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Décisions

Conseil Conc., 16 mai 1990, n° 90-D-16

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques concertées à l'occasion de marchés de travaux d'assainissement de la communauté urbaine de Lyon et de la construction du collecteur de la vallée des Razes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré en formation plénière sur le rapport de Mme Jeangirard-Dufal, dans la séance des 15, 16 mai 1990 où siégeaient M. Laurent, président, M. Beteille, vice- président, MM. Cortesse, Flecheux, Fries, Gaillard, Mme Lorenceau, M. Schmidt, membres.

Conseil Conc. n° 90-D-16

16 mai 1990

Le Conseil de la concurrence,

Vu la lettre enregistrée le 19 mai 1988 sous le numéro F 161, par laquelle le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques relevées sur des marchés d'entretien du réseau d'assainissement de la communauté urbaine de Lyon et sur le marché de la construction du collecteur de la vallée des Razes ; Vu les ordonnances n° 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945, modifiées, respectivement relatives aux prix et à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par les parties et le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants des parties ayant demandé à présenter des observations orales entendus ; Retient les constatations (I) et adopte la décision (II) ci-après exposées :

I. - Constatations

A. - Caractéristiques du secteur

1. Travaux publics et assainissement

Les travaux publics représentent 81 milliards de francs de chiffre d'affaires en France en 1982 et 106 milliards de francs en 1987. Les travaux routiers y tiennent la première place (1/3), suivis par l'ensemble ouvrages d'art-génie civil-terrassements puis les travaux électriques ; les travaux regroupés au sens large dans les rubriques assainissement-hygiène publique et comprenant aussi bien l'adduction d'eau, les canalisations, les réseaux d'égouts que les stations d'épuration, représentaient 18 p. 100 du total des travaux publics en 1980, 16 p. 100 en 1984 et 14 p. 100 en 1987. Dans l'ensemble des travaux d'assainissement, les travaux d'entretien constituent le quart, les travaux de construction neuve les trois quarts. Les collectivités publiques sont les principaux donneurs d'ouvrage en la matière ; les communes commandent 59 p. 100 des travaux du secteur hygiène publique.

Les stations d'épuration et les réseaux d'égouts existants sont encore très loin de couvrir l'ensemble du territoire ; la France représente des besoins, en termes d'épuration des eaux, de 80 millions d'équivalents-habitants (il s'agit des effluents de la population permanente à laquelle s'ajoute la population saisonnière, et de la pollution industrielle, mais on ne prend pas en compte les populations isolées non raccordables à un réseau d'assainissement collectif). Compte tenu des incohérences de certaines structures (réseaux non raccordés à une station, stations mal desservies ou insuffisamment performantes), la desserte efficace réelle représente, en 1986-1987, 35 p. 100 des besoins. Les investissements dans le secteur de l'hygiène publique ont régressé de 1980 (21,5 milliards de francs) à 1985 (14 milliards de francs), l'épuration des eaux n'étant pas toujours considérée comme une priorité, d'autant que les coûts de ce type d'investissement sont élevés. Les investissements en réseaux d'égouts et stations d'épuration s'élevaient à 8 milliards en 1980 et 6 milliards en 1986. Le rythme actuel d'installation correspond à une capacité annuelle supplémentaire de 2,2 millions d'équivalents-habitants, ce qui ne permettrait une desserte à peu près complète du territoire que vers 2005-2010. Sous réserve de la volonté en la matière des collectivités publiques, le potentiel de demande en ce qui concerne l'assainissement est donc considérable.

2. Les données de la région lyonnaise

La région Rhône-Alpes est l'une des régions les plus actives en matière de travaux publics en général et d'assainissement en particulier. Elle était en 1984 la première région française pour le montant de travaux par habitant. La région bénéficie, sur une longue période, d'une suite de très gros chantiers (plusieurs autoroutes, des centrales nucléaires, le métro de Lyon, des barrages, le TGV, les jeux Olympiques de Grenoble puis d'Albertville...) qui induisent des travaux dans de multiples spécialités et pour de très nombreuses entreprises (notamment, en matière d'assainissement, les détournements de réseaux).

Comme les autres régions françaises, elle a connu une baisse d'activité à l'époque des faits, beaucoup moins marquée toutefois que dans le reste du pays l'activité dans la branche travaux publics a baissé de 2 p. 100 entre 1983 et 1984 dans la région alors qu'elle diminuait de 8,7 p. 100 en moyenne en France ; les effectifs employés ont diminué de 10 p. 100 entre 1981 et 1984 dans la région Rhône-Alpes mais de 20 p. 100 sur l'ensemble du pays. En outre, le département du Rhône a beaucoup moins accusé la récession que les autres départements de la région.

