CA Paris, 1re ch. sect. concurrence, 17 septembre 1992, n° ECOC9210161X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Géosavoie (GIE)
Défendeur :
Ministre de l'Économie, des Finances et du Budget
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidents :
MM. Borra, Canivet, Mme Aubert
Conseillers :
M. Guerin, Mme Nerondat
Avocat :
SCP Rambaud-Martel.
Le groupement d'intérêt économique Géosavoie ainsi que MM. Bonnard, Perrier, Branche, Godard, Falcoz, Dorange-Pattoret, Vial, Berthet, Dyen, Karst, Claraz, Boch, Barral, Delaunay, Fleurantin, Gaimard, les SCP Ferre-Fleurantin et Fontanez-Perronnier ont, le 22 janvier 1992, formé un recours contre la décision n° 91-D-59 du Conseil de la concurrence du 3 décembre 1991 qui a fait injonction au GIE Géosavoie de supprimer l'article 2 nouveau de son règlement intérieur et a infligé aux dix-sept membres du groupement des sanctions pécuniaires allant de 5 000 F à 66 000 F.
Le ministre de l'économie et des finances a, le 26 février 1992, formé un recours incident contre cette décision pour que soit infligée au GIE Géosavoie une sanction pécuniaire de 250 000 F et que sa dissolution soit ordonnée.
Les éléments de la clause sont rappelés comme suit :
A la suite de la candidature de la Savoie aux jeux Olympiques, les géomètres experts du département ont, en 1987, cherché à s'organiser et ont créé, d'une part, la société Savoie Informatique et Graphisme, d'autre part, le GIE dont sont devenus membres tous les géomètres du département à l'exception d'un seul.
Le GIE Géosavoie a défini son objet à l'article 3 des statuts en ces termes : " De l'organisation des jeux Olympiques d'hiver en Savoie en 1992 naîtront des travaux importants dont la réalisation exigera des délais très courts. Le groupement d'intérêt économique a pour objet de créer par la réunion des capacités techniques et matérielles de ses adhérents un organisme qui permettra à ceux-ci d'y accéder alors qu'à titre individuel ces travaux leur seraient difficilement accessibles. "
Il est géré par un administrateur délégué assisté d'administrateurs et ne dispose d'aucune infrastructure ni de personnel. Son siège est fixé au domicile de l'administrateur délégué qui utilise les moyens de son cabinet pour la gestion quotidienne. Ses frais sont financés par un prélèvement sur le montant des travaux attribués et par les cotisations de ses membres.
L'article 2 du règlement intérieur fixe les règles d'attribution des travaux : " Elle sera faite au coup par coup par l'administrateur délégué assisté des autres administrateurs après contacts auprès des membres du groupement. Elle sera équitable dans la mesure où chaque membre aura, sur un exercice, réalisé une masse de travaux sensiblement égale en pourcentage global à celle fixée dans l'état ci-annexé. Un membre pourra, pour des raisons qui lui sont propres, refuser l'exécution d'un travail au titre du groupement. Dans ce cas, il ne pourra réclamer de compensation et son attribution globale annuelle sera diminuée d'autant. Si, pour des raisons d'opportunité, de connaissance des lieux, de spécialisation ou pour tout autre cause, un membre du groupement a eu, sur l'exercice en cours, une attribution excessive, la correction d'attribution se fera sur l'exercice suivant. Il en sera de même en cas d'attribution insuffisante. "
L'annexe I du règlement intérieur prévoit que les travaux sont répartis en fonction de pourcentages attribués à chaque cabinet qui tiennent compte, d'une part, de la localisation des travaux, d'autre part, des cotisations à l'ordre des géomètres experts et au conseil régional calculées à partir du chiffre d'affaires et de la masse salariale.
L'annexe II du même règlement précise que les travaux d'un montant supérieur à 180 000 F sont traités par le GIE, leur montant faisant l'objet d'une répartition au prorata, telle que définie au règlement intérieur, sauf si un seul cabinet est consulté. Lorsque le montant des travaux est inférieur à 180 000 F et lorsque le GIE est consulté soit seul, soit en concomitance avec plusieurs cabinets, il oriente l'affaire vers les cabinets et le montant du marché entre dans le compte prorata, sauf s'il est consulté avec un seul cabinet.
