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Décisions

Cass. com., 18 mai 1999, n° 98-30.008

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Suburbaine de canalisations et de grands travaux (Sté)

Défendeur :

Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Nicot (faisant fonctions)

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

Mes Le Prado, Ricard.

TGI Nanterre, prés., du 17 oct. 1991

17 octobre 1991

LA COUR : - Attendu que, par ordonnance du 17 octobre 1991, le président du Tribunal de grande instance de Nanterre a, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, autorisé des agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de diverses entreprises, dont ceux des sociétés BIR à Chennevières-sur-Marne et CICO à Bry-sur-Marne, dans le département du Val-de-Marne, et a délivré Commission rogatoire au président du Tribunal de grande instance de Créteil pour contrôler les opérations ; que le 18 octobre 1991, ce dernier a désigné des officiers de police judiciaire pour y assister ; que la société Suburbaine de canalisation et de grands travaux, qui s'est vu notifier des griefs sur la base de documents saisis à cette occasion, a demandé l'annulation des saisies, effectuées le 23 octobre 1991, en invoquant un dépassement du champ de l'autorisation judiciaire ; que, par l'ordonnance attaquée, rendue le 22 octobre 1997, le président du Tribunal de grande instance de Créteil a rejeté sa demande ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Suburbaine de canalisation et de grands travaux fait grief à l'ordonnance d'avoir ainsi statué en faisant état d'une délégation des 6 et 7 novembre 1997, postérieure, alors, selon le pourvoi, que par ces indications, la Cour de cassation n'est pas en mesure de contrôler si la décision attaquée a été rendue par un juge ayant reçu délégation du président du tribunal ; que la décision frappée de pourvoi ne satisfait pas aux exigences de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu qu'il résulte des pièces régulièrement communiquées à cette cour que la mention visée par le moyen était le fruit d'une erreur matérielle, corrigée par une ordonnance rectificative du 7 mai 1998, rendue par le président du tribunal de grande instance en vertu de l'article 462 du nouveau Code de procédure civile, dont il résulte que le magistrat qui a rendu la décision attaquée agissait par délégation du président des 6 janvier et 7 juillet 1997 et non des 6 et 7 novembre 1997 ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le second moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu que la société Suburbaine de canalisation et de grands travaux reproche encore à l'ordonnance d'avoir statué comme elle a fait alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en niant que l'ordonnance du 17 octobre 1991 n'avait autorisé des perquisitions et saisies que pour 22 marchés limitativement énumérés, la décision attaquée a dénaturé cette ordonnance et violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que, ce faisant, la décision attaquée a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; alors, en outre, qu'en niant qu'il appartient toujours et en tout état de cause au juge de l'autorisation de veiller à ce que ne puissent être utilisées les indications de documents saisis, lorsqu'elles excèdent le domaine de l'autorisation et figurent à côté d'indications n'excédant pas quant à elles ce domaine, et de prendre les mesures propres à exclure et, éventuellement, sanctionner une telle utilisation, la décision attaquée a violé l'article 48, et 11 et suivants de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors, enfin, que le régime juridique des opérations d'enquête visées par l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, nécessitant une autorisation judiciaire, diffère par définition du régime juridique des opérations ne requérant pas une telle autorisation ; qu'il appartient au seul juge de l'autorisation de veiller à ce que ne soient pas utilisées les indications de documents saisis sur autorisation judiciaire, lorsque ces indications excèdent le domaine de l'autorisation, et figurent à côté d'indications n'excédant pas quant à elles ce domaine ; qu'il s'ensuit qu'il appartient au même juge de prendre les mesures propres à empêcher et, éventuellement, à sanctionner l'exploitation irrégulière des documents saisis ; qu'en le niant, la décision attaquée a violé les articles 45 à 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu qu'analysant l'ordonnance d'autorisation de visites domiciliaires du 17 octobre 1991, le président du tribunal a relevé qu'elle retenait, dans le secteur des travaux de souterrains pour la pose de canalisations EDF-GDF, des similitudes de prix très fréquentes entre les entreprises soumissionnant aux nombreux appels d'offres, qui ne pouvait s'expliquer que par une concertation ; qu'il a estimé que la liste des marchés pour lesquels cette ordonnance avait relevé l'existence de présomptions n'était pas exhaustive, les marchés mentionnés n'étant que des illustrations de la pratique dont la preuve était recherchée dans un secteur déterminé ; qu'en se déterminant ainsi, abstraction faite de tous autres motifs surabondants, le président du tribunal qui n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée par l'ordonnance du 17 octobre 1991, n'a pas violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses quatre branches ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi.