Livv
Décisions

Conseil Conc., 18 janvier 1994, n° 94-D-05

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Marché de l'automobile

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Adopte sur le rapport de M. Bernard Thouvenot par M. Barbeau, président, M. Cortesse, vice-président, MM. Bon, Gicquel, Mme Hagelsteen, MM. Marleix, Pichon, Rocca, Sargos, Sloan, Thiolon, membres.

Conseil Conc. n° 94-D-05

18 janvier 1994

Le Conseil de la concurrence (formation plénière),

Vu la lettre enregistrée le 30 novembre 1988 sous le numéro F 206 par laquelle les sociétés Asia Motor France, Europe Auto Service, JMC Automobiles et Monin Automobiles ont saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre sur le marché de l'automobile ; - Vu la lettre enregistrée le 28 mai 1990 sous le numéro F 319 par laquelle la société Somaco a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre sur le marché de l'automobile en Martinique ; - Vu le traité du 25 mars 1957 modifié instituant la Communauté européenne, et notamment son article 85, et le règlement du Conseil de la Communauté européenne n° 17-62 du 6 février 1962 modifié, pris pour son application; - Vu les ordonnances n° 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945 modifiées, relatives respectivement aux prix et à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique ; - Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; - Vu le Code de la route, et notamment son article R. 106 ; - Vu l'arrêt du 16 janvier 1992 de la Cour de justice des Communautés européennes ; - Vu l'arrêt du 17 juin 1992 de la Cour d'appel de Paris sur recours contre la décision n° 91-D-52 du 20 novembre 1991 du Conseil de la concurrence relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de l'automobile en Guadeloupe ; - Vu les observations du ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur ; - Vu les observations présentées par les parties et par le commissaire du Gouvernement ; - Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les parties entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci-après exposés :

I. - CONSTATATIONS

Les pratiques qui ont été examinées concernent le marché de l'automobile de la France métropolitaine et celui de la Martinique et portent, en premier lieu, sur les conditions d'importation des véhicules japonais en France métropolitaine et à la Martinique et, en second lieu, sur les participations à des foires ou salons.

A. - Les quotas d'importation

Selon les dispositions de l'article R. 106 du Code de la route, tout véhicule dont l'immatriculation est obligatoire doit, pour pouvoir circuler sur la voie publique, faire l'objet d'une réception par le service des mines. Cette réception peut être effectuée par type sur la demande du constructeur : dans ce cas, le constructeur fait homologuer par l'administration un type de véhicule et des vérifications ultérieures sont faites pour contrôler la conformité des véhicules construits aux notices descriptives des prototypes réceptionnés. Elle peut également être effectuée à titre isolé sur la demande du propriétaire ou de son représentant : dans ce cas, chaque véhicule doit être présenté au service des mines, l'instruction des dossiers étant exclusivement faite par la direction régionale de l'industrie d'Ile-de-France.

En ce qui concerne les véhicules qui ne sont pas fabriqués ou montés sur le territoire d'un Etat membre de la Communauté européenne, la réception par type n'est admise que si le constructeur possède en France un représentant spécialement accrédité auprès du ministre des transports. Lorsque les saisines ont été présentées, les seuls constructeurs japonais se trouvant dans ce cas étaient Toyota, Nissan, Mazda, Honda et Mitsubishi, aucune suite n'ayant été donnée aux demandes d'accréditation présentées par les auteurs de ces saisines en tant que représentants des constructeurs Subaru, Daïhatsu, Suzuki et Isuzu : ces derniers ne pouvaient ainsi bénéficier de l'agrément par type. Ils n'ont donc pu qu'importer en France des véhicules ayant transité par d'autres pays de la Communauté, notamment la Belgique, et leur activité a également été contrariée par les dispositions de l'arrêté ministériel du 5 novembre 1984 relatif à l'immatriculation des véhicules qui limitent à deux mois la période de validité du certificat dit 846 A délivré par le service des douanes, les autorités de police et de gendarmerie verbalisant en effet les propriétaires de véhicules circulant en France sous immatriculation étrangère au-delà d'un délai de deux mois.

1. En métropole

De 1980 à 1989, la répartition des ventes entre les cinq importateurs accrédités a toujours été à peu près la suivante :

Toyota : 29 p. 100 ;

Nissan : 28 p. 100 ;

Mazda : 24 p. 100 ;

Honda : 14 p. 100 ;

Mitsubishi : 5 p. 100.

Selon les déclarations concordantes des cinq importateurs accrédités et de leur représentant syndical, en 1976, le Gouvernement, constatant un déséquilibre des échanges d'automobiles avec le Japon, a établi un quota d'importation de véhicules japonais égal à 3 p. 100 du total des immatriculations annuelles et, depuis lors, cette mesure a été renouvelée chaque année, l'administration répartissant par ailleurs ce quota global de 3 p. 100 entre les cinq importateurs accrédités en fixant à chacun sa part respective selon une proportion qui a aussi été reconduite chaque année : après une évaluation du nombre des immatriculations de l'année suivante faite au mois de décembre avec la Chambre syndicale des importateurs d'automobiles et de motocycles (CSIAM), le ministère de l'industrie a convoqué au début de chaque année les cinq importateurs accrédités pour leur communiquer la part qui leur revenait sur le contingent global de 3 p. 100 du nombre d'immatriculations attendu ; ensuite, en fonction de l'évolution des ventes réelles, ces chiffres ont été ajustés et le contingent définitif autorisé à chaque importateur lui a été indiqué.

