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Décisions

Conseil Conc., 10 juin 1997, n° 97-D-45

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques mises en œuvre par le Conseil national de l'Ordre des architectes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de Mme Annick Biolley-Coornaert, par M. Barbeau, président, M. Cortesse, vice-président, , M. Jenny, vice-président.

Conseil Conc. n° 97-D-45

10 juin 1997

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 28 décembre 1993 sous le numéro F725, par laquelle le ministre de l'Economie et des Finances a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par le Conseil national de l'Ordre des architectes ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, modifiée ; Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée ; Vu le décret n° 73-207 du 28 février 1973 relatif aux conditions de rémunération des missions d'ingénierie et d'architecture remplies pour le compte des collectivités publiques par des prestataires de droit privé ; Vu le décret n° 80-217 du 20 mars 1980 portant code des devoirs professionnels des architectes ; Vu les observations présentées par le Conseil national de l'Ordre des architectes et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et le représentant du Conseil national de l'Ordre des architectes entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :

I- CONSTATATIONS

A- La profession d'architecte

1. Une profession réglementée :

La loi sur l'architecture n° 77-2 du 3 janvier 1977, en reconnaissant à la création architecturale un caractère d'intérêt public (article 1er), a imposé à toute personne désirant entreprendre des travaux soumis à une autorisation de construire de faire appel à un architecte pour établir le projet architectural (article 3).

Toutefois des dérogations sont prévues (article 4) pour :

- les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier, pour elles-mêmes, une construction de faible importance dont les caractéristiques, et notamment la surface maximale n'excède pas 170 mètres carrés pour une construction à usage autre qu'agricole et 800 mètres carrés pour une construction agricole ( décret n° 77-190 du 3 mars 1977 devenu article R. 421-1-2 du Code de l'urbanisme) ;

- les travaux soumis au permis de construire ou à autorisation, qui concernent exclusivement l'aménagement et l'équipement des espaces intérieurs des constructions et des vitrines commerciales ou qui sont limités à des reprises n'entraînant pas de modifications visibles de l'extérieur.

L'architecte bénéficie donc d'un monopole restreint portant exclusivement sur les projets architecturaux pour les surfaces excédant celles ci-dessus définies. Il est dès lors en concurrence avec les autres maîtres d'œuvre pour les surfaces inférieures à ces seuils et pour la direction des travaux.

Les missions de l'architecte sont définies par l'article 2 du Code des devoirs professionnels des architectes qui dispose que :

"La vocation de l'architecte est de participer à tout ce qui concerne l'acte de bâtir et l'aménagement de l'espace ; d'une manière générale, il exerce la fonction de maître d'œuvre.

Outre l'établissement du projet architectural, l'architecte peut participer notamment aux missions suivantes :

- aménagement et urbanisme, y compris élaboration de plans ;

- lotissement ;

- élaboration de programmes ;

- préparation des missions nécessaires à l'exécution des avant projets ; consultation des entreprises, préparation des marchés d'entreprises, coordination et direction des travaux ;

- assistance aux maîtres d'ouvrage ;

- conseil et expertise ;

- enseignement".

La profession d'architecte ne peut être exercée que par les personnes physiques inscrites à un tableau régional d'architecture (article 9 de la loi du 3 janvier 1977). L'inscription confère le droit d'exercer sur l'ensemble du territoire national.

Cette profession s'exerce principalement à titre individuel sous forme libérale (72 % de la profession en 1994). Cependant, le législateur a également prévu trois autres modes d'exercice de cette activité :

- en qualité d'associé d'une société d'architecture (12,5 % en 1994) ;

- en qualité de fonctionnaire ou d'agent public (3,3 % en 1994) ;

- en qualité de salarié d'organismes d'études exerçant exclusivement leurs activités pour le compte de l'Etat ou des collectivités dans le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme, d'un architecte ou d'une société d'architecture, d'une personne physique ou morale de droit privé édifiant des constructions pour son propre et exclusif usage, ou d'une société d'intérêt collectif agricole d'habitat rural (12,2 % en 1994).

Enfin, l'ensemble des architectes constitue l'Ordre des Architectes (article 21 titre IV de la loi du 3 janvier 1977), dont l'organisation repose sur une structure à deux niveaux :

- les conseils régionaux chargés de procéder à l'inscription des architectes à l'Ordre, après avoir vérifié qu'ils remplissent les conditions requises par la loi (article 23) ;

- le Conseil national chargé de coordonner l'action des conseils régionaux et de contribuer à leur information (article 25).

