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Décisions

Conseil Conc., 18 septembre 1990, n° 90-D-31

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques mises en œuvre par l'Office d'annonces

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré en section sur le rapport de M. Jean-René Bourhis, dans sa séance du 18 septembre 1990 où siégeaient : MM. Pineau, vice-président, Cabut, Cortesse, Gaillard, Sargos, , Urbain, membres.

Conseil Conc. n° 90-D-31

18 septembre 1990

Le Conseil de la concurrence,

Vu la lettre du 9 décembre 1987 enregistrée sous le numéro C 124 (F 130) par laquelle le président de l'Association pour la défense des annonceurs (ci-après ADACP) a saisi le Conseil de la concurrence de diverses pratiques mises en œuvre par l'Office d'annonces (ci-après ODA) sur le marché de la publicité dans les pages jaunes des annuaires officiels des P et T ; Vu l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par l'ODA ; Vu les observations présentées par le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace ; Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et le représentant de l'ODA entendus, le représentant de l'ADACP ayant été régulièrement convoqué à la séance ; Retient les constatations (I) et adopte la décision (II) ci-après exposées :

I. CONSTATATIONS

A. Le cadre réglementaire de l'édition et de la diffusion des annuaires officiels

1. Le pouvoir de l'administration des postes et télécommunications en matière d'édition et d'utilisation des annuaires

Au moment des faits, c'est l'administration des postes et télécommunications qui, conformément aux dispositions de l'article R. 10 du code des postes et télécommunications (livre II, titre 1er, chapitre 1er, intitulé " Le monopole des télécommunications "), délivrait l'autorisation de publier des documents destinés à la vente ou à la distribution gratuite, comportant des listes d'abonnés au téléphone, aux adresses télégraphiques enregistrées ou au service télex. Le texte précisait en outre que " ladite autorisation peut être assortie (...) de conditions visant notamment les mesures à prendre pour éviter toute ressemblance de présentation entre les documents officiels et la publication autorisée ".

L'article précité qui a été modifié par le décret n° 89-738 du 12 octobre 1989 précise, dans sa rédaction actuelle, que " la publication de listes d'abonnés (...) est soumise à autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications " et limite les possibilités de refus aux seuls cas où la publication envisagée porterait atteinte au bon fonctionnement du service public des télécommunications ou des réseaux privés autorisés. La mesure visant à éviter toute confusion entre les publications qui font l'objet d'autorisations et les annuaires officiels a été maintenue dans le nouveau texte.

L'ODA a fait valoir que des autorisations étaient fréquemment données à des entreprises pour éditer des annuaires sur le fondement des dispositions précitées et versé au dossier plusieurs annuaires locaux ou professionnels tels " l'Indispensable 1989 " qui concerne l'agglomération grenobloise ou l'annuaire Ravet Anceau qui serait distribué, de façon sélective, dans la région Nord-Pas-de-Calais, annuaires qui sont présentés par I'ODA comme des concurrents de l'annuaire officiel (pages jaunes) des P et T.

2. Le droit des abonnés à figurer dans les listes officielles d'abonnés ou annuaires officiels et d'obtenir de tels documents.

Il résulte des dispositions de l'article D. 359 du code des P et T que " Le nom des titulaires des postes d'abonnement principaux permanents est, sauf demande contraire des intéressés, inscrit sur une ou des listes périodiques ou sur des suppléments destinés à tenir ces listes à jour ".

Tout abonné au téléphone figure donc, sauf opposition formelle de sa part, dans la liste alphabétique de l'annuaire, à savoir les " pages blanches " des annuaires. Les professionnels abonnés au téléphone figurent, en outre, dans la liste par professions, à savoir les " pages jaunes " des annuaires. En sus de la mention obligatoire et gratuite, les professionnels ont la possibilité de demander qu'un encart publicitaire payant soit réservé à leur entreprise dans les pages jaunes.

