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Décisions

Conseil Conc., 10 avril 1991, n° 91-D-18

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Secteur de l'enseignement de la conduite automobile dans le Sud de la France

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, en commission permanente sur le rapport oral de M. J. Zachmann, dans sa séance du 10 avril 1991 où siégeaient, M. P. Laurent, président ; MM. Béteille, Pineau, vice-présidents.

Conseil Conc. n° 91-D-18

10 avril 1991

Le Conseil de la concurrence,

Vu la lettre enregistrée le 2 août 1987 sous le numéro F 102 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de la Privatisation, a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques d'entente dans le secteur de l'enseignement de la conduite des véhicules dans les départements des Bouches-duRhône, des Alpes-Maritimes, de Vaucluse, de la Haute-Corse, de l'Aude, de la Lozère et de l'Hérault ; Vu les ordonnances n° 451483 et n° 45-1484 du 30 juin 1945 modifiées, respectivement relatives aux prix et à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée relative à la liberté des prix et de la concurrence, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application ; Vu la procédure engagée le 29 novembre 1989 en application des dispositions de l'article 22 de l'ordonnance n° 86-1243 ; Vu les observations présentées par les parties et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du gouvernement et les parties ayant demandé à présenter des observations, entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :

I. CONSTATATIONS

A. Le marché

Les candidats à l'examen du permis de conduire recherchent habituellement des auto-écoles proches de leur domicile ou de leur lieu de travail ; les candidats lycéens ou étudiants fréquentent volontiers des autoécoles proches de leurs établissements d'enseignement. Toutefois, eu égard à la dépense entraînée, il n'est pas rare que la clientèle soit attirée par des auto-écoles relativement plus éloignées dès lors qu'elles proposent des conditions de prix attractives. La zone de chalandise des auto-écoles est par ailleurs d'autant plus vaste que, occasionnellement, elles cherchent leurs clients à domicile. Enfin, en proposant à prix forfaitaire un nombre donné - voire illimité d'heures pour l'apprentissage du code de la route, un volume horaire pour l'apprentissage de la pratique de la conduite et un nombre variable de présentations aux épreuves du code et de la conduite, certaines auto-écoles contribuent à accroître la mobilité des clientèles entre les localités et les quartiers des villes.

Alors que, jusqu'à une époque récente, les marchés pouvaient être délimités selon un critère simple de distance, désormais les stratégies commerciales des prestataires accroissent la capillarité des marchés locaux pour les rendre connexes les uns aux autres.

Dans l'espèce, l'enquête administrative a porté sur un certain nombre de départements du Sud de la France.

B. Structure et réglementation de la profession

La profession des enseignants de la conduite automobile est exercée en règle générale par des exploitants individuels qui s'y consacrent à titre exclusif. Même si des associations comme " l'Ecole de conduite françaiseCER " ont été constituées, le secteur a conservé un caractère artisanal.

L'exploitation d'une auto-école est subordonnée à un agrément délivré par la préfecture du département après enquête administrative et à la possession du certificat d'aptitude professionnelle et pédagogique.

Antérieurement à 1986, les auto-écoles ont été soumises à différents systèmes de réglementation des prix. De 1982 à 1984, les hausses tarifaires autorisées étaient limitées en valeur relative. En 1985, selon les prestations, les hausses autorisées ont été exprimées en valeur absolue ou en valeur relative. L'engagement de lutte contre l'inflation n° 86-114 relatif à l'enseignement de la conduite prévoyait que les cours pratiques pouvaient être, sur la base des prix pratiqués au 31 décembre 1985, majorés de 1,50 F pour le permis B et 1,70 p. 100 pour les autres permis. Pour " toutes formes de préparation au permis proposées aux élèves pour un tarif global ou forfaitaire ", les prix hors taxes pouvaient être augmentés de 0,70 p. 100. Enfin, les prix de toutes les autres prestations pouvaient être déterminés sous la responsabilité de l'exploitant.

Un avenant à l'engagement de lutte contre l'inflation n° 86-164 a libéré le 13 octobre 1986 les prix de l'ensemble des prestations de services proposées par les auto-écoles.