2. La rémunération des architectes :

Les architectes peuvent être rémunérés pour leurs prestations selon quatre modes distincts :

- au pourcentage, la somme versée par le maître d'ouvrage étant proportionnée au montant final des travaux ;

- selon un forfait, déterminé avant le début des travaux en valeur absolue ;

- à la vacation, le montant étant fixé entre les parties ;

- au déboursé, lorsque les frais réels s'ajoutent au prix de la vacation.

Les rémunérations au pourcentage et au forfait sont les plus couramment pratiquées.

Il faut cependant distinguer deux régimes de rémunération distincts, selon que la prestation s'effectue pour le compte d'un maître d'ouvrage public (40 % du chiffre d'affaires de la profession aujourd'hui contre 60 % dans les années 1980) ou pour celui d'un maître d'ouvrage privé.

Dans le premier cas, depuis l'entrée en vigueur du décret du 28 février 1973 relatif aux conditions de rémunération des missions d'ingénierie et d'architecture remplies pour le compte des collectivités publiques par des prestataires de droit privé, le principe est une rémunération forfaitaire a priori en fonction d'un "coût d'objectif" définitif, du contenu de la mission et de la complexité de la réalisation (article 5). En outre, ce texte prévoit la définition par arrêtés de barèmes pour la rémunération des missions normalisées (article 8).

A la suite de l'intervention de la loi de décentralisation de 1982, la rémunération de la maîtrise d'ouvrage publique a fait l'objet d'une modification par la loi du 12 juillet 1985. Ce texte introduit par son article 9 le principe d'une rémunération forfaitaire fixée contractuellement, sur la base des trois critères antérieurement retenus (étendue de la mission, degré de complexité, coût prévisionnel des travaux). Le décret n° 93­1268 du 29 novembre 1993, pris pour l'application de la loi du 12 juillet 1985 et relatif aux missions de maîtrise d'œuvre confiées par des maîtres d'œuvre publics à des prestataires de droit privé a abrogé le décret n° 73-207 du 28 février 1973 instaurant des barèmes.

Dans le second cas, le principe de rémunération de l'architecte retenu par l'article 46 du décret du 20 mars 1980 relatif au Code des devoirs professionnels des architectes, est la libre négociation. Ce texte définit en outre le calcul des honoraires, par référence aux barèmes annexés au décret du 28 février 1973 précité, en fonction, des difficultés de la mission, du coût de la réalisation de l'ouvrage projeté et de sa complexité (article 47).

B- Les pratiques relevées

1. L'élaboration du contrat d'architecte 1988 :

En 1978, le Conseil national de l'Ordre des architectes et l'Union Nationale des Syndicats Français d'Architectes ont signé une charte traitant des rôles et missions respectifs de ces deux organismes.

Le Conseil national de l'Ordre, qui jusqu'en 1980 publiait "un contrat d'architecte" comportant barèmes et taux horaires des vacations présentés comme des minima en dessous desquels les missions ne pouvaient être convenablement assurées comme l'avait relevé la décision n° 87-D-53 du Conseil, décida en application de cette charte de confier à l'Union Nationale des Syndicats Français d'Architectes le soin de procéder à l'édition de ce qui était appelé alors le contrat-barème des prestations réalisées pour le compte des maîtres d'ouvrage privés, et sur lequel figurait la mention "approuvé par l'Ordre des Architectes".

Dès 1982, l'application de la charte avait été limitée à la suite d'un rapport de l'Inspection des Finances sollicité par la tutelle, le ministère de l'équipement, critiquant les liens financiers existants entre les deux organismes ; puis le 13 novembre 1986, un protocole mettait fin à cet accord au motif d'un contexte économique et professionnel modifié.

Cependant, le Conseil national de l'Ordre avait décidé d'entreprendre, dès le début de l'automne 1986, une étude visant à mettre au point un nouveau contrat d'architecte. Le vice-président du Conseil national de l'Ordre, M. Yves Bonnel, convoquait par lettre du 26 septembre 1986, les membres du groupe de réflexion "contrat" composé notamment de quatre architectes. M. Mazet, membre de ce groupe, transmettait le 7 mai 1987 au Conseil national de l'Ordre, un document contenant "le tableau permettant le calcul des honoraires à annexer au futur contrat d'architecte".

Le Conseil national de l'Ordre a précisé dans une note du 19 octobre 1992, que le contrat a été élaboré en tenant compte de l'intervention de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et de la décision du Conseil de la concurrence n° 87-D-53 du 1er décembre 1987 relative à la situation de la concurrence dans le domaine des honoraires d'architectes. Cette décision considérait comme prohibées, d'une part, la publication et la diffusion par l'UNSFA du "contrat-barème" de 1982 qui comportait des clauses aboutissant à la détermination chiffrée de la rémunération de l'architecte et, d'autre part, la diffusion par le Conseil national de l'Ordre de ce "contrat-barème". Cette décision enjoignait, en outre, au Conseil national de l'Ordre de cesser la diffusion dudit contrat.

