Livv
Décisions

Conseil Conc., 7 juillet 1993, n° 93-D-30

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Situation de la concurrence dans le domaine des prestations de services en matière d'urbanisme

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport de M. Henri Courivaud, par MM. Barbeau, président, Jenny, vice-président, MM. Blaise, Robin, Sloan, Thion, Urbain, membres.

Conseil Conc. n° 93-D-30

7 juillet 1993

Le Conseil de la concurrence (section III),

Vu la lettre enregistrée le 31 janvier 1991 sous le numéro F. 382, par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, a saisi le Conseil de la concurrence de la situation de la concurrence dans le domaine des prestations de services en matière d'urbanisme ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application ; Vu le code de l'urbanisme ; Vu les observations présentées par le ministre de l'équipement, du logement et des transports ; Vu les observations présentées par la Société française des urbanistes (SFU), la Société centrale pour l'équipement du territoire (SCET) et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la SFU et de la SCET entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :

I. - CONSTATATIONS

A. - Le secteur en cause

L'article L. 110 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction qui résulte de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, définit l'urbanisme comme une activité consistant à "aménager le cadre de vie, gérer le sol de façon économe, assurer la protection des milieux naturels et des paysages et promouvoir l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ". Un urbaniste est donc un professionnel qui intervient dans le cadre de l'activité ci-dessus définie.

En complément de cette définition et précisant la finalité des documents d'urbanisme, l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme, dans la rédaction résultant de la loi précitée, indique qu'ils servent à " déterminer les conditions permettant, d'une part, de préserver les activités agricoles, de protéger les espaces forestiers, les sites et les paysages, et, d'autre part, de prévoir suffisamment de zones réservées aux activités économiques et d'intérêt général et de terrains constructibles pour la satisfaction des besoins présents et futurs en matière de logement ".

A ses débuts, la profession était composée essentiellement par les architectes qui considéraient l'urbanisme comme une extension de leur domaine professionnel, le mot " urbaniste " étant longtemps utilisé comme qualificatif du mot " architecte ". La profession d'urbaniste ne fait pas l'objet d'une réglementation. Dès lors, cette appellation n'est pas protégée à l'inverse de ce qui est prévu pour les architectes, notamment par la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture.

L'aménagement des villes dans leur ensemble, des quartiers urbains ou périurbains ou des immeubles, a suscité une forte demande en terme de prestations d'urbanisme et a justifié une intervention croissante des pouvoirs publics pour satisfaire une telle demande. Après l'adoption des lois de décentralisation, notamment la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 et la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, l'intervention des collectivités locales s'est progressivement substituée à celle de l'Etat en ce qui concerne l'urbanisme, sans que cette évolution se traduise par un désengagement de l'initiative publique. En conséquence, la profession exerce principalement ses missions dans le secteur public et se recrute majoritairement parmi les fonctionnaires, les agents contractuels ou bien parmi un personnel bénéficiant d'un statut spécifique défini par les organismes dépendant des collectivités publiques (sociétés d'économie mixte d'intérêt local, sociétés dépendant directement ou indirectement à la fois des communes ou de leurs groupements et de la Caisse des dépôts et consignations). Cette imbrication a été perçue par les urbanistes, selon la SFU, comme un obstacle à la détermination de leur expertise en termes financiers (calcul du chiffre d'affaires, évaluation des charges liées à leurs activités) ; ceux-ci ont en outre reproché aux architectes de revendiquer l'exclusivité de l'exercice de la profession d'urbaniste et, pour consolider cette prépondérance sur ce marché face à l'Etat et aux collectivités, de sous-évaluer le prix de leurs prestations de services en matière d'urbanisme.

Si l'on peut se fonder sur une estimation établie par les professionnels eux-mêmes recensant 3 000 à 3 500 urbanistes à part entière, l'hétérogénéité des situations (plus ou moins grande dépendance des urbanistes vis-à-vis des administrations, plus ou moins grande sensibilité des conditions d'exercice de la profession aux pratiques suivies par les architectes ou les ingénieurs-conseils ou encore les géomètres-experts, diversité extrême des qualifications et des formations dispensées ...) conduit à distinguer, en ce qui concerne les prestations de services en matière d'urbanisme, un marché où interviennent non seulement les urbanistes déclarés tels mais également les architectes et les services techniques de l'Etat, des collectivités locales et de leurs groupements.