C. Les pratiques constatées

1° Les interventions d'organisations syndicales

La Chambre syndicale nationale du commerce et de la réparation automobile (CSNCRA) a organisé par le moyen de l'association de formation " Anper " des stages de formation intitulés " amélioration de la rentabilité " et ayant notamment pour objet la définition et le calcul des prix de revient du prix de l'heure d'enseignement de la conduite. Ont été diffusés durant ces stages des documents comportant d'une part une liste des charges directes et indirectes devant être intégrées dans le calcul du prix de revient des prestations, d'autre part des exemples chiffrés de clefs de répartition types de ces charges.

Il ressort des procès-verbaux d'audition de MM. Barbusse, Fontaine et Labrid-Mazet que ces méthodes de calcul de prix de revient ont été exposées lors de réunions organisées, notamment par la CSNCRA, dans les départements de l'Hérault, de Vaucluse et de l'Aude et ont été utilisées lors de concertations sur les prix.

L'Union nationale intersyndicale des enseignants de la conduite (Unidec), qui regroupe notamment les centres d'éducation et de sécurité routière (CESR), la confédération syndicale patronale des enseignants de la conduite des véhicules à moteur (CSPECVM) et les autoécoles de conduite française (ECF) -, a adressé aux présidents et représentants de ses syndicats départementaux (union départementale des enseignants de la conduite - UDEC) une note relative aux tarifs de l'heure pratique du permis B (pièce n° 80). Elle y invitait les exploitants à " reconstituer une marge qui avait disparu depuis longtemps " et précisait : " la bonne solution semble de ce fait être une augmentation immédiate de 5 à 10 p. 100 selon que vous êtes au-dessus ou au-dessous du prix moyen de référence ". La note citait les prix de référence hors taxes de 99 F et de 105 F, soit 117 F et 125 F taxes comprises.

Dès le lendemain de la libération des prix de la profession, l'Association de défense de l'enseignement de la conduite automobile (ADECA) a diffusé une note (pièce n° 7) à ses responsables les informant de la mise en œuvre de " réunions départementales regroupant toutes les organisations professionnelles afin d'envisager en commun ses modalités d'application sur le terrain et éviter ainsi de trop gros écarts de prix entre les collègues ".

2° Les pratiques des entreprises

Secteur d'Istres

a) Fixation du tarif du " forfait apprentissage anticipé de la conduite "

L'apprentissage anticipé de la conduite est une prestation destinée à des jeunes âgés de plus de seize ans qui, après avoir acquis une formation pratique et théorique, peuvent approfondir l'expérience de la route en conduisant accompagnés d'un adulte.

Les auto-écoles candidates à la commercialisation de cette nouvelle prestation devaient préalablement procéder au dépôt d'une proposition type de forfait auprès de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Quatre auto-écoles exerçant dans le secteur d'Istres ont remis un tel tarif : Europ (M. Cazals), Francis (M. Wojszycki), CFCI (M. Cez), Gaby (M. Jobard), tandis que l'auto-école Paulette n'a pas respecté l'obligation de dépôt du tarif.

Les faits suivants ressortent des pièces du dossier : une identité complète entre la proposition de l'auto-école Europ et celle de l'auto-école CFCI tant dans la décomposition du forfait que dans son prix total de 4372 F (pièces n° 13 et n° 14) ; un prix très voisin de 4370 F pour l'auto-école Francis avec des sous-postes aux prix très voisins ou identiques (pièce n° 15) ; un document saisi à l'auto-école Gaby (pièce n° 19) montre que son exploitant, M. Jobard, a déterminé son forfait (pièce n° 16) à partir d'une photocopie de la proposition de l'auto-école CFCI (pièce n° 14).

b) Pratiques relatives à l'implantation de deux nouvelles auto-écoles

A la suite de l'implantation de deux nouvelles autoécoles (7/7 et Bettina) dans le secteur, les auto-écoles précédemment installées à Istres (CFCI, Europ, Francis, Gaby et Paulette) ont adressé des plaintes aux autorités administratives. L'une, du 30 janvier 1986 (pièce n° 8), adressée au préfet des Bouches-du-Rhône, reprochait à l'auto-école 7/7 " sa politique de prix suicidaire " et le non-respect " de règles établies par la profession ".

Une autre plainte, du 3 octobre 1986 (pièce no 9), adressée à diverses autorités administratives, était dirigée contre l'auto-école Bettina-Garage du Grand-Fos, accusée de ne pas respecter les conditions réglementaires.

