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Décisions

CA Paris, 1re ch. A, 28 janvier 1988, n° ECOC8810012X

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Conseil de l'ordre des pharmaciens, Laboratoires Lachartre (Sté), Pierre Fabre Cosmétiques (SA), Ducray (SA), Expanscience (Sté), Goupil (Sté), Ruby d'Anglas (Sté), Laboratoires d'applications dermatologiques Vichy (Sté), Pharmygiène (Sté), Groupement de répartition pharmaceutique, Lutsia (Sté), OCP Répartition (Sté), Laboratoires Monot (Sté), Biopha (Sté), Roc (Sté)

Défendeur :

Ministre de l'Économie, des Finances et de la Privatisation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Premier président :

M. Drai

Présidents de chambre :

MM. Averseng, Edin

Conseillers :

MM. Borra, Canivet

Avoués :

Mes Menard, Valdelievre, Kiefer-Joly, Blin, Bolling, SCP Trotry-Jobin, SCP Paul Boncour-Faure, SCP Gauzere Lagourgue, SCP Gaultier Kistner, SCP Teytaud

Avocats :

Mes Vatier, Lucas de Leyssac, Colin, Voillemot, Hermant, Henriot, Meffre, Epstein, Fourgoux, Berthat.

CA Paris n° ECOC8810012X

28 janvier 1988

Les sociétés Biopha, Expanscience, Goupil, Pierre Fabre Cosmétiques, Lachartre, Lutsia, Monot, Pharmygiène, Ruby d'Anglas et Vichy ont formé des recours contre la décision rendue le 9 juin 1987 par le Conseil de la concurrence en ce qu'elle leur a enjoint de cesser de subordonner l'agrément de leurs distributeurs à la qualité de pharmacien d'officine.

La société Vichy critique, en outre, la décision en ce qu'elle lui a donné injonction de modifier ses contrats de distribution en supprimant la clause qui interdit aux revendeurs de rétrocéder des produits à un autre revendeur agréé.

Les sociétés Expanscience, Lachartre, Monot, Roc, " OCP " Répartition et GRP visent également en leur recours la disposition leur enjoignant de cesser de diffuser auprès des pharmaciens des indications directes ou indirectes de prix conseillés.

L'ordre national des pharmaciens a formé un recours contre les chefs de la décision, d'une part, lui donnant injonction, dans l'exercice de ses compétences autres que juridictionnelles, de s'abstenir à l'avenir de toute ingérence dans le comportement des fabricants et des pharmaciens en matière de prix et d'agrément des distributeurs, d'autre part, lui infligeant une sanction pécuniaire de 100 000 F ;

La société Roc a déclaré " intervenir volontairement " à l'instance pour demander la réformation de la décision du Conseil de la concurrence, celle à rendre par la cour devant avoir une influence déterminante sur ses structures de distribution. Cette société, partie devant le Conseil, se joint ainsi à l'instance conformément aux dispositions de l'article 7 du décret n° 87-849 du 19 octobre 1987.

La société Ducray a, en même temps que sa société mère, la société Pierre Fabre Cosmétiques, formé contre la décision du Conseil de la concurrence un recours tendant à la réformation de celle-ci en son article 1er, et subsidiairement à l'octroi d'un délai pour lui permettre la mise en conformité de son système de distribution sélective. Cette société, non visée par la décision entreprise, et non partie devant le Conseil de la concurrence, doit être regardée comme formant une intervention volontaire principale, recevable en vertu des articles 325 et 329 du nouveau Code de procédure civile.

La société Guigoz, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, le Syndicat des pharmaciens de Seine-et-Marne, le Syndicat national de la dermopharmacie et la société CERP Rouen visés par la décision entreprise n'ont pas formé de recours.

Sur quoi LA COUR,

Considérant qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de joindre les recours, dirigés contre une même décision ;

En la forme

Considérant que, pour solliciter l'annulation de la décision attaquée, la société Biopha, dans ses dernières conclusions, soulève trois moyens différents ;

Considérant, sur le premier moyen, que la société invoque une violation des droits de la défense, en ce qu'elle n'a pas obtenu un délai de deux mois pour répondre aux conclusions écrites du commissaire du Gouvernement, lesquelles " après une véritable énonciation de griefs " relevaient (pages 40 et 41) la nécessité d'adresser aux fabricants des injonctions relatives à une modification des contrats de distribution sélective et à une suspension de la pratique des prix conseillés de revente, alors que, selon Biopha, le rapport ne formulait pas de reproches précis la concernant, de sorte qu'elle n'avait pas jusque-là estimé nécessaire de produire un mémoire ;