L'activité travaux publics en 1984 dans la région Rhône-Alpes se répartit en 26 p. 100 pour les routes, 21 p. 100 pour les travaux électriques, 28 p. 100 pour les ouvrages d'art, le génie civil et le terrassement et 13,5 p. 100 pour l'assainissement. La région Rhône-Alpes est la deuxième région de France pour l'activité en matière d'eau et d'assainissement, dont le montant représentait 1,5 milliard de francs environ en 1984.

Les entreprises de travaux publics dans la région Rhône-Alpes sont en moyenne de petite taille par rapport à l'ensemble de la France, mais très dynamiques puisque la région est la seconde en France parmi les moins importatrices de travaux publics ; 62 p. 100 de l'activité travaux publics est réalisé par des entreprises ayant leur siège dans la région, 25 p. 100 par des agences locales d'entreprises extérieures et 12 p. 100 seulement par des entreprises étrangères à la région. Dans le secteur eau- assainissement, ces proportions sont respectivement de 73,8, 15,6, et 10 p. 100.

La communauté urbaine de Lyon, dite Courly, a été créée en 1970. Elle regroupe 55 communes sur un territoire de 50 000 hectares avec une population de 1 106 000 habitants au recensement de 1982. Le réseau d'assainissement est un réseau unitaire (eaux de pluie et eaux usées) qui comprend 2 500 km de canalisations, dont 700 km de canalisations visitables (c'est-à-dire d'un diamètre supérieur à 1,80 mètre). Les 56 stations de relèvement et les 9 stations d'épuration de la Courly traitent les effluents de 1,3 million d'équivalents-habitants. De gros travaux de rénovation des collecteurs ont été entrepris par la Courly depuis un certain nombre d'années. En 1985, 5,2 millions de francs de travaux de réhabilitation sont effectués sur les collecteurs visitables. Le budget assainissement de la Courly comportait, en 1985, 157 millions d'investissements dont 122 millions de francs d'extension du réseau, et 309 millions de francs de fonctionnement, dont 19 millions de francs de travaux d'entretien du réseau. La Courly est donc un client très important pour les entreprises travaillant dans le domaine de l'assainissement, d'autant plus que celles-ci ont fréquemment une activité dans d'autres secteurs voisins (voirie, terrassements, eau, déchets...) où la Courly est également un demandeur de poids.

Les entreprises qui effectuent des travaux d'assainissement pour le compte de la Courly sont très diverses il s'agit aussi bien de petites entreprises spécialisées, dont le chiffre d'affaires reste en dessous de 10 millions de francs, et qui n'emploient que 10 ou 15 personnes, que d'entreprises plus diversifiées, voire importantes sur le plan local, pouvant avoir 80 millions de francs de chiffre d'affaires et plus de 200 salariés. Interviennent également quelques très grosses entreprises, de dimension nationale (par exemple Cochery-Bourdin-Chaussé, l'Entreprise industrielle, GTM, Sogea...).

B. - Les marchés de maintenance de la Courly

I. Leurs caractéristiques

Le territoire de la communauté urbaine est divisé en lots pour l'entretien du réseau d'assainissement. La possibilité de répartition en lots résulte de l'article 274 du code des marchés publics "lorsque le fractionnement est susceptible de présenter des avantages techniques ou financiers, les travaux, fournitures ou services sont répartis en lots pouvant donner lieu chacun à un marché distinct. Le règlement de la consultation fixe le nombre, la nature et l'importance des lots, ainsi que les conditions imposées au sous-missionnaire pour souscrire à un ou plusieurs lots et les modalités de leur attribution". Le découpage des lots a été remanié plusieurs fois en fonction de l'évolution de la population et des besoins de travaux. Les marchés d'entretien des réseaux d'égouts sont des contrats d'un ou deux ans tacitement reconductibles ; les derniers appels d'offres ont eu lieu en 1977 (pour trois ans), 1980 (pour quatre ans), 1984 (pour quatre ans), 1988 (pour cinq ans).

La technologie nécessaire pour les travaux demandés varie en fonction de la nature du terrain (certaines zones rocheuses nécessitent de maîtriser l'emploi d'explosifs), du type de réseau (les travaux à grande profondeur supposent de blinder les tranchées), de l'emplacement des canalisations (les travaux en centre ville doivent être effectués très vite avec les contraintes de la circulation). Le coût d'exploitation des différents lots est fonction de ces facteurs et aussi de l'emplacement des carrières et décharges, important pour le transport de produits pondéreux.

