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Décisions

Conseil Conc., 7 janvier 1998, n° 98-D-02

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques en matière d'honoraires mises en œuvre par le barreau d'Aurillac

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de M. André-Paul Weber, par M. Barbeau, président, MM. Cortesse, Jenny, vice-présidents.

Conseil Conc. n° 98-D-02

7 janvier 1998

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 13 octobre 1993 sous le numéro F 629, par laquelle la Confédération syndicale du cadre de vie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques en matière d'honoraires mises en œuvre par " les barreaux d'Aurillac, Clermont-Ferrand, Digne, Gap, Bonneville et Marseille " ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, modifiée, et le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; Vu les observations présentées par l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac, par la Confédération syndicale du cadre de vie et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la Confédération syndicale du cadre de vie et du Conseil de l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :

Par lettre susvisée, la Confédération syndicale du cadre de vie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques en matière d'honoraires mises en œuvre par différents barreaux. La présente décision a trait aux pratiques relevées dans le ressort du barreau d'Aurillac.

I. - Constatations

A. - La profession d'avocat

La profession d'avocat est régie par la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. La profession est constituée en barreaux établis auprès des tribunaux de grande instance. Chaque barreau est doté de la personnalité civile et est administré par un Conseil de l'Ordre. Les membres du Conseil de l'Ordre sont élus pour trois ans, au scrutin secret, par tous les avocats inscrits au tableau du barreau, par les avocats stagiaires ayant prêté serment avant le 1er janvier de l'année au cours de laquelle a lieu l'élection et par les avocats honoraires ressortissant dudit barreau. A sa tête est élu pour deux ans un bâtonnier ; il représente le barreau dans tous les actes de la vie civile. Il lui revient de prévenir ou, le cas échéant, de concilier les différends d'ordre professionnel entre les membres du barreau et d'instruire toute réclamation formée par les tiers.

Les missions du Conseil de l'Ordre sont définies par l'article 17 de la loi précitée. Il a vocation à traiter de toutes questions intéressant l'exercice de la profession et à veiller à l'observation des devoirs des avocats ainsi qu'à la protection de leurs droits. Il est en particulier tenu " d'arrêter et, s'il y a lieu, de modifier les dispositions du règlement intérieur, de statuer sur l'inscription au tableau des avocats ...d'exercer la discipline... de maintenir les principes de probité, de désintéressement, de modération et de confraternité sur lesquels repose la profession et d'exercer la surveillance que l'honneur et l'intérêt de ses membres rendent nécessaires (...) de veiller à ce que les avocats soient exacts aux audiences et se comportent en loyaux auxiliaires de la justice ".

Sur réquisition du procureur général, toute délibération ou décision du Conseil de l'Ordre étrangère aux attributions qui lui sont reconnues ou contraires aux dispositions législatives ou réglementaires est annulée par la cour d'appel. Les délibérations ou décisions du Conseil de l'Ordre de nature à léser les intérêts professionnels d'un avocat peuvent également, à la requête de l'intéressé, être déférées à la cour d'appel. De même, les décisions du Conseil de l'Ordre relatives à une inscription au barreau ou sur la liste du stage, à l'omission ou au refus d'omission du tableau ou de la liste du stage sont susceptibles d'être déférées à la cour d'appel par le procureur général ou par l'intéressé.

Selon les articles 22 et suivants de la loi du 31 décembre 1971, le Conseil de l'Ordre, siégeant comme conseil de discipline, a la faculté de poursuivre et de réprimer les infractions et fautes commises par les avocats inscrits au barreau ou sur la liste du stage. Il intervient d'office, à la demande du procureur général ou à l'initiative du bâtonnier. Le Conseil de l'Ordre peut suspendre provisoirement de ses fonctions l'avocat qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire. Dans les mêmes conditions ou à la requête de l'intéressé, il peut mettre fin à cette suspension. Les décisions du Conseil de l'Ordre en matière disciplinaire peuvent être déférées à la cour d'appel par l'avocat intéressé ou par le procureur général. Toute juridiction estimant qu'un avocat a commis à l'audience un manquement aux obligations que lui impose son serment peut saisir le procureur général en vue de poursuivre cet avocat devant le Conseil de l'Ordre dont il relève.

Par application de l'article 1er de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le montant des honoraires demandés par l'avocat est librement déterminé. À l'exception de la tarification de la postulation et des actes de procédure qui est régie par les dispositions sur la procédure civile, l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 prévoit que " les honoraires de consultations, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. À défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci. Toute fixation d'honoraires, qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire, est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu ".

