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Décisions

CA Paris, 1re ch. sect. concurrence, 6 mars 1991, n° ECOC911029X

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Syndicat français des artistes-interprètes, Syndicat indépendant des artistes-interprètes, Sydas, Syndicat national libre des acteurs Force ouvrière, TF1 (SA), Antenne 2 (SA), FR3 (SA), Union syndicale de la production audiovisuelle, Institut national de l'audiovisuel, Pathé Cinéma (SA), Ministre de l'Economie, Union des producteurs de films, Chambre syndicale des producteurs et exportateurs de films français, S2PA

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Premier président :

Mme Ezratty

Président :

M. Vengeon

Avocat général :

M. Jobard

Conseillers :

Mme Hannoun, MM. Canivet, Guérin

Avoués :

SCP Teytaud, SCP Duboscq-Pellerin, SCP Fanet, SCP Menard-Scelle-Millet, SCP Bouaziz-Benamara, Me Huyghe

Avocats :

Mes Soulie, Attal, Solal, Lévy, Dunaud, Bousquet, Rosand, Binet, Bihl.

CA Paris n° ECOC911029X

6 mars 1991

Par décision n° 90-D-21 du 26 juin 1990, le Conseil de la concurrence a infligé diverses sanctions pécuniaires aux signataires d'un accord conclu 31 mai 1988 entre les syndicats d'artistes-interprètes SFA, SYDAS, SNLA et SIA, les sociétés TF1, Antenne 2 et FR 3, l'INA, USPA (Union syndicale des producteurs de programmes audiovisuels) et la société Pathé-Cinéma.

Les circonstances de fait ayant abouti à cette décision sont les suivants :

Depuis 1959, les syndicats d'artistes interprètes ont signé avec l'ORTF, puis avec les trois premières chaînes de télévision, des convenons collectives prévoyant la perception d'une rémunération supplémentaire égale à un pourcentage de leur cachet initial en cas de rediffusion des œuvres auxquelles ils avaient participé.

A la suite de l'apparition de nouveaux diffuseurs, la convention conclue le 22 juillet 1985 a prévu en ses articles 8-7 et 8-18 que les cessions commerciales d'œuvres préexistantes " à l'un quelconque des nouveaux diffuseurs " donneraient lieu à la répartition entre les artistes interprètes, au prorata de leur salaire initial dans l'émission considérée, d'une quote-part des " recettes nettes producteur " correspondant aux sommes effectivement encaissées, déduction faite d'un abattement de 20 p. 100.

L'INA, ayant par contrats du 16 avril 1987 autorisé les sociétés La Cinq et M 6 à diffuser certaines émissions faisant partie de ses archives, s'est trouvé tenu, en sa qualité de signataire, de respecter ces dernières dispositions.

Désirant obtenir le versement d'un pourcentage de leur salaire initial pour les rediffusions sur toutes les chaînes de télévision publiques et privées, les artistes-interprètes ont demandé l'élaboration d'une nouvelle convention collective et, en raison du refus des sociétés La Cinq et M 6 de prendre part aux négociations, ont entrepris un mouvement de grève.

Par accord du 19 février 1988, les sociétés TF 1, Antenne 2 et FR 3 ainsi que l'INA et l'USPA se sont engagés à ne pas céder leurs droits d'exploitation à des sociétés de diffusion qui feraient l'objet de cette grève et à ne pas réaliser de coproduction avec elles, un nouvel accord conclu le 30 mars suivant précisant que ce second engagement serait caduc à la signature de la convention collective.

Le 31 mai 1988, cette convention a été signée entre, d'une part, les quatre syndicats d'artistes-interprètes SFA, SYDAS, SNLA et SIA, d'autre part, les sociétés TF 1, Antenne 2, FR 3, Canal Plus et la SEPT (Société d'édition de programmes de télévision), l'INA, I'USPA et la société Pathé-Cinéma.

Elle comportait un article 1-2-4 ainsi libellé: " Tout contrat passé entre l'une des entreprises de communication audiovisuelle signataires ou adhérentes et une société française non signataire de la présente convention pour de tels façonnages (terme employé à l'article 1-2-4 précédent pour désigner les réalisations d'émissions) ou coproductions (ou achats de droits commandes) devra prévoir que cette société est tenue d'appliquer aux artistes-interprètes les dispositions de la présente convention ".