Les exploitants des auto-écoles 7/7 et Bettina ont déclaré sur procès-verbal d'audition avoir fait l'objet de pressions et de menaces anonymes dirigées contre leur pratique commerciale de prix bas (pièces n° 25 et 26).

c) Prix d'enseignement de l'heure de conduite :

L'enquête a révélé que les prix étaient identiques pour les auto-écoles CFCI, Europ, Francis, Gaby et Paulette des prix d'enseignement de l'heure de conduite permis B, tant avant la libération des prix qu'après.

Secteur de Marseille

a) Fixation du " forfait d'apprentissage anticipé de la conduite "

Il résulte des procès-verbaux d'audition de M. Valenti (La Blancarde, pièce n° 35), Frangioni (Conduite 2000, pièce n° 36), AIIin (Calypso, pièce n° 39), Mayan (Concorde, pièce n° 38), Hamot (Gouffé, pièce n° 34), Mlle Rebont (Rallye, pièce n° 54) qu'ont eu lieu des entrevues et des réunions visant à l'élaboration d'un tarif forfaitaire commun.

Ont participé aux réunions : d'après M. Hamot, les autoécoles de La Blancarde, Calypso, Concorde, Gouffé, Arcen-Ciel, Conduite 2000, Mick, des Virages ; d'après Mlle Rebont, les auto-écoles Calypso, Conduite 2000, Rallye, des Virages, Sport ; d'après M. Mayan, les auto-écoles Concorde, de La Blancarde, Mick, Foch, Rallye, des Virages, Conduite 2000.

Les propositions types de forfaits déposées par les auto-écoles de La Blancarde, Ecole de conduite 2000,

Concorde, Arc-en-Ciel, Gouffé (pièces n° 28 à 33) sont identiques dans leur montant (3 985 F) et dans leur décomposition. Des propositions de tarifs similaires ont été déposées par les auto-écoles Concorde et des Virages (pièce n° 56).

b) Prix de l'heure d'enseignement de conduite

Des déclarations concordantes de M. Holam (auto-école Michel, pièce n° 42), de Mlle Troin (auto-école La Brunette, pièce n° 43), de M. Guilard (auto-école Le Guide, pièce n° 52) il ressort qu'à la suite de la libération des prix, des réunions ont été consacrées, à la fin de décembre 1986 et au début de 1987, à la détermination des tarifs.

Sont cités comme participants : à une réunion du 22 décembre 1986, les auto-écoles Saint-Just (Mme Janzac),

La Brunette (Mlle Troin), Le Guide (M. Guilard), Edelweiss (M. Labrousse), La Rose des vents (M. Boyer) ; à une " entrevue informelle lors d'un examen du code début janvier 1987 ", les auto-écoles La Rose des vents (M. Boyer), Saint-Just (Mme Janzac), Château Gaubert (M. Dislaire), Michel (M. Holam) ; à une réunion du début de janvier 1987, les auto-écoles Saint-Just (Mme Janzaci, Chris'Bel (Mme Garcia), Sandra (M. Bertolini), Michel (M. Holam).

Il ressort également de ces déclarations qu'au cours des réunions le prix commun de 110 F à compter du 1er janvier 1987 a été adopté. L'instruction a établi que les auto-écoles Le Guide, Corot, Michel, Edelweiss, Dislaire, Saint-Just et La Rose des vents ont appliqué le prix de 110 F à la date du 1er janvier ou à des dates voisines.

Secteur de Nice et de Menton

Une réunion a été organisée fin octobre 1986 ayant pour objet l'adoption d'un nouveau tarif à appliquer à compter du mois de novembre 1986. Y ont participé " la plupart des représentants des auto-écoles de Menton, Roquebrune, Cap-Martin et Beausoleil " (pièce n° 66). Les auto-écoles Jean (pièce n° 59), Capd'Ail (pièce n° 60), Floréal (pièce n° 63), André (pièce n° 62), Marcel (pièce n° 57), Linas-Montlhéry (pièce n° 58), Stop (pièce n° 66) ont reconnu avoir assisté à cette réunion. En outre il est fait état de la présence des auto-écoles Michel et Claude dans les pièces n° 59 et 60.

Le tarif adopté a été dactylographié et reprographié pour être remis aux participants puis communiqué à d'autres auto-écoles. Il a été saisi sous cette forme aux auto-écoles Jean, Cap-d'Ail, André, Marcel, Linas-Montlhéry, Claude et sous une forme manuscrite à l'auto-école Floréal dont l'exploitant a reconnu l'avoir recopié.