M. Lopez, président du Conseil national de l'Ordre, a justifié pour sa part la mise au point du nouveau contrat d'architecte dans son procès-verbal du 10 février 1995, au motif "que, depuis la mise en cause des contrats-types de l'UNSFA par la décision du conseil, les maîtres d'ouvrage, surtout les plus épisodiques et les plus occasionnels, ne disposaient plus d'informations quant aux relations contractuelles architectes-maîtres d'ouvrage".

Selon les déclarations de Mme Gambaro recueillies par procès-verbal du 28 juillet 1992, une fois élaboré, le contrat d'architecte a été soumis notamment à l'UNSFA, puis a été publié et diffusé en 1988 aux vingt-trois mille architectes inscrits à l'Ordre, accompagné d'un tableau indicatif des taux usuels de rémunération, et d'une "notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte".

Le contrat d'architecte a, par ailleurs, été diffusé pendant quelques années dans le serveur minitel Télarchi exploité par l'Ordre, suivi d'une rubrique intitulée "calculer vos honoraires". Depuis 1994, le contrat et le tableau des honoraires n'apparaissent plus dans le serveur. Selon M. Lopez (procès-verbal du 10 février 1995) : "De telles informations sur les rémunérations ne permettaient pas aux maîtres d'ouvrage "occasionnels" d'établir un dialogue nécessaire avec l'architecte ; pour utiliser de telles informations, une négociation s'avérait en effet indispensable avant l'établissement du contrat".

2. Le contrat d'architecte, le tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte, la notice explicative à usage exclusif de l'architecte :

a) Le contrat d'architecte :

Le champ d'application du contrat est le même que celui du contrat-barème de l'UNSFA et du contrat d'architecte édité par l'Ordre jusqu'en 1980, c'est-à-dire celui des prestations rendues aux maîtres d'ouvrage privés, principalement les promoteurs immobiliers et les particuliers.

Le contrat est actualisé par l'Ordre chaque année.

Il est composé de cinq titres : généralités, déroulement du contrat, rémunération, missions complémentaires et dispositions particulières, indisponibilité, résiliation.

1 Généralités : deux obligations sont rappelées pour l'architecte, celle d'être détenteur d'une assurance couvrant sa responsabilité professionnelle, et celle de faire appel à un contrôle technique lorsque son intervention est nécessaire.

2 Déroulement du contrat : ce titre décrit les phases successives de la mission de l'architecte de l'étude préliminaire à la réception des travaux.

3 Rémunération :

Le contrat prévoit quatre types de rémunération.

"- mode de rémunération :

- Le maître d'ouvrage honorera l'architecte selon l'une des modalités suivantes :

-- au pourcentage au taux de ... % du montant TTC final des travaux.

-- A la signature du présent contrat celui-ci est estimé à la somme de ... F TTC.

-- Selon un forfait de ... F HT.

- Il est prévu que le forfait peut être révisé par une formule basée sur l'évolution de l'index ingénierie.

- Au déboursé

- A la vacation dont le taux hors taxe est fixé par entente entre les parties à :

... F/heure ;

... F/demi ;

... F/journée."

En outre le contrat propose (§ 3.2), une décomposition du paiement des honoraires en fonction de la réalisation de l'ouvrage (ex : dossier permis de construire 15 % des honoraires), ainsi qu'un échéancier des versements au prorata de la réalisation des travaux sans indication chiffrée (ex : ... % à la signature du contrat, §3.3).

Le contrat précise également (§3.4) que "les notes d'honoraires présentées par l'architecte doivent être réglées par le maître d'ouvrage dans le délai de trente jours. Passé ce délai, des intérêts moratoires seront dus". Le taux de l'intérêt moratoire n'est pas précisé.

4 Missions complémentaires et dispositions particulières : la mission normale de l'architecte peut être complétée par la fourniture d'études techniques, par une mission complémentaire de coordination, pilotage et ordonnancement de travaux. Dans ces cas, le contrat propose une rémunération supplémentaire sans indication chiffrée.

Seul un "nota" prévoit que la rémunération supplémentaire peut être exprimée :

- en % du montant des travaux du ou des lots considérés ;

- en % du montant global des travaux ;

- ou en % du montant de l'honoraire d'une mission normale.