2. En Martinique

Si, pour des raisons particulières, les données recueillies ne font pas en réalité apparaître en Martinique une stabilité comparable à celle de la métropole, les parts des importateurs ont néanmoins été réparties au début de chaque année sur la base suivante :

Toyota : 46,93 p. 100 ;

Nissan : 26,01 p. 100 ;

Mazda : 15,00 p. 100 ;

Honda : 7,99 p. 100 ;

Mitsubishi : 4,07 p. 100.

Des difficultés étant survenues dans le fonctionnement d'un régime administré limitant depuis 1982 l'importation des véhicules japonais en Martinique à 15 p. 100 des immatriculations totales et fixant de façon constante la répartition de ce contingent entre les représentants des cinq importateurs accrédités au niveau national, un nouveau système a été mis en place au cours de plusieurs réunions.

La première réunion s'est tenue le 1er octobre 1987 à la préfecture de la Martinique, où un bilan des immatriculations des neuf premiers mois de 1987 a été fait et des propositions pour l'établissement des quotas de 1988 envisagées. Puis, les concessionnaires de véhicules japonais ayant insisté pour qu'une réunion se tienne très rapidement à Paris avec l'ensemble des administrations concernées pour arrêter définitivement les règles précises applicables, une deuxième réunion a été organisée le 19 octobre 1987, au ministère des départements et territoires d'outre-mer, à laquelle participaient trois représentants de ce ministère, deux représentants du ministère de 1'industrie et les cinq concessionnaires martiniquais d'automobiles japonaises.

Le compte rendu de cette dernière réunion, établi sur papier à en-tête du ministère des départements et territoires d'outre-mer et dont copie a été transmise aux concessionnaires le 29 octobre 1987 par la préfecture de la Martinique, fait apparaître qu'il y a été décidé :

" - de fixer à 537 véhicules le chiffre des dépassements de Toyota devant être répartis entre les quatre autres marques japonaises, dont 50 d'ores et déjà récupérés ;

" - de fixer comme base de calcul avant "récupération" la quote-part de Toyota à 46,93 p. 100 (clé de répartition de 1982) à compter de l'année 1988. Cette quote-part est applicable à l'occasion de la détermination du quota de ladite année ;

" - d'accepter une autolimitation, toutes marques confondues, à 15 p. 100 du marché global, et de respecter impérativement cette autolimitation, au besoin en s'autocontrôlant ;

" - de se référer pour le calcul de ce pourcentage au volume global des immatriculations réalisées à l'expiration de l'année civile précédente ;

"- de réévaluer le marché global de l'année 1987 sur la base des immatriculations effectives et de corriger l'évaluation provisoire fixée à 8 000 véhicules, la marque Toyota étant exclue du bénéfice de cette actualisation ;

" - d'apurer progressivement l'excédent Toyota défini ci-dessus (537 - 50 = 487), étant par ailleurs entendu que le contingent de la marque, dans la mesure où l'application de la quote-part à 15 p. 100 du marché le permet, ne descendra pas au-dessous de 520 véhicules/an. "

Il ressort par ailleurs du même compte rendu " qu'un protocole d'accord entre les concessionnaires d'automobiles japonaises en Martinique sera établi en conséquence ". Le 8 novembre 1987, ce protocole d'accord a été signé entre les cinq concessionnaires en question, en présence du représentant du préfet de la Martinique, pour convenir de respecter la quote-part de 15 p. 100 fixée par l'administration et de la répartir entre eux selon la clé de répartition de 1982.

Par la suite, la préfecture de la Martinique a convoqué chaque année, au mois de janvier, les cinq importateurs locaux à des réunions au cours desquelles leur ont été indiqués le nombre total de véhicules japonais dont l'importation était autorisée sur la base de 15 p. 100 du total des immatriculations réelles de l'année précédente, le quota initial qui en résultait selon la clé de répartition définie en 1982 et le nombre définitif autorisé pour chaque marque en prenant en compte les stocks existant à la fin de l'année précédente ainsi que les restitutions dues par l'importateur de Toyota (soldées à la fin de l'année 1989) ou, éventuellement, des compléments exceptionnels.

Interrogé sur les modalités de gestion par l'administration des importations de voitures japonaises, le directeur des industries de base et des biens d'équipement du ministère de l'industrie et du commerce extérieur a répondu au président du Conseil de la concurrence qu'il était clair en tout état de cause que le comportement des entreprises importatrices devait " tenir compte du fait que les modalités de gestion susvisées n'étaient pas du ressort de ces entreprises " (lettre en date du 12 janvier 1993, pièce n° N6).