L'auto-école Dani-Dan a arrêté le 1er décembre 1986 un tarif dans lequel le prix de l'heure de conduite (permis B) et du code de la route sont pratiquement identiques à ceux du " tarif type ".

Secteur d'Avignon et de Carpentras

Plusieurs réunions ont été organisées à l'initiative de M. Trouvé et de M. Ferrando, respectivement président et vice-président départementaux de la Chambre syndicale nationale du commerce et de la réparation automobile (CSNCRA) (pièces n° 86, 87, 91, 99, 100, 101, 102 et 104).

M. Trouvé a affirmé qu'il s'était borné à exposer un mode de calcul du prix de revient de l'heure d'enseignement. M. Nauroy a produit (pièce n° 169) la photocopie de la lettre de convocation établie sur papier à en-tête de la CSNCRA et qui porte notamment comme ordre du jour " la liberté des prix ".

Des déclarations de MM. Chafer et Masson (pièces n° 87 et 102) il résulte que M. Trouvé a conclu son exposé en indiquant une fourchette d'augmentation du prix de l'heure de 5 à 10 F.

Des réunions similaires ont été organisées par M.Ferrando, vice-président départemental de la CSNCRA. Selon M. Fontaine (auto-école Permis de Provence, pièce n° 98), " M. Ferrando nous a donné une circulaire sur laquelle figurait un modèle de calcul de tarifs : base de prix + pourcentage = nouveau tarif à mettre en pratique ".

L'analyse des tarifs appliqués à la suite de la libération des prix montre qu'à l'exception des autoécoles Palayer et Eysseric, les autres entreprises ayant fait l'objet de l'enquête ont adopté des prix identiques ou voisins pour l'heure d'enseignement de la conduite (permis B).

Secteur de Haute-Corse

Il ressort des pièces du dossier qu'au cours d'une réunion tenue le 15 novembre 1986 le prix de l'heure de conduite a été arrêté entre un certain nombre de participants à 107 F. La présence à cette réunion des auto-écoles Team, des Résidences, Ecole de conduite insulaire et Ecole de conduite bastiaise a été reconnue par leurs dirigeants (pièces n° 105 à 107, 110 et 170). Celle de l'auto-école Traversa est mentionnée dans la pièce n° 107 et n'a pas été contestée, non plus que celle de l'auto-école Saint-Christophe. Seuls ont expressément déclaré avoir été absents les dirigeants de l'auto-école Saint-Pierre (pièces n° 109 et 176).

Une deuxième réunion s'est tenue le 10 janvier 1987, selon les déclarations convergentes de MM. Chadefaux (pièce n° 111), Michel (pièce n° 108), Angelotti (pièce n° 112), Milleliri (pièce n° 114), Léonetti et Bourgeois (pièce n° 176). Mais cette réunion n'a pas abouti (pièces n° 111 et 112).

L'analyse des tarifs pratiqués après la libération des prix montre que les auto-écoles Ecole de conduite bastiaise, Ecole de conduite insulaire, des Résidences et Saint-Christophe ont adopté le prix de 107 F, alors que les auto-écoles Feu vert, Team, Micheli et Milleliri ont fixé leur prix à des niveaux inférieurs (de 94,50 à 100 F).

Secteur de la Lozère

Il ressort des déclarations de M. Sanson (président de l'UDEC-Lozère, pièce n° 125), Mme Valat (auto-école Valat, pièce n° 116), M. Manella (auto-école Manella, pièce n° 118), M. Collange (auto-école Collange, pièce n° 121), M. Chanial (auto-école Seguin, pièce n° 123) qu'une réunion a été organisée par l'UNIDEC au début de novembre 1986.

Cette réunion a porté notamment sur la libération des prix. Il ressort de la pièce n° 116 que si la question de l'harmonisation des prix a été abordée " il a été prévu que chacun devait établir ses prix en fonction de ses coûts de revient ". En fait les tarifs pratiqués après la libération des prix se sont échelonnés de 115 F à 120 F.

Secteur de Carcassonne

Selon la déclaration de Mme Minard (auto-école Minard, pièce n° 126), des réunions ont eu lieu aux auto-écoles Labrid-Mazet et Ecole de conduite club, portant sur la liberté des prix. M. Seguy (auto-école Seguy, pièce n° 128) a indiqué que M. Labrid-Mazet, président départemental de la CSNCRA réunit les professionnels environ deux fois par an et les " informe des hausses auxquelles nous pouvons prétendre ". En fait, le tarif pratiqué après la libération des prix a été de 115 F.

II. SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRéCéDENT, LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Sur la procédure

Considérant qu'en réponse à la proposition du président du Conseil de la concurrence de soumettre le dossier à l'examen de la commission permanente du conseil, les auto-écoles CECA SARL, le Dauphin, du Triolet, de la Poste et Sète Conduite, toutes exerçant leur activité dans le département de l'Hérault, ont demandé le renvoi de l'affaire devant une autre formation du conseil ; qu'il convient dès lors de disjoindre de la présente décision l'ensemble des faits relatifs au département de l'Hérault consignés dans la notification de griefs ;

Considérant que, si les statuts de la Chambre syndicale nationale du commerce et de la réparation automobile confèrent la plus large autonomie à ses organisations départementales, celles-ci n'ont pas la personnalité morale ; que dès lors les pratiques à caractère anticoncurrentiel dont elles prennent l'initiative sont imputables à la CSNCRA ;

Considérant que Mme Mondet, gérant de la SARL auto-école Claude fait valoir que M. Claude Mondet, décédé depuis lors, était l'exploitant de l'auto-école Claude à l'époque des faits ; que cependant les griefs ayant été notifiés à cette entreprise, il appartenait à sa gérante d'y répondre ;

Considérant qu'aucun grief n'a été notifié à Mme Nathalie Delbecchi, épouse Cafaxe, exploitante de l'autoécole Jean depuis le 1er janvier 1989 ; que l'auto-école Jean doit être mise hors de cause ;

Sur les marchés

Considérant que les auto-écoles Saint-Just, Jean-Claude, Marcel, Dani-Dan, André, Stop, Michel, Malignon, Valat, Manella-Conduite sans frontières, Gaiffier, Pelat, Attrazic, SCP Volant 2000 et l'UNIDEC estiment que le jeu de la concurrence dans le secteur des auto-écoles se trouve limité géographiquement sous l'effet du comportement de la clientèle qui limite son choix à l'exploitant le plus proche de son domicile ou de son lieu de travail, c'est-à-dire à l'échelon d'un arrondissement ou d'une commune ; qu'elles soutiennent qu'au-delà de ce cadre géographique limité elles ne sont pas en concurrence entre elles ;

Considérant cependant qu'il résulte du dossier que des concertations sur les prix entre auto-écoles au niveau départemental ont été préconisées par certaines organisations professionnelles afin de permettre une reconstitution des marges ; que des exploitants d'autoécoles ont eu pour objectif d'obtenir l'accord de leurs confrères opérant dans les mêmes zones géographiques sur des augmentations concertées de tarifs ; que certains exploitants d'auto-écoles se sont plaints des prix qu'ils estimaient anormalement bas pratiqués par d'autres entreprises ; quel'ensemble de ces faits établit suffisamment que les aires de chalandise des auto-écoles s'interpénètrent de telle sorte que des ententes de prix entre elles au niveau local ou départemental peuvent avoir pour effet de limiter la concurrence ;

En ce qui concerne les pratiques des organisations syndicales :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les responsables de la CSNCRA du Vaucluse ont organisé, en octobre 1986, des réunions au cours desquelles ils ont donné des consignes de prix pour ce qui est de l'heure de conduite (pièces n° 87 et 102) ; qu'en outre, l'ADECA a diffusé le 14 octobre 1986 une circulaire aux termes de laquelle elle rappelait à ses adhérents " que la libération des prix doit faire l'objet de réunions départementales regroupant toutes les organisations professionnelles afin (...) d'éviter de trop grands écarts de prix " ; qu'à la suite de l'envoi de cette circulaire, le représentant de l'ADECA dans le département de la Haute-Corse a organisé le 15 novembre 1986 une réunion de concertation sur les prix entre les membres de cette association ; qu'enfin l'UNIDEC a adressé, en octobre 1986, à ses responsables départementaux une circulaire aux termes de laquelle " la liberté des prix est enfin l'opportunité à saisir pour reconstituer une marge qui avait disparu depuis longtemps (...) " ; qu'elle recommandait " une augmentation immédiate de 5 à 10 p. 100 selon que vous êtes audessus ou au-dessous du prix moyen de référence " ;