En application des dispositions du décret n° 79-440 du 7 juin 1979 modifié (article D. 359 du code des postes et télécommunications) : " Le titulaire d'un abonnement principal ordinaire et permanent a droit (...) à un exemplaire de la liste d'abonnés sur laquelle il figure, ainsi qu'à ses suppléments éventuels. Il peut, lorsque le service des télécommunications en a fait la proposition, demander qu'au lieu et place de cette liste soit mis à sa disposition un terminal permettant l'accès à l'annuaire téléphonique sous forme électronique. "

Les abonnés dotés d'un annuaire électronique (" Minitel ") ne peuvent recevoir gratuitement que la liste professionnelle, c'est-à-dire les " pages jaunes " de l'annuaire. Cette faculté, qui avait temporairement été supprimée, a été rétablie en 1987 à la suite de nombreuses réclamations d'usagers.

L'article L. 37 du code des postes et télécommunications prévoit que : " La responsabilité de l'Etat peut être engagée à raison des services de communication sur le réseau des télécommunications en cas de faute lourde. Il en est de même en ce qui concerne les erreurs ou omissions qui pourraient se produire dans la rédaction, la distribution ou la transmission des listes d'abonnés. " Le Conseil d'Etat a récemment considéré (ministre des postes et télécommunications contre SCP du laboratoire d'analyses médicales Armand et Painsonneau, 12 mai 1989) que le remplacement du nom d'un laboratoire par celui d'un laboratoire concurrent ainsi que l'omission d'une adresse étaient, malgré la diffusion d'un rectificatif, constitutifs d'une faute lourde pouvant engager la responsabilité de l'Etat.

3. Le cadre juridique de la commercialisation des espaces publicitaires dans les annuaires officiels

Il n'existe aucun texte législatif ou réglementaire organisant la vente d'espaces publicitaires dans les annuaires officiels des abonnés au téléphone. Celle-ci constitue un prolongement ancien de l'activité principale d'édition des annuaires, laquelle relève de la mission de service public incombant à l'administration des télécommunications.

B. L'évolution des relations entre la Direction générale des télécommunications (DGT) et l'Agence Havas

1. La convention du 30 juin 1967

La coopération entre l'administration des P et T et l'Agence Havas concerne l'exploitation de la publicité dans les annuaires officiels ; elle a été instaurée par une convention en date du 4 février 1946, modifiée par avenants.

Une convention signée le 30 juin 1967 a défini, sur de nouvelles bases, les relations entre les parties. Le dernier avenant, au moment de l'instruction, était daté du 30 juin 1987 et prévoyait une prorogation de cette convention jusqu'au 31 décembre 2003.

L'Agence Havas est chargée par les P et T et, sous leur contrôle, d'assurer, pour une période fixée initialement à douze années renouvelables par tacite reconduction par périodes triennales, " la prospection de la publicité à insérer dans les différents annuaires officiels édités par ou pour le compte de la DGT " ainsi que " la conception technique de cette publicité, son exécution et sa mise en page ".

L'édition, l'impression et la répartition des annuaires sont à la charge de l'administration, selon la périodicité et les règles fixées par le code des postes et télécommunications.

La convention stipule en outre que l'Agence Havas est ducroire et qu'elle est autorisée à rétrocéder l'exploitation de la régie à sa filiale, l'Office d'annonces.

En contrepartie de ses services, l'Agence Havas perçoit une rémunération en pourcentage calculée sur le montant des espaces publicitaires facturés.

2. L'évolution récente des relations entre la DGT et l'Agence Havas

Au moment des faits, l'Agence Havas contrôlait l'ODA Conformément aux stipulations de l'avenant n° 5 à la convention du 30 juin 1967 susmentionnée, l'Agence Havas a cédé une partie de sa participation à la Cogécom (filiale de l'Etat, DGT), de manière à ce que le capital soit réparti entre elles en parts égales de 43,8 p. 100.

3. L'activité de I'ODA

L'ODA est le régisseur exclusif de la publicité dans les annuaires officiels des P et T. Il commercialise des espaces publicitaires dans les annuaires auprès des entreprises, soit directement par ses représentants, soit indirectement par l'intermédiaire des agences de publicité. Au cours de l'année 1987, les ventés de publicité de la société se sont élevées à 2 391 169 211 F, chiffre en progression de 27,4 p. 100 par rapport à celui de l'exercice précédent.

En application de l'article 1er de la convention du 30 juin 1967, l'administration des postes et télécommunications fixe les tarifs de la publicité applicables à chaque édition.