B. - Les exclusions des foires et salons

Au cours de l'enquête, il a été constaté que des difficultés ont été rencontrées par des entreprises distribuant des véhicules de marques japonaises ou coréennes qui ne disposent pas d'un importateur accrédité.

1. Le salon de l'automobile d'Orléans de 1986

A l'occasion du treizième salon qui s'est tenu du 23 au 27 octobre 1986, l'association Foires et Salons d'Orléans a répondu à une demande de participation de M. Castro, gérant du garage de Beaugie à Bucy-Saint-Liphard, membre du réseau Asia Motor France, qui avait l'intention d'exposer des véhicules des marques Daïhatsu et Suzuki, par une lettre en date du 20 octobre 1986 ainsi rédigée : " M. Dupont, président du salon, vous a fait remarquer par une lettre en date du 15 octobre que, pour pouvoir exposer ces véhicules, vous deviez produire un accréditif d'un importateur officiel en France. N'étant pas en possession de ce document, nous considérons que vous n'êtes pas en règle avec la législation du salon de l'automobile qui accepte uniquement des voitures neuves. De ce fait, nous sommes au regret de vous informer que vous ne pourrez présenter les marques Daïhatsu et Suzuki sous peine d'exclusion de votre établissement au salon ".

La directrice générale adjointe de l'association Foires et Salons d'Orléans a confirmé ces faits en précisant que c'est la Chambre syndicale du commerce et de la réparation automobile (CSNCRA), représentée par M. Dupont, qui a opposé un refus d'exposer à M. Castro, et elle a remis aux enquêteurs copie d'un télex reçu par M. Dupont et émanant de la CSNCRA régionale dont le président est M. Colin.

Le texte du télex en question, adressé à M. Dupont, président du salon et par ailleurs président départemental des concessionnaires de la CSNCRA, est le suivant :

" Important et urgent,

" Monsieur le président, suite aux problèmes qui m'ont été exposés concernant marques Suzuki et Daïhatsu, nous vous confirmons que ces marques ressortent de l'importation pirate et qu'elles n'ont absolument pas le droit d'être présentes dans les salons officiels régionaux.

" Prière de faire respecter rigoureusement cette règle impérative.

" Le président régional, J. Colin. "

2. La foire de printemps de Strasbourg de 1988

Dans le cadre de la foire-exposition de printemps organisée du samedi 23 avril au dimanche la mai 1988 au palais des Expositions de Strasbourg par la Société des foires et expositions de Strasbourg (SOFEX), plusieurs salons se sont tenus dont le salon régional de l'auto. M. Froeliger, négociant automobile à Sélestat, après s'être adressé à la SOFEX, qui lui a précisé que l'exposition de véhicules était gérée par la CSNCRA locale, a transmis à cette dernière une demande d'exposition de quatre véhicules tout terrain en spécifiant qu'il s'agissait des modèles suivants ;

1 Jeep AMC Wrangler ;

1 Jeep AMC Cherokee ;

1 Daïhatsu Rocky ;

1 Suzuki Samuraï.

Par lettre du 12 avril 1988, le responsable départemental de la CSNCRA lui a répondu qu'il était " au regret de ne pouvoir donner une suite favorable à sa demande, tous les emplacements du salon de l'automobile étant réservés depuis bien longtemps ".

M. Froeliger a déclaré que, le secrétaire général départemental de la CSNCRA lui ayant précisé par ailleurs qu'un arrangement était possible s'il n'exposait que des Jeep, il avait alors effectivement obtenu un emplacement après avoir adressé à la SOFEX une demande de participation portant sur deux véhicules Jeep. Il a ajouté qu'à côté de deux véhicules qu'il avait exposés il avait présenté un panneau mentionnant les véhicules d'occasion qu'il avait en stock à Sélestat, parmi lesquels des Suzuki et Daïhatsu, et qu'en raison de la présence de ce panneau, le secrétaire général départemental de la CSNCRA lui avait demandé le vendredi 29 avril au soir de quitter le salon en le menaçant " d'aller chercher la police ". Il a précisé qu'il a alors quitté le salon le samedi 30 avril au matin.

3. Le salon international du 4 x 4 et du tout-terrain de Val-d'Isère de 1986

Depuis 1984, la SARL Groupe Audhoui Promotion organise chaque année le salon international du 4 x 4 et du tout-terrain à Val-d'Isère. En 1986, le troisième salon s'est tenu du 16 au 24 août. L'un des auteurs des saisines, la société Asia Motor France, qui, selon son gérant, avait été contactée au mois de février 1986 par la société Groupe Audhoui Promotion pour participer à ce salon et qui a confirmé sa demande d'inscription par télex en date du 30 juin 1986, a reçu en réponse un premier télex en date du 7 juillet 1986 ainsi rédigé :

"Suite votre demande confirmons règlement approuvé ministère du commerce et chambre syndicale des importateurs d'automobiles : tous les véhicules présentés devront être conformes à la réglementation applicable en matière d'homologation, l'exemplaire du P-V des mines barré rouge est demandé.