En cours d'instruction de la procédure devant le Conseil de la concurrence, l'article 2 du règlement intérieur a par décision de l'assemblée générale extraordinaire du 24 janvier 1991 été modifié de la manière suivante : " Attribution des travaux. Elle sera faite au coup par coup par l'administrateur délégué assisté des autres administrateurs. Elle sera faite en fonction des disponibilités de chacun et des souhaits du maître de l'ouvrage. "
Les annexes I et II du règlement intérieur ont été supprimées.
Saisi le 21 décembre 1989 par le ministre de l'économie, des finances et du budget de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur des géomètres-experts visant notamment le GIE Géosavoie, le Conseil de la concurrence a, après avoir fait adresser le 2 janvier 1991 une notification de griefs complémentaires à l'ensemble des membres du GIE, pris la décision ci-dessus rapportée. Il a estimé que, si le groupement d'intérêt économique formé par des entreprises indépendantes et concurrentes ne constitue pas en soi une entente prohibée, il a réalisé en l'espèce un partage de marchés entre ses membres en réservant par avance à chacun d'eux un quota de travaux en fonction de son implantation géographique et du chiffre d'affaires réalisé et en prévoyant un " correctif d'attribution " qui contribue à accentuer la rigidité du système. La modification apportée le 24 janvier 1991 a maintenu, à son avis, le principe de répartition originel. La circonstance selon laquelle les pratiques mises en œuvre n'auraient eu qu'un effet limité a été selon le conseil sans incidence sur la qualification dès lors que ces pratiques avaient un objet ou pouvaient avoir un effet anticoncurrentiel.
Aux termes des mémoires déposés dans l'intérêt du GIE Géosavoie et de ses membres ceux-ci invoquent comme moyens d'annulation ou de réformation :
Que le groupement par la réunion des moyens de ses membres dont aucun n'aurait pu répondre aux appels d'offres et réaliser les travaux concernés a été un acteur économique nouveau entraînant, par son intervention, un accroissement de la concurrence ;
Qu'une distinction doit être faite entre la répartition des marchés qui est le résultat de l'appel d'offres ayant fait jouer la concurrence et la répartition des travaux entre les différents membres du GIE qui est indispensable puisque celui-ci ne dispose d'aucun matériel ni personnel et qui a été fondée sur la rationalité économique en faisant appel aux critères de localisation des travaux, de moyens, capacités et compétence ;
Que le maintien de l'injonction est injustifié, le groupement étant disposé, pour la bonne information des maîtres d'ouvrage, à mentionner dans toute réponse à une consultation, outre son nom, celui de ses membres ; que les sanctions ne sont pas motivées et ne tiennent pas compte du seul secteur d'activité concerné qui est celui de l'activité pour les collectivités publiques.
Après un examen des moyens soulevés, le ministre de l'économie et des finances a demandé la confirmation des sanctions pécuniaires prononcées à l'encontre des membres du groupement. Faisant observer que la licéité du GIE Géosavoie avait fait l'objet d'un débat contradictoire, il a estimé que son recours incident est en état d'être jugé et sa demande de sanction fondée car le groupement n'est pas un opérateur supplémentaire sur le marché mais ne fait en réalité que répartir les commandes entre les opérateurs présents sur ce marché en préservant les zones d'influence de ceux-ci.
Sur le recours incident, le GIE Géosavoie et ses membres ont répliqué que le grief incriminant le caractère anticoncurrentiel du groupement a été écarté par le rapporteur, que la notion d'attribution des travaux au sein du GIE correspond à l'objectif né de la constitution du groupement et ne peut être assimilée à une répartition des marchés.
Le ministère public a conclu en ce sens que l'article 2 du règlement intérieur a un objet anticoncurrentiel et que les pratiques effectuées sur ce fondement tombent sous le coup de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 sans que soient par ailleurs établies les conditions d'application de l'article 10-2 de cette ordonnance. Son avis est en outre que l'article 2 dans sa nouvelle rédaction n'a pas un objet anticoncurrentiel et qu'en ce qui concerne l'effet le dossier n'apporte pas d'éléments d'information suffisamment probants concernant la réalisation de marchés dans cette nouvelle optique. Il a observé enfin que si, indépendamment des sanctions prononcées contre les membres du GIE, le groupement peut lui-même être sanctionné l'injonction concernant la dissolution ne relève pas de la compétence de la cour.