Le ministre a précisé dans ses observations que " les modalités des rapports entre l'ODA et les intermédiaires, les agences de publicité en particulier, ne sont pas du ressort de l'administration des P et T ". L'instruction a, par ailleurs, établi que la DGT n'intervient pas dans la rédaction des conditions générales de vente de l'ODA, qui restent de la stricte compétence du régisseur.

C. Le marché de la publicité dans les pages jaunes des annuaires

1. Le service proposé

Les espaces publicitaires dans les pages jaunes se présentent sous la forme d'encarts insérés dans les différentes rubriques de l'annuaire, de dimensions variables et de présentation standardisée. Les augmentations de tarifs observées particulièrement au cours des années 1986 et 1987 résulteraient notamment du rattrapage décidé à la sortie de la période de blocage des prix, de l'augmentation importante du nombre d'abonnés et de l'amélioration du support (introduction, de la quadrichromie en couverture et sur soixante-quatre pages).

2. Le marché en cause

La diffusion très large des pages jaunes auprès des abonnés qui, en les consultant, recherchent des fournisseurs ou des prestataires de services, explique le développement exceptionnel des ventes d'espaces publicitaires de ce support. Document de référence concernant la quasi-totalité des offreurs de biens et services d'une aire géographique définie regroupés dans quelque 2400 rubriques professionnelles, ce support est caractérisé par l'étendue de sa diffusion ainsi que par le lien implicite qu'il crée dans l'esprit des usagers entre la publicité et l'information obligatoire des listes exhaustives d'abonnés. Ainsi, le caractère quasi officiel du support le distingue, dans l'esprit du public, des annuaires privés, gratuits ou payants, qui sont généralement soit des annuaires réservés à certaines professions, soit des annuaires très localisés géographiquement.

D. Les pratiques dénoncées par I'ADACP

1. La clause relative à l'indemnisation des annonceurs en cas d'inexécution du contrat

Une clause insérée dans les conditions générales de vente de l'ODA des éditions 1984 et 1985 stipulait que " Toutes erreurs ou omissions ne peuvent entraîner la résiliation du présent engagement. Elles peuvent donner droit seulement à réduction proportionnelle. "

Cette clause a été modifiée comme suit dans les éditions 1986, 1987 et 1988 : " Toute erreur ou omission dans le corps d'une annonce, d'une part, ou toute non-parution, d'autre part, ne peut entraîner la résiliation du présent engagement. L'erreur ou l'omission peut donner droit seulement à réduction proportionnelle ; la non-parution peut, au plus, conduire à une réparation égale au montant de l'annonce publicitaire non parue. "

Cette modification a fait suite à un arrêt de la Cour de cassation en date du 17 janvier 1984, arrêt dans lequel la cour avait considéré que la non-publication, par l'ODA de deux encarts publicitaires dans les annuaires de la Drôme et de Vaucluse, devait s'analyser comme étant l'inexécution totale de ses obligations contractuelles par le régisseur exclusif des P et T, cette omission étant assimilable à une faute lourde et de nature à écarter l'application de la clause limitative de responsabilité qui figurait dans les conditions générales de vente de l'ODA au moment des faits.

L'ODA a fait valoir que cette clause se retrouve " dans les éditions de tous les concurrents de l'ODA, parfois même à des conditions plus restrictives ".

2. La suppression du commissionnement des agences de publicité la première année

Dans sa lettre de saisine, I'ADACP a indiqué qu'" afin de privilégier son propre service commercial et par là même de dissuader les agences commerciales d'intervenir dans sa " chasse gardée ", l'ODA a décidé unilatéralement en 1984 de ne plus consentir pour la première année une commission aux agences de publicité qui lui donneraient un ordre d'insertion pour le compte d'un client qui figure déjà dans les pages jaunes de l'annuaire ".

Les faits n'ont pas été contestés par l'ODA qui a expliqué sa décision par le fait que, dans l'hypothèse envisagée, l'agence de publicité se limite à reprendre à son compte un ordre qui " en tout état de cause, serait parvenu à 1'ODA par le canai précédent ". Elle se réfère par ailleurs à l'avis relatif au secteur de la publicité rendu les 15 et .18 décembre 1987 par le Conseil de la concurrence. Dans cet avis (BOCCRF n° 34 du 26 décembre 1987), le conseil avait estimé que " sans entrer dans le fond du débat, il n'est pas certain que la pratique du non-commissionnement soit, par elle-même, génératrice d'atteinte à la concurrence ".

