Conseil Conc., 4 mai 2001, n° 01-D-24
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Décision
Pratiques relevées à l'occasion de marchés d'éclairage public et d'électrification rurale dans le département de l'Hérault
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré, sur le rapport de M. Beaufays, par Mme Pasturel, vice-présidente, présidant la séance, Mmes Mader-Saussaye, Perrot, MM. Nasse, Piot, Ripotot, membres.
Le Conseil de la concurrence (section IV),
Vu la lettre enregistrée le 20 décembre 1993 sous le n° F 644, par laquelle le ministre de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence des pratiques relevées à l'occasion de marchés d'éclairage public et d'électrification rurale dans le département de l'Hérault ; Vu le livre IV du Code de commerce et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour l'application de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement, par les sociétés Travesset, SEP, Allez et Cie, Bordères, Fournié-Grospaud ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Sogetralec, Allez, Spie-Trindel, Somel, Travesset, SEP et Fournié-Grospaud entendus au cours de la séance du 13 mars 2001, les sociétés EEHC et Bordères, ayant été régulièrement convoquées ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci-après exposés :
I - CONSTATATIONS
1. Le marché relatif à l'éclairage des chemins ruraux n° 106 et 123 à Béziers
Le 19 septembre 1991, la commune de Béziers a lancé un appel public à la concurrence, en vue de la réalisation des travaux d'éclairage public des chemins ruraux 106 et 123. Sept entreprises ont déposé des offres, mais la commune, n'ayant pu engager les travaux dans le courant de l'exercice 1992, n'a pas donné suite a cette première consultation. Une nouvelle consultation a eu lieu à partir du 9 décembre 1992. La décision d'attribution du marché, prise le 10 février 1993, a confié celui-ci à la société Sogetralec, pour un montant de 44 346 F TTC.
2. Le programme d'électrification à Cessenon-sur-Orb
Dans le cadre d'un programme d'électrification rurale décidé en 1991 par le conseil général de l'Hérault, il a été alloué à la commune de Cessenon-sur-Orb une subvention, en vue de la réalisation de travaux d'électrification sur son territoire. Par délibération du 24 janvier 1992, la commune a lancé une "consultation sommaire" des entreprises de la région, après avoir fait réaliser un devis détaillé des travaux par le cabinet d'études Gaxieu. Le montant des travaux, tel qu'il résulte de ce devis, s'élève à 346 671,48 F TTC.
Par voie de presse, les entreprises intéressées ont été invitées à retirer un dossier auprès du cabinet précité et à proposer un rabais exprimé en pourcentage du montant du devis, ainsi que le délai dans lequel elles pourraient effectuer les travaux, la date de remise des plis étant fixée au 20 février 1992.
Au vu des résultats de cette consultation, la société Sogetralec a été déclarée attributaire du marché, pour un montant égal à celui déterminé par le cabinet d'études Gaxieu.
3. Le marché relatif à l'éclairage public du CD n° 19 à Sérignan
Le 27 janvier 1992, la commune de Sérignan a lancé un appel d'offres ouvert, en vue de la réalisation de travaux d'éclairage public des trottoirs du chemin départemental n° 19, pour un montant de travaux estimé à 171 533,55 F TTC. Huit entreprises ont répondu à cette consultation. Bien qu'elle n'ait pas présenté l'offre la moins-disante, la société Sogetralec a été déclarée titulaire du marché, en raison de ses capacités professionnelles et financières, pour un montant de 169 029 F TTC.
4. Le marché négocié passé par le département de l'Hérault pour l'éclairage du giratoire nord à Maraussan
Par lettre du 29 janvier 1993, le conseil général de l'Hérault a demandé aux entreprises Sogetralec, Bordères, Allez, Travesset, Ricard et SEP de lui présenter leur meilleure offre de prix en vue de la réalisation de l'éclairage public du giratoire de la voie d'évitement nord à Maraussan. Toutes les entreprises consultées ont répondu et le groupement d'entreprises Sogetralec/Bordères a été déclaré attributaire du marché pour un montant de 93 633 F TTC.