Mais considérant qu'il résulte de l'article 21, alinéa 2, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, que le commissaire du Gouvernement n'a pas la qualité de partie ; que s'il peut, comme elles, présenter des observations après la notification du rapport, selon le même texte, et lors des séances du Conseil, selon l'article 25, il n'a pas pour autant le pouvoir d'émettre des griefs ; que, dans le cas présent, ceux-ci, en vertu de l'article 59, alinéa 2, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, se trouvent limités au rapport qui a été effectivement notifié aux parties intéressées avant l'entrée en vigueur de ce texte ;

Considérant que, contrairement à l'affirmation de Biopha, le rapport reproche expressément à celle-ci, sur la base de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, d'avoir participé, d'une part, à la concertation entre certains fabricants pour refuser la vente de leurs produits aux centres Leclerc (p. 65) ; et, d'autre part, à la concertation entre les fabricants au sein du Syndicat national de la dermopharmacie sur les prix conseillés (p. 66) ; qu'il nomme enfin Biopha parmi les sociétés à l'égard desquelles la preuve des contrats de distribution a pu être apportée par l'instruction (p. 75) ;

Considérant qu'au demeurant il était loisible au conseil de Biopha, entendu par le Conseil de la concurrence en formation plénière, le 9 juin 1987, de répondre alors aux observations du commissaire du Gouvernement, déposées le 25 mai précédent ;

Considérant, sur le deuxième moyen, que Biopha reproche au rapport et à la décision attaquée d'avoir restreint l'autosaisine relative au " problème de la distribution exclusive en pharmacie de produits ne relevant pas du monopole légal des officines " en limitant leurs recherches aux seuls produits cosmétiques et d'hygiène corporelle, à l'exclusion des autres marchandises qui, sans entrer dans le monopole pharmaceutique, figurent sur la liste, portée à l'article 1er de l'arrêté du 8 décembre 1943, de celles dont les pharmaciens peuvent faire le commerce ; que Biopha se prévaut, à ce même égard, des observations du Conseil de la concurrence suivant lesquelles " la notion de marché et de substituabilité est, dans la pratique, nécessairement relative ", et, " les produits distribués exclusivement en pharmacie définissaient des contours d'un marché distinct des autres marchés ".

Mais, considérant qu'ainsi le moyen contestant en définitive la pertinence du marché de référence, concerne le fond du litige et ne peut donc aboutir à l'annulation de la décision ;

Considérant, sur le troisième moyen, que le procès-verbal de la séance du Conseil de la concurrence du 9 juin 1987 fait ressortir que deux membres, MM. Bon et Fries, n'ont pas participé au délibéré ; que, pour s'attacher à cette circonstance, Biopha se fonde sur les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, d'après lesquelles " toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial (...). Le jugement doit être rendu publiquement (...) " ; qu'elle soutient qu'en procédure civile comme en procédure administrative, la composition de la juridiction doit rester identique lors des débats et du délibéré ;

Mais considérant que le procès-verbal précité, signé du secrétaire et du président, établit, de même que les mentions de la décision, que onze membres ont siégé et participé au délibéré ; qu'ainsi le quorum de huit membres requis, pour la formation plénière, par l'article 6 du décret du 29 décembre 1986 était atteint ; qu'en l'absence de toute fraude, dans la composition définitive de la formation, démontrée ou seulement invoquée, la circonstance mise en avant par Biopha n'a pas constitué une atteinte aux droits de la défense et au déroulement régulier de la procédure ;

Considérant enfin que le Conseil de la concurrence mène les débats en présence des parties ou celles dûment appelées (art. 18 de l'ordonnance du 1er décembre 1986) et prononce ses décisions en présence de ces mêmes parties ; que ces décisions sont publiées au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ; qu'il s'ensuit que les prescriptions impératives de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ont été normalement respectées ;

Considérant qu'il n'y a lieu, sur aucun des trois moyens, d'annuler la décision attaquée ;

Au fond

Considérant qu'il appartient à la cour, d'abord de délimiter le marché en cause, puis d'examiner celui-ci au regard des textes régissant les ententes et actions concertées, d'apprécier les comportements des diverses parties en cause, enfin de décider les mesures que commandent les constatations et qualifications retenues ;

I - DÉFINITION DU MARCHÉ

Considérant que les produits cosmétiques et d'hygiène corporelle sont définis par l'article L. 658-l du Code de la santé publique comme étant les substances ou préparations, autres que les médicaments, destinées à être mises en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain ou avec les dents et les muqueuses, en vue de les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d'en modifier l'aspect, de les parfumer ou d'en corriger l'odeur ;

Considérant que la liste indicative des catégories de produits cosmétiques et d'hygiène corporelle dont, en vertu des articles L. 569 du Code de la santé publique et 1er de l'arrêté du 8 décembre 1943, les pharmaciens d'officine sont autorisés à faire le commerce, bien qu'il ne s'agisse pas de médicaments, comprend les familles de produits énumérés à l'article 1er de l'arrêté du 7 mars 1977 ; que celles-ci sont essentiellement constituées par les crèmes, lotions, gels, huiles et poudres pour la peau et le visage, les produits de maquillage et de beauté, les savons et eaux de toilette, les préparations pour le bain, les produits solaires, les dentifrices, les déodorants, les parfums et les produits capillaires ; que leur mise sur le marché n'est pas soumise à autorisation, mais fait l'objet de la réglementation édictée par les articles L. 658-1 à L. 658-10 du Code de la santé publique, résultant de la loi du 10 juillet 1975.