5 Indisponibilité résiliation : le contrat décrit les différentes hypothèses d'indisponibilité et de résiliation.

b) Le tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte :

Ce tableau présente cent dix taux d'honoraires à appliquer aux différents types de construction et aménagement couramment pratiqués par les architectes.

Sur la base d'un barème de montant des travaux exprimé sous forme de fourchettes (actualisées chaque année en fonction du coût de la vie), au regard d'une note de complexité définie sur des critères d'usage de la profession suivant le secteur d'activité (logement, tertiaire, enseignement...) et le type de construction (maison individuelle, bureaux, maternelle...), un coefficient moyen de rémunération est appliqué. Il est donné soit HT calculé sur les montants TTC des travaux, soit HT calculé sur le montant HT des travaux.

Les taux usuels de rémunération contenus dans le tableau ont été régulièrement relevés de 1988 à 1992 en fonction du coût de la vie comme cela ressort de l'article paru dans la revue "d'Architectures" n° 23 de mars 1992, revue éditée par le Conseil national de l'Ordre.

Le Conseil national de l'Ordre a précisé dans une note adressée aux enquêteurs le 14 septembre 1992, les méthodes utilisées pour la construction de ce tableau :

"Les éléments chiffrés du tableau indicatif au contrat édité en 1988 par l'Ordre des Architectes ont été établis par référence aux méthodes de calcul figurant dans le décret de 1973 relatif à l'ingénierie et à l'architecture.

"Les bases de calcul se sont appuyées, en outre :

"- sur une enquête menée auprès des architectes (1 800 opérations dépouillées) ;

"- sur les usages antérieurs en matière d'honoraires publics et privés, actualisés.

"Les coefficients retenus ne résultent donc pas de l'application d'une formule. Chaque taux mentionné est donc par lui-même une moyenne qui est appliquée, en outre, à une fourchette de montant de travaux très large (...).

"Ces fourchettes indicatives permettent une réelle négociation, de même que la définition de la note de complexité qui est établie conjointement par les parties.

"Les intervalles n'ont, en outre, rien de normatif puisque l'ensemble des indications chiffrées ne sont qu'indicatives".

Il y a lieu de relever qu'au moment de la première diffusion du contrat-type en 1988 l'enquête menée auprès des architectes n'avait pas encore été entreprise. Ce n'est, en effet, qu'en janvier 1989 que l'instance ordinale a décidé de réaliser une enquête semestrielle auprès d'échantillons constitués par chaque conseil régional et cela pour préparer la mise en place des décrets d'application de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et ses rapports avec la maîtrise d'ouvrage privée, ainsi que le précise la lettre du 31 janvier 1989 adressée par l'Ordre aux présidents des conseils régionaux. Le but poursuivi par l'Ordre était alors de se doter de moyens permettant d'apprécier de manière fiable les divers modes de calcul des rémunérations utilisés par les architectes. En outre cette lettre précisait "(...) Déjà l'Ordre vient-il d'éditer un contrat type (...)".

Dans un second courrier transmis par l'Ordre au service d'enquête daté du 19 octobre 1992, il était précisé :

"Pour établir les données indicatives relatives aux taux de rémunération annexées, le groupe de travail a procédé - en 1988 - à une synthèse de données existantes ou recueillies auprès d'architectes. En particulier les premières études (ci-jointes) d'actualisation des barèmes ingénierie (décret de 1973) ont nourri la réflexion et donné une première série d'indications".

Or, l'étude d'actualisation des barèmes d'ingénierie de 1973 de M. Daniel Barraud, architecte, jointe à ce courrier, n'est pas datée et semble également être postérieure à la première diffusion du contrat-type 1988, dans la mesure où la première page d'annexe de ce document se fonde sur des données de janvier 1973 et de juin 1989.

En fait, il semble que les taux de rémunération aient essentiellement été établis à partir de l'étude de M. Mazet.

Depuis 1994, à la demande du ministre de l'Economie, le Conseil national de l'Ordre a invité les présidents des conseils régionaux, par courriers des 16 et 17 mai 1994, à cesser la diffusion de ce tableau.

c) La notice explicative à usage exclusif de l'architecte :

Destinée à présenter le contrat d'architecte aux membres de l'Ordre, elle a accompagné exclusivement le contrat-type 1988, comme cela ressort de "la note relative au contrat établi par l'Ordre des Architectes" du Conseil national de l'Ordre du 19 octobre 1992. Cette affirmation est en outre confortée par les autres contrats diffusés ultérieurement auxquels ne sont joints aucune notice.