B. - Les pratiques relevées

Selon les déclarations de ses représentants, la Société française des urbanistes (SFU) est la plus importante des organisations nationales regroupant les urbanistes et reconnue comme représentative dans la profession par le ministère de l'équipement, du logement et des transports. Dans son rôle de défense de la profession, la SFU s'est efforcée au cours des années 1980 d'agir dans deux directions :

- la définition du " métier de l'urbaniste" en tant que tel par la mise en œuvre de formations spécialisées, à l'instar de celles qui régissent les autres professions intervenant sur le marché ;

- la définition d'un mode de fixation de la rémunération des urbanistes exerçant à titre libéral, servant de référence aux professionnels dans leurs interventions, que ce soit auprès du secteur public ou du secteur privé, et leur permettant d'être reconnus comme des experts à part entière dans leur spécialité, et comme de véritables chefs d'entreprise auprès de leurs interlocuteurs principaux, les collectivités locales et leurs groupements.

S'agissant des initiatives menées par la SFU concernant la rémunération des urbanistes, il convient de constater que :

- jusqu'en 1981, le ministère chargé de l'urbanisme fixait périodiquement par circulaires DAFU/1800 des barèmes de rémunération permettant, d'une part, aux administrations et aux organismes qui en dépendent de forfaitiser le montant des études qu'ils lançaient auprès des urbanistes, d'autre part, à ces derniers, d'établir leurs devis en fonction de l'enveloppe financière ainsi forfaitisée et du temps nécessaire pour réaliser l'étude.

Cependant, à partir de 1975, ces circulaires avaient fait prévaloir le principe suivant lequel la détermination du prix de revient devait être l'un des fondements de la passation des marchés d'études d'urbanisme. La dernière circulaire du ministère chargé de l'urbanisme (DAFU/1800 du 8 mai 1981) précisait ainsi que les devis prévisionnels présentés par les urbanistes devaient être établis à partir de la comptabilité analytique de leur entreprise et que, si l'administration définissait un certain nombre d'éléments constitutifs de prix sous la forme d'un barème intégré dans un " cahier de clauses comptables ", ces dispositions avaient désormais un caractère indicatif.

La SFU, en l'absence à partir de 1981 de directives administratives concernant la rémunération des urbanistes, a décidé en 1986 de s'assurer le concours de la Société centrale pour l'équipement du territoire (SCET), filiale de la Caisse des dépôts et consignations, chargée notamment de superviser l'activité des agences d'urbanisme de cet établissement public. Cette concertation s'est traduite par la signature, le 7 juillet 1986, d'un accord cadre d'une durée illimitée, précisant que seront recommandées aux sociétés d'urbanistes adhérentes du réseau de la SCET des méthodes d'évaluation des prestations de services et les conditions de rémunération des professionnels. En application de cet accord, les responsables de la SCET et de la SFU ont défini un " guide de méthodologie ". Certains éléments de ce guide ont été repris dans un barème de rémunération des urbanistes destiné à être intégré dans les annuaires édités par la SFU à l'attention des professionnels.

S'agissant de l'annuaire 1989 de la SFU, ce barème figure dans le chapitre intitulé " Méthode d'évaluation des missions de l'urbaniste " et comporte les éléments suivants :

- le cadre commun des missions de l'urbaniste ; - le contenu des tâches et des missions ;

- les méthodes d'établissement du devis ;

- les autres modalités (révision des contrats, paiement des honoraires, intérêts moratoires).

Pour ce qui concerne l'établissement des devis, la " méthode " s'inspire des principes fixés par le ministère chargé de l'urbanisme dans sa circulaire du 8 mai 1981 susmentionnée, mais elle en diffère de façon substantielle sur les points suivants :

- les moyennes de rémunérations mensuelles brutes et de coûts unitaires mensuels sont mentionnées en unités d'intervention, alors que les éléments de coûts directs étaient indiqués dans la circulaire de 1981 avec un plancher et un plafond ;

- les coûts spécifiques (" rémunérations et frais de personnel affectables ") contiennent des éléments de barème plus détaillés que ceux présentés par la circulaire de 1981 ;

- il n'est mentionné nulle part dans la " méthode" un modèle de calcul des rémunérations se référant aux prix de revient constatés directement par l'urbaniste ou à partir de sa comptabilité analytique, contrairement à ce que recommandait la circulaire de 1981 ;

- toutefois, dans cette " méthode" est posé le principe de libre fixation de la marge bénéficiaire, alors que la circulaire susmentionnée définissait un tarif pour la fixation de cette marge.

En outre, sont présentées comme ayant valeur de normes certaines dispositions du barème défini par la SFU. Il s'agit notamment :

- des modes d'évaluation des missions qui sont définies en détail et pour lesquelles une rémunération plancher est déterminée en fonction du nombre d'hectares ou d'habitants ;

- des méthodes d'établissement du devis et des frais de voyage ;

- des coefficients multiplicateurs appliqués pour la détermination des coûts complémentaires ;

- des autres modalités touchant aux révisions et au paiement des honoraires.

La SFU a fait paraître cette " méthode de calcul " dans l'annuaire de 1989 qu'elle a diffusé à tous ses adhérents et aux urbanistes stagiaires. Elle a dressé cet annuaire au Conseil national et aux conseils régionaux de l'ordre des architectes, ainsi qu'à toutes les revues susceptibles de publier de tels barèmes, notamment Le Moniteur et Urbanisme.

II. - SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL

Sur le marché de référence :

Considérant qu'il n'est pas contesté que les prestations de services en matière d'urbanisme s'effectuent sur un marché caractérisé par une demande émanant de l'Etat, des collectivités territoriales et des sociétés qui relèvent d'eux et par une offre émanant d'architectes, d'agents publics appartenant notamment aux services techniques de l'Etat et des collectivités locales, de salariés relevant de la SCET ou de sociétés d'économie mixte, de salariés du secteur privé et de chefs d'entreprise exerçant à titre libéral ;

Considérant que le fait que les contrats donnant lieu à des prestations de services en matière d'urbanisme sont le plus souvent élaborés par des personnes publiques ne saurait faire obstacle à l'application des règles de la concurrence; qu'en effet, selon les dispositions de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 " Les règles définies à la présente ordonnance s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait des personnes publiques " ;

Sur les pratiques dénoncées :

En ce qui concerne la SFU :

Considérant que, s'il est normal pour une organisation professionnelle de fournir à ses membres une aide à la gestion, celle-ci ne doit, de quelque manière que ce soit, exercer d'influence directe ou indirecte sur le libre jeu de la concurrence à l'intérieur de la profession concernée, notamment en prenant la forme d'un schéma de calcul de rémunération qui comporte des éléments destinés à s'imposer à toutes les entreprises ;

Considérant que la " méthode d'évaluation des missions de l'urbaniste ", insérée dans l'annuaire 1989 de la SFU et réalisée par cette organisation professionnelle, comporte des indications permettant à des professionnels de calculer leur rémunération sans tenir compte des coûts de revient réels; qu'en outre ladite " méthode " se fonde sur des formules mathématiques ou des forfaits permettant de déterminer de façon automatique et uniforme le prix de certaines prestations; qu'elle présente dès lors un caractère normatif et est, de ce fait, de nature à dissuader les urbanistes de procéder à la fixation autonome de leurs prix;

Considérant qu'en adressant les barèmes de rémunération au Conseil national et aux conseils régionaux de l'ordre des architectes, ainsi qu'à toutes les revues susceptibles de les publier, la SFU leur a délibérément donné une diffusion très large pour en augmenter la portée ;

Considérant qu'à le supposer établi le fait que les pouvoirs publics, en l'occurrence les services du ministère de l'équipement, du logement et des transports, auraient, à l'époque des faits, donné des encouragements à 'élaboration par les professionnels eux-mêmes d'une " méthode d'évaluation des missions de l'urbaniste " comprenant des barèmes de rémunération, ne saurait exonérer la SFU de sa responsabilité dans la mise en œuvre de cette pratique; qu'en tout état de cause, cette organisation professionnelle n'a reçu aucune habilitation pour exercer en ce domaine et sous quelque forme que ce soit une mission de service public ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que l'élaboration et la diffusion par la SFU des barèmes de rémunération intégrés dans la " méthode d'évaluation des missions de l'urbaniste " ont eu un objet anticoncurrentiel; que, par ailleurs, il n'a pas été contesté au cours des débats que la SCET a communiqué ces barèmes à l'ensemble des sociétés, organismes et agences qui la composent ou qui en dépendent ; que, ces barèmes ont pu, de ce fait, avoir un effet anticoncurrentiel; que, dès lors, ils tombent sous le coup des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne la SCET :

Considérant qu'il ressort du procès-verbal d'audition du président et du vice-président de la SFU, réalisé le 16 septembre 1991 : " Après les lois de décentralisation, la SFU (...) est entrée en relation avec la SCET, société de services, filiale de la Caisse des dépôts, chargée de conseiller les sociétés d'équipement en matière d'aménagement du territoire. Dans le cadre de ses fonctions à la SCET, M. Lenoir était responsable de l'animation d'un groupe d'agences d'urbanisme et responsable du développement urbain. C'est à ce titre qu'en liaison avec la SFU il a élaboré la méthode d'évaluation des missions d'urbanisme. Les travaux entrepris ont permis, en l'absence d'instructions de la part de l'Etat, de définir un guide de méthodologie permettant à la profession, dans ses relations avec les collectivités locales et les sociétés d'économie mixte, de présenter clairement et de définir la nature de ses prestations et un mode de calcul pour leurs rémunérations. Ce guide a été élaboré et mentionné pour la première fois dans l'annuaire 1986 de la SFU, amélioré et complété les années suivantes, 1987, 1988, 1989 ".