5. Le marché sur appel d'offres ouvert passé par la commune d'Agde pour des travaux d'extension de l'éclairage public
La commune d'Agde a lancé un appel d'offres ouvert en vue de la réalisation de travaux d'extension de l'éclairage public pour un montant prévisionnel de 650 000 F. À l'issue de la consultation, la société Sogetralec a été déclarée attributaire du marché pour un montant de 565 813 F TTC.
A partir des éléments recueillis au cours de l'enquête administrative, le rapporteur a estimé qu'une pratique d'échange d'informations sur les prix, préalablement au dépôt des offres, entre les candidats aux marchés publics susvisés, était établie en ce qui concerne quatre marchés d'électrification ou d'éclairage public. Un grief a été notifié, de ce chef, à :
EMPLACEMENT TABLEAU
Le rapporteur a considéré, en revanche, qu'en ce qui concerne le marché d'électrification rurale lancé par la commune de Cessenon-sur-Orb, aucun élément ne permettait d'établir, comme le soutenait le ministre de l'Economie, que les soumissionnaires avaient échangé des informations sur les prix. En conséquence, aucun grief n'a été notifié à ces entreprises.
Au stade de la notification du rapport, le rapporteur a estimé que les douze procès-verbaux établis par les enquêteurs, sur lesquels se fondait la notification de griefs, étaient irréguliers et devaient, par suite, être écartés du dossier. Le rapport notifié à l'ensemble des entreprises précitées, le 11 octobre 1999, a conclu au non-lieu total, au motif que les seules constatations régulières restant au dossier ne permettaient d'établir aucun des griefs initialement retenus.
Le commissaire du Gouvernement, d'une part, a pris acte de l'absence de grief notifié à l'encontre des sociétés candidates au marché d'électrification rurale lancé par la commune de Cessenon-Sur-Orb, d'autre part, a soutenu que les procès-verbaux sur lesquels reposait la notification de griefs étaient réguliers et a demandé au Conseil de la concurrence de prononcer des sanctions pécuniaires à l'encontre des sociétés concernées.
II - SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,
Sur la procédure
Considérant que les enquêteurs régulièrement habilités par le ministre de l'Economie peuvent, en application de l'article L. 450-3 du Code de commerce, accéder à tous locaux à usage professionnel, demander la communication des livres, factures et tous autres documents professionnels et en prendre copie, recueillir sur convocation ou sur place les renseignements et justifications propres à établir l'existence de pratiques anticoncurrentielles et à en identifier les auteurs ; que, toutefois, ces opérations d'enquête sont soumises au principe de loyauté dans la recherche des preuves, qui garantit le droit de toute personne à ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable, la circonstance que l'enquête administrative préalable ne soit pas soumise aux exigences de la contradiction ne devant pas conduire les personnes entendues à faire, dans l'ignorance de l'objet de l'enquête, des déclarations sur la portée desquelles elles pourraient se méprendre ; que cette obligation de loyauté impose aux agents de l'administration de faire clairement connaître aux personnes entendues l'étendue et l'objet de l'enquête, ce qui doit s'entendre à la fois du cadre juridique dans lequel interviennent les enquêteurs et du secteur concerné par leurs investigations ; qu'il appartient au Conseil de la concurrence, dans l'exercice de son pouvoir de sanction, de veiller au respect de l'obligation de loyauté et, sous réserve du respect du contradictoire, d'écarter de la procédure tout élément ou pièce qui aurait été obtenu en contradiction avec cette obligation (Cour d'appel de Paris, 2 mars 1999, Seco Desquenne ; 15 juin 1999, Solatrag ; 6 juin 2000, SOCAE ; 12 décembre 2000, Entreprise Morillon Courvol Courbot) ;
Considérant que, pour conclure à la régularité des procès-verbaux litigieux, le commissaire du Gouvernement se réfère à l'arrêt rendu, le 25 janvier 2001, par la chambre criminelle de la Cour de cassation, sur le pourvoi formé par les sociétés CERP et OCP Répartition SAS, qui énonce " qu'aucune des dispositions visées aux moyens n'impose aux enquêteurs de mentionner expressément, à peine de nullité des procès-verbaux qu'ils établissent, qu'ils ont fait connaître aux personnes entendues l'objet de leurs investigations " ;