" Il ne sera satisfait aux demandes d'admission émanant d'importateurs que si ces derniers peuvent justifier de ce qu'ils sont accrédités auprès du ministère des transports comme importateurs officiels seuls habilités à réceptionner par type les véhicules de la marque qu'ils représentent.

"Prière vous déterminer par rapport à ce texte en vue participation salon.

" Salutations. Audhoui. "

Aucune mention relative à l'accréditation officielle ne figurant dans les dispositions du règlement intérieur du troisième salon international du 4 x 4 et du tout terrain de Val-d'Isère, cette société exprima sa surprise en réponse et précisa que Daïhatsu et Suzuki étaient deux marques accréditées dans les pays voisins et que ses véhicules possédaient des P-V des mines barrés de rouge ; elle contesta l'existence de telles prescriptions dans le règlement du salon et menaça l'organisateur de le poursuivre en justice. Elle reçut alors un nouveau télex en date du 25 juillet 1986 ainsi rédigé :

" Malgré menaces formulées dans vos télex, serions très heureux vous compter parmi nos exposants comme a été précisé à votre avocat Maître Brunot. Malheureusement, sommes complets à ce jour et dans l'impossibilité vous réserver emplacement convenable, même si votre accréditation était effective au 15 août 1986. (...) "

Or, un procès-verbal de constat établi par huissier mentionne notamment que, le 19 août 1986, un emplacement de 20 mètres de longueur était libre dans l'enceinte du salon. Ce document fait par ailleurs état de déclarations de dirigeants de deux entreprises participant au salon selon lesquelles il leur aurait été interdit d'exposer des véhicules Suzuki, et il est effectivement apparu que l'organisateur du salon a exclu de l'exposition la société JSA à Tain-l'Ermitage. Le gérant de la société Groupe Audhoui Promotion a déclaré qu'à la suite des problèmes qu'il avait rencontrés avec ces entreprises, " des contacts avec la chambre syndicale ont abouti à une modification du règlement intérieur ".

De fait, le règlement intérieur de ce salon comporte désormais les dispositions générales suivantes :

" 1-2. Tous les véhicules présentés devront être neufs et n'avoir jamais été immatriculés préalablement dans quelque pays que ce soit et être conformes à la réglementation en vigueur.

" Tous les constructeurs et importateurs de véhicules devront être accrédités par le ministère chargé des transports à l'effet de réceptionner par type les véhicules des marques représentées.

" L'organisateur se réserve le droit de refuser (...) toute demande d'emplacement concernant des industriels, fabricants, importateurs ou commerçants dont la qualité n'aurait pas été reconnue comme telle par les chambres syndicales de constructeurs et importateurs de véhicules automobiles et dont l'avis en cas de litige s'imposera, etc.

Deux courriers en date du 23 juin et du 1er juillet 1986 échangés entre la société Groupe Audhoui Promotion et la CSIAM font apparaître que l'organisateur a été reçu le 5 juin 1986 par le président-délégué général de la chambre syndicale pour un entretien consacré aux demandes d'inscription des " importateurs sauvages " et qu'il lui a été suggéré d'établir des conditions d'admission exigeant l'accréditation officielle habilitant à réceptionner les véhicules par types. Par ailleurs, une circulaire du 6 avril 1987 de la CSIAM, dont l'organisateur du salon du 4 x 4 de Val-d'Isère a officiellement été destinataire, formule les modifications que cette organisation professionnelle lui suggère, conjointement avec le Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA), d'apporter à son règlement : il est ainsi précisé que seuls peuvent être admis les constructeurs ou leurs représentants spécialement accrédités auprès du ministère des transports dans les termes de l'article R. 106 du Code de la route.

4. Le Salon international voiture et moto de course de 1988

Au mois de février 1988, la société Promocourse International qui a organisé le dix-neuvième Salon international voiture et moto de course, manifestation qui accueille notamment des véhicules 4 x 4, en a refusé l'accès à la société JMC Automobiles, l'un des auteurs des saisines, qui avait participé aux salons des deux années précédentes et qui souhaitait y exposer des véhicules Daïhatsu. Le président-directeur général de cette société a reconnu ces faits en précisant :

" En 1988, suite à la présence de JMC Automobiles, la chambre syndicale des constructeurs et la chambre syndicale des importateurs nous ont contraints à obliger nos exposants à ne présenter sur leurs stands que des véhicules de compétition afin d'exclure JMC Automobiles qui, pour les marques qu'il représentait, Daïhatsu, ne faisait pas partie des constructeurs accrédités.

" Suite à cet incident, la chambre syndicale des importateurs et celle des constructeurs nous ont demandé d'élaborer un nouveau règlement évitant à tout constructeur non accrédité de pouvoir exposer dans un salon comme le nôtre. "

Il figure en effet les indications suivantes sur un procès-verbal du conseil d'administration de la CSIAM du 25 mars 1987 :

" Semaine de la voiture et de la moto de course qui s'est tenue à la porte de Versailles du 13 au 22 février 1987 : à l'ouverture du salon susvisé, la Chambre à constaté avec surprise que parmi les exposants on trouvait trois marques japonaises non accréditées Isuzu, Daïhatsu et Suzuki (...). En outre, les produits présentés (...) étaient neufs et ne correspondaient pas à des types homologués ou préparés pour la course. "

Selon son président-délégué général, cette organisation est intervenue avec le CCFA pour que les organisateurs du salon rappellent aux exposants les termes du règlement qui prévoient que seuls les véhicules homologués par la Fédération internationale des sports automobiles ou bien encore ayant participé effectivement à une course internationale et préparés pour cette course pouvaient être exposés.

