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Décisions

Cass. com., 26 mai 1992, n° 90-13.499

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Vatres (Époux)

Défendeur :

Pétroles Shell (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.

T. com. Paris, 5e ch., du 31 janv. 1986

31 janvier 1986

LA COUR : - Attendu selon l'arrêt déféré (Paris, 25 janvier 1990), que, par acte sous seing privé du 12 avril 1977, la société Shell française, actuellement dénommée Société des pétroles Shell (société Shell), a conclu, pour une durée de dix années, avec M. Vatres, un contrat de revente au détail de ses produits ; qu'après la modification de la législation relative au prix de carburants, M. Vatres a demandé à la société Shell de modifier en conséquence le calcul de sa marge bénéficiaire ; que la société Shell lui a proposé, soit la poursuite du contrat, soit une modification à certaines conditions ; que M. Vatres a estimé ces offres inacceptables et a résilié le contrat avec effet à compter du 20 juin 1983 ; que la société Shell a assigné M. Vatres pour avoir restitution en nature des cuves qu'elle avait mises à sa disposition et attrait dans la procédure Mme Vatres, qui s'était portée caution solidaire des engagements de son époux ; que la cour d'appel a accueilli cette demande de la société Shell et a condamné en outre les époux Vatres à 30 000 F de dommages-intérêts pour " résistance abusive " ;

Sur le moyen relevé d'office, après avertissement donné aux parties ; - Vu l'article 50, alinéa 1er, de l'ordonnance du 30 juin 1945, applicable en la cause ; - Attendu que sont nulles les conventions sous quelque forme et pour quelque cause que ce soit, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ;

Attendu que, pour statuer comme il a fait, l'arrêt, après avoir relevé l'existence dans le contrat d'une clause de restitution en nature des cuves et que la rupture du contrat est intervenue sans faute de la part litigieuse n'est pas prohibée par l'ordonnance du 30 juin 1945 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'obligation de restitution en nature du matériel impose des travaux coûteux au revendeur de carburant, non justifiés par des nécessités techniques en raison de la durée de vie des cuves, qu'elle est de nature à le dissuader à traiter avec un autre fournisseur, qu'elle est ainsi disproportionnée avec la fonction qui lui a été fixée de faire respecter l'exclusivité d'achat du carburant et qu'elle constitue un frein à la concurrence d'autres fournisseurs, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 janvier 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.