Par ailleurs le même jour les mêmes organismes signataires, à l'exception de la SEPT et de Canal Plus ont signé un accord séparé rédigé en ces termes:

" Les accords des 19 février et 30 mars 1988 sont rendus caducs par la signature de la convention collective des artistes-interprètes engagés pour des émissions de télévision.

" Toutefois, les sociétés et organismes signataires du présent accord ne procéderont pas à des cessions d'exploitation de programmes préexistants dont ils détiennent les droits aux sociétés La Cinq et M 6, si ces dernières faisaient l'objet d'une grève des artistes-interprètes, pendant la durée de celle-ci et au plus tard jusqu'au 1er janvier 1989.

" Sont également visées par ces dispositions les cessions d'émissions produites ou coproduites jusqu'au 1er janvier 1989 par les sociétés et organismes signataires du présent accord sans participation financière des sociétés La Cinq et M 6.

" A cette date, de telles cessions ne pourront intervenir que si le diffuseur acquéreur accepte de supporter la charge d'une rémunération des artistes-interprètes constituée par un pourcentage du salaire initial négocié avec les syndicats d'artistes.

" Cet engagement n'est pas applicable aux cessions de droits effectuées en exécution de contrats conclus antérieurement au 19 février 1988. "

Soutenant que la clause 1-2-4 susvisée interdirait dorénavant aux producteurs indépendants d'amortir leurs coûts de production des œuvres télévisuelles par le moyen des rediffusions, l'Union des producteurs de films (UFP) a saisi le 3 août 1988 le Conseil de la concurrence d'une requête tendant à obtenir la suspension de ses dispositions.

Puis la Chambre syndicale des producteurs et exportateurs de films français (CSPEFF) et le Syndicat des producteurs de programme audiovisuels (S2PA) ont demandé respectivement le 2 septembre 1988 et le 26 juillet 1989 au Conseil de la concurrence de constater que l'article 1-2-4 de la convention collective du 31 mai 1988, de même que la " clause de boycott " en date du même jour constituent une violation des articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Enfin les sociétés La Cinq et M 6, qui avaient également saisi le Conseil de la concurrence les 4 et 8 août 1988, se sont désistées de leurs plaintes après avoir adhéré à la convention collective le 13 septembre 1988 avec effet rétroactif au 1er juillet précédent en obtenant des abattements spécifiques sur les rémunérations dues aux artistes-interprètes à l'occasion des rediffusions effectuées jusqu'au 1er juillet 1992.

A la suite de cette adhésion, l'UPF a renoncé aux mesures conservatoires par elle sollicitées, mais a maintenu sa demande d'examen de la convention collective au regard des articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et a étendu sa saisine à l'examen des clauses de boycott des 19 février et 31 mai 1988.

Tout en relevant qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur le point de savoir si l'article 1-2-4 précité constituait un procédé irrégulier d'extension de la convention collective, le Conseil de la concurrence a dans sa décision du 26 juin 1990 estimé que la clause qu'il comporte ne pouvait être regardée comme une entente au détriment des sociétés La Cinq et M 6 et qu'aucun élément du dossier ne fournissait l'indice d'une volonté commune des diffuseurs d'affaiblir les producteurs par ce moyen.

En revanche, considérant que l'accord séparé avait pour objet de limiter l'accès des sociétés La Cinq et M 6 aux émissions à rediffuser disponibles sur le marché, il a estimé qu'il constituait une entente directement contraire aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et a, à ce titre, infligé une sanction pécuniaire de 2 500 000 F à la société TF 1, 1 500 000 F à chacune des sociétés Antenne 2 et FR3, 150 000 F à chacun des syndicats d'artistes-interprètes et à l'USPA, 100 000 F à l'INSA et à la société Pathé-Cinéma.

Il a en outre ordonné la publication de sa décision dans Le Figaro, Le Monde, Les Echos et La Tribune de I'Economie.

Les dix signataires de l'accord ainsi sanctionné ont formé un recours en annulation et subsidiairement en réformation de cette décision.