Effectivement, par une lettre en date du 16 février 1987 faisant expressément référence aux interventions des " chambres syndicales des constructeurs et des importateurs automobiles ", la société Promocourse a demandé aux exposants d'enlever sans délai les véhicules présentés qui ne répondraient pas à ces caractéristiques.

De son côté, le responsable des relations internationales du CCFA a reconnu que " pour ce qui concerne le Salon de la voiture de course, nous avons été avertis de la présence de véhicules non conformes aux réglementations précitées. Nous sommes intervenus auprès des organisateurs pour leur demander de se conformer aux dispositions de la motion ". Cette responsable a ensuite transmis à la société Promocourse International un projet de " réglementation du salon de la voiture de course " portant sur la définition des produits et celle des exposants, en lui demandant de communiquer ses observations au CCFA.

Ce projet est exactement le même que celui qui a été diffusé par la circulaire en date du 6 avril 1987 de la CSIAM et dont les organisateurs du Salon de la voiture et de la moto de course (qui l'ont reçue le 7 avril) étaient également destinataires, comme celui du Salon du 4 x 4 de Val-d'Isère.

De fait, le règlement du Salon international voiture et moto de course comprend désormais la condition suivante parmi les conditions d'admission particulières aux exposants automobiles figurant dans son règlement général :

"C - 2 Exposants admis :

" Sont admis sur invitation : les constructeurs ou leurs représentants spécialement accrédités auprès du ministère des transports dans les termes de l'article R. 106 du Code de la route. "

La circulaire de la CSIAM en date du 6 avril 1987 concernant les " conditions à remplir pour être éligibles à présenter des véhicules, notamment au Salon de la moto, la voiture de course et du 4 x 4, ainsi qu'à celui du 4 x 4 de Val-d'Isère " comporte le rappel suivant : " Lors du dernier conseil d'administration de la chambre, qui s'est tenu le 25 mars 1987 (cf. procès-verbal de ce conseil, point 5, page 7), il a été convenu que votre Chambre se rapprocherait de celle des constructeurs français, afin de veiller à ce que les salons puissent en toute légalité refuser l'accès aux importateurs non accrédités par le ministère des transports, qui nous font une concurrence qu'on peut qualifier de " déloyale " ou " sauvage ".

Le " projet de réglementation du Salon de la voiture de course " diffusé par cette circulaire et présenté par elle comme " un document élaboré conjointement par les deux chambres syndicales " est exactement le même que celui que le CCFA a adressé à la société Promocourse.

II. - SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,

Considérant que les saisines susvisées portent sur des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la procédure :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 88 du traité de Rome du 25 mars 1957 et du troisième alinéa de l'article 9 du règlement n° 17 susvisé, les autorités des Etats membres restent compétentes pour appliquer les dispositions des articles 85, paragraphe 1, et 86 du traité tant que la Commission des Communautés européennes n'a engagé aucune procédure ; qu'ainsi le Conseil de la concurrence est compétent pour apprécier les faits constatés au B de la partie I de la présente décision sur le fondement des dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité de Rome susvisé mais qu'en revanche, il n'est plus compétent pour apprécier sur ce fondement ceux qui sont constatés au A de la même partie dès lors que la Commission a engagé une procédure à leur sujet ;

Considérant que, pour les faits mis en œuvre pendant la période antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les règles applicables sont celles des ordonnances du 30 juin 1945 susvisées ; que, si ces textes ont été abrogés, les pratiques qui étaient visées par les dispositions du premier alinéa de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 sont identiques à celles qui sont prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et que l'ordonnance du 1er décembre 1986 dispose que les pouvoirs de qualification des pratiques anti-concurrentielles et de décision antérieurement dévolus au ministre chargé de l'économie sont exercés par le Conseil de la concurrence ;

Sur la prescription :

Considérant qu'il est prétendu que les saisines enregistrées le 30 novembre 1988 et le 28 mai 1990 ne portaient que sur les faits constatés au A de la partie I de la présente décision et que le Conseil de la concurrence n'a été informé que le 21 janvier 1992 de ceux constatés au B, à l'occasion de la transmission du rapport administratif ; qu'il en est déduit que ces derniers seraient couverts par la prescription dans la mesure où ils remontent à plus de trois ans avant cette date ;