Les marchés de décembre 1984, concernant l'attribution des lots de 1985 à 1988, qui font l'objet de la saisine, sont passés sous forme d'appel d'offres restreint, avec sélection préalable des candidatures sur chaque lot en fonction des capacités techniques des entreprises par rapport aux caractéristiques des réseaux de chaque zone. Le montant de travaux de chaque lot est évalué avec un minimum et un maximum annuels, pour éviter les multiples avenants passés aux précédents marchés, lorsque les travaux nécessaires dépassaient les prévisions initiales. Il s'agit de marchés à commande, réalisés au fur et à mesure des besoins à l'intérieur de ces prévisions, en application de l'article 273 du code des marchés publics, aux termes duquel "certains marchés peuvent ne fixer que le minimum et le maximum des prestations, arrêtées en valeur ou en quantité, susceptibles d'être commandées au cours d'une période déterminée n'excédant pas celle d'utilisation des crédits budgétaires, les quantités des prestations à exécuter étant précisées, pour chaque commande, par la collectivité ou l'établissement contractant en fonction des besoins à satisfaire. Ces marchés, dits "marchés à commandes ", doivent indiquer la durée pour laquelle ils sont conclus. Ils peuvent comporter une clause de tacite reconduction sans toutefois que la durée totale du contrat puisse excéder cinq années".

En 1980 et 1984, les lots sont regroupés en trois séries les lots n° 1 à 8 qui comprennent l'entretien des égouts et maçonneries, et aussi, pour certains lots, l'entretien des galeries anciennes situées sous les collines de Fourvière et de la Croix- Rousse les lots n° 9 à 16 qui comprennent l'entretien des réseaux collectifs ainsi que les travaux de branchements particuliers ; les lots n° 21 à 30 qui ne comprennent que les branchements particuliers. Au total, l'appel d'offres de décembre 1984 représente un chiffre d'affaires compris entre 19,1 et 57 MF annuels pour des contrats tacitement renouvelables pour une durée totale de quatre ans. Les marchés sont passés selon la technique du rabais sur un bordereau de prix préétabli par la Courly.

2. Historique

Les lots ont été redécoupés en 1988, mais il s'agit essentiellement d'une division de lots précédents, qui permet d'étudier la succession des exploitants sur une même zone géographique au cours des quatre derniers appels d'offres (1977, 1980, 1984 et 1988), on constate que plus de la moitié des lots restent au même exploitant sur toute la période (c'est-à-dire de 1977 à 1993 si la reconduction tacite joue).

Si 12 lots ont changé d'exploitant, il s'agit pour 10 lots d'un seul changement sur la période. Les changements d'exploitants se limitent souvent à des échanges de lots entre entreprises ou des changements de conjoints, l'un des titulaires du lot restant stable.

Au total, 19 entreprises conservent, seules ou avec un conjoint, le même lot de 1977 à 1980 de 1980 à 1984, 25 entreprises restent sur le même lot de 1984 à 1988, compte tenu d'un redécoupage, on retrouve 32 entreprises sur la même zone d'exploitation.

Entre 1977 et 1980, la seule entreprise nouvelle à prendre un lot d'entretien d'égout, en plus des 30 précédents titulaires, est Sobea qui vient comme conjoint avec Fleitou sur le lot 25 que cette entreprise exploitait précédemment. Entre 1980 et 1984, le nombre total d'exploitants passe à 34, l'entreprise Serpollet ayant succédé sur le lot 29 à l'entreprise Guignardat, admise au règlement judiciaire, et les sociétés Eltra, Nouvetra, TPO faisant leur apparition comme conjoints d'exploitants précédents. En 1988 apparaissent trois autres entreprises sur des lots nouvellement créés, et une comme conjoint d'un ancien exploitant, ce qui porte le nombre total d'intervenants à 38. Sur l'ensemble de la période, mis à part le cas de Guignardat, aucune entreprise titulaire d'un lot n'est évincée de l'attribution des lots d'entretien, où s'insèrent peu à peu de nouvelles entreprises sans que les précédents titulaires sortent pour autant de ce marché.

En 1984, à part l'arrivée de Serpollet qui se place sur un lot vacant, les seuls changements sont des échanges de lots et des changements de conjoints, l'un des titulaires restant le même.