Mais considérant, d'une part, que l'arrêt précité répond, en les rejetant, aux moyens pris de la violation des articles 45 à 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et 31 du décret n° 86- 1309 du 29 décembre 1986, seuls invoqués par le recours ;qu'en revanche, c'est en se fondant sur les dispositions combinées de l'article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales et de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui n'étaient pas en cause dans le pourvoi, que la jurisprudence de la Cour d'appel de Paris applique aux enquêtes administratives visées à l'article L. 450-3 du Code de commerce les principes de loyauté dans la recherche des preuves et de non auto-incrimination et en déduit l'obligation, pour les enquêteurs, de faire connaître aux personnes entendues l'objet de l'enquête ;
Considérant, d'autre part, en ce qui concerne les conséquences de l'absence de mention expresse relative à l'objet de l'enquête, qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour d'appel de Paris que la nullité des procès-verbaux n'est pas nécessairement encourue de ce chef, cette nullité n'ayant lieu d'être prononcée qu'à défaut d'éléments extrinsèques ou intrinsèques à ces documents, propres à établir que les personnes entendues n'ont pu, en dépit de l'absence de la mention requise, se méprendre sur le cadre juridique de l'intervention des enquêteurs et sur le secteur concerné par leurs investigations (Cour d'appel de Paris, 13 avril 1999 SA Dectra ; 12 décembre 2000, SA Entreprise Morillon Courvol Courbot) ;
Considérant, ainsi, qu'il appartient à l'administration d'établir que les personnes entendues avaient connaissance de l'objet des investigations des enquêteurs, ce qu'elle peut faire par la mention expresse de cet objet figurant sur les procès-verbaux, ou, à défaut d'une telle mention, par des éléments extrinsèques ou intrinsèques à ceux-ci ;
Considérant qu'en l'espèce, l'ensemble des procès-verbaux litigieux comporte la formule pré- imprimée aux termes de laquelle les enquêteurs " habilités à procéder aux enquêtes nécessaires à l'application de l'ordonnance n°86.1243 du 1er décembre 1986 (ont) indiqué à Monsieur X. l'objet de l'enquête, réalisée avec les pouvoirs de l'article 47 de l'ordonnance susvisée, dont nous lui avons remis copie " ; que cette mention, qui comporte la référence, insuffisante, à l'ordonnance du 1er décembre 1986, alors en vigueur, sans la précision relative au titre III de ce texte, et n'indique pas le secteur visé par les investigations des enquêteurs, ne permet pas d'établir que les personnes concernées auraient été clairement informées de l'objet et de l'étendue de l'enquête ;
Considérant que le commissaire du Gouvernement se fonde, néanmoins, sur les énonciations portées dans le corps des procès-verbaux litigieux pour soutenir que les intéressés ne pouvaient ignorer ni que l'enquête s'inscrivait dans le cadre de la recherche de pratiques anticoncurrentielles, ni qu'elle portait sur les marchés d'éclairage public et d'électrification rurale dans le département de l'Hérault ;
Considérant que deux séries de procès-verbaux ont été parallèlement établies par les enquêteurs ; que la première série, qui porte sur les marchés publics relatifs, respectivement, à l'éclairage des chemins ruraux n° 106 et 123 à Béziers et à l'extension de l'éclairage public à Agde, comprend le procès-verbal de déclaration et de communication de documents du 23 mars 1993 de M. Philippe Roger, directeur général de la société Sogetralec, les procès-verbaux de déclaration et de communication de documents du 12 mai 1993 de M. Philippe Roger, du 18 mai 1993 de M. Bordères, président du conseil d'administration de la société Bordères, et du 25 juin 1993 de Mme Marie-Andrée André, secrétaire à la société Sogetralec, le procès-verbal de déclaration et de communication de documents du 17 mai 1993 de M. Rateau, directeur de la société Somel, le procès-verbal de déclaration et de communication de documents du 18 mai 1993 de M. Meslay, directeur d'agence de la société Allez, le procès-verbal de déclaration et de communication de documents