Mais considérant que le Conseil de la concurrence est saisi de toutes pratiques susceptibles d'affecter la concurrence sur un marché et qu'il peut, sans avoir à se saisir d'office, examiner et, le cas échéant, qualifier, au regard des articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, toute pratique intéressant le marché considéré, révélée lors des investigations auxquelles il a été procédé à la suite de la saisine ; que c'est donc par rapport à la date d'enregistrement de la saisine des sociétés Asia Motor France, Europe Auto Service, JMC Automobiles et Monin Automobiles, qui précise, d'une part que les véhicules importés par ces sociétés ont été " bannis " du Salon mondial de l'automobile de 1988 et, d'autre part, que des obstacles ont été " accumulés pour dissuader les importateurs, les distributeurs et les acheteurs potentiels de véhicules des marques importées par les sociétés plaignantes ", que doit être calculé le délai de prescription couvrant toutes les pratiques de cette nature révélées lors de l'instruction, qu'elles aient été expressément mentionnées ou non dans le dossier joint à l'appui de cette saisine ; qu'il en résulte que le conseil peut examiner tous les faits qui se sont produits depuis le 30 novembre 1985 ; qu'au surplus, en ce qui concerne le salon du 4x4 de Val-d'Isère et celui de la voiture de course, de la moto et du 4x4, les pratiques en question concernent notamment des dispositions des règlements intérieurs de ces manifestations pour 1990 et 1991 pour l'appréciation desquelles la relation de faits antérieurs, à supposer même qu'ils fussent prescrits, serait toujours possible pour faciliter la compréhension de ceux qui seraient encore susceptibles d'être sanctionnés ;

Au fond :

Sur les quotas d'importation :

Considérant que la limitation de la part des véhicules japonais à 3 p. 100 du marché métropolitain et à 15 p. 100 du marché martiniquais résulte de mesures de contingentement mises en œuvre par les pouvoirs publics ; que, dans le cadre de cette régulation, les pouvoirs publics ont également organisé les modalités de répartition entre les importateurs des quantités de véhicules admises en France et arrêté cette répartition de façon à ce que le quota global puisse être étalé sur les ventes de l'année ;

Considérant que, si le jeu de la concurrence a été faussé dans la mesure où l'accès des véhicules japonais et coréens au marché français de l'automobile a été limité et où, chaque année, la part de marché globale de ces derniers a été répartie sans concurrence entre les marques Toyota, Nissan, Mazda, Honda et Mitsubishi, l'initiative de ces pratiques revient à l'administration et non aux entreprises concernées ; que l'enquête prescrite à la demande du président du Conseil de la concurrence n'a pas permis d'établir que le comportement des importateurs accrédités ou de leurs concessionnaires martiniquais pouvait être détaché des décisions de l'administration, ce qu'a d'ailleurs confirmé au Conseil le directeur des industries de base et des biens d'équipement du ministère de l'industrie et du commerce extérieur en déclarant que " toute interrogation sur leur comportement doit tenir compte du fait que les modalités de gestion n'étaient pas du ressort de ces entreprises " ;

Considérant en particulier que, si le protocole signé le 8 novembre 1987 entre les concessionnaires martiniquais pouvait constituer l'indice d'un comportement autonome de ces entreprises, cet accord a été conclu en application de directives données notamment par un conseiller technique du cabinet du ministre des départements et territoires d'outre-mer, le directeur des affaires économiques, sociales et culturelles de l'outre-mer du ministère des départements et territoires d'outre-mer et le sous-directeur du service des biens d'équipement du ministère de l'industrie lors de la réunion tenue le 19 octobre 1987 au ministère des départements et territoires d'outre-mer et il n'a été corroboré par aucun élément suffisamment probant pour établir l'existence de pratiques mises en œuvre par ces entreprises indépendamment des interventions de la préfecture de la Martinique ;

Considérant que, par ailleurs, il n'a pas été constaté de pressions sur l'administration pour l'inciter à refuser l'accréditation aux représentants d'autres marques de véhicules japonaises ou coréennes ou à faire obstacle aux importations parallèles de véhicules soumis à la réception à titre isolé ;

Considérant que, dans son arrêt du 17 juin 1992 susvisé, la Cour d'appel de Paris a jugé qu'il n'appartient ni au Conseil de la concurrence ni à elle-même d'apprécier une politique de contingentement mise en œuvre par les pouvoirs publics ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en ce qui concerne les quotas d'importation, les pratiques dénoncées par les auteurs des saisines ne peuvent être regardées comme constitutives de pratiques prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; qu'il n'y a lieu à ce sujet de surseoir à statuer ni dans l'attente d'une décision des autorités communautaires ni en vue de procéder à un complément d'instruction ;

Sur les pratiques d'exclusion des foires et salons.