Considérant que l'UNIDEC fait valoir qu'elle a organisé des réunions avec " l'absence de volonté de constituer une entente (...) et pour objectif d'empêcher une trop forte hausse des prix ", et a " joué son rôle syndical " en limitant son intervention à l'indication de pourcentage de hausse ;

Considérant cependant quetant la diffusion d'informations visant à intervenir sur la fixation des prix que l'organisation de réunions ayant pour objet de déterminer en commun des prix, en vue de limiter le libre exercice de la concurrence, excèdent le rôle traditionnel d'une organisation syndicale et constituent, de la part de la CSNCRA, de I'ADECA et de I'UNIDEC une infraction aux dispositions de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 ;

En ce qui concerne le forfait d'apprentissage anticipé de la conduite :

Considérant, en premier lieu, que quatre auto-écoles d'Istres, auto-école Gaby, CFCI, Francis et Europ, ont, en mai 1986, déposé simultanément des tarifs identiques pour cette prestation non encore commercialisée ; qu'il ressort des pièces n° 9, 16, 13 et 14 que ces autoécoles se sont concertées pour l'établissement de leur tarif ;

Considérant qu'à l'inverse, l'auto-école Paulette, malgré l'obligation qui lui en était faite par la réglementation économique alors en vigueur, n'a pas procédé à un dépôt de tarif ; que la reconstitution de ce tarif par les enquêteurs ne suffit pas à établir sa participation à une concertation sur les prix ; qu'elle doit être mise hors de cause ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de retenir de grief à l'encontre de l'auto-école CFCM, qui n'a pas déposé de tarif ;

Considérant, en second lieu, que les pièces n° 34, 38, 54, 28 à 33 apportent la preuve que les auto-écoles La Blancarde, Concorde, Conduite 2000, Rallye, des Virages et Gouffé exerçant à Marseille se sont réunies en mai et juin 1986 pour élaborer en commun la composition et le prix de cette prestation et ont déposé des tarifs identiques ou extrêmement voisins du prix de 3 985 F ;

Considérant que MM. Valenti (auto-école La Blancarde) et Frangioni (auto-école de Conduite 2000) nient toute participation à une concertation ; que MM. Valenti et Mayan (auto-école La Concorde) expliquent que leur action trouve son origine dans les consignes tarifaires qui leur auraient été données par le ministère de l'intérieur lors d'une journée d'information réunissant les auto-écoles du département ; que Mlle Rebont (auto école Rallye) affirme que les réunions contestées ont limité leur objet à des considérations techniques ; que M. Frangioni allègue que l'identité des tarifs résulte de l'application de la réglementation qui régit cette prestation ;

Mais considérant qu'aucune preuve n'est apportée sur les préconisations tarifaires imputées aux représentants du ministère de l'intérieur ; que, par ailleurs, l'instruction du 27 janvier 1987 relative à la mise en place de l'apprentissage anticipé de la conduite, si elle prévoit un nombre minimal d'heures d'enseignement, laisse au-delà de cette contrainte toute liberté à l'exploitant dans la composition et le nombre d'heures du forfait proposé et qu'ainsi elle ne saurait être la cause des identités constatées ;

Considérant que M. Mayan et M. Hamot (auto-école Gouffé) font valoir que, compte tenu du faible nombre d'autoécoles incriminées et du faible nombre de clients intéressés par cette prestation, il y a lieu de conclure à " l'inanité " du grief d'entente ;

Mais considérant quesont visées par les dispositions de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 les ententes ayant un objet anticoncurrentiel ou une potentialité d'atteinte à la concurrence quels qu'aient été leurs effets ; que, dès lors, il y a lieu d'imputer aux autoécoles La Blancarde, Concorde, Conduite 2000, Rallye, des Virages et Gouffé une infraction aux dispositions dudit article ;

Considérant, en revanche, que n'ont pas déposé de tarif les autoécoles Mick, Foch, Calypso et Arc-en-Ciel ; que, dans ces conditions, aucun grief ne peut être retenu à l'encontre de ces entreprises ;

En ce qui concerne le prix de l'heure d'enseignement de la conduite :

Considérant en premier lieu qu'il résulte de l'instruction que, dans le secteur de Marseille, l'auto-école Saint-Just a participé à trois réunions, l'auto-école Michel à deux réunions, l'auto-école Dislaire à une réunion au cours desquelles a été élaborée une entente sur les prixet qu'elles ont adopté les prix convenus ; qu'elles ont ainsi commis une infraction aux dispositions de l'article 50 de l'ordonnance de 1945 susvisée ;