Sur quoi, LA COUR :
a) Sur le recours principal :
Sur les pratiques :
Considérant que la forme juridique adoptée par des entreprises qui se concertent est sans influence sur l'application des dispositions législatives ou réglementaires régissant la concurrenceet qu'en particulier les dispositions de l'ordonnance du 23 septembre 1967, relative aux groupements d'intérêt économique, ne font pas obstacle à ce que les pratiques anticoncurrentielles auxquelles se livrent les entreprises associées dans un tel groupement soient appréciées au regard des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986;
Considérant que les statuts complétés par le règlement intérieur et les annexes font que le GIE Géosavoie a vocation à répondre aux appels d'offres émanant des partenaires publics en jouant un rôle prépondérant lors de la consultation puis à procéder à la répartition des marchés qui lui ont été attribués entre les membres du groupement suivant des règles précises ;
Que le groupement a un monopole d'intervention pour les marchés de travaux d'un montant supérieur à 180 000 F, sauf si un seul cabinet est consulté, et intervient également pour les marchés inférieurs à ce montant pour faire la répartition lorsqu'il est seul consulté ou consulté en même temps que plusieurs cabinets membres du groupement ;
Que la répartition des marchés entre les membres du groupement est jugée équitable lorsqu'elle correspond au pourcentage affecté à chaque cabinet de géomètre expert et calculé en fonction de la localisation géographique des travaux et des cotisations versées aux instances ordinales ;
Que le respect de cette règle est renforcé par l'existence d'un correctif d'attribution au cas où, pour des raisons d'opportunité et de connaissance des lieux, un cabinet a, au cours d'un exercice, bénéficié d'une attribution excessive ;
Considérant que, selon M. Karst, administrateur délégué entendu au cours de l'enquête administrative, le prix offert par le groupement pour un marché déterminé et l'attribution de celui-ci à un ou plusieurs membres du groupement ont été décidés au cours de réunions auxquelles ont été conviés tous les participants au GIE ;
Considérant qu'il ressort des dispositions ci-dessus rappelées qui régissent le GIE que ce groupement a pour mission de répartir les marchés entre ses membres en réservant à chacun d'eux un quota de travaux selon des critères préétablis excluant toute concurrence ;
Que le groupement et ses membres réalisent une entente qui tombe sous le coup de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Considérant que la réunion de tous les cabinets de géomètres experts du département de la Savoie à l'exception d'un seul au sein d'une telle organisation ne pouvait et n'a pas effectivement amélioré la concurrence concernant les appels d'offres auxquels le GIE a répondu ;
Que les marchés conclus ont tous porté sur des travaux routiers à l'intérieur du département pour lesquels les cabinets savoyards étaient les mieux placés géographiquement ;
Que leur attribution et leur exécution ne justifiaient pas que toute compétition fût supprimée entre les cabinets de ce département ;
Que les deux marchés les plus importants de la société Scétauroute ont certes été attribués à des cabinets extérieurs mais, l'un, à une entreprise de taille moyenne puisqu'elle avait treize salariés et faisait un chiffre d'affaires de 5 MF par an et, l'autre, à deux cabinets travaillant en association ; qu'aucun de ces marchés n'exigeait le regroupement de dix-sept cabinets ;
Que, pour les huit marchés proposés par la direction départementale de l'équipement et dont les montants ont varié de 43 680 F à 369 110 F, le GIE a été désigné cinq fois ;
Que, dans trois cas, la concurrence a pu jouer grâce à la présence des cabinets extérieurs dont il n'est pas exclu qu'ils aient été consultés par le maître d'ouvrage pour contrebalancer l'absence de concurrence entre les cabinets du département en raison de la présence du groupement, que, dans deux cas, le groupement s'est trouvé en compétition avec deux de ses membres en sorte que la concurrence n'a pas joué, que, dans un cas, le marché a été attribué au groupement malgré une offre supérieure de 25 p. 100 à celle du moins-disant ;
Considérant que force est de constater qu'aucun accroissement de la concurrence n'est résulté de l'intervention du GIE;
Qu'au contraire son existence, en raison du grand nombre de cabinets qu'il regroupe, a gêné les maîtres d'ouvrage voulant faire respecter la concurrence dans leurs appels d'offres;
Que la composition et le mode de fonctionnement du GIE ont eu des effets anticoncurrentiels aggravés sur les marchés de moyenne et faible importance que celui-ci a obtenus en plus grand nombre ;