Considérant que ces produits sont, par leur nature et par l'usage auquel ils sont destinés, entièrement différents des autres produits, objets, préparations et accessoires énumérés par l'arrêté du 8 décembre 1943 et constituant des marchés distincts ; que la société Biopha n'est pas fondée à faire grief au rapporteur et au conseil, alors que la Commission de la concurrence s'était saisie d'office le 14 décembre 1984 " du problème de la distribution exclusive en pharmacie de produits ne relevant pas du monopole légal des officines ", de n'avoir examiné que le marché des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle ;

Considérant qu'il est constant que la distribution des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle se répartit en quatre circuits, dont les parts respectives restent stables depuis plusieurs années, à savoir :

- la distribution en grandes surfaces et magasins ordinaires (56,5 p. 100)

- la diffusion sélective en magasins spécialisés (21 p. 100) ;

- la pharmacie d'officine (11,3 p. 100) ;

- la vente directe, notamment par correspondance (10,6 p. 100),

que cependant ces chiffres globaux couvrent de grandes disparités selon les catégories de produits ; qu'ainsi la part de la pharmacie est importante, tout en ayant diminué, pour les produits plus spécialement destinés aux enfants du premier âge (47 p. 100) et reste faible pour certains autres comme les déodorants (4 p. 100 en 1986);

Considérant que les sociétés Biopha, Expanscience, Pierre Fabre Cosmétiques (par ses filiales Klorane, Galenic et Ducray), Goupil, Lachartre, Lutsia, Monot, Pharmygiène, Ruby d'Anglas et Vichy, distribuent, depuis de nombreuses années, leurs produits cosmétiques et d'hygiène corporelle exclusivement en officines pharmaceutiques, dont le nombre total en France est d'environ 22000 ; que la société Roc ne livre qu'à des points de vente placés sous la responsabilité directe d'un pharmacien d'officine ;

Considérant que les fabricants recourant à la vente exclusive en pharmacie, tout en mettant l'accent sur la spécificité et la technicité de leurs produits, invoquent en leur majorité la substituabilité à ceux-ci des produits vendus dans les autres secteurs de distribution, pour prétendre que l'ensemble constitue un marché unique sur lequel s'exerce la concurrence ; que cependant, lors de l'instruction de l'affaire, la société Lachartre a indiqué que ses produits (gamme capillaire Begor), très spécialisés, étaient peu concurrencés par ceux distribués en grandes surfaces, mais l'étaient par ceux vendus en pharmacie ; que, selon la société Lutsia, ses produits pour la peau (Lutsine et Onagrine) ne sont pas similaires aux autres cosmétiques distribués par les circuits non officinaux (rapport, annexe 23) ; que tous les fabricants font valoir que leurs productions sont conçues, fabriquées et contrôlées selon les mêmes méthodes que celles utilisées pour les médicaments ; qu'ils appuient, pour certains, leurs affirmations de consultations et d'attestations délivrées par des universitaires et des praticiens dermatologues ;

Considérant qu'il ressort des auditions et renseignements recueillis par le rapporteur du Conseil de la concurrencé (annexe 12), et émanant notamment des professeurs Escande et Pourrat, ainsi que du Laboratoire national de la santé, que les cosmétiques contiennent parfois des matières actives, les différences de dosage constituant l'un des éléments qui les différencient des médicaments ; que certains, produits destinés particulièrement aux peaux sensibles, sont mieux testés que d'autres, mais que les contrôles réglementaires assurent que, vendus dans un circuit ou dans un autre, ils sont de bonne qualité ; qu'il n'y a pas de preuve scientifique décisive de la supériorité technique des produits vendus en pharmacie ;

Considérant que, s'il n'existe pas de réelle spécificité technique tenant à la nature des produits, le circuit officinal a créé au regard des consommateurs une image propre, liée à celle du pharmacien dispensateur de médicaments; qu'il résulte en particulier d'une étude de la Sofres produite devant le Conseil de la concurrence, que les acheteurs en pharmacie recherchent la satisfaction d'un besoin de sécurité et de conseilque ce circuit de distribution, qui comprend l'ensemble d'une profession strictement réglementée par la puissance publique et organisée autour du monopole du médicament, a ainsi pour conséquence aux yeux des utilisateurs une insubstituabilité des produits, dont la distribution, en pharmacie constitue une juxtaposition de marchés isolés des autres secteurs vendant des produits similaires; que le niveau moyen des prix, inférieur à celui de la parfumerie de luxe, mais supérieur à celui de la grande distribution, constitue un élément objectif, confortant la spécificité de ce marché;