II. A LA LUMIÈRE DES CONSTATATIONS QUI PRÉCÈDENT, LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE

En ce qui concerne fa définition du marché et la position de l'ODA sur celui-ci :

Considérant que l'ODA allègue que les espaces publicitaires des pages jaunes de l'annuaire téléphonique sont substituables aux autres espaces publicitaires proposés à l'échelon local comme les annuaires privés, les guides locaux, les journaux gratuits, ou les prospectus distribués dans les boîtes aux lettres ;

Mais considérant qu'il n'est pas contesté que les usagers du téléphone ont, dans leur ensemble, exprimé leur attachement spécifique à ce support, en demandant le rétablissement, en 1987, de la faculté, pour les possesseurs d'un annuaire électronique, d'obtenir les pages jaunes de leur département ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient l'ODA, les annonces publicitaires figurant dans les annuaires officiels des P et T, constituent une activité associée à celle du service public de l'information des usagers empruntant partiellement au prestige de ce même service public; que, la mise à disposition de ce support à titre gratuit, dans le département, auprès de tous les foyers disposant d'une ligne téléphonique, et le caractère de document de référence qu'il revêt en raison de l'exhaustivité des informations, classées par rubriques professionnelles, confèrent aux encarts publicitaires un taux de pénétration non comparable à ceux des autres supports et une efficacité particulière pour certains types d'annonceurs locaux ; que, les annuaires professionnels privés publiés dans certaines communes, ne disposant pas de l'ensemble des caractéristiques ci-dessus mentionnées, ne peuvent être considérés comme étant substituables aux pages jaunes de l'annuaire; qu'il existe ainsi un marché spécifique de la publicité dans l'annuaire officiel des abonnés au téléphone, marché sur lequel tous les annonceurs de chaque département sont confrontés à un offreur unique ; qu'il résulte de ce qui précède que l'ODA détient un monopole sur le marché des espaces publicitaires dans les pages jaunes des annuaires officiels des usagers du téléphone ;

En ce qui concerne les pratiques de l'ODA

Sur la clause insérée dans les conditions de vente de l'ODA :

Considérant que l'ODA soutient qu'à supposer que la commercialisation des espaces publicitaires dans les annuaires officiels constitue un marché spécifique, l'application de la clause critiquée, si elle peut entraîner une inégalité de fait entre les clients, ne peut nullement s'interpréter comme une pratique discriminatoire constitutive d'un abus de position dominante de la part de l'ODA ; que, de plus, le régisseur exclusif des P et T fait valoir que des clauses comparables ou plus contraignantes figurent dans des annuaires publiés par des entreprises " concurrentes " de l'ODA ;

Mais considérant qu'il résulte d'une jurisprudence constante (cf. Cour de cassation, chambre commerciale - 17 janvier 1984 : ODA contre M. Canet - 9 mai 1990 : ODA contre Leroux) que la non-publication par l'ODA d'une annonce publicitaire, ou de ses éléments substantiels, dans les pages jaunes de l'annuaire peut constituer une faute lourde de nature à écarter l'application de la clause limitative de responsabilité incluse dans ses conditions générales de vente; que, dès lors, l'introduction de cette clause dans son libellé actuel qui méconnaît délibérément une jurisprudence établie favorable aux droits de la clientèle revêt un caractère injustifié manifeste ayant pour objet de dissuader les annonceurs de demander réparation dans les cas d'inexécution de la prestation; qu'en effet, cette clause imposée par le détenteur du monopole, de manière " quasi administrative " et " peu contraignante " pour lui (cf. arrêt du 30 juin 1988 de la cour d'appel de Versailles confirmé par l'arrêt de la Cour de cassation en date du 9 mai 1990 précité), sans négociation possible de la part des signataires qui ne disposent pas d'un instrument médiatique concurrent et équivalent, peut détourner les entreprises victimes d'une défaillance de l'ODA d'une action en réparation auprès des juridictions compétentes ; que le maintien de la clause en tant qu'elle concerne la non-publication d'une annonce peut avoir pour effet de permettre à I'ODA de limiter artificiellement le risque financier qu'il encourt en cas de non-exécution d'un élément essentiel du contrat signé avec un annonceur et de lui permettre de limiter les coûts associés au contrôle de la qualité de ses prestations ; que dans les faits, il résulte des précisions apportées par l'ODA lors de la séance que, s'il prévoit pour l'avenir de faire signer aux annonceurs des bons à tirer, cette procédure de contrôle de la qualité de sa prestation n'a, dans le passé, été mise en œuvre que pour les annonceurs importants ;