Considérant en revanche qu'il ressort des pièces du dossier que les auto-écoles Rose des vents, Sandra, Le Guide n'ont pas adopté le tarif convenu et que les autoécoles Corot et Arc-en-ciel n'ont pas participé à la concertation ;

Considérant en deuxième lieu que,dans le secteur d'Istres, si les auto-écoles Gaby, CFCI, Francis et Europ ont effectivement aligné leurs tarifs, cette seule circonstance, en l'absence d'éléments établissant une concertation préalable, ne justifie pas le maintien d'un grief d'entente ; quel'entreprise CFCM n'a pas appliqué le tarif commun ;

Considérant par ailleurs que, dans ce même secteur, la signature de pétitions dont l'objet porte notamment sur une plainte contre des prix anormalement bas ne saurait à elle seule constituer la participation à une entente illicite ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief notifié ne saurait être maintenu à l'encontre des entreprises Gaby, CFCI, CFCM, Francis, Europ et Paulette ;

Considérant en troisième lieu que, dans les secteurs de Nice et de Menton, il résulte de l'instruction(pièce n° 66) qu'au cours d'une réunion tenue à la fin du mois d'octobre 1986 les auto-écoles Cap d'Ail, Floréal, la SARL André, la SARL Marcel, les auto-écoles Linas-Montlhéry, Michel et la SARL Claude ont adopté un tarif commun, l'ont diffusé et l'ont appliqué à compter du 1er novembre 1986 ; que ces faits sont constitutifs d'une entente anticoncurrentielle ;

Considérant, en revanche, que doivent être mises hors de cause d'une part l'auto-école Dani Dan qui n'a pas participé à la concertation, d'autre part l'auto-école Stop dont le siège est à Monaco et dont il n'est pas établi qu'elle ait eu une activité sur le territoire français ;

Considérant en quatrième lieu que, dans les secteurs d'Avignon et de Carpentras, s'il ressort du dossier qu'au cours de deux réunions tenues en octobre et décembre 1986 à Avignon MM. Trouvé et Ferrando, respectivement président et vice-président départementaux de la CSNCRA, ont indiqué des " fourchettes de prix ", il ne peut être considéré comme établi que se soit dégagé entre les participants à ces réunions un accord formel de volontés ; que la seule circonstance que certaines des autoécoles aient adopté par la suite des prix identiques ou très voisins, ne suffit pas à établir l'existence d'une entente ; que dès lors doivent être mises hors de cause les auto-écoles Trouvé, Brun, Mistral, Normani, Ecole de conduite des Princes, Palayer, Benoît, CCER, de la Pyramide, Pôle Position, Rey, Malignon, Bottegoni, Ferrando SARL, Rieupet, Broc, Victor, Mercier, Merino, Tallet, Camussi, Provence Permis, Jean-Pierre, Michel, Europe conduite stage, La Balance, ABC, Montlhéry, Contact ;

Considérant en cinquième lieu qu'en Haute-Corse il ressort des pièces du dossier que les auto-écoles des Résidences, Ecole de conduite insulaire, Ecole de conduite bastiaise et SaintChristophe ont participé à une réunion tenue le 15 novembre 1986 au cours de laquelle a été fixé le prix minimum de 107 F pour l'heure de conduite et avoir appliqué ce prix ; que dès lors, en agissant ainsi, elles ont participé à une action anticoncurrentielle ;

Considérant en revanche qu'il n'est pas établi qu'aient participé à cette entente les auto-écoles Traversa, du Nebbiu, Team, Micheli, CESR 20 SARL, Milleliri, Feu Vert, Saint-Pierre ;

Considérant en sixième lieu que, s'il ressort des pièces du dossier qu'au cours d'une réunion tenue au début du mois de novembre 1986 à Mende la " question de la libération des prix " a été abordée, la preuve de l'élaboration d'une entente anticoncurrentielle n'a pas été apportée, en dépit des parallélismes de prix constatés par la suite ;

Considérant, par ailleurs, que si M. Sanson a été l'objet d'une notification de griefs en sa qualité de président de l'UDEC-Lozère, c'est à bon droit qu'il ne lui a pas été notifié de grief en tant qu'exploitant d'auto-école, dès lors que cette entreprise n'assure que l'enseignement de la conduite des poids lourds ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que doivent être mises hors de cause les auto-écoles VA-LA, Manella, Gaiffier, Pelat, Attrazic, Collange, Gibert, Chantal, Delmas, SCE Volant 2000, Seguin, Elyane auto-école ;