Les différends susceptibles de survenir entre l'avocat et son client quant au montant et au recouvrement des honoraires sont réglés par les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991. Les réclamations sont soumises au bâtonnier par toute partie, sans condition de forme. Selon l'article 175 du décret, le bâtonnier accuse réception de la réclamation. Sa décision doit être prise dans un délai de trois mois. A défaut, il lui appartient de saisir le premier président de la cour d'appel. Selon l'article 176 du décret, la décision du bâtonnier est susceptible d'un recours devant le premier président de la cour d'appel. La décision du bâtonnier, non déférée au premier président de la cour d'appel, peut être rendue exécutoire par ordonnance du président du tribunal de grande instance à la requête de l'avocat ou de la partie.

L'article 183 du décret du 27 novembre 1991 prévoit enfin que " toute infraction aux règles professionnelles, tout manquement à la probité... expose l'avocat qui en est l'auteur à des sanctions disciplinaires ". Enumérées à l'article 184 du décret, ces sanctions, qui vont de l'avertissement au blâme, à l'interdiction temporaire -qui ne peut excéder trois années-, à la radiation du tableau ou de la liste du stage, ou au retrait de l'honorariat, sont prononcées par le Conseil de l'Ordre sous le contrôle de la cour d'appel. Au total, la loi reconnaît au client un droit de contestation que le bâtonnier est appelé à régler et tout manquement au devoir de modération dans le montant des honoraires demandés est susceptible de donner lieu à une action disciplinaire de la part du Conseil de l'Ordre.

B. - Les faits à qualifier

L'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac a établi un document intitulé "Recommandations de l'Ordre des avocats au barreau d'Aurillac 1993". Son préambule comporte les mentions ci-après reproduites : " Le Conseil de l'Ordre, après en avoir délibéré, émet les recommandations suivantes en matière d'honoraires de base. Les affaires présentant une complexité ou des difficultés exceptionnelles -et celles plaidées en dehors du ressort pourront faire l'objet d'une convention d'honoraires. Ces honoraires sont hors taxe et sont assujettis au taux de TVA de 18,60 %. Il n'est, en rien, dérogé aux principes mis en vigueur dans la profession, concernant le changement d'avocat et les honoraires de désistement ".

Pour plus de quarante prestations, le document donne des montants d'honoraires sans qu'il soit fait en général état des mentions " minimum " ou " maximum ".

Exceptionnellement, une fourchette est proposée. Certaines des indications contenues dans le document sont ci-après reproduites.

" I - Tribunal de grande instance

1 - Généralité des affaires : par intervention : 3 800 francs

2 - Affaires plus complexes (constitution) : 5 000 francs

3 - JME - JAM : 2 800 francs

4 - Divorce et séparation de corps :

a) - Article 242 : 6 000 francs

b) - Consentement mutuel (il n'y a pas lieu à émoluement dans cette procédure :

- 1 avocat : 9 000 francs

- 2 avocats : chacun : 5 000 francs

c) - Demandée - Acceptée - Article 248

- en demande : 6 000 francs

- en réponse et plus si discussion : 3 000 francs

II - Chambre du Conseil

1 - Changement de régime matrimonial : 5 500 francs

2 - Envoi en possession : 2 000 francs

3 - Renonciation à succession : 1 500 francs

4 - Requête Président : 1 500 francs

5 - Référés : 3 000 francs

6 - Commission juge des loyers : 3 500 francs

III - Instance pénale

1 - Formation collégiale : 3 500 francs

2 - Juge unique : 2 500 francs

3 - Partie civile (sauf demande minimale) : 3 000 francs

4 - Délivrance et surveillance PV au Parquet : 300 francs

5 - Instruction : par intervention : 1 000 francs

IV - Tribunal d'instance ...

3 - Police : 4ème classe : 1 300/1 600 francs ;

5ème classe : 2 200 francs ; ...

V - Conseil de prud'hommes

1 - Conciliation : 2 500 francs

2 - Jugement : 3 500 francs

VI - Tribunal de commerce

1 - Généralités des affaires : 2 500/4 000 francs

2 - Contredit

a) - de 10 000 francs : 1 500 francs

b) + de 10 000 francs : 2 500 francs

VII - Commission de retrait permis de conduire : 2000 francs

VIII - Cour d'appel

1 - Civil - commercial - social : 5 000 francs plus frais de déplacement : 600 francs

2 - Pénal : 4 000 francs (...) ;

X - Tribunal administratif

1 - Référés : 3 000 francs

2 - Au fond : 5 000 francs

Frais de déplacement : 600 francs

XI - Cour d'assises

1 - Convention minimale de : 8 000 francs

XII - Consultation laissée à l'initiative de chacun ou gratuite

1 - orale : 300 francs

2 - écrite : 800 francs

XIII - Base provision TGI

- Base provision instance et autres juridictions : 2 500 francs."