Considérant que la distinction invoquée par les requérants entre répartition des marchés et répartition des travaux est artificielle et dépourvue de contenu ;
Que chaque appel d'offres auquel a répondu avec succès le GIE a entraîné l'attribution d'un marché de prestations de services à un ou plusieurs membres du groupement suivant des critères préétablis excluant le jeu de la concurrence entre les cabinets du département de la Savoie ;
Considérant que le fonctionnement du GIE ne devient pas légitime du seul fait qu'étant dépourvu de ressources propres, de personnel et d'infrastructure il ne pouvait exécuter les marchés qui lui étaient confiés et devait donc les répartir entre ses membres alors que cette organisation ne répondait pas à une nécessité mais à un choix de ceux qui ont créé le groupement;
Que ce mode de fonctionnement montre que, loin de vouloir constituer une entité économique nouvelle par la mise en commun d'un potentiel humain et de moyens, les géomètres experts se sont réunis au sein du groupement pour obtenir les marchés et les répartir entre eux en évitant de se faire concurrence;
Considérant qu'il apparaît ainsi que le GIE Géosavoie a pour seul objectif le partage des marchés entre ses membres ; que, par son existence même, il porte atteinte à la concurrence quelles que soient les modifications apportées aux dispositions qui le régissent;
Qu'une répartition des travaux " faite en fonction des disponibilités des cabinets membres du GIE et des souhaits du maître d'ouvrage " introduit un autre mode d'affectation également contestable et restrictif en matière de concurrence ;
Qu'elle laisse entièrement subsister la concertation préalable à l'appel d'offres ;
Que le maître d'ouvrage n'a pas à choisir le cabinet de géomètre expert le plus compétitif mais seulement à exprimer sa préférence quant au cabinet chargé de la réalisation des travaux;
Que son information sur les cabinets qui sont membres du GIE ne donne aucune transparence à une consultation faussée initialement par une entente tendant à la répartition des marchés ;
Considérant que l'objectif poursuivi par le groupement n'obéit à aucune rationalité économique car il tend, par la mise en place d'une structure artificielle, à préserver les zones d'influence de chaque cabinet lorsque référence est faite à l'implantation géographique ou les situations acquises lorsqu'il s'agit de faire participer chaque adhérent aux travaux ou de les attribuer en fonction des disponibilités de chacun ; qu'il n'a aucun effet incitatif sur la qualité des prestations de service ni sur le prix de celles-ci ;
Considérant que l'interposition entre le maître d'ouvrage et les géomètres experts d'un groupement constitué entre eux ayant pour seule fonction le partage des travaux attribués au groupement est faite dans l'intérêt de ces opérateurs mais n'assure aucun progrès économique ni profit pour les utilisateurs ; qu'elle entraîne une élimination de la concurrence pour une partie substantielle des marchés publics offerts ;
Considérant que les pratiques suivies par le GIE Géosavoie doivent être sanctionnées dès lors qu'elles ont eu un objet manifestement anticoncurrentiel et ont pu avoir un effet anticoncurrentiel même si le groupement n'a pas obtenu les marchés importants escomptés et a eu une activité réduite ;
Sur les sanctions :
Considérant que l'injonction prononcée par le conseil en vue de supprimer le nouvel article 2 du règlement intérieur du GIE Géosavoie doit être confirmée car, comme décrit ci-dessus, la répartition des marchés constitue en fait l'objet même du GIE ;
Que, nonobstant toute disposition statutaire, il doit être fait interdiction aux membres du groupement de mettre en œuvre, sous couvert de celui-ci, toute pratique contraire aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Considérant que pour prononcer les sanctions, le conseil a tenu compte de l'incidence des pratiques sur le fonctionnement du marché ;
Considérant que la création d'un GIE chargé de soumissionner des marchés publics dans des conditions qui faussent la concurrence pour les répartir ensuite entre ses membres qui ont éliminé toute concurrence entre eux met en évidence des pratiques illicites dont la gravité n'est pas seulement fonction de l'importance de ces marchés ou des effets des pratiques;
Qu'un dommage est causé à l'économie dès lors qu'une entente fausse la concurrence voulue par le recours à des appels d'offres dont les maîtres d'ouvrage sont en droit d'attendre qu'ils donnent lieu à une compétition réelle et à la détermination du meilleur prix pour les marchés proposés;