Considérant en dernier lieu qu'il ne résulte pas de l'instruction que les réunions organisées à l'initiative de la CSNCRA entre les auto-écoles exerçant dans le secteur de Carcassonne aient abouti à une entente sur les prix ; que dès lors, en dépit du parallélisme des tarifs constaté par la suite, il ne peut être retenu de griefs de ce chef ; qu'en conséquence sont mises hors de cause les auto-écoles Labrid-Mazet, Marty, Seguy, Molina, Saint-Christophe (Castelnaudary), Raynaud, du Viguier et Ecole de conduite club ;

Considérant, en ce qui concerne l'ensemble des infractions relevées dans la présente décision, qu'aucun élément du dossier n'est de nature à justifier l'application de l'article 5-1 de l'ordonnance n° 451483 du 30 juin 1945 susvisée ;

Considérant que ces infractions sont également visées à l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 susvisée ; qu'il y a lieu dès lors, par application de l'article 13 du même texte, d'infliger, d'une part à la CSNCRA, à l'ADECA et à l'UNIDEC, en raison des consignes qu'elles ont diffusées, d'autre part aux auto-écoles Gaby, CFCI, Francis, Europ, La Blancarde, Concorde, Ecole de conduite 2000, Rallye, Auto-école des virages, Gouffé, Saint-Just, Michel (Marseille), Dislaire, Capd'Ail, Floréal, SARL André, SARL Marcel, LinasMontlhéry, Michel (Menton), SARL Claude, Auto-école des résidences, Auto-école de conduite bastiaise, Auto-école de conduite insulaire, Auto-école Saint-Christophe (Folelli), des sanctions pécuniaires calculées dans les conditions et limites fixées à l'article 53 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 susvisée ; que le premier acte interruptif de la prescription étant daté du 29 janvier 1987, le plafond de la sanction applicable à chacune des entreprises susmentionnées doit être déterminé en fonction de son chiffre d'affaires de l'exercice 1986 ; qu'en l'espèce, les informations fournies sur ces chiffres d'affaires par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, versées au dossier ouvert à la communication, n'ont pas été contestées,

Décide :

Article unique - Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

100 000 F à la Chambre syndicale du commerce et de la réparation automobile (CSNCRA) ;

30 000 F à l'Association de défense de l'enseignement de la conduite automobile (ADECA) ;

10 000 F à l'Union nationale intersyndicale des enseignants de la conduite (UNIDEC) ;

3 000 F à M. Claude Jobard (auto-école Gaby) ;

10 000 F à M. Didier Cez (auto-école CFCI ;

9 000 F à M. Eugène Wojszycki (auto-école Francis) ;

6 000 F à M. Daniel Cazals (auto-école Europ) ;

3 000 F à M. Valenti (auto-école La Blancarde) ;

4 000 F à M. Philippe Mayan (auto-école Concorde) ;

3 000 F à M. J-C. Frangioni (auto-école de Conduite 2000) ;

1 800 F à Mlle Colette Rebout (auto-école Rallye) ;

1 800 F à M. Foch (auto-école des Virages) ;

2 000 F à M. Robert Hamot (auto-école Gouffé) ;

3 000 F à Mme Irène Janzac (auto-école Saint-Just) ;

10 000 F à M. Michel Ho-Lam (auto-école Michel à Marseille) ;

4 000 F à M. Daniel Dislaire (auto-école Dislaire) ;

1 800 F à Mlle Amaranto (auto-école Cap-d'Ail) ;

2 000 F à M. Favre (auto-école Floréal) ;

4 000 F à la SARL André ;

10 000 F à la SARL Marcel ;

3 000 F à M. Pierre Bolet (auto-école Linas-Monthléry) ;

500 F à M. Michel Scaramanga (auto-école Michel à Menton) ;

6 000 F à la SARL Claude ;

4 000 F à M. Guadagnini (auto-école des résidences) ;

10 000 F à M. Guy Bozzano (auto-école de conduite bastiaise) ;

10 000 F à M. Joseph Graziani (Ecole de conduite insulaire) ;

6 000 F à la SARL Auto-école Saint-Christophe, à Folelli, Haute-Corse.