Considérant par ailleurs que l'ODA n'est pas fondé à soutenir, comme il l'a fait en séance, que l'article L. 37 du code des postes et télécommunications justifierait l'extension de la clause limitative de sa responsabilité vis-à-vis des annonceurs ; qu'en effet, d'une part, la limitation de la responsabilité de l'Etat prévue dans cet article ne s'applique pas en cas de faute lourde et, d'autre part, elle ne concerne que les erreurs ou omissions survenant dans les listes d'abonnés et non pas celles survenant dans les encarts publicitaires seuls en cause ici ; qu'en outre, le régisseur exclusif des P et T ne saurait, en tout état de cause, tirer argument d'une limitation de la responsabilité de l'Etat en cas de défaillance de celui-ci dans ses obligations de service public d'édition des annuaires pour imposer à ses cocontractants une clause limitant sa propre responsabilité au seul remboursement en cas de non-parution des annonces publicitaires dont la bonne exécution lui incombe de par le contrat de régie exclusive, obligation en contrepartie de laquelle il perçoit une rémunération négociée entre l'Agence Havas et les P et T ;

Considérant que l'ODA ne saurait utilement se prévaloir du fait que des éditeurs d'annuaires privés auraient inséré dans leurs propres conditions générales de vente des clauses limitatives de responsabilité identiques à la sienne qu'en effet, ces entreprises interviennent sur des marchés différents de celui sur lequel intervient l'ODA, seul marché en cause dans la présente affaire ; qu'en outre, à supposer même que ces éditeurs disposent d'une position dominante sur les marchés sur lesquels ils interviennent et que les pratiques soient prohibées par les dispositions du titre III de l'ordonnance, une telle circonstance ne serait pas de nature à justifier les pratiques 4e l'ODA sur le marché des espaces publicitaires dans les pages jaunes ;

Considérant qu'il n'est pas allégué que l'extension de la clause limitative de responsabilité examinée est nécessaire pour assurer un progrès économique, notamment en accroissant la productivité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la pratique en cause tombe sous le coup des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 sans qu'aucun fait la justifie au regard de l'article 10 de ce texte et, pour les faits antérieurs à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er décembre 1986, sous le coup de l'article 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945, sans pouvoir être justifiée au regard de son article 51 ;

Sur la suppression de la commission aux agences de publicité a l'occasion de la reprise d'un client " en portefeuille " de l'ODA :

Considérant que la pratique consistant, de la part de l'ODA, à ne pas verser, la première année et pour des ordres déjà " en portefeuille ", la commission habituellement consentie aux agences de publicité ne constitue pas, en elle-même, une atteinte à la concurrence dans la mesure où les agences perçoivent la commission en cause dès la première année pour les nouveaux clients et, dès la seconde, pour les clients déjà " en portefeuille " ; que cette pratique qui ne s'oppose pas, dans les circonstances de l'espèce, à l'accès des agences de publicité au marché considéré n'est pas constitutive d'un abus au sens des dispositions des articles 50 et 8 des ordonnances précitées ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre susvisée,

Décide :

Art. 1er. : - Il est enjoint à l'ODA de supprimer dans la clause limitative de responsabilité les dispositions relatives à la non-parution de la publicité.

Art. 2. : - Il est infligé à l'ODA une sanction pécuniaire de 2,5 millions de francs.

Art. 3. - Dans un délai maximum de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, le texte intégral de celle-ci, sera publié, aux frais de l'ODA, sous le titre " Décision du Conseil de la concurrence relative à des pratiques relevées sur le marché de la publicité dans les pages jaunes des annuaires officiels des abonnés au téléphone ", dans les publications suivantes : Les Echos, Stratégies, Métiers.