Considérant que les sanctions ont été modulées en fonction du chiffre d'affaires réalisé en 1990 par chaque géomètre expert membre du groupement et que leur montant est dans les limites fixées par l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, selon les indications fournies par les requérants ;
Qu'il faut en outre observer que le chiffre d'affaires a été un élément retenu par les membres du groupement pour fixer le quota de travaux affecté à chaque cabinet ;
Considérant que les travaux des géomètres experts constituent un seul secteur d'activité car ils mettent en œuvre des techniques et des matériels identiques et sont accomplis par des personnes ayant une même qualification ;
Qu'aucune différenciation ne peut être faite à cet égard entre les travaux destinés aux collectivités publiques et à la clientèle privée ;
Que la distinction entre les deux secteurs ne repose que sur la mise en concurrence des cabinets par les partenaires publics selon les règles du Code des marchés publics ;
Considérant que les condamnations prononcées ont fait une juste appréciation des différents critères ainsi que de la participation de chaque membre à la réalisation de l'entente ;
Que cette participation à une entente prohibée doit être sanctionnée indépendamment des bénéfices tirés de l'attribution de travaux ;
Que tel est le cas de M. Delaunay qui, comme M. Bonnard et M. Vial, n'a pas fait de travaux dans le cadre du GIE mais a été l'un des membres du groupement et a de ce fait participé à la concertation ;
Considérant que M. Perrier a pris sa retraite en mars 1990 mais a été membre du GIE jusqu'à cette date pendant la période où le groupement a été le plus actif et a lui-même bénéficié de missions ;
Que les sanctions doivent être maintenues tant à l'égard de M. Delaunay qu'à l'égard de M. Perrier ;
b) Sur le recours incident :
Considérant que le ministre de l'Économie et des finances est en droit d'agir contre le GIE Géosavoie auquel ont été notifiés les griefs de pratiques anticoncurrentielles ;
Que l'instruction du dossier a porté sur le rôle assumé par le GIE en qualité d'organisateur de la concurrence et de répartiteur des marchés ;
Considérant que le conseil a sanctionné les membres du GIE qui se sont répartis entre eux les marchés au mépris des règles de concurrence sans prononcer de condamnation à l'égard du GIE ;
Considérant néanmoins que les sanctions pécuniaires prononcées à l'égard des membres d'un groupement n'excluent pas que le groupement lui-même se voit infliger une condamnation;
Considérant que le GIE a la personnalité morale et a été l'instrument du regroupement des cabinets savoyards, de l'organisation et de la mise en œuvre de l'entente, répondant aux appels d'offres, orientant les marchés vers ses membres et les répartissant entre ceux-ci ;
Que son existence a entraîné une restriction de la concurrence sans procurer aucun avantage économique aux partenaires publics ;
Qu'une sanction à son égard est fondée ;
Considérant que le rôle dévolu à cette structure, le dommage causé à l'économie ci-dessus décrit et le chiffre d'affaires réalisé qui a été en moyenne de 1,59 MF pour l'année 1989 et l'année 1990 justifient la condamnation du GIE Géosavoie au paiement de la somme de 250 000 F ;
Considérant qu'en vertu de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 le conseil de la concurrence et la cour d'appel statuant sur le recours contre la décision du conseil disposent du pouvoir d'ordonner la cessation des pratiques anticoncurrentielles, de prononcer des sanctions pécuniaires et d'ordonner la publication des décisions ;
Qu'il n'entre dans la compétence ni du conseil ni de la cour de prononcer la dissolution d'un groupement d'intérêt économique;
Que l'application de l'article 9 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relève de la compétence des juridictions du fond habilitées à statuer sur la validité de toute convention se rapportant à une pratique prohibée par les articles 7 et 8;
Que la demande de dissolution du GIE Géosavoie est irrecevable,
Par ces motifs : Sur le recours principal : Rejette le recours formé par le GIE Géosavoie et ses membres contre la décision du conseil de la concurrence n° 91-D-59 du 3 décembre 1991 ; Complète l'injonction donnée par le conseil en ces termes : " Il est fait interdiction aux membres du GIE Géosavoie de mettre en œuvre, sous couvert de celui-ci, toute pratique contraire aux dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 " ; Sur le recours incident : Déclare irrecevable la demande de dissolution du GIE Géosavoie présentée par le ministre de l'économie et des finances ; Condamne le GIE Géosavoie à une sanction pécuniaire de 250 000 F.