Considérant qu'il convient donc d'examiner sur ledit marché le jeu de la concurrence sans englober dans cette appréciation l'ensemble des circuits de vente des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle;

II. - LES ENTENTES ET ACTIONS CONCERTEES

Considérant qu'aux termes de l'article 85 (§ 1) du Traité de Rome, sont incompatibles avec le Marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun ;

Considérant d'autre part, que, selon l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, applicable aux faits retenus de l'espèce, sont prohibées les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites, ou coalitions sous quelque forme et pour quelque cause que ce soit, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, notamment en faisant obstacle à l'abaissement des prix de vente ou de revente, ou en limitant l'exercice de la libre concurrence par d'autres entreprises ;

Considérant que les sociétés Biopha, Pierre Fabre Cosmétiques, Goupil, Monot et Vichy ont conclu des contrats écrits de distribution sélective avec de nombreux pharmaciens ;

Considérant que les sociétés Expanscience et Lachartre, qui n'ont pas conclu de tels contrats, soutiennent que leur politique de distribution exclusive résulte d'un choix unilatéral et ne constitue pas une entente au sens des textes précités ;

Mais considérant que l'agrément par les fabricants des distributeurs pharmaciens d'officine se fonde sur l'acceptation, expresse ou tacite, de la part des contractants, de la politique poursuivie par les fabricants exigeant l'exclusion de tous distributeurs n'ayant pas la qualité de pharmacien d'officine ; que cet agrément est donc de nature contractuelle, tant au sens de l'article 85 du Traité de Rome, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (arrêt du 25 octobre 1983, AEG Telefunken), qu'au sens de l'article 50 de l'ordonnance précitée ;

Considérant qu'une entente s'étendant à l'ensemble du territoire d'un État membre a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l'interpénétration économique voulue par le Traité, et assurant une protection à la production nationale(Cour de justice des Communautés européennes : Vereeniging Van Cement, 17 octobre 1972, Salonia, 16 juin 1981) ; qu'en l'espèce, les systèmes de distribution exclusive en pharmacie couvrent en France plus de 11 p. 100 des ventes totales de cosmétiques et d'hygiène corporelle et ont un effet sensible, actuel ou potentiel, sur le commerce intra-communautaire; qu'ils empêchent toute firme d'un autre État membre n'ayant pas la qualité de pharmacien d'officine en France de vendre dans ce pays les produits couverts par l'entente; que ces systèmes entrent donc dans le champ d'application de l'article 85 du Traité; que par leur généralité, organisant un ensemble de relations verticales entre deux professions, ils affectent le jeu de la concurrence au sens de l'article 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945, quelle que soit la part du marché détenue par chacun des fabricants ;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence d'apprécier, au regard des textes précités, d'une part, la validité des ententes de distribution sélective, d'autre part, l'existence et la licéité de pratiques concertées;

A. - Les systèmes de distribution sélective

Considérant que si ces systèmes entraînent par eux-mêmes une certaine restriction de la concurrence, ils sont néanmoins admissibles à condition que le choix des revendeurs s'opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif relatifs à la qualification professionnelle du revendeur, de son personnel et de ses installations ; que ces critères doivent être justifiés par les nécessités d'une distribution adéquate des produits et ne pas avoir pour objet ou pour effet d'exclure par nature une ou des formes déterminées de commerce qui seraient aptes à cette distribution ; qu'ils doivent être appliqués de manière non discriminatoire ;

Considérant que toutes les sociétés en cause - à l'exception de la société Roc qui, formellement, exige seulement que le point de vente soit placé sous la responsabilité directe d'un titulaire du diplôme de pharmacien - réservent leurs ventes aux pharmaciens d'officine et excluent délibérément toute autre forme de distribution ; qu'elles font valoir que cette politique correspond à un choix d'image de marque et de stratégie commerciale pour des laboratoires fabriquant par ailleurs des médicaments ; que, notamment les sociétés Biopha, Expanscience, Pierre Fabre Cosmétiques, Goupil, Lachartre, Lutsia, Pharmygiène insistent sur la technicité et la finalité de leurs fabrications, dont certaines peuvent être assimilées à des produits traitants pour la peau ou le cuir chevelu, et sont prescrites par les dermatologues ou utilisées dans les maternités ; que toutes les sociétés mettent en avant le rôle primordial du pharmacien, en raison de sa formation, dans le conseil au client, le lancement des produits nouveaux et la remontée de l'information, de l'utilisateur au fabricant ; qu'elles soulignent les avantages de l'organisation de la profession pharmaceutique relativement à la rapidité des fournitures, au retrait des produits dangereux, à la conservation des stocks et aux horaires d'ouverture des officines ; que toutefois, les sociétés Ruby d'Anglas (annexe 23 du rapport, p. 145) et Vichy (annexe 23, p. 206) ont reconnu lors de l'instruction par le rapporteur que la commercialisation de leurs produits n'exigeait pas de précautions supplémentaires par rapport à celles prescrites par les textes législatifs et réglementaires relatifs aux produits cosmétiques et d'hygiène corporelle ;