Considérant qu'il ressort des éléments du dossier que le président régional du centre et le président départemental des concessionnaires du Loiret de la CSNCRA ont refusé l'accès du salon de l'automobile d'Orléans, organisé du 23 au 27 octobre 1986 par l'association Foires et Salons d'Orléans, avec l'accord de cette dernière, à un distributeur de véhicules de marques Daïhatsu et Suzuki dont ils ont indiqué qu'elles " ressortaient de l'importation pirate " ; que le président du secteur départemental du Bas-Rhin a exclu du salon régional de l'auto, organisé par son association au sein de la foire de printemps de Strasbourg de 1988, un négociant automobile qui y exposait un véhicule de marque Daïhatsu et un autre de marque Suzuki alors qu'il n'avait obtenu un emplacement qu'après avoir accepté de ne présenter que des véhicules de marque Jeep ;

Considérant qu'il en ressort également que la société Groupe Audhoui Promotion a refusé l'accès du Salon international du 4 x 4 et du tout terrain de Val-d'Isère qu'elle a organisé du 16 au 24 août 1986 à la société Asia Motor France qui souhaitait y exposer des véhicules de marques Daïhatsu et Suzuki après avoir rencontré le président de la CSIAM et échangé des courriers avec lui qui établissent que l'accréditation officielle de l'exposant a été exigée pour éviter les demandes des " importateurs sauvages " ; que la société Promocourse International a refusé l'accès du Salon international voiture et moto de course qu'elle a organisé au mois de février 1988 à la société JMC Automobiles qui souhaitait y exposer des véhicules de marque Daïhatsu après intervention de la CSIAM, qui avait constaté qu'au salon de l'année précédente, on trouvait trois marques non accréditées (Isuzu, Daïhatsu et Suzuki) parmi les exposants, et du CCFA ;

Considérant qu'il en ressort enfin, qu'après avoir reçu des consignes au mois d'avril 1987, de la part de la CSIAM et du CCFA, qui se sont rapprochés " afin de veiller à ce que les salons puissent en toute légalité refuser l'accès aux importateurs non accrédités par le ministère des transports ", la société Groupe Audhoui Promotion a introduit de nouvelles dispositions dans le règlement intérieur du salon du 4 x 4 et du tout terrain de Val-d'Isère, selon lesquelles " tous les constructeurs et importateurs de véhicules devront être accrédités par le ministère chargé des transports à l'effet de réceptionner par type les véhicules des marques représentées ", et la société Promocourse international dans celui du Salon de la voiture et de la moto de course, selon lesquelles " sont admis sur invitation les constructeurs ou leurs représentants spécialement accrédités auprès du ministère des transports dans les termes de l'article R. 106 du Code de la route " ;

Considérant que la participation à un salon professionnel permet à un importateur ou un concessionnaire d'automobiles de rencontrer la clientèle potentielle ; qu'ainsi, les pratiques visant à exclure de ces manifestations les distributeurs des véhicules de marques Daïhatsu, Isuzu et Suzuki ont eu pour objet et pour effet de limiter la capacité concurrentielle de ces entreprises ;

Considérant que la CSIAM et le CCFA soutiennent que ces pratiques sont dépourvues d'objet et d'effet anticoncurrentiel et que la potentialité d'effet anticoncurrentiel ne pourrait être sensible puisque l'importation en France des véhicules de construction japonaise ou coréenne est réservée aux représentants accrédités des marques Toyota, Nissan, Mazda, Honda et Mitsubishi ;

Mais considérant que l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, dès lors qu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ; qu'entre ainsi dans le champ d'application de ces dispositions toute pratique commerciale, même si elle n'a aucun effet, dès lors qu'elle a un objet ou peut avoir un effet anticoncurrentiel sur un marché ; qu'en l'espèce, l'effet sur le marché résulte du fait que la vente de véhicules peut toujours avoir lieu selon la procédure de réception à titre isolé ;

Considérant que ces pratiques ont été susceptibles d'affecter le commerce entre les Etats membres dès lors que les distributeurs exclus des salons professionnels importaient leurs véhicules en France depuis d'autres pays de la Communauté européenne ; que l'effet de ces pratiques sur la concurrence ne saurait se mesurer selon le nombre de véhicules effectivement vendus selon la procédure de réception à titre individuel alors qu'elles avaient précisément pour objet et pour effet de le limiter ; qu'en l'occurrence, les ventes de voitures selon la procédure de réception à titre isolé ne font l'objet d'aucun système de contingentement ; qu'ainsi, ces pratiques sont également contraires aux dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité de Rome du 25 mars 1957 ;

Considérant que le Conseil national des professions de l'automobile (CNPA, ex- CSNCRA) et le CCFA prétendent que les pratiques en cause n'entreraient pas dans le champ de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans la mesure où il s'agirait d'actions qu'ils ont mises en œuvre unilatéralement et non en concertation avec un partenaire ;

Mais considérant que les actions des organisations professionnelles ont en elles-mêmes un caractère collectif et sont donc susceptibles d'entrer dans le champ de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'une concertation entre ces organisations et d'autres parties ; qu'en outre, en l'espèce, il apparaît que des éléments de concertation ont été expressément relevés entre la CSNCRA et l'association Foires et Salons d'Orléans, entre la CSLAM et la société Groupe Audhoui Promotion, d'une part, et la société Promocourse international, d'autre part, entre le CCFA et la société Promocourse international, et enfin entre la CSLAM et le CCFA ;