Les sociétés TF 1, Antenne 2, FR3 ainsi que l'USPA contestent tout d'abord la régularité de la procédure en soutenant que le Conseil de la concurrence ne pouvait, sans respecter le principe du contradictoire, examiner la clause de boycott tardivement invoquée par les plaignants à une époque où il n'avaient plus aucun intérêt à agir de ce chef.

Les quatre syndicats d'artistes-interprètes, la société TF 1, l'INA et la société Pathé-Cinéma contestent en second lieu la compétence du Conseil de la concurrence pour examiner les accords collectifs conclus entre les syndicats de salariés avec leurs employeurs et pour apprécier la régularité des modalités d'exercice de leur droit de grève.

Les sociétés TF 1, Antenne 2 et FR 3 ainsi que les quatre syndicats d'artistes interprètes contestent enfin le bien-fondé de la sanction prononcée, en faisant valoir que l'accord incriminé ne pouvait constituer une entente prohibée au sens de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et que, conformément aux dispositions de l'article 10 de cette même ordonnance, il ne pouvait être sanctionné puisqu'il se trouvait justifié par les dispositions de la loi du 3 juillet 1985 sur la rémunération due aux artistes interprètes, l'USPA ajoutant qu'elle n'avait aucun intérêt à porter préjudice aux sociétés La Cinq et M 6 avec lesquelles elle pouvait être appelée à travailler au même titre qu'avec les autres chaînes de télévision.

Subsidiairement, tous les requérants demandent la réduction des sanctions prononcées.

Tout en estimant la condamnation déférée justifiée en son principe, le ministre de l'économie demande pour sa part de réduire le montant des sanctions infligées aux syndicats d'artistes interprètes à 15 000 F pour le Sydas et à 20 000 F pour chacun des trois autres syndicats.

Les trois plaignants (UPF, CSPEFF et S2PA) concluent à la confirmation de la décision entreprise sans former appel incident quant au rejet de leurs réclamations relatives à la clause 1-2-4.

Enfin le SIA sollicite leur condamnation au paiement d'une indemnité de 15 000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR:

Sur la régularité de la procédure:

Considérant que les trois sociétés de télévision poursuivies et l'USPA contestent tout d'abord la régularité de la procédure en avançant que le Conseil de la concurrence se serait, sans respecter le principe du contradictoire, " auto-saisi " de l'examen de l'accord sanctionné à une époque où celui-ci était devenu caduc.

Mais considérant que ce moyen apparaît dénué de tout fondement, dès lors que cet accord était expressément visé dans la plainte de la chambre syndicale des producteurs et exportateurs de films français qui a été enregistrée au Conseil de la concurrence le 2 septembre 1988 et qu'il ne peut davantage être soutenu que cet accord était alors caduc puisqu'il est resté en vigueur jusqu'à l'adhésion des sociétés La Cinq et M 6 à la convention collective le 13 septembre suivant.

Considérant de même que, si ce grief a été dénoncé ultérieurement par le Syndicat des producteurs de programmes audiovisuels et par l'Union des producteurs de films, la société TF 1 ne saurait en déduire que leurs plaintes auraient dû être déclarées irrecevables pour défaut d'intérêt à agir ; qu'en effet, si la caducité de l'accord dénoncé rendait dorénavant sans objet toute demande tendant à ce qu'il y soit mis fin, le Conseil de la concurrence pouvait néanmoins valablement examiner si sa conclusion et son maintien en vigueur pendant plus de trois mois justifiaient que des sanctions soient prononcées à l'encontre de ses signataires.

Considérant enfin que les parties poursuivies ne sauraient reprocher au Conseil de la concurrence de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire en leur laissant croire que les poursuites dont elles faisaient l'objet ne portaient que sur l'article 1-2-4 de la convention collective, alors que la notification de griefs qui leur a été dénoncée porte expressément sur l'accord séparé du 31 mai 1988.

Sur la compétence:

Considérant que les quatre syndicats d'artistes-interprètes, la société TF 1, l'INA et la société Pathé-Cinéma contestent en second lieu la compétence du Conseil de la concurrence pour examiner un accord collectif conclu par des syndicats de salariés avec leurs employeurs et pour apprécier la régularité des modalités d'exercice de leur droit de grève.