Considérant que, certes, les fabricants peuvent légitimement, pour ceux de leurs produits contenant une certaine proportion d'éléments actifs, pour ceux destinés à des peaux fragiles ou accompagnant un traitement, exiger de leurs distributeurs la présence sur le point de vente de personnes spécialement qualifiées par leur formation pour les fonctions de conseil au client et de liaison avec le fabricant, notamment celle d'un titulaire du diplôme de pharmacien, cette présence n'étant pas exclue par les textes en vigueur ; qu'il leur est aussi loisible de subordonner leur agrément à des conditions adéquates de présentation, de stockage, d'assortiment et d'information du fabricant ; que, cependant, l'exclusion a priori de toute forme de commercialisation, même répondant à ces critères, autre que la pharmacie d'officine, constitue une restriction discriminatoire et non proportionnée aux nécessités de la distribution des produits en cause; qu'il est en effet constant que les exigences précitées pourraient être satisfaites ailleurs que dans les officines pharmaceutiques ; que la législation sur la protection des consommateurs est applicable à tous les revendeurs ; que ni la capacité limitée de production de certains fabricants, ni l'organisation de la prospection commerciale par des visiteurs médicaux et de la distribution par des grossistes répartiteurs, ni la simple hypothèse de pressions sur les prix par de grands distributeurs, ne sont des justifications suffisantes de l'atteinte actuellement portée à la concurrence entre distributeurs de mêmes marques, et de l'exclusion d'autres formes de distribution ;

Considérant que cette restriction s'est manifestée par une rigidité dans la fixation des prix de revente, la réglementation déontologique de la profession de pharmacien d'officine, dans l'application qui en est faite, s'opposant à une véritable concurrence par les prix ; que, selon l'article R. 5015-26 du Code de la santé publique, les pharmaciens doivent s'interdire de solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de leur profession, même lorsque ces procédés et moyens ne sont pas expressément prohibés par la législation en vigueur ; qu'aux termes de l'article R. 5053, la publicité en faveur des officines et celle qui est faite dans les vitrines de pharmacie ne peuvent être réalisées par des procédés contraires à la dignité de la profession ; que l'article R. 5015-60 dispose qu'en toutes circonstances, les pharmaciens inscrits à l'ordre doivent faire preuve de loyauté les uns envers les autres et de solidarité ; que, sur le fondement de ces textes, les instances disciplinaires (Conseil national de l'ordre, 17 janvier 1985 et 29 mai 1986 ; Conseil régional de Picardie, 13 mai 1985, annexe 16 du rapport) ont sanctionné des pharmaciens ayant annoncé des rabais sur la " parapharmacie " par affiche dans leur officine ; que, jusqu'en 1985, les pharmaciens appliquaient pour chaque produit cosmétique ou d'hygiène corporelle le prix national unique conseillé par le fabricant ; qu'à partir du milieu de l'année 1985, certains fabricants (Pierre Fabre Cosmétiques, Vichy, Lutsia, Roc, Expanscience) ont diffusé des tableaux de prix calculés en fonction du taux de marge choisi par chaque pharmacien ; que toutefois, les pièces versées aux débats (annexes 50, 90 et 107 du rapport) font apparaître qu'en 1986, Biopha, Expanscience, Guigoz, Phannygiène, Monot, les répartiteurs GRP et OCP, diffusaient toujours des prix publics " indicatifs " ; qu'ainsi que l'ont déclaré M. Cassier, président du Conseil central de l'ordre (section A Pharmaciens d'officine), et M. Parente, président du Syndicat des pharmaciens de Seine-et-Marne, les pharmaciens, tout en étant libres de fixer leurs prix, ont l'habitude de voir ceux-ci calculés par les fabricants (annexes 63 et 96 du rapport) ; que selon une enquête réalisée en juin 1986 à la demande du rapporteur (rapport p. 94), si le pourcentage de cas dans lesquels le prix constaté est égal au prix conseillé est de 66 p. 100, ce pourcentage s'élève à 85 p. 100 si l'on prend en compte le nombre de cas où le prix constaté est supérieur ou égal au prix conseillé, celui-ci jouant alors le rôle de prix minimum ; que si, selon une enquête réalisée par la Sofres du 28 au 31 juillet 1987 dans 160 pharmacies de la région parisienne, une proportion assez élevée d'officines présentaient des réductions de prix sur au moins une catégorie de produits (27 p. 100) et des offres promotionnelles (48 p. 100), il ne résulte pas de ce sondage limité dans le temps et l'espace que la rigidité des prix à l'intérieur d'une même marque ait totalement disparu dans le secteur pharmaceutique, alors que, le 22 mai 1986, le président du Conseil central des pharmaciens d'officine déclarait au rapporteur du Conseil de la concurrence : "La parapharmacie ne peut faire l'objet de publicité ou de promotion commerciale par des procédés contraires à la dignité de la profession, car ces pratiques auraient un retentissement négatif sur l'officine ", qu'entendus les 24 et 25 juin 1986 (rapport, annexe 90), les représentants des grossistes répartiteurs OCP et GRP ont indiqué qu'ils continuaient à diffuser auprès de leurs clients pharmaciens les prix publics indicatifs des fabricants ou ceux résultant de coefficients multiplicateurs ;