Ce document précise en premier lieu dans son préambule l'objet du contrat :

"Il faut rappeler tout d'abord qu'aux termes de l'article 11 du décret du 20 mars 1980 portant Code des devoirs de l'architecte, tout engagement professionnel de l'architecte doit faire l'objet d'une convention écrite préalable définissant la nature et l'étendue de ses missions ou de ses interventions ainsi que les modalités de sa rémunération.

"C'est l'objet du présent contrat. Nous l'avons voulu simple et susceptible d'être adapté à tout type de construction (...).

"Ce contrat ne constitue qu'une référence et peut être modifié ou complété selon la volonté des parties".

En second lieu, la notice présente le contenu des différents chapitres du contrat et les orientations retenues, tout en précisant qu'il ne s'agit là que de conseil :

(...) "Nous vous conseillons de retenir cette marge d'incertitude (estimation provisoire du montant des travaux dans la limite d'une variation de 15 % ) ; les parties demeureront toutefois libres de la modifier" ( II Déroulement du contrat).

Il apparaît toutefois que pour le chapitre "IV- Missions complémentaires et dispositions complémentaires", la note propose à titre indicatif, alors que le contrat d'architecte ne comporte aucun taux de rémunération, des pourcentages de rémunération supplémentaire pour la fourniture d'études techniques complémentaires aux missions normales suivants :

"Avant-projet structure (sans quantitatif) : 10 % d'une mission normale ;

Avant-projet fluides (plomberie, chauffage, ventilation, électricité) y compris descriptif, quantitatif et notes de calcul : 20 % de l'honoraire d'une mission normale ;

"Quantitatif gros œuvre et second œuvre : 10% de l'honoraire d'une mission normale à moduler suivant l'importance et la complexité des lots concernés ;

"Coordination, pilotage : 20% de l'honoraire d'une mission normale."

II- SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,

Sur la prescription,

Considérant que le Conseil national de l'Ordre des architectes soutient que la notice explicative accompagnant le contrat-type n'a été diffusée avec celui-ci que pour l'année 1988 ; que la saisine du service d'enquête par l'administration centrale datant du 23 février 1992 il ne pouvait être recherché de faits antérieurs au 23 février 1989 sans méconnaître l'article 27 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais considérant que si la notice explicative a été diffusée exclusivement en 1988, ce document qui constitue une présentation générale du contrat d'architecte avait une durée indéterminée et ne nécessitait pas d'actualisation, dès lors qu'il préconisait, pour certaines missions, une rémunération représentant un pourcentage fixe de l'honoraire applicable à une mission normale de l'architecte, honoraire déterminé par le tableau indicatif des taux usuels de rémunération actualisé régulièrement par le Conseil national de l'Ordre jusqu'en 1994 ; que la notice n'a pas été expressément abrogée ni dénoncée par le Conseil national de l'Ordre, et a ainsi pu être utilisée par les architectes, de telle sorte qu'elle a conservé son objet et ses effets potentiels jusqu'à ce jour ; qu'en conséquence le conseil a pu en être saisi sans que puisse lui être opposé le délai de prescription de trois ans entre sa diffusion et le premier acte de constatation des faits ;

Sur la procédure,

Considérant que le Conseil national de l'Ordre des architectes fait valoir que le ministre de la culture, ministre de tutelle, doit intervenir dans la procédure conformément aux dispositions de l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans la mesure où l'enquête portant sur la rémunération des architectes, menée par le Conseil national de l'Ordre auprès de ses membres en 1989 avait pour but de collecter des informations destinées à mettre en place une réglementation nouvelle remplaçant celle du décret du 28 février 1973 ;

Mais considérant que selon une jurisprudence constante le département ministériel intéressé s'entend de celui qui est chargé d'appliquer un texte dont dépend la solution du litige; que le décret du 28 février 1973 ne s'applique qu'aux prestations rendues par les architectes aux collectivités publiques et non aux prestations réalisées par les architectes pour le compte d'un maître d'ouvrage privé visées par le contrat d'architecte et ses annexes ; que si l'enquête sur la rémunération des architectes, menée en 1989 à l'initiative du Conseil national de l'Ordre découle du projet de réforme du décret du 28 février 1973, il n'en est pas de même du contrat d'architecte et de ses annexes ; qu'en conséquence le ministre de la culture ne peut être considéré comme un ministre intéressé au sens de l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur les pratiques constatées,

En ce qui concerne l'élaboration et la diffusion du tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte :

Considérant que l'élaboration et la diffusion à l'initiative d'une organisation professionnelle d'un document destiné à l'ensemble de ses adhérents constitue une action concertée; que, s'il est loisible à un syndicat professionnel ou à un groupement professionnel de diffuser des informations destinées à aider ses membres dans l'exercice de leur activité, l'aide à la gestion ainsi apportée ne doit pas exercer d'influence directe ou indirecte sur le libre jeu de la concurrence à l'intérieur de la profession; qu' en particulier les indications données ne doivent pas pouvoir avoir pour effet de détourner les entreprises d'une appréhension directe de leurs coûts, qui leur permette de fixer individuellement leurs prix ou honoraires;

Considérant que le Conseil national de l'Ordre des architectes a établi et diffusé, auprès de ses membres à partir de 1988 et jusqu'en 1994, un tableau indicatif des taux usuels de rémunération des différents types de construction et aménagement réalisés par les architectes dans le cadre de leurs missions courantes permettant d'établir le taux d'honoraires à appliquer, en fonction de l'importance de la mission définie par des montants de travaux exprimés sous forme de fourchettes et d'une note de complexité élaborée à partir des critères en usage dans la profession suivant le secteur d'activité et le type de construction ; qu'ainsi, par exemple, pour la construction d'une maison particulière d'un montant de travaux d'un million de francs, correspondant à une note de complexité de l'ouvrage de 6, le tableau prévoyait en 1992 un taux usuel de rémunération de 9,5 % du montant des travaux soit 95 000 F ; qu'en suggérant de tels taux en ce qui concerne l'importance de la mission et la complexité des opérations, le Conseil national de l'Ordre des architectes est allé au-delà de l'aide technique qu'il peut légitimement apporter à ses membres et a pu, ainsi, inciter ses membres à ne pas tenir compte dans la détermination de leurs honoraires de leurs conditions spécifiques d'exploitation; qu'au cas d'espèce, les taux uniques ainsi diffusés pouvaient inciter les membres de l'Ordre à les appliquer, alors qu'il appartenait à chacun d'eux d'établir sa rémunération en fonction de la situation et des données propres à son cabinet d'architecture;

Considérant que le Conseil national de l'Ordre fait valoir en premier lieu, que le tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale de l'architecte ne doit pas être considéré comme un barème mais comme un cadre de référence à partir duquel en fonction de la complexité de l'opération et de l'importance de la mission, la négociation de la rémunération entre l'architecte et son client trouve sa place ; que, compte tenu du fait qu'à chaque type d'ouvrage correspond plusieurs notes de complexité, les taux de rémunération contenus dans le tableau ne sont pas de nature à harmoniser les honoraires et répondent à la diversité des agences d'architectures quelles que soient leur taille et leur rentabilité ;

Mais considérant que bien qu'intitulé "tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte", ce tableau revêt un caractère incitatif, comme l'a d'ailleurs reconnu en séance le représentant de l'Ordre en admettant que l'élaboration et la diffusion de ce type de document avait pour objet de lutter contre la réalisation de missions "au rabais" ; que ce tableau a également une valeur normativedans la mesure où, s'il constitue, selon l'Ordre, une base de négociation entre l'architecte et son client pour la rémunération de ce dernier, le montant de la rémunération de l'architecte est en fait directement lié à la note de complexité de l'ouvrage, note dont le représentant de l'Ordre en séance a reconnu que seul l'architecte était à même de la déterminer; qu'enfin le fait qu'à chaque type de construction corresponde plusieurs notes de complexité est sans incidence sur le caractère normatif des taux puisque l'architecte, quel que soit l'ouvrage, détermine une note unique de complexité et par conséquent un seul taux de rémunération ; que le tableau constitue dès lors un cadre de référence susceptible d'empêcher l'architecte de se fonder sur ses propres coûts dans l'établissement de ses honoraires; que son caractère normatif est renforcé par le fait qu'il est présenté par le Conseil national de l'Ordre à ses adhérents dans la revue "D'Architectures" n° 23 de mars 1992 , éditée par cette instance, non seulement comme une "base de négociation entre les parties" mais également comme un document susceptible d'être "retenu par les tribunaux en cas de litige ou bien d'absence de preuve écrite dans le domaine des marchés privés" ; qu'en conséquence l'élaboration et la diffusion d'un tel document a eu pour objet de restreindre le jeu de la concurrence ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'Ordre fait valoir que la diffusion du tableau indicatif n'a pas eu d'effet sensible sur le marché considéré dans la mesure où la vérification par les enquêteurs de sa mise en œuvre n'a porté que sur des cabinets d'architectes des régions d'Ile-de-France, de Haute et de Basse-Normandie alors que la diffusion du tableau avait été nationale et que pour seulement 20% des opérations recensées les architectes ont appliqués des taux de rémunérations égaux à ceux préconisés par le tableau indicatif ;