du 9 juin 1993 de M. Robin, gérant de la société EEHC, et le procès-verbal de déclaration et de communication de documents du 16 juin 1993 de M. Fernandez, chef de centre de la société de Spie-Trindel ; que la seconde série de procès-verbaux, qui porte sur les marchés publics relatifs, respectivement, à l'éclairage public des trottoirs du CD n° 19 à Sérignan et à l'éclairage public du giratoire de la voie d'évitement nord à Maraussan, comprend le procès-verbal de communication de documents du 23 mars 1993 de MM. Marc Macou et René Bres, respectivement " responsable d'affaire " et directeur de la société Travesset, les procès-verbaux d'audition et de communication de pièces du 12 mai 1993 de M. René Bres, du 17 juin 1993 de Mlle Valérie Bertrand, employée administrative de la société Travesset, et du 17 juin 1993 de M. Eric Sablier, chargé d'études de la même société ;
En ce qui concerne la première série de procès-verbaux
Considérant que le commissaire du Gouvernement soutient, en premier lieu, que le procès-verbal de déclaration et de communication de documents de M. Philippe Roger, en date du 23 mars 1993, comporterait des indications de la part de ce dernier et un inventaire des documents communiqués, qui permettraient d'établir que l'intéressé avait une pleine connaissance de l'objet de l'enquête ; qu'il fait valoir, en second lieu, que les procès-verbaux des 12 mai et 25 juin 1993, également établis au siège de la Sogetralec, consistent en un commentaire des pièces saisies lors de la visite du 23 mars précédent et que, dès lors, l'objet de l'intervention effectuée par les enquêteurs ne pouvait être ignoré des personnes concernées ;
Mais considérant, en premier lieu, que le procès-verbal du 23 mars 1993 retrace les propos de M. Philippe Roger de la façon suivante : " Notre société réalise tous types d'électrification, aérien, souterrain, éclairage public, etc. En ma présence vous avez consulté les dossiers d'affaires de nos chantiers classés dans des dossiers à clapet. Je vous ai présenté les dossiers que vous avez souhaité examiner. En plus, je vous ai présenté, sur votre demande, les dossiers énumérés ci-après " ; que ces déclarations, qui se bornent à décrire, d'une part, l'objet général de l'activité de la société Sogetralec, d'autre part, l'opération de communication de dossiers accomplie par M. Philippe Roger sur demande des enquêteurs, ne permettent pas d'inférer que l'intéressé aurait été préalablement informé de ce que les investigations de ces derniers portaient sur la recherche de pratiques anticoncurrentielles, ni qu'il avait connaissance du secteur concerné par ces investigations ; que la transcription de l'inventaire des documents communiqués, opération qui ne peut être effectuée qu'à l'issue de la communication des pièces figurant dans cet inventaire, ne permet pas de présumer que la personne auditionnée aurait eu connaissance de l'objet de l'enquête préalablement à cette communication ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le procès-verbal d'audition de M. Philippe Roger en date du 23 mars 1993 ne comporte pas les énonciations propres à établir que l'intéressé ne pouvait se méprendre sur l'objet de l'enquête ; qu'aucun élément extrinsèque audit procès-verbal ne permet, par ailleurs, de conclure que M. Philippe Roger aurait eu, en fait, connaissance de cet objet ; que ce procès-verbal est irrégulier et doit être écarté des débats, ainsi que l'ensemble des pièces communiquées lors de cette audition ;
Considérant, en second lieu, que les procès-verbaux du 12 mai 1993 et du 25 juin 1993, établis au siège de la société Sogetralec, ont pour seul objet de recueillir les déclarations de M. Philippe Roger et de Mme André sur les pièces communiquées aux enquêteurs par M. Philippe Roger, le 23 mars 1993, dans les conditions décrites ci-dessus ; qu'ainsi, les déclarations et communications de documents mentionnées dans ces procès-verbaux ont été induites par les diligences irrégulières précédemment effectuées par les enquêteurs et ne présentent aucun caractère d'autonomie permettant de les disjoindre du procès-verbal initial du 23 mars 1993 précité ; qu'il s'ensuit que l'ensemble de ces procès-verbaux est entaché de nullité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'état du dossier tel qu'il se présente après qu'en ont été écartés les éléments obtenus irrégulièrement, il n'existe pas d'indices suffisants pour établir une pratique d'entente prohibée à l'encontre des sociétés Sogetralec et Bordères concernant le marché d'électrification des chemins ruraux 106 et 123 à Béziers, ni à l'encontre des sociétés Sogetralec, Allez, EEHC, Somel, Spie-Trindel et Travesset, concernant le marché d'extension de l'éclairage public à Agde ;