Sous la rubrique " Honoraires en matière de recouvrement ", le document donne enfin les indications ci-après reproduites : " La fixation d'un honoraire, après l'achèvement d'une affaire, y compris par transaction et après résultat concrétisé, sera calculé sur les bases ci-après, compte tenu de la nécessité d'assurer, à la fois, la rémunération du travail fourni et celui du service rendu ainsi que les frais et charges s'imposant aux cabinets :

1°) Jusqu'à 25 000 francs : honoraire ;

2°) De 25 000 à 250 000 francs : 8 % ;

3°) De 250 000 à 500 000 francs : 5 % ;

4°) Au-dessus de 500 000 francs : 2 %.

Pour la défense, application des mêmes tranches ; le résultat étant divisé par deux ".

Par procès-verbal d'audition du 27 janvier 1996, Me Canonne, bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac a déclaré : " L'Ordre des avocats d'Aurillac a établi et diffusé exclusivement auprès de ses confrères le document " Recommandations en matière d'honoraires ". Ce document a répondu à une volonté de présenter aux justiciables une information aussi précise que possible quant au montant des honoraires susceptibles d'être demandés. Le document a également répondu aux besoins du bâtonnier lorsque celui-ci est appelé à définir des montants d'honoraires en cas de taxation. Les chefs de juridiction ont, pour leur part, toujours souhaité disposer de cette information qui leur sert à calculer le montant des frais liés à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile. À partir du moment où le Conseil de l'Ordre avait, après délibération, émis des recommandations en matière d'honoraires, il y a lieu de penser que ces recommandations ont, du moins pour partie et pour les affaires les plus simples, été appliquées ".

II. - Sur la base des constatations qui précèdent, le Conseil,

Sur la procédure,

Considérant que l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac déplore les " conditions dans lesquelles les investigations ayant amené à la saisine du Conseil de la concurrence ont pu être conduites (...) les renseignements qui ont pu être fournis par la secrétaire de l'Ordre aux interrogations menées par Monsieur Giordano, simple particulier, fût-il mandaté par une association de défense des consommateurs, ne peuvent être considérés encore régulièrement recueillis " ; qu'il dénonce " la nullité de la procédure utilisée pour parvenir aux poursuites et, dès lors l'absence de preuve juridiquement rapportée des prétendues pratiques anticoncurrentielles reprochées " ;

Mais considérant que le Conseil de la concurrence a été régulièrement saisi des pratiques en cause par une organisation de consommateurs agréée conformément aux dispositions de l'article 11 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 susvisée ; que, s'agissant du barreau d'Aurillac, la saisine de la CSCV fait état de la demande formulée par l'un de ses membres, M. Giordano, le 22 juillet 1993 auprès de la secrétaire de l'Ordre afin de connaître " le prix d'un référé, d'un divorce, d'une intervention auprès du juge des enfants " ; que le fait pour un consommateur, par ailleurs membre d'une association de consommateurs, de s'informer auprès du secrétariat de l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac du prix de différentes prestations juridiques ne peut être considéré comme un procédé déloyal ; qu'il n'est pas contesté que l'instruction menée à la suite de cette saisine a été menée de façon pleinement contradictoire ; qu'il n'est pas davantage contesté que le document intitulé " Recommandations de l'Ordre des avocats au barreau d'Aurillac en matière d'honoraires " a été élaboré et diffusé par cet Ordre et qu'il aurait été surtout destiné, comme l'a déclaré en séance le bâtonnier de l'Ordre, à répondre à ce qui serait la première question que pose un client lors de sa première visite à un avocat, à savoir quel sera le montant approximatif des honoraires ; que le Conseil de la concurrence n'est pas compétent pour apprécier les éventuels délits commis à l'occasion du recueil de documents par un membre de l'organisation saisissante, alors même qu'il n'est avancé par l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac ni que de tels délits auraient été commis, ni qu'il aurait engagé des poursuites de ce chef ;

Sur les pratiques constatées,

Considérant que l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac a établi et diffusé en 1993 un document intitulé " Recommandations de l'Ordre des avocats au barreau d'Aurillac en matière d'honoraires " ; que ces recommandations, qui concernent une quarantaine de prestations relevant des domaines judiciaire ou juridique, présentent des montants d'honoraires ; que, s'agissant des honoraires applicables au titre des affaires de police et des affaires déférées devant le tribunal de commerce, des fourchettes sont mentionnées ;