Considérant que la CSIAM et le CCFA font valoir que leurs pratiques ne seraient pas soumises aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 au motif qu'elles seraient justifiées par leur rôle de surveillance de la réglementation des foires et salons dans le cadre de l'Organisation internationale des constructeurs d'automobiles qui imposerait notamment que les exposants ne présentent que des véhicules neufs offerts à la vente dans les conditions du seul régime de la réception par type ; que la CSIAM ajoute que les distributeurs qui voulaient exposer des véhicules offerts à la vente dans les conditions du régime de la réception à titre isolé auraient enfreint les dispositions de l'article 44 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 qui prohibent la publicité fausse ou de nature à induire en erreur ; que le CNPA (ex-CSNCRA) prétend également que les distributeurs de véhicules dont les marques n'avaient pas de représentant accrédité en France et qui ne pouvaient présenter que des véhicules déjà immatriculés dans un pays étranger par lequel ils avaient transité ne pouvaient être admis dans des manifestations destinées à exposer des véhicules neufs ;

Considérant toutefois qu'en admettant même que les dispositions invoquées, qui n'ont d'ailleurs pas été fournies au conseil, édictent de telles règles, il ne peut être allégué qu'elles résultent directement de lois ou de règlements pris pour leur application ; que, dans son arrêt du 16 janvier 1992 susvisé soulignant que les importations parallèles de voitures bénéficient d'une certaine protection en droit communautaire en tant qu'elles favorisent le développement des échanges et le renforcement de la concurrence, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit qu'une publicité peut présenter des véhicules comme étant neufs lorsqu'ils sont immatriculés pour les seuls besoins de l'importation et qu'ils n'ont jamais circulé ; qu'en outre, il n'appartient qu'aux tribunaux judiciaires de faire respecter les dispositions de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 précitée ;

Considérant que ne peut être davantage invoqué le bénéfice de l'exonération de la prohibition de ces pratiques sur le fondement du 2 de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; qu'en effet, à supposer que celles-ci aient été inspirées par le souci de protéger les consommateurs afin de leur épargner des difficultés lors de la réception des véhicules, cet objectif aurait pu être atteint sans qu'il soit indispensable d'exclure des salons les distributeurs de véhicules de marques Daïhatsu, Isuzu ou Suzuki, auxquels il suffisait d'enjoindre d'exposer ces voitures en informant les consommateurs des conditions exactes de réception ;

Sur les sanctions et les injonctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le Conseil de la concurrence " peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction " ;

Considérant que le dommage à l'économie résulte de l'effet que ne peuvent manquer d'avoir ces pratiques anticoncurrentielles sur le marché de l'automobile ; que, toutefois, les constatations ne portent que sur quatre salons dont l'importance n'est pas grande ;

Considérant que, si des griefs ont été finalement retenus à la charge de l'association Foires et Salons d'Orléans et des sociétés Groupe Audhoui Promotion et Promocourse International, il y a lieu de tenir compte du fait que le comportement de ces organismes leur a été dicté par la CSNCRA, la CSIAM et le CCFA dont la représentativité et l'influence étaient telles quant au secteur professionnel où se recrute la clientèle des organisateurs de salons d'automobiles qu'ils ne pouvaient se soustraire à leur pression ; qu'en conséquence, il convient simplement d'enjoindre à la société Groupe Audhoui Promotion et à la société Promocourse International de supprimer respectivement, dans le règlement intérieur du Salon international du 4 x 4 et du tout terrain de Val-d'Isère et dans celui du Salon international voiture et moto de course toute disposition subordonnant l'accès de l'exposant au fait que le véhicule soit distribué en France par un constructeur ou son représentant accrédité ;

Considérant qu'en l'espèce la CSNCRA, la CSIAM et le CCFA ont utilisé leur représentativité et leur autorité pour imposer à des organisateurs de salons la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles ; qu'il a été constaté que la CSIAM avait pris une part déterminante dans l'organisation et la mise en œuvre des pratiques d'exclusion constatées à la fois au salon du 4 x 4 de Val-d'Isère et à celui de la voiture et de la moto de course ;

Considérant que les ressources des secteurs départementaux du Bas-Rhin et du Loiret de la CSNCRA se sont respectivement élevées à 34 902 F et 607 906 F en 1992, que leurs pratiques sont imputables à la CSNCRA et que celle-ci a pris la dénomination de Conseil national des professions de l'automobile (CNPA) le 26 mars 1991 ; que, pour la même année, les ressources de la CSIAM et du CCFA se sont respectivement élevées à 3 597 067 F et 23 742 146 F ;

Considérant que, compte tenu de ces éléments d'appréciation, il y a lieu de prononcer des sanctions pécuniaires de 300 000 F à la charge du CNPA, de 900 000 F à la charge de la CSIAM et de 600 000 F à la charge du CCFA,

Décide ;

Article 1er

Il est enjoint à la société Groupe Audhoui Promotion et à la société Promocourse International de supprimer, dans le règlement intérieur des salons qu'elles organisent, toute disposition subordonnant l'accès de l'exposant au fait que le véhicule soit distribué en France par un constructeur ou son représentant accrédité.

Article 2

Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

300 000 F au CNPA pour la CSNCRA ;

900 000 F à la CSIAM ;

600 000 F au CCFA.