Considérant toutefois que l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, dès lors qu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ; qu'entre ainsi dans le champ d'application de ces dispositions toute pratique concertée, même si elle n'a aucun effet, dès lors qu'elle a un objet ou peut avoir un effet anticoncurrentiel sur un marché ; qu'en l'espèce le tableau a été diffusé en 1988 aux vingt-trois mille architectes membres de l'Ordre ; que depuis cette date il a été diffusé à environ dix mille exemplaires par an par les conseils régionaux de l'Ordre ; qu'en outre l'instruction a montré que, sur un échantillon de quarante-cinq architectes ou sociétés d'architectures exerçant dans les régions d'Ile-de-France, de Basse et Haute Normandie dans 20 % des cas les taux de rémunération appliqués étaient égaux ou très proches de ceux préconisés par l'Ordre ; que si le représentant de l'Ordre a fait valoir que ce pourcentage révélait une application limitée en soutenant que les architectes des régions concernées étaient particulièrement avertis pour déterminer leurs propres coûts de gestion, cette analyse ne peut que suggérer une application plus large du tableau indicatif dans les autres régions ;

Considérant en conséquence que l'élaboration et la diffusion de 1988 à 1994 par le Conseil national de l'Ordre des architectes du tableau indicatif des taux usuels de rémunération constitue une pratique concertée qui a eu pour objet et a pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché considéré au-delà même de la cessation de sa diffusion, dans la mesure où le Conseil national de l'Ordre, s'il a interrompu la diffusion du tableau usuel de rémunération en 1994, ne l'a toutefois pas dénoncé à ses membres, certains d'entre eux pouvant donc continuer à l'utiliser; que de telles pratiques sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne la diffusion et la publication de "la notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte" :

Considérant que le Conseil national de l'Ordre des architectes a établi et diffusé auprès de ses membres en 1988, "une notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte" présentant le contenu et les objectifs du contrat d'architecte et comportant des taux indicatifs d'honoraires pour certaines missions complémentaires des missions courantes, et en particulier, un taux de rémunération de 10 % de l'honoraire d'une mission normale pour "un avant-projet structure quel que soit le quantitatif" et pour un "quantitatif gros œuvre et second œuvre", ainsi qu'une rémunération supplémentaire de 20 % d'une mission normale pour "un avant projet fluides (plomberie, chauffage, ventilation, électricité) y compris descriptif et notes de calcul" ; qu'en suggérant de tels taux, l'Ordre des Architectes est allé au-delà de l'aide au calcul des honoraires qu'il peut légitimement apporter pour certaines missions complémentaires d'architecture, et a pu, ainsi, inciter ses membres à ne pas tenir compte dans la détermination de leurs honoraires de leurs conditions particulières d'exploitation ; qu'au cas d'espèce, ces taux uniques pouvaient inciter les membres de l'Ordre à les appliquer pour établir leurs honoraires, alors qu'il appartenait à chacun d'eux de se déterminer en fonction de sa situation et de ses données propres ;

Considérant, en premier lieu, que l'Ordre des architectes soutient, qu'en prenant en compte exclusivement l'importance et la complexité de l'ouvrage, les taux proposés par la notice avaient un caractère purement indicatif et qu'en outre la notice n'a eu ni pour objet ni pour effet de fausser le jeu de la concurrence puisqu'elle ne comporte aucun élément relatif aux coûts de revient des prestations réalisées par les architectes, à la taille, à l'organisation et à la rentabilité des cabinets ;

Mais considérant, que la rémunération usuelle pour certaines missions complémentaires courantes était définie dans la notice explicative par un pourcentage fixe de l'honoraire d'une mission normale, ce qui pouvait dissuader les architectes de se référer pour établir leurs honoraires à leurs coûts de revient ; qu'une telle notice, dès lors, revêt un caractère anticoncurrentiel ; que celui-ci est en outre renforcé par le fait que les taux préconisés étaient établis par référence au tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte dont le caractère anticoncurrentiel a été démontré ci-dessus ; qu'enfin elle a été diffusée en 1988 aux vingt-trois mille architectes inscrits à l'Ordre et n'a pas été dénoncée par cette instance ordinale à ses membres ; qu'en conséquence l'effet potentiel anticoncurrentiel de ce document s'est poursuivi jusqu'à ce jour ;

Considérant, en second lieu, que le Conseil national de l'Ordre des architectes fait valoir que la notice explicative était destinée uniquement à l'usage de l'architecte pour l'aider dans la négociation de ses honoraires avec son client et réciproquement, que l'établissement d'une convention d'honoraire entre l'architecte et son client correspond à un devoir essentiel de l'architecte prévu par l'article 11 du Code des devoirs de l'architecte et que l'élaboration du contrat-type s'est inspirée du décret du 28 février 1973 qui posait le principe d'une rémunération forfaitaire en fonction d'un coût d'objectif définitif, du contenu de la mission et de la complexité de la réalisation ;