En ce qui concerne la seconde série de procès-verbaux
Considérant que le commissaire du Gouvernement soutient, en premier lieu, que les énonciations figurant dans le procès-verbal de communication de documents de MM. Marc Macou et René Bres, du 23 mars 1993, dressé au siège la société Travesset, permettraient d'établir que les signataires de ce document avaient une pleine connaissance de l'objet de l'enquête ; qu'il fait valoir, en second lieu, que les procès-verbaux des 12 mai et 17 juin 1993, également établis dans les locaux de la société Travesset, consistent en un commentaire des pièces saisies lors de la visite du 23 mars précédent et que, dès lors, les personnes entendues les 12 mai et 17 juin 1993 ne pouvaient se méprendre sur l'objet des investigations des enquêteurs ;
Mais considérant, en premier lieu, qu'il ressort des mentions portées sur le procès-verbal du 23 mars 1993 que les enquêteurs se sont présentés à 9h30 dans les locaux de la société Travesset où ils ont été reçus par M. Marc Macou, puis, à partir de 11h45, par M. René Bres, et qu'ils ont procédé à des demandes de communication de documents, sans auditionner les intéressés, ainsi qu'en atteste, notamment, la seule énonciation relative au déroulement de l'opération contenue dans le procès-verbal, à savoir : " En la présence de M. Macou, nous avons demandé communication des dossiers d'études du secteur de l'éclairage public. En la présence constante de ce dernier nous avons consulté ces documents. Puis, nous avons demandé copies à M. Bres des documents inventoriés en page 3 et 4 après son arrivée dans l'entreprise " ;
Considérant que la relation qui est ainsi faite, dans le corps du procès-verbal, de la communication de documents à laquelle il a été procédé ne permet pas de s'assurer que les représentants de la société Travesset aient été informés, préalablement à toute demande des enquêteurs, du secteur concerné par les investigations qui allaient se dérouler dans l'entreprise, ainsi que du cadre juridique de cette opération ; que, dans ces conditions, MM. Bres et Macou ont pu se méprendre sur la portée de leurs communications ;
Considérant, en second lieu, que les procès-verbaux du 12 mai 1993 concernant M. Bres, du 17 juin 1993 concernant Mme Valérie Bertrand et du même jour concernant M. Eric Sablier, ont pour objet de recueillir les déclarations des intéressés sur les pièces communiquées aux enquêteurs par MM. Marc Macou et René Bres, le 23 mars 1993, dans les conditions décrites ci-dessus ; qu'ainsi, les déclarations et communications de documents mentionnées dans ces procès-verbaux ont été induites par les diligences irrégulières précédemment effectuées par les enquêteurs et ne présentent aucun caractère d'autonomie permettant de les disjoindre du procès-verbal initial du 23 mars 1993, précité ; qu'il s'ensuit que ces procès-verbaux sont également entachés de nullité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, qu'en l'état du dossier, tel qu'il se présente après qu'en ont été écartés les éléments obtenus irrégulièrement, il n'existe pas non plus d'indices suffisants pour établir une pratique d'entente prohibée à l'encontre des sociétés Travesset, SEP et Fournié-Grospaud, concernant le marché relatif à l'éclairage public des trottoirs du CD n° 19 à Sérignan et le marché relatif à l'éclairage public du giratoire de la voies d'évitement nord à Maraussan ;
Considérant, en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de défense soulevés, qu'il convient de faire application de l'article L. 464-6 du Code de commerce,
Décide :
Article unique. - Il n'est pas établi que les sociétés Sogetralec, Travesset, Somel, Allez, EEHC, Spie-Trindel, SEP, Fournié-Grospaud, Bordères, ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.