la société Biwater

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président : M. Laurent ; Vice-président : M. Béteille ; Membre : M. Gaillard ; Rapporteur : M. Paitre.

Conseil Conc. n° 90-MC-08

10 mai 1990

LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,

Vu la lettre enregistrée le 11 avril 1990 sous le numéro M 69 par laquelle la SABiwater a saisi le Conseil de la concurrence d'une demande de mesures conservatoires à l'encontre de la direction départementale de l'équipement d'Ille-et-Vilaine, de l'office d'équipement hydraulique de la Corse et de la SA Pont-à-Mousson, ensemble les observations complémentaires de la société Biwater, enregistrées les 20 et 27 avril 1990 ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par le ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer enregistrées le 3 mai 1990 ; Vu les observations présentées par le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable Vern Chantepie enregistrées le 3 mai 1990 ; Vu les observations présentées par l'office d'équipement hydraulique de la Corse enregistrées le 3 mai 1990 ; Vu les observations présentées par la société Pont-à-Mousson enregistrées le 3 mai 1990; Vu les observations du commissaire du Gouvernement enregistrées le 3 mai 1990 ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les parties entendus;

Considérant que la société Biwater, dont l'activité de commercialisation de canalisations et raccords en fonte ductile a débuté le 1er septembre 1988, affirme dans sa lettre susvisée que la société Pont-à-Mousson dénigre ses produits auprès des maîtres d'ouvrage publics, des maîtres d'œuvre et des entreprises de travaux d'assainissement et d'adduction d'eau en soutenant faussement qu'ils ne sont pas conformes aux normes françaises homologuées; qu'elle fait valoir que cette pratique présente le caractère d'un abus de la position dominante que la société Pont-à-Mousson détiendrait sur le marché ; qu'elle allègue, en outre, que cette pratique a été appuyée par certains maîtres d'ouvrage publics ainsi que par des services techniques départementaux; que la société Biwater demande le prononcé de mesures conservatoires ; qu'elle précise que cette demande intéresse, d'une part, l'exécution d'un marché du 28 février 1990 par lequel le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable Vern Chantepie a confié l'exécution de travaux d'adduction d'eau à l'entreprise Forclum, d'autre part, la situation résultant du marché par lequel, au début de 1990, la société Pont-à-Mousson est devenue, pour quatre ans, le seul fournisseur en canalisations d'eau et raccords de l'office d'équipement hydraulique de la Corse ;

Considérant que la société Biwater ne s'est pas bornée, dans sa lettre enregistrée le 11 avril 1990, à solliciter le prononcé de mesures conservatoires, mais a également entendu saisir le Conseil sur le fondement de l'article 11 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 susvisée ; que si, en vertu de l'article 12 du décret du 29 décembre 1986 également susvisé, une demande de mesures conservatoires ne peut être formée qu'accessoirement à une saisine du Conseil au fond, aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige les intéressés à présenter ces demandes par deux documents distincts ; que d'ailleurs la lettre de la société Biwater a fait l'objet d'un double enregistrement; que la société Pont-à-Mousson n'est par suite pas fondée à soutenir que la demande faisant l'objet de la présente décision serait irrecevable faute d'avoir été présentée accessoirement à une saisine au fond;

Considérant que l'application des dispositions de l'article 12 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est subordonnée à la constatation de comportements susceptibles d'entrer dans le champ d'application des articles 7 et 8 de l'ordonnance, et auxquels il faudrait mettre fin sans délai pour prévenir ou faire cesser un trouble grave et immédiat ;

Considérant qu'à supposer que les pratiques dénoncées soient de la nature de celles visées par les articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,il ne résulte pas du dossier, en tout état de cause, que, du fait de ces pratiques, l'entreprise Biwater subisse immédiatement une atteinte grave, ainsi que l'a d'ailleurs admis en séance son directeur; qu'en effet, compte tenu de sa vocation à répondre aux besoins en canalisations en fonte ductile qui se manifestent sur l'ensemble du territoire, elle ne justifie pas que le préjudice qui résulte de son éviction des marchés passés par le syndicat intercommunal Vern Chantepie et l'office d'équipement hydraulique de la Corse présente les caractères que doit revêtir une atteinte à l'entreprise; que si la société Biwater prétend qu'elle perd chaque mois, du fait de ces pratiques, une vingtaine de marchés sur les vingt-cinq qu'elle devrait obtenir compte tenu notamment de ses prix, ces allégations ne sont assorties d'aucun élément de preuve ; que dès lors, à défaut de l'atteinte grave et immédiate définie par l'article 12 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, la demande de mesures conservatoires présentée par la société Biwater, qui, au demeurant, ne précise pas la nature de ces mesures, doit être rejetée.

Décide : Article unique - La demande de mesures conservatoires enregistrée sous le numéro M 69 est rejetée.