Considérant que ne peut rester licite la diffusion de prix conseillés, opérée dans le cadre des ententes précédemment relevées, et s'adressant à des revendeurs auxquels la déontologie interdit de solliciter la clientèle par les procédés habituels de la concurrence et qui, de surcroît, sont habitués à respecter des prix légalement imposés en matière de médicaments;

Considérant que la clause des contrats conclus par la société Vichy interdisant au pharmacien agréé de revendre à un autre distributeur agréé est restrictive de concurrence en droit interne, même si elle autorise expressément la cession à un autre distributeur implanté dans la CEE; que c'est donc à juste titre que le Conseil de la concurrence a enjoint à ladite société de supprimer cette clause ; que la société Goupil, visée par la même injonction, n'en demande pas la réformation ;

Considérant qu'il ressort de ce qui précède l'existence d'entraves importantes à la concurrence sur les prix dans les ententes constituées par les réseaux de distribution exclusive en pharmacie ; que ces entraves ne sont pas suffisamment compensées par d'autres facteurs de concurrence ou par une concurrence intermarques ;

B. - Les actions concertées

1) Entre les fabricants et les organisations de pharmaciens

Considérant qu'il résulte des pièces annexées au rapport et contradictoirement versées aux débats que de nombreuses réunions communes ont été tenues :

a) Pour la défense du système de distribution exclusive et la mise en place de contrats :

- le 6 juillet 1983 (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France et Syndicat national de la dermopharmacie (annexe 30) ;

- le 27 février 1984 (Vichy, Fédération) (annexe 85) ;

- le 29 février 1984 (Fabre, pharmaciens de Seine-et-Marne) (annexe 85)

- le 18 avril 1984 (CIPO, organisme créé par la Fédération, fabricants) (annexe 33) ;

- le 9 mai 1984 (Monos, pharmaciens de la Côte-d'Or) (annexe 68) ;

- le 27 septembre 1984 (Ordre, Syndicats de pharmaciens, Fabre, Roc, Monot, Lachartre, Ruby d'Anglas, Expanscience, Vichy) (annexe 93) ;

b) Pour organiser le refus de vente aux centres Leclerc, après l'ouverture en février 1983 à Dammarie-les-Lys d'un magasin vendant à marges réduites des produits des fabricants en cause :

- le 5 septembre 1983 au Syndicat national de la dermopharmacie (Fabre, Expanscience, Lutsia, Roc, Vichy) (annexes 79 et 107) chacun des participants affirmant sa volonté de refuser de vendre aux centres Leclerc ;

- le 20 décembre 1983 au Conseil central de l'ordre, section A (Expanscience, Fabre, Goupil, Monot, Roc, Ruby d'Anglas, Vichy) en vue de faire le point sur les moyens pour justifier le refus de vente et sur la détermination respective à cet égard des fabricants et des pharmaciens (annexe 62) ;

- le 22 février 1984 (Fabre, Fédération des syndicats pharmaceutiques) (annexe 85) ;

- le 27 février 1984 (Vichy, fédération) (annexe 85) ;

c) Pour le maintien, sous la pression des pharmaciens, de prix uniques dans toutes les officines :

- les 23 février et 15 mai 1984 (Fédération des syndicats pharmaceutiques, chambre syndicale des répartiteurs) (annexes 35 et 36) ;

- le 20 septembre 1984 (Fédération des syndicats pharmaceutiques, Fabre, Lutsia, Roc, Ruby d'Anglas, Vichy) (annexes 39, 76, III) ;

- le 27 septembre 1984 (Ordre, syndicats de pharmaciens, Fabre, Roc, Monot, Lachartre, Ruby d'Anglas, Expanscience, Vichy) (annexe 83) ;

- le 30 janvier 1985 par la Fédération des syndicats pharmaceutiques (annexe 75).