Mais considérant que ne sont nullement prévus par le Code des devoirs de l'architecte et le décret du 28 février 1973 l'élaboration d'un contrat-type et d'une notice explicative portant sur la rémunération des prestations rendues aux maîtres d'ouvrage privés et comportant des taux de rémunération anticoncurrentiels ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'établissement et la diffusion par le Conseil national de l'Ordre des architectes de la notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte constituent des pratiques concertées ayant eu pour objet et ayant pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence et, par suite, prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur les sanctions,

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : "Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. 100 du montant du chiffre d'affaires hors taxes en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le montant maximum est de dix millions de francs. Le Conseil de la concurrence peut ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'il désigne, l'affichage dans les lieux qu'il indique et l'insertion de sa décision dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne intéressée" ; qu'en application de l'article 22, alinéa 2 de la même ordonnance, "la commission permanente peut prononcer les mesures prévues à l'article 13, les sanctions infligées ne pouvant, toutefois, excéder 500 000 F pour chacun des auteurs des pratiques" ;

Considérant qu'il convient, en application de l'article 13 ci-dessus rappelé, de prévenir la poursuite de telles pratiques en enjoignant au Conseil national de l'Ordre des architectes de ne plus élaborer ni diffuser de barème d'honoraires et de dénoncer "le tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte", ainsi que la "notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte, chapitre IV - Missions complémentaires et dispositions complémentaires", à l'ensemble des architectes inscrits à l'Ordre ;

Considérant que la gravité des pratiques doit s'apprécier en tenant compte de la circonstance que le Conseil national de l'Ordre des architectes avait été destinataire de la décision du Conseil de la concurrence n° 87-D-53 du 1er décembre 1987, devenue définitive, relative à la situation de la concurrence dans le domaine des honoraires d'architectes; que cette décision lui avait enjoint de cesser la diffusion du contrat-barème élaboré par l'Union Nationale des Syndicats Français d'Architectes en ce qu'il comportait des clauses aboutissant à une détermination chiffrée de la rémunération de l'architecte, pratiques prohibées par les dispositions de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 ; que le Conseil national de l'Ordre des architectes, qui avait commencé à élaborer un contrat d'architecte en mai 1987 n'a pas interrompu la préparation de ce nouveau document en dépit du fait que la décision précitée lui avait été notifiée ;

Considérant que, pour apprécier le dommage causé à l'économie, il y a lieu de retenir que l'Ordre des Architectes a diffusé en mai 1988 à ses vingt-trois mille membres le contrat d'architecte accompagné d'un "tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale d'architecte" ainsi que d'une "notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte" ; que ces documents concernaient les prestations rendues par les architectes aux maîtres d'ouvrage privés, et notamment aux consommateurs les moins avertis que sont les particuliers pour la détermination des honoraires de cette profession ; que toutefois à partir de 1994 la diffusion du tableau indicatif a cessé ; qu'en outre, il y a lieu de tenir compte du fait que l'activité des architectes est affectée depuis 1991 par la récession du secteur du bâtiment et des travaux publics ;

Considérant qu'en ce qui concerne les facultés contributives du Conseil national de l'Ordre des architectes, le montant des cotisations qui détermine les ressources de l'Ordre se sont élevées à 55 770 956 F pour l'année 1996 selon la lettre du président du Conseil national de l'Ordre du 22 avril 1997; que l'examen des bilans comptables fait apparaître un déficit de 14 434 672 F pour l'exercice 1996 ; qu'en fonction des éléments ci-dessus énoncés, il y a lieu d'infliger au Conseil national de l'Ordre des architectes une sanction pécuniaire de 200 000 F,

Décide :

Article 1er : - Il est établi que le Conseil national de l'Ordre des architectes a enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2 : - Il est enjoint au Conseil national de l'Ordre des architectes, d'une part, de ne plus élaborer ni diffuser de barèmes d'honoraires et, d'autre part, de dénoncer dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision le "tableau indicatif des taux usuels de rémunération de la mission normale de l'architecte" et la "notice explicative à l'usage exclusif de l'architecte - chapitre IV-Missions complémentaires et dispositions complémentaires" à l'ensemble des architectes inscrits à l'Ordre.

Article 3 : - Il est infligé au Conseil national de l'Ordre des architectes une sanction pécuniaire de 200 000 F.