Considérant que l' " accord-cadre " du 7 juillet 1986 susmentionné stipule qu'il a pour objet de définir les missions de l'urbaniste et de préciser les méthodes d'évaluation des coûts de cette activité ; qu'il résulte des pièces du dossier que cette " méthode " a été recommandée et diffusée aux sociétés, organismes et agences relevant du groupe de la SCET ;

Considérant que la SCET, en élaborant et en signant cet " accord cadre " a participé aux activités de la SFU dans son rôle d'organisation professionnelle; que l'annuaire 1989 de la SFU mentionne que : " la méthode de calcul a été mise au point conjointement par la SCET et la SFU, (...) [qu'un] protocole d'accord sur l'application de ce mode de calcul a été signé en juillet 1986 par le directeur de la SCET et par le président de la SFU " ; que le protocole d'accord ainsi mentionné est bien l'" accord cadre " signé par la SCET et la SFU le 7 juillet 1986 et dont les dispositions principales ont été rappelées précédemment ;

Considérant que c'est donc en vain que la SCET affirme qu'étant une société commerciale, elle n'a pas été officiellement investie d'une mission dévolue normalement aux organisations professionnelles, à l'instar de la SFU, et qu'elle n'a pas pu de ce fait prêter son concours à la mise en œuvre de la pratique anticoncurrentielle reprochée à cette dernière ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que d'une part, la SCET s'est concertée avec la SFU pour élaborer les dispositions susmentionnées de la " méthode d'évaluation des missions de l'urbaniste "; que d'autre part, elle a diffusé et contribué à la mise en œuvre de ladite méthode; que ces comportements constituent des pratiques anticoncurrentielles tombant sous le coup de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Sur la sanction :

Considérant que, aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 susvisée, applicable en l'espèce dès lors que les faits ayant donné lieu aux griefs ci-dessus retenus se sont produits et se sont poursuivis après l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er décembre 1986. " Le Conseil de la concurrence ... peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. 100 du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise le maximum est de dix millions de francs " ;

Considérant que les pratiques constatées ont empêché le libre jeu de la concurrence par les prix sur les prestations en matière d'urbanisme ; que l'importance du dommage causé à l'économie doit s'apprécier au regard de la spécificité du marché en cause, marqué par une forte présence des services de l'Etat, des collectivités locales et des organismes qui en dépendent à côté d'urbanistes relevant uniquement du secteur privé ;

Considérant qu'en ce qui concerne la gravité des faits reprochés, le fait pour le secteur de l'urbanisme d'avoir été longuement réglementé par l'Etat ne saurait faire échapper les pratiques retenues aux dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 susvisée ;

Considérant toutefois qu'il résulte des pièces du dossier que, par lettre du 28 juin 1991, la SFU a demandé à ses délégués régionaux de surseoir à toute évocation orale ou écrite de la " méthode d'évaluation " susmentionnée et qu'elle a, par la suite, suspendu toute démarche de diffusion de ladite méthode, dans l'attente des résultats de la présente saisine du Conseil de la concurrence par le ministre chargé de l'économie ; que, dans l'annuaire 1992-1993 de la SFU, intitulé " missions des urbanistes ", il est mentionné un avertissement libellé comme suit " l'annuaire 92-93 ne comporte plus les méthodes d'évaluation des missions d'urbanisme. En effet, le ministère des finances, en vertu de l'ordonnance du 1er décembre 1986, exige que les devis soient établis en fonction des pratiques et de la comptabilité analytique de chaque organisme ".

Considérant que le chiffre d'affaires hors taxes de la SCET pour l'année 1991 s'est élevé à 563 033 799,46 F, dont 183 081 000 F au titre des honoraires d'urbanisme, et que le montant des cotisations perçues par la SFU auprès de ses adhérents s'est élevé à 442 407 F en 1991, derniers exercices connus ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à la SFU de ne plus élaborer ni diffuser de barèmes relatifs à la rémunération de prestations en matière d'urbanisme et de lui infliger une sanction pécuniaire de 100 000 F ;

Considérant, en ce qui concerne la SCET, qu'il convient de tenir compte de sa responsabilité dans l'élaboration et dans la diffusion des barèmes de rémunération incriminés en raison de son rôle, en sa qualité de filiale de la Caisse des dépôts et consignations, sur le marché en cause ; qu'il y a lieu de lui enjoindre de ne plus participer à l'élaboration de tels barèmes et de lui infliger une sanction pécuniaire de 1 000 000 F,

Décide :

Article 1er. II est enjoint à la Société française des urbanistes de ne plus élaborer ni diffuser de barèmes relatifs à la rémunération des prestations en matière d'urbanisme.

Article 2. Il est enjoint à la Société centrale pour l'équipement du territoire de ne plus participer à l'élaboration et à la diffusion de barèmes relatifs à la rémunération des prestations en matière d'urbanisme.

Article 3. Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

- 100 000 F à la Société française des urbanistes ;

- 1 000 000 F à la Société centrale pour l'équipement du territoire.