2) Par l'Ordre national des pharmaciens

Considérant que les organes exécutifs de l'Ordre ont joué un rôle actif dans l'organisation de réunions et la mise en œuvre de pressions, ainsi

- le 20 décembre 1983, réunion mise en œuvre par le Conseil central, section A, avec la plupart des fabricants, pour organiser le refus de vente aux centres Leclerc (annexe 62) ;

- le 5 avril 1984, déclaration du président du Conseil central à un représentant de Fabre Cosmétiques, selon laquelle dès qu'il aura les noms des pharmaciens " félons ", (c'est-à-dire ayant livré aux centres Leclerc), il les traduira devant le conseil de discipline (annexe 87) ;

- le 4 juin 1984, lettre du même président à un grossiste selon laquelle les conseils régionaux seraient amenés à exercer des poursuites disciplinaires contre les confrères qui procéderaient à des ristournes sur les prix (annexe 18) ;

- le 27 septembre 1984, organisation, sous la présidence du président du Conseil national de l'ordre, d'une réunion pour la mise en place des contrats de distribution sélective, au cours de laquelle l'Ordre a affirmé sa volonté de prix uniques (annexe 93) ;

- le 11 février 1985, lettre du président du Conseil national de l'ordre au président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques, exprimant le souhait que le circuit officinal continue d'être choisi exclusivement et que cette considération inspire le comportement de ses confrères ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient l'Ordre national des pharmaciens, ces pratiques anti-concurrentielles ne peuvent être justifiées par les règles déontologiques de la profession, dont l'interprétation ne saurait permettre de provoquer ou de renforcer des effets contraires au droit de la concurrence ; qu'en la présente espèce, qui ne concerne pas les médicaments, le moyen tiré de la protection de la santé publique en droit communautaire est sans portée ; que ces pratiques illicites, qui engagent l'Ordre national des pharmaciens, qu'elles aient été commises par l'un ou l'autre de ses organes, appellent l'injonction justement prononcée par le Conseil de la concurrence, lequel en a expressément exclu l'application au pouvoir disciplinaire de l'ordre ;

3) Par les organismes répartiteurs

Considérant que, par circulaire du 9 mars 1984, OCP Répartition, à la suite de l'ouverture du magasin Leclerc, a demandé à ses directeurs d'établissement d'être " excessivement attentifs aux commandes importantes " de produits cosmétiques et d'hygiène corporelle vendus exclusivement en pharmacie, et d'en informer le siège " avec toute la rapidité et la discrétion nécessaires " ; qu'OCP ajoutait : " il est de notre intérêt de nous serrer les coudes avec nos clients et nos fournisseurs dans cette affaire " (annexe 90) ;

Considérant que, par lettre du 3 janvier 1985, le président-directeur général de GRP, rappelant qu'il avait déjà refusé de vendre à une pharmacienne de Vendée poursuivie disciplinairement pour vente " à prix Leclerc ", se déclarait à l'entière disposition de Fabre Cosmétiques pour apporter son aide dans la détection de la source des approvisionnements aux centres Leclerc, et confirmait sa totale détermination en faveur du circuit officinal traditionnel, ainsi que sa volonté de combattre les pharmaciens qui joueraient un jeu équivoque et " douteux " (annexe 90) ;

Considérant que, lors de son audition le 27 juin 1986, le représentant de GRP a précisé que sa société diffusait aux pharmaciens les prix publics indicatifs des fabricants, ou ceux résultant de l'application, au prix d'achat hors taxes du pharmacien, du coefficient multiplicateur tel qu'il était à l'époque où étaient diffusés des prix conseillés (annexe 90) ; que le directeur des achats d'OCP, entendu le 24 juin 1986, a indiqué que cette société opérait de la même manière (annexe 90) ;

Considérant que ces actions concertées des grossistes répartiteurs, menées à l'intérieur du réseau de distribution exclusive dont ils font partie intégrante, constituent des pratiques anticoncurrentielles visées par les articles 85 (§ 1) du Traité de Rome et 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945 ;

Considérant qu'en outre les sociétés OCP et GRP ne sont pas fondées à soutenir que l'injonction prononcée a à leur égard un caractère discriminatoire en ce qu'elle ne vise pas d'autres grossistes présents sur le marché ; qu'en effet la décision tranchant une situation litigieuse ne saurait, quant à présent, s'appliquer qu'aux parties en cause ;

C. - L'application des dispositions de l'article 51 de l'ordonnance du 30 juin 1945

Considérant que les fabricants font valoir que la distribution exclusive des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle en pharmacie a une influence bénéfique sur la qualité de ces produits, la formation des revendeurs, le conseil, l'innovation et la promotion ; qu'ils prétendent que ce système favorise le progrès économique et les besoins des consommateurs ;

