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Décisions

Cass. com., 3 mai 1995, n° 92-20.250

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Compagnie générale de travaux et d'installations électriques, Saunier Duval électricité (Sté), CEPECA (Sté), Syndicat des entrepreneurs de réseaux et de constructions électriques, Entreprise de transport et de distribution d'énergie (Sté), CEGELEC (Sté), SNEC (Sté), TEIM (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

Mme Geerssen

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Delaporte, Briard, Mes Vuitton, Choucroy, Ricard.

TGI Paris, Prés., du 9 sept. 1992

9 septembre 1992

LA COUR : - Attendu que, par ordonnance du 9 septembre 1992, le président du tribunal de grande instance de Paris a autorisé des agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux de 9 entreprises parisiennes et aux 51 adresses d'autres sociétés ou des filiales de ces sociétés parisiennes en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles sur le marché de l'électrification rurale ;

Sur le premier moyen des pourvois n° 92-20.251 et 92-20.252 : - Attendu que les sociétés Saunier Duval électricité et CEPECA font grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visites et saisies litigieuses, alors, selon les pourvois, que, sans vérifier que la demande signée par le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait été faite par délégation expresse du ministre chargé de l'Économie, le président du Tribunal a méconnu les dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Mais attendu que, si les visites et saisies prévues par ce texte ne peuvent être autorisées que dans le cadre des enquêtes demandées, soit par le ministre chargé de l'Économie, soit par le Conseil de la concurrence, il n'est pas interdit au ministre de déléguer ses pouvoirs conformément aux lois et règlements; que la délégation permanente de signature du ministre d'État, ministre de l'Économie, des Finances et du Budget, donnée par l'arrêté du 13 avril 1992, publié au Journal officiel du 15 avril, au profit de M. Christian Babusiaux, directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, pour signer tous actes, arrêtés, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets, permet au délégataire de prendre au nom du ministre les décisions qui, dans la limite de ses attributions, relèvent de la compétence de ce ministre, sans que cette délégation implique l'abandon par le ministre de la possibilité d'exercer personnellement ses pouvoirs; que le président du Tribunal n'avait donc pas à constater que M. Babusiaux agissait sur instructions expresses du ministre chargé de l'Économie; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen des pourvois n° 92-20.250 et 92-20.254, pris en leur première branche, sur le second moyen du pourvoi n° 92-20.255, pris en sa première branche, et sur le quatrième moyen des pourvois n° 92-20.253, 92-20.256 et 92-20.257, réunis : - Vu l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; - Attendu que, pour autoriser les visites et saisies litigieuses, l'ordonnance retient des présomptions tirées de documents provenant de saisies autorisées par des décisions antérieures ;

Attendu qu'en se fondant sur de tels documents obtenus au moyen de visites et saisies ayant pour objet la recherche de la preuve d'agissements distincts de ceux visés dans la demande sur laquelle il statuait, sans préciser qu'ils avaient été régulièrement saisis comme se rapportant aux agissements retenus dans les ordonnances antérieures, et, dans l'affirmative, sans indiquer au moyen de quelle procédure l'Administration avait distrait lesdits documents des précédentes saisies pour les présenter à l'appui de sa nouvelle requête, le président du Tribunal n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur la seconde branche du premier moyen des pourvois n° 92-20.250 et 92-20.254 : - Vu l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; - Attendu qu'aux termes de ce texte, le président du Tribunal, qui autorise une visite et une saisie domiciliaire, désigne un ou plusieurs officiers de police judiciaire chargés d'assister à l'opération et de le tenir informé de son déroulement ;

Attendu qu'en désignant, pour les sociétés situées dans le ressort de sa juridiction, M. Guy Coquet, directeur-adjoint chargé de la sous-direction des affaires économiques et financières à l'effet de nommer les officiers de police judiciaire placés sous son autorité et territorialement compétents, le président du Tribunal a méconnu les exigences du texte susvisé;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 9 septembre 1992, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Paris.