3. Les pratiques relevées

a) Analyse des résultats de l'appel d'offres

60 entreprises présentent leur candidature pour l'appel d'offres d'entretien des ouvrages d'assainissement de la Courly le 17 octobre 1984, qui fait l'objet de la saisine. 17 sont refusées (les entreprises Demathieu-Bard, Millot, Niège et Buhler, Chantiers modernes, Chantiers d'Aquitaine, Campenon Bernard, SADE, Chaussy, Dethève, Gagneraud, Gerland, TGC, J. Lebèbvre, STR, Menusar, Scarpari, Muller Frères) et 42 répondent au deuxième appel de candidatures par lots le 24 octobre. 34 seront finalement retenues sur les 26 lots, numérotés de 1 à 16 et de 21 à 30, à savoir ;

STTP sur le lot 1 (Lyon [7e] et [8e] arrondissement) ;

Monin sur le lot 2 (Lyon [3e] et [6e]) ;

Deluermoz et EGBTP Maia-Sonnier sur le lot 3 (Lyon [1er], [2e], [4e], Caluire)

Gantelet-Galaberthier sur le lot (Lyon [5e] et [9e], Ecully, Champagne) ;

Blondet sur le lot 5 (Villeurbanne, Vaulx-en-Velin) ;

Les Asphalteurs réunis sur le lot 6 (Vénissieux, SaintFans) ;

Pommier sur le lot 7 (La Mulatière, Ouflins, Pierre-Bénite, Sainte-Foy-lès-Lyon) ;

Deal et la société d'exploitation De Filippis sur le lot 8 (Saint-Priest, Bron, Chassieu) ;

Bourdin-Chaussè-Cochery et Beylat sur le lot 9 (Charly, Irigny, Saint-Genis-Laval, Vernaison) ;

Collet sur le lot 10 (Charbonnières, Craponne, Franche-ville, Marcy-l'Etoile, Saint- Genis-lès-Ollières, Tassin-lademi-Lune) ;

Charles de Filippis sur le lot 11 (Collonges-au-Mont-d'Or, Limonest, Saint-Cyr-au- Mont-d'Or, Saint-Didier-au-Mont-d'Or, La Tour-de-Salvagny, Dardilly) ;

STPA sur le lot 12 (Albigny-sur-Saône, Couzon-au-Mont-d'Or, Curis-au-Mont- d'Or, Poleymieux-au-Mont-d'Or, Saint-Germain-au-Mont-d'Or, Saint-Romain-au- Mont-d'Or) ;

SVTP et les Carriers des Saignes sur le lot 13 (Cailloux-sur-Fontaines, Fleurieu-sur- Saône, Fontaines-Saint-Martin, Genay, Montanay, Neuville-sur-Saône, Rochetaillèe- sur-Saône) ;

Carrion et Eltra sur le lot 14 (Fontaines-sur-Saône, Rillieux-la-Pape, Sathonay- Cainp, Sathonay-Village, Caluire branchements particuliers) ;

Artale et Nouvetra sur le lot 15 (Decines, Jonage, Meyzieu) ;

Perrier sur le lot 16 (Corbas, Feyzin, Mions, Solaize) ;

Les lots 21 à 30 qui ne comprennent que des travaux de branchements particuliers se répartissent ainsi :

Lot 21 (Lyon [7e]) : Coiro ;

Lot 22 (Lyon [8e]) : Gauthey ;

Lot 23 (Lyon [3e] et [6e] partie ouest) : Legros ;

Lot 24 (mêmes arrondissements, partie est) : Paulet et TPO ;

Lot 25 (Lyon [1er], [2e] et [4e]) : Sobea et Fleitou ;

Lot 26 (La Mulatière, Oullins, Pierre-Bénite, Sainte-Foylès-Lyon) : Guillet ;

Lot 27 (Lyon [8e] et [9e], Ecully, Champagne-au-Mont-d'Or) : Guilbaud ;

Lot 28 (Vaulx-en-Velin, Villeurbanne) : Bouhey ;

Lot 29 (Vénissieux, Saint-Fons) : Serpollet ;

Lot 30 (Bron, Chassieu, Saint-Priest) : Schevack.

Les entreprises interrogées manifestent toutes de l'intérêt pour les lots d'assainissement de la Courly, qui représentent une garantie de chiffre d'affaires et d'emploi de leur personnel sur une longue période, ainsi que l'occasion de se faire connaître d'un client qui représente un potentiel de travaux neufs important.

La plupart des entreprises ne semblent cependant vraiment intéressées que par un lot, deux à la rigueur. Elles justifient leur préférence par des raisons géographiques les travaux d'entretien nécessitant de nombreux déplacements de matériels et de personnels dans des zones urbaines, sources de coûts élevés, seules les zones situées près du siège de l'entreprise pourraient être rentables. Les chefs d'entreprise insistent aussi sur la sécurité et le gain de temps, donc la meilleure qualité de prestation, qu'assure aux entreprises du secteur une bonne connaissance du terrain ; de plus, certains déclarent ne déposer d'offre que sur les lots dont la technologie correspond à leur spécialité (égouts visitables, explosifs...).