Mais considérant que le Conseil de la concurrence a exactement relevé que la législation relative à la protection des consommateurs est applicable à tous les revendeurs, qu'ils soient ou non pharmaciens d'officine ; que la remontée de l'information de l'utilisateur au fabricant, ainsi que la fonction de conseil au client, peuvent être organisées de manière adéquate en dehors de l'officine ; qu'il n'est pas établi que l'ouverture par les sociétés en cause de nouveaux réseaux répondant aux critères ci-dessus définis ne permettraient pas le lancement de produits innovants ou la promotion des marques ; que les conditions auxquelles l'article 51 subordonne la validation des ententes anticoncurrentielles ne sont pas réunies ; que ne le sont pas davantage celles posées par l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

III. - LES MESURES A PRENDRE

Considérant que le Conseil de la concurrence a justement estimé que les ententes et actions concertées ci-dessus relevées tombaient sous le coup des dispositions des articles 85 du Traité de Rome et 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945, sans pouvoir être justifiées par les dispositions de l'article 51 de ladite ordonnance et qu'elles étaient également visées par l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986; que les injonctions que le Conseil, faisant application des pouvoirs à lui conférés par l'article 59, alinéa 2, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, a prononcées à l'égard des sociétés demanderesses aux recours, ne peuvent qu'être confirmées ;

Considérant qu'il convient cependant, en vue de permettre aux destinataires de ces injonctions la mise en place d'une nouvelle politique de distribution, selon les critères ci-dessus définis, de leur accorder un délai ainsi qu'il est prévu par l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant que, conformément au même texte qui permet d'assortir la décision de conditions particulières, il y a lieu de faire vérifier l'exécution des injonctions dans les termes du dispositif ci-après, et de surseoir au prononcé des sanctions jusqu'à cette vérification ;

Par ces motifs, et ceux non contraires du Conseil de la concurrence : Joint les instances inscrites au répertoire de la cour sous les numéros 87-11812, 87-11519, 87-12668, 87-12704, 87-12703, 87-13055, 87-13102, 87-13283, 87-13282, 87-13285, 87-13391, 87-13475, 87-14044, 87-14154, 87-14311 ; Statuant dans la limite des recours dont elle est saisie ; Reçoit l'intervention volontaire de la société Ducray. Dit n'y avoir lieu à annulation de la décision du Conseil de la concurrence ; Confirme cette décision en ce qu'elle a enjoint aux sociétés Biopha, Expanscience, Goupil, Pierre Fabre Cosmétiques, Lachartre, Lutsia, Mondi, Pharmygiène, Ruby d'Anglas et Vichy de cesser de subordonner l'agrément de leurs distributeurs à la qualité de pharmacien d'officine ; constate que ce chef de la décision n'est pas frappé de recours par la société Guigoz ; étend cette injonction à la société Roc ; accorde aux parties en cause un délai expirant le 1er août 1988 pour l'application desdites injonctions ; Confirme la décision en ce qu'elle a enjoint à la société Vichy de modifier ses contrats de distribution par la suppression de la clause interdisant aux revendeurs de rétrocéder des produits à un autre revendeur agréé ; constate que ce chef de la décision n'est pas frappé de recours en ce qu'il concerne la société Goupil ; Confirme la décision en ce qu'elle a enjoint aux sociétés Lachartre, Monot, " OCP " Répartition et GRP de cesser de diffuser auprès des pharmaciens des indications directes ou indirectes de prix conseillés ; constate que ce chef de la décision n'est pas frappé de recours par les sociétés Expanscience, Fabre, Goupil, Lutsia, Pharmygiène, Roc, Ruby d'Anglaa, Vichy et Biopha ; Confirme la décision en ce qu'elles enjoint à l'Ordre national des pharmaciens, dans l'exercice de ses compétences autres que juridictionnelles, de s'abstenir de toute ingérence dans le comportement des fabricants et des pharmaciens en matière de prix et d'agrément des distributeurs ; Ajourne le prononcé de toute sanction pécuniaire ; dit qu'afin de vérifier l'exécution des injonctions ci-dessus énoncées, l'affaire sera à nouveau appelée devant la cour à l'audience du jeudi 1er décembre 1988, à neuf heures, au vu d'un rapport que le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes voudra bien communiquer aux parties en cause, et déposer au greffe de la cour avant le 1er novembre 1988 ; Dit que dans le délai d'un mois après la notification du présent arrêt, le texte intégral de celui-ci sera publié dans les journaux Le Moniteur des pharmaciens, Les Echos et Le Monde, sur l'initiative de M. le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ; Dit que les frais de publication seront supportés in solidum par les parties ci-dessous condamnées aux dépens ; Condamne les sociétés Biopha, Expanscience, Pierre-Fabre Cosmétiques, Goupil, Lachartre, Lutsia, Monot, Pharmygiène, Roc, Ruby d'Anglas, Vichy, " OCP " Répartition et GRP ainsi que l'Ordre national des pharmaciens, in solidum aux dépens.