Considérant que les recommandations ont été émises après que le Conseil de l'Ordre en avait délibéré ; que les recommandations concernent les " honoraires de base " ; que le document établi et diffusé comporte des mentions à caractère normatif et d'autres pouvant servir de références même si les affaires présentant une complexité ou des difficultés exceptionnelles -et celles plaidées en dehors du ressort- " pourront faire l'objet d'une convention d'honoraires " ; que, par ailleurs, " La fixation d'un honoraire, après l'achèvement d'une affaire, y compris par transaction et après résultat concrétisé, sera calculée sur les bases ci-après, compte tenu de la nécessité d'assurer, à la fois, la rémunération du travail fourni et celui du service rendu -ainsi que les frais et charges s'imposant aux cabinets :

- jusqu'à 25 000 francs honoraire ;

- de 25 000 francs à 250 000 francs 8 % ;

- de 250 000 francs à 500 000 francs 5 % ;

- au-dessus de 500 000 francs 2 %.

Pour la défense, application des mêmes tranches ; le résultat étant divisé par deux ".

Considérant qu'en élaborant et en diffusant le document en cause, le barreau des avocats d'Aurillac a pu conduire ses membres à fixer le montant de leurs honoraires, non selon les conditions d'exploitation propres de leurs cabinets, mais à partir des indications reproduites dans le document examiné; que tel a été le sens de la déclaration du bâtonnier de l'Ordre en date du 27 janvier 1996 qui a soutenu : " À partir du moment où le Conseil de l'Ordre avait, après délibération, émis des recommandations en matière d'honoraires, il y a lieu de penser que ces recommandations ont, du moins pour partie et pour les affaires les plus simples été appliquées " ;

Considérant que la transparence de l'information au bénéfice des justiciables, si elle était recherchée, n'imposait pas que fût établi et diffusé le document en cause, et que soit adopté un barème unique d'honoraires pour l'ensemble du barreau; qu'au contraire une telle transparence pouvait être mieux assurée par l'établissement par chaque cabinet d'avocat de ses propres honoraires;

Considérant qu'ainsi les " Recommandations de l'Ordre des avocats au barreau d'Aurillac en matière d'honoraires " qui ont été établies en 1993 par l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac et qui ont été diffusées auprès de ses membres sont constitutives d'une action concertée ayant pour objet et pouvant avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence; que ces pratiques sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Sur les sanctions,

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Le Conseil de la Concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. 100 du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le montant maximum est de dix millions de francs (...) Le Conseil de la concurrence peut ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'il désigne, l'affichage dans les lieux qu'il indique et l'insertion de sa décision dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne intéressée " ;

Considérant qu'il convient par application de l'article 13 ci-dessus rappelé, pour prévenir la poursuite de telles pratiques, d'enjoindre à l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac de ne plus élaborer ni diffuser de barème d'honoraires et d'en informer tous les membres du barreau ;

Considérant que, pour apprécier le dommage à l'économie, il y a lieu de retenir que le document en cause donnait des indications d'honoraires, pour une liste d'environ quarante prestations juridiques concernant de nombreuses procédures devant les différentes juridictions ; que la gravité des pratiques doit s'apprécier en tenant compte de la circonstance que le document intitulé " Recommandations (...) en matière d'honoraires " a été diffusé à l'ensemble des membres du barreau d'Aurillac ; que, par ailleurs, le ministère d'avocat est, s'agissant de différentes procédures, obligatoire ; qu'enfin l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac ne pouvait ignorer les dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant que, pour l'année 1996, les ressources de l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac se sont élevées à 81 768,94 francs, dont 16 500 francs de cotisations des trente-six avocats inscrits et 62 675,24 francs de report 1995 ; qu'en fonction des éléments tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu d'infliger au barreau d'Aurillac une sanction pécuniaire de 35 000 francs,

Décide :

Article 1er. - Il est établi que l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac a enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2.- Il est enjoint à l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac, d'une part, de ne plus élaborer ni diffuser de " Recommandations " contenant l'indication de montants, de minimums ou de fourchettes d'honoraires et, d'autre part, d'adresser, dans un délai de deux mois à compter de sa notification, la copie de la présente décision à chacun des avocats inscrits au barreau d'Aurillac.

Article 3. - Il est infligé à l'Ordre des avocats du barreau d'Aurillac une sanction pécuniaire de 35 000 francs.