La motivation des entreprises pour un lot particulier est renforcée par les dispositions du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), qui prévoit que "nul ne pourra être attributaire à la fois de deux lots" .

Les résultats de l'appel d'offres pour les lots d'entretien des égouts de décembre 1984 répondent presque exactement aux préférences manifestées par les entreprises.

STTP s'intéresse aux lots du centre ville, pour des raisons techniques. Lorsqu'elle avait son siège dans le 7e arrondissement, elle s'est prioritairement intéressée à ce secteur qui relevait du lot 1. Ayant transféré l'entreprise à Pierre-Bénite, STTP a néanmoins souhaité conserver le lot n° 1 car sa nouvelle implantation n'en était pas très éloignée, et elle possédait l'expérience de ce secteur de sous-sol très encombré (ann. VI-30 et VII-14). Elle obtient satisfaction.

L'entreprise Monin n'est intéressée que par les lots 1 et 2 en entretien ; elle fait un rabais plus important sur le lot 2 en 1984 (ann. II-6) et obtient ce lot 2.

Pour Deluermoz, qui a le lot 3, le représentant de l'entreprise dit (ann. II-7) ne pas être intéressé par les lots 1, 2 et 5, avoir fait un effort sur le lot 4 et "un effort supplémentaire sur le lot 3" la société ajoute (ann. VII-13) avoir acquis une expérience dans le domaine des galeries qui explique son intérêt pour le lot 3.

Gantelet-Galaberthier (ann. V1-5 et VII-3l) porte un intérêt spécial au lot de galeries de la colline de Fourvière, pour lequel elle déclare disposer du savoir-faire, d'un per- sonnel très performant et de rails installés par ses soins dans les galeries. Le lot 4 qui correspond à ses préférences lui est attribué.

M. Blondet (annexes II-8, VVI-I et VII-26) affirme porter une attention particulière, lors de chaque appel d'offres, au lot qu'il connaît le mieux pour des raisons de relations avec le personnel local, de coût du transport réduit, de connaissance du sous- sol... Cette entreprise a son siège à Villeurbanne et a le lot 5 (Villeurbanne - Vaulx-en- Velin) depuis 1978.

Les Asphalteurs réunis, société coopérative de production ouvrière, demandent toujours le lot 6 réservé à une SCOP, qu'ils obtiennent.

L'entreprise Pommier avait le lot 7 depuis 1978 et souhaitait le conserver en 1984 car, dit M. Pommier "nous avons réalisé les grands collecteurs de cette zone, nous avions un dépôt sur place et du personnel habitué à travailler dans ce secteur" (annexes II-9 et VI-40). Elle obtient ce lot.

Pour la société d'exploitation De Filippis, M. Gérard de Filippis déclare (annexe VI-26) "La société d'exploitation de Filippis a son siège à Bron. Les carrières ne sont pas très loin. La société avait le lot 15 (Décines) depuis 1980. J'ai préféré prendre le lot 8 (Saint-Priest - Bran - Chassieu) en 1984, car je voulais me rapprocher de mon siège." Selon M. Pommier (annexe VI-40) "Deal a le lot 8 car cette entreprise a son siège à Chassieu. De plus elle est adjudicataire de l'entretien du réseau d'eau à Saint- Priest... Chaque entreprise s'intéresse au lot le plus proche de chez elle et les autres le savent". Deal et la société d'exploitation De Filippis obtiennent conjointement le lot 8.

L'agence de la société Bourdin et Chaussé se trouve à Vernaison, commune comprise dans le lot 9. L'entreprise Georges Beylat a son siège à Brignais, commune limitrophe de cette zone (annexe VII-3), et fait valoir que son objectif est de centrer ses chantiers sur les communes voisines pour limiter le coût des déplacements et profiter de la proximité des carrières et décharges. Bourdin et Chaussé et Beylat obtiennent conjointement le lot 9.

Collet a le lot 10 et souhaite le garder (annexes II-12 et VI-11), car c'est un lot de terrain rocheux correspondant à la qualification en explosifs de la société, et c'est aussi la zone du principal établissement de l'entreprise (Charbonnières).