Mais considérant que, tout en reconnaissant dans sa décision qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur l'appréciation de la régularité du procédé d'extension de la convention collective que comportait son article 1-2-4, le Conseil de la concurrence a pu justement faire valoir, dans ses observations en réplique aux moyens des requérants,qu'il relevait de sa compétence de sanctionner les engagements anticoncurrentiels, quelle que soit la nature de la convention dans laquelle ils se trouvent insérés.

Considérant qu'il convient en outre de relever que l'accord incriminé était étranger à la convention collective conclue par les syndicats d'artistes-interprètes avec les sociétés de production et de diffusion qui les emploient et que, sans dénier à ces artistes la possibilité d'exercer leur droit de grève, le Conseil de la concurrence se trouvait compétent pour examiner si cet accord constituait, comme le soutenaient les plaignants, une " clause de boycott " au détriment d'entreprises tierces.

Au fond:

Considérant que les requérants concluent à l'annulation de la décision déférée en soutenant que l'accord incriminé ne pouvait constituer une entente prohibée au sens de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Qu'à cet effet ils prétendent tout d'abord que ce texte n'interdit que les actions concertées entre et à l'encontre d'entreprises auxquelles ne peut être assimilé un accord conclu à la demande des syndicats dans le cadre d'une négociation collective portant sur le taux de la rémunération de leurs membres ;

Mais considérant que la prohibition édictée par l'ordonnance ne se limite pas aux pratiques réunissant ou opposant des entreprises en situation de concurrence, mais qu'elle intéresse toutes formes de concertation, quels qu'en soient les auteurs et les victimes directes, dès lors qu'objectivement elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché; qu'en conséquence l'accord signé le 31 mai 1988 par les sociétés TF 1, Antenne 2, FR3, l'INA, l'USPA, Pathé-Cinéma et, au titre des syndicats d'artistes-interprètes, par le SFA CGT, le SYDAS CFDT, le SNLA FO et le SIA, est à examiner, en son ensemble et pour tous ses participants, au regard du texte susvisé;

Considérant que les requérants font valoir en second lieu que ledit accord n'avait pas pour but de fausser le jeu de la concurrence, mais au contraire d'imposer aux deux chaînes de télévision concernées les mêmes charges que celles auxquelles sont soumis les auteurs diffuseurs en ce qui concerne le salaire des artistes-interprètes ;

Mais considérant que les dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne visent pas à unifier les coûts des produits et services mais au contraire à proscrire toutes concertations, conventions ou coalitions qui tendent à faire obstacle à la fixation de leurs prix par le libre jeu du marché ; que, dès lors, l'intention alléguée par les auteurs de l'entente ne constitue pas une justification pertinente ;

Considérant que s'il a sans aucun doute été adopté pour contraindre les sociétés La Cinq et M 6 à engager les négociations aboutissant à la conclusion de la convention collective à laquelle elles s'étaient jusqu'alors dérobées, l'acte critiqué, qui interdit à ses signataires toutes cessions de droits d'exploitation sur des programmes préexistants, a momentanément exclu les deux chaînes de télévision concernées du marché des œuvres audiovisuelles destinées à la rediffusion ; que, de ce fait, il a nécessairement eu pour effet d'empêcher le jeu de la concurrence ;

Considérant qu'il est encore soutenu, en référence à l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, que l'accord sanctionné résulte de l'application de la loi du 3 juillet 1985, laquelle renvoie à une convention collective la rémunération des artistes-interprètes pour l'exploitation des œuvres auxquelles ils ont concouru et qu'il ne peut être reproché aux syndicats représentatifs de cette catégorie professionnelle de s'être opposés à la rediffusion d'émissions sur lesquelles ils ont des droits par des chaînes de télévision qui avaient refusé de négocier leur rétribution ;

Mais considérant que si l'article 19 de la loi du 3 juillet 1985 prévoit que, à défaut d'être prévu au contrat initial, le taux de rémunération des artistes-interprètes du fait de l'exploitation des œuvres audiovisuelles est notamment fixé par une convention collective, l'article 8-5 de celle qui a été signée le 31 mai 1988 dispose qu'en cas de cession de droits à un non-adhérent, la rémunération des artistes-interprètes, éventuellement payée par le cédant, est fixée par son article 8-4-1 ;

