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Décisions

Cass. com., 30 mai 2000, n° 98-30.408

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

ETDE (SA), ETDE Sud-Est (SA), Gramari (SA)

Défendeur :

Directeur Général de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, Me Ricard.

TGI Thonon-les-Bains, Prés., du 17 sept.…

17 septembre 1998

LA COUR : - Joint les pourvois n° 98-30.408 et n° 98-30.410 qui attaquent la même ordonnance et présentent un moyen identique : - Attendu que, par ordonnance du 17 septembre 1998, le président du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, autorisé des agents de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de huit entreprises, parmi lesquelles les sociétés ETDE et Gramari, en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles prohibées par les points 1, 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance précitée à l'occasion des procédures d'attribution de lots soumis à appels d'offres, en 1996, par le SELEQ 74 pour la réalisation de travaux de renforcement, d'extension ou de mise en souterrain des réseaux de distribution publique d'électricité et d'éclairage public ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : - Attendu que les sociétés ETDE Sud-Est, ETDE et Gramari font grief à l'ordonnance d'avoir ainsi statué alors, selon les pourvois, d'une part, que le président du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains s'est exclusivement fondé, pour accorder l'autorisation sollicitée, sur des présomptions tirées de la "structure des propositions" faites par les entreprises ayant participé aux appels d'offres lancés en 1992 et 1996 par le SELEQ 74, pour en déduire que les entreprises attributaires, en 1996, étaient déjà, pour la plupart, titulaires du marché précédent ; qu'en se fondant ainsi sur des hypothèses, générales et abstraites, tirées du résultat des appels d'offres, à l'exclusion de toute présomption concrète de la concertation illicite alléguée par l'Administration requérante, le président du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ; alors, d'autre part, que le président du tribunal de grande instance ne peut autoriser l'Administration requérante à effectuer des perquisitions et saisies que dans la mesure où les infractions qu'elles sont destinées à établir peuvent être présumées ; que, s'agissant de la violation du domicile, qui figure parmi les Libertés Fondamentales protégées par la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, ces présomptions doivent être graves, précises et concordantes, ce qui suppose que les infractions présumées se déduisent directement des éléments d'information présentés à l'appui de la requête, et que ces éléments ne soient pas ambigus, ce qu'il appartient au président du tribunal de grande instance de vérifier au terme d'une analyse concrète et précise ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que des infractions au regard des points 1, 2 et 4 de l'article 7 de l' ordonnance du 1er décembre 1986 pouvaient être présumées, que les entreprises attributaires en 1996 étaient déjà, pour la plupart, titulaires du marché précédent, et qu'il existerait un "manque de compétitivité" de la part des soumissionnaires à l'appel d'offres, dont certains ne sont jamais compétitifs tandis que d'autres obtiennent un lot mais "ne se mettent plus jamais en mesure d'en obtenir un autre", sans préciser en quoi ces conjectures faisaient directement présumer les concertations alléguées, et sans apprécier concrètement si ces circonstances ne présentaient pas un caractère ambigu, dès lors notamment que la reconduction de marchés au profit d'entreprises déjà attributaires n'implique pas, en soi, une concertation frauduleuse, le président du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de vérifier que le contrôle judiciaire prévu par l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 a été exercé, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ; et alors, enfin, que l'ordonnance attaquée a retenu, pour affirmer que des infractions au regard des points 1, 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 pouvaient être présumées, que certaines des entreprises nouvelles qui ont soumissionné à l'appel d'offres lancé en 1996 ont remis des offres systématiquement trop élevées ou inadaptées, et que les entreprises qui obtenaient l'attribution d'un lot remettaient pour les autres lots des offres trop élevées ; qu'en estimant ainsi tout à la fois que le fait pour une entreprise de soumettre systématiquement des offres trop élevées constituait un indice de concertation illicite, et qu'à l'inverse la soumission d'offres tantôt compétitives, tantôt trop élevées, faisaient également présumer une entente (p. 23 dernier alinéa et p. 24), le président du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains s'est contredit, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, et en se référant aux éléments d'information fournis par l'Administration, qu'il existait des présomptions d'agissements visés par la loi justifiant la recherche de la preuve de ces agissements au moyen d'une visite et de saisie de documents s'y rapportant, le président du tribunal, qui ne s'est pas contredit, a satisfait aux exigences de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, toute autre contestation, notamment quant à la valeur des éléments ainsi retenus, étant inopérante<B/>; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette les pourvois.