M. Picolo déclare (annexes VI-19 et II-13) pour Charles de Filippis, qui obtient le lot 11, et Les Carriers des Saignes, qui obtient le lot 13 "Les lots 11 et 13 sont proches de nos bases et c'est pourquoi nous tenons à les garder. Les Carriers ont abandonné le lot 12 pour se rapprocher de leur secteur. "

D'après M. Gantelet (annexe VI-5), SVTP est une petite entreprise qui se présente sur des lots de faible importance. Ayant son siège à Villeurbanne, elle travaille surtout dans cette zone. Elle se présente conjoint avec les Carriers des Saignes et emporte le lot 13.

STPA explique (annexe VII-20) qu'elle cherche à conserver le même lot pour des raisons de connaissance du terrain et de moindres coûts des déplacements. M. Picolo (annexe VI-19) et M. Bouhey (annexe VI-44), associés de STPA, disent tous deux que STPA a le lot 12 car il est tout près de son siège.

M. Carrion déclare (annexe II-15) "Je travaille en entretien sur la zone Rillieux - Sathonay - Caluire - Fontaines depuis 1971. Mon personnel habite Caluire et il s'y trouve un dépôt de matériel..." Carrion a le lot 14 correspondant à cette zone depuis 1978. Eltra, dont le siège est à Rillieux-la-Pape, est conjoint avec Carrion en 1984 sur le lot correspondant à ce secteur.

Selon M. G. de Filippis (annexe VI-26) "Artale est à Décines et s'intéressait donc au lot 15" qu'elle exploite depuis 1984. Anale confirme (annexe II-16) sa préférence pour les lots d'entretien de Décines et Meyzieu et dit avoir voulu récupérer en 1984 ce qui lui avait échappé auparavant. Nouvetra expose (annexe VII-10) qu'elle a choisi un lot proche de ses dépôts de Décines pour limiter les coûts. Artale et Nouvetra obtiennent conjointement le lot 15.

Perrier a le lot 16 "qui se trouve près du siège de la société et des carrières de Corbas" et qui l'intéresse le plus (annexe VI-15) et ce depuis 1980.

Gauthey explique (annexe VII-11) que pour 1984 il a concentré ses efforts sur le lot 22, car c'est le lot le plus proche de l'agence de Chassieu et c'est un lot qu'il connaît bien pour l'avoir précédemment exploité. Ce lot lui est attribué.

Legros, exploitant du lot 23 en 1980, est reconduit sur ce lot en 1984.

L'entreprise Paulet et l'entreprise TPO (annexe VII-28) disent s'être groupées pour obtenir des marchés plus importants ; Paulet précise qu'il connait très bien le secteur des 3e et 6e arrondissements. Les deux entreprises obtiennent le lot 24.

Sobea et Fleitou, exploitants conjoints du lot 25 en 1980, sont reconduits sur ce lot en 1984.

Les entreprises Guillet, Guilbaud et Bouhey ont manifesté leur préférence respectivement pour les lots 26, 27 et 28, en se fondant essentiellement sur leur connaissance des lieux ; elles obtiennent satisfaction (annexes VII-25, II-19 et VI-44).

L'entreprise Serpollet (annexes II-20 et VII-16) précise qu'elle a été admise, en 1984, sur quatre lots, et que, compte tenu de son activité principale et de sa technicité, elle préférait un lot de branchements particuliers. Elle ajoute que le lieu de son implantation la conduisait à préférer le lot 29 (Vénissieux), qu'elle obtient.

Schevack rappelle (annexes II-21, VI-26 et VII-24) que le lot 21 présentait des difficultés techniques et qu'elle avait donc souhaité y renoncer ; elle obtient le lot 30 qu'elle estimait plus intéressant pour elle.

Le précédent titulaire du lot 30, l'entreprise Coiro obtient le lot 21.

Ainsi, à l'issue de l'appel d'offres de 1984, la quasi-totalité des entreprises attributaires ont obtenu le lot de leur souhait et, en outre, les changements d'attributaires revêtent un caractère exceptionnel.

En ce qui concerne la nature des offres, il apparaît que le montant des rabais n'est pas essentiellement déterminé par des calculs techniques précis et qu'il reflète l'intérêt que manifeste l'entreprise pour le lot. Chaque entreprise ne présente qu'un rabais significatif, parfois deux.

Chaque entreprise se présente sur plusieurs lots, mais le rabais le plus important est proposé sur le lot qu'elle désire obtenir, les autres lots faisant l'objet de rabais de plus en plus faibles, voire de majorations, selon l'ordre de ses préférences.