Qu'il s'ensuit que, le salaire des artistes-inteprètes dû en cas de transfert des droits d'exploitation d'une œuvre à un diffuseur non soumis à la convention collective étant néanmoins déterminé par celle-ci, les signataires de l'accord séparé ne sont pas fondés à soutenir que le refus de cession prévu par l'accord à l'encontre des sociétés La Cinq et M 6 était justifié par l'application de la loi du 3 juillet 1985 ;

Considérant que les requérants font enfin valoir que l'application de l'accord litigieux était limitée quant à sa durée à celle de la grève des artistes-interprètes à l'égard des sociétés La Cinq et M 6 et sa mise en œuvre justifiée par l'article 4-1 de la convention collective qui interdit aux sociétés de télévision d'éluder les effets d'un tel mouvement social en ayant recours à des rediffusions ;

Mais considérant que, même si toute nouvelle diffusion d'œuvres préexistantes donne lieu au paiement de salaires aux artistes-interprètes qui ont fourni des prestations lors de leur enregistrement, le refus de céder les droits d'exploitation sur ces œuvres auquel se sont ensemble engagées les sociétés qui en étaient détentrices n'est pas assimilable à une cessation concertée du travail de la part des artistes-interprètes ; que, dès lors qu'elle résulte d'une entente prohibée, cette interdiction de cession de droits ne peut être rendue licite par l'exercice du droit de grève auquel elle est prétendument rattachée et qu'en outre la clause susvisée de la convention collective par laquelle les organismes de télévision s'engagent à s'abstenir de programmer des rediffusions en cas de grève des artistes-interprètes n'est pas opposable aux sociétés La Cinq et M 6 qui n'en étaient pas signataires ;

Considérant qu'il s'ensuit que ni les dispositions de la loi du 3 juillet 1985 ni celles de la convention collective ne pouvant justifier l'accord incriminé, c'est à juste titre que le Conseil de la concurrence a constaté qu'il constituait une entente prohibée au sens de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans la mesure où il avait manifestement pour effet d'exclure temporairement les sociétés La Cinq et M 6 de l'accès du marché de programmes préexistants.

Considérant toutefois qu'eu égard aux circonstances particulières, précédemment exposées, dans lesquelles est intervenue la conclusion de cet accord, la mesure de publication ordonnée apparaît une sanction suffisante pour prévenir le renouvellement d'agissements similaires, sans qu'il soit nécessaire de maintenir les sanctions pécuniaires infligées à ses signataires ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Par ces motifs: Rejette les recours formés contre la décision n° 90-D-21 rendue le 26 juin 1990 par le Conseil de la concurrence en ce qu'elle a constaté que l'accord conclu le 31 mars 1988 entre les syndicats d'artistes-interprètes SFA, SYDAS, SNLA et SIA, d'une part, les sociétés TF 1, Antenne 2 et FR 3, l'INA, I'USPA et la société Pathé-Cinéma, d'autre part, constituait une entente prohibée tendant à exclure les sociétés La Cinq et M 6 de l'accès au marché des programmes préexistants ; et ordonné la publication de cette disposition ; annule les sanctions pécuniaires infligées aux signataires de cet accord ; ordonne à leurs frais in solidum dans les mêmes journaux que ceux visés à la décision déférée la publication d'un encart ainsi libellé: " Par arrêt du 6 mars 1991, La Cour d'appel de Paris a, sans maintenir les sanctions pécuniaires infligées par la décision 90-D-21 du Conseil de la concurrence en date du 26 juin 1990, rejeté les recours en annulation de cette décision qui a constaté que l'accord conclu le 31 mai 1988 entre les syndicats d'artistes-interprètes SFA, SYDAS, SNLA et SIA, d'une part, les sociétés TF 1, Antenne 2 et FR 3, l'INA, l'USPA et la société Pathé-Cinéma, d'autre part, constituait une entente prohibée tendant à exclure temporairement les sociétés La Cinq et M 6 de l'accès au marché des programmes préexistants. " ; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Laisse les dépens à la charge des requérants.