Ainsi, Guilbaud propose - 9 sur le lot 27, mais + 4 sur les lots 22 et 25, Carrion présente un rabais de - 9 sur le lot 14 et une majoration de + 6 sur le lot 15, Collet propose - 8 sur le lot 10, + 10 et + 9 sur les lots 1 et 2, Sobea propose + 6 sur le lot 4 et - 5 sur le lot 25, Serpollet propose + 6 sur les lots 14 et 15 et - 6,5 sur le lot 29, STTP présente un rabais de - 6 sur le lot 1, - 5 sur le lot 5, mais une majoration de + 5 sur le lot 2, Pommier propose - 6,5 sur le lot 7 et + 9,5 sur le lot 1, Monin propose - 5 sur le lot 2 et + 6 sur le lot 24, les Carriers des Saignes offrent - 7 sur le lot 13 et + 10 sur le lot 5, Coiro présente un rabais de - 5,2 sur le lot 21 et une majoration de + 6 sur le lot 25, Charles de Filippis propose - 6 sur le lot 11 et + 3 sur le lot 10, SVTP propose + 4 sur le lot 10 et - 7 sur le lot 13, Gauthey offre - 5,5 sur le lot 22 et des majorations sur les lots 26, 27 et 30, Legros propose - 5 sur le lot 23 mais des majorations sur les lots 14, 27 et 28, Paulet offre - 7 sur le lot 24 et + 3 sur le lot 30.

La qualité spécifique de la prestation de tel ou tel exploitant ne peut avoir aucune influence sur le choix final de l'attributaire du lot car la Courly désigne systématiquement le moins disant sur chaque lot. La sélection préalable est faite en fonction des capacités techniques des entreprises, mais parmi les entreprises sélectionnées (6 à 7 selon les lots en 1984), seul le montant du rabais déterminera l'attributaire final du lot.

Dans les cas de reconduction du précédent titulaire, celui-ci garde son lot quelle que soit son attitude par rapport au montant de son offre précédente (en 1980) ; le montant des rabais précédemment consentis par les titulaires est communiqué par la Courly à l'ensemble des entreprises et peut servir de référence aux différents offreurs. Lorsque le titulaire d'un lot, profitant de l'expérience acquise dans son exploitation, propose un rabais plus intéressant en 1984 qu'en 1980, il conserve le lot, et cela aussi bien s'il est le seul à proposer mieux que le rabais antérieur (ainsi les lots 1, 2, 3,9, 10, 11, 12, 13, 14, 23, 24, 25, 26, 28) que si d'autres concurrents ont proposé également un rabais supérieur à celui du précédent titulaire (lots 4, 5, 7, 16) ; lorsque le précèdent titulaire n'augmente pas son rabais, il l'emporte tout de même, aucun concurrent n'ayant proposé mieux que le rabais antérieur (cas du lot 22) le précédent titulaire l'emporte encore lorsqu'il fait une proposition de rabais inférieure à celle avec laquelle il l'avait emporté en 1980 (lot 27).

Il ressort des propos des chefs d'entreprise que, lorsqu'une entreprise souhaite, pour des raisons diverses, changer de lot, elle y parvient le plus souvent. On observe déjà ce phénomène en 1980 Perrier a alors pris le lot 16, proche du siège de la société, qui l'intéressait davantage que celui qu'elle exploitait précédemment (n° 8) et les Carriers des Saignes, souhaitant se rapprocher de leur siège, obtiennent le lot 13. En 1984 plusieurs résultats correspondent à la volonté d'un précédent titulaire de changer de lot c'est, comme on l'a vu, le cas des entreprises Schevack, société d'exploitation De Filippis et Anale. En 1988 Pommier, qui souhaite abandonner le lot 7 pour se rapprocher de son siège de Saint-Priest, obtiendra le lot de Bron situé à proximité.

Entre 1980 et 1984, on constate que les changements croisés d'exploitants qui se produisent sur les lots 8-15 d'une part, 21-30 d'autre part, coïncident avec des modifications concernant les rabais

Deal et Artale sont attributaires conjoints du lot 8 en 1980 avec un rabais de - 5 ; en 1984, Anale ne propose que + 3 sur ce lot, mais le groupement Nouvetra-Artale prend le lot 15 avec un rabais de - 8,5 ; le précédent attributaire du lot 15, la société d'exploitation De Filippis, l'a obtenu avec un rabais de - 6 en 1980 ; en 1984 cette société obtient le lot 8, conjoint avec Deal, en proposant - 8,5, alors qu'elle ne propose que - 4 sur le lot 15.

La société Schevack a eu le lot 21 en 1980 avec un rabais de - 4,5 et prend le lot 30 en 1984 avec un rabais de - 6, alors qu'elle ne propose que - 4,5 sur le lot 21. L'entreprise Coiro a obtenu le lot n° 30 en 1980 avec - 5,5 ; elle obtient le lot 21 en 1984 avec une proposition de rabais de - 5,2 alors qu'elle ne propose que - 5 sur le lot 30.

Dans le cas du lot 29 où une entreprise laisse un lot vacant (règlement judiciaire de l'entreprise Guignardat, titulaire du lot), peu d'entreprises se présentent pour prendre le lot disponible, et les rabais consentis sont du même ordre que sur les autres lots ; seule une entreprise propose un rabais supérieur (- 6,5) à celui du précédent titulaire du lot en 1980 (- 5) ; cette entreprise, nouvelle venue sur ce marché (Serpollet), ne propose d'ailleurs de rabais que pour le lot qu'elle qualifie elle-même de disponible, et des majorations sur les deux autres lots pour lesquels elle a été sélectionnée.

Il résulte des déclarations d'un certain nombre d'entrepreneurs qu'ils reconnaissent déposer des offres "cartes de visite" sur les chantiers qui ne les intéressent pas pour des raisons diverses. Ainsi M. Blondet déclare (ann. II-8) : "Je ne tiens pas à m'excuser sur les chantiers m'intéressant peu car je pourrais être pénalisé par la suite" de même le représentant de SVTP dit (ann. II-14) "Sur des marchés qui requièrent une qualification, nous préférons répondre pour éviter de courir le risque de ne plus être consultés" ; M. Bouhey déclare (ann. II-19) "J'étais peu intéressé et je pensais avoir peu de chances d'obtenir le marché j'ai quand même soumissionné pour continuer d'avoir des rapports avec la Courly" ; le représentant de la société Anale ajoute (ann. II-16) : "Lorsque nous proposons un faible rabais ou une majoration, cela signifie que nous ne sommes pas intéressés par le marché" . En particulier en ce qui concerne les lots d'entretien, des entreprises déclarent que certaines de leurs soumissions étaient de pur principe ainsi Serpollet (ann. II-20), qui soumissionne à + 6 sur Les lots 14 et 15, expose que "les lots 14 et 15 m'intéressaient peu, étant considéré que l'entreprise Serpollet est récente dans le métier et plus spécialisée dans les branchements particuliers" Schevack (ann. II-21) affirme : "Nous n'étions pas du tout intéressés par le lot 23, pour lequel nous avons proposé une majoration pour être sûrs de ne pas l'avoir" ; M. Blondet déclare (ann. VI-1) : "Je fais Le rabais maximum sur [le lot] que je souhaite vraiment obtenir, puis, de manière dégressive, sur les autres (0 ou + 1 si je veux seulement répondre par principe)" Gauthey (ann. VII-11) allègue que "à tort ou à raison, elle a pensé que n'étant interrogée que sur 7 lots, si elle ne répondait pas sur chacun d'eux, elle risquait dans l'avenir de ne plus être admise à soumissionner ou de ne l'être que pour un nombre de lots plus limité" Carriers des Saignes et Charles de Filippis (ann. VI-19 et VII-27) expliquent qu'elles visent, chacune, un lot, qu'elles répondent sur d'autres lots uniquement pour être présentes et que "pour les lots entretien, chacun répond sur plusieurs affaires pour manifester sa présence, mais en cible une (...) en 1984, il y a eu sur le lot 11 une soumission de Charles de Filippis et une de Carriers pour manifester notre présence dans le secteur Nord de Lyon. De Filippis, avec - 5,5, avait ciblé ce lot, Carriers répondant seulement par principe. Bouhey ne s'intéressait pas au lot n° 13. Il s'intéressait seulement à son lot de branchements (n° 28) de Vaulx-en-Velin-Villeurbanne" selon M. Picolo (ann. II-13) "concernant mon secteur (lot 11), il me semble qu'aucune autre entreprise n'est vraiment intéressée, il s'agit certainement de cartes de visite de leur part".

b) Description des pièces saisies

La pièce n° 4 de l'annexe II-17, saisie au siège de la société Perrier, et portant la mention dactylographiée "assainissement entretien 1985", comporte, dans la partie gauche du document, une photocopie du bulletin municipal officiel de la ville de Lyon du 30 septembre 1984 annonçant les marchés avec le montant des 26 lots et le territoire couvert pour chaque lot. Ce tableau a été surchargé au crayon par des lignes horizontales séparant les 16 lots d'égouts. Ces lignes n'ont pas été portées pour les 10 lots de branchements. Par contre, pour ces lots, 2 traits verticaux ont été tracés, formant accolade, l'un des lots 21 à 24, l'autre des lots 25 à 28. En face du lot 8 figure une petite croix. La partie droite du document comporte un autre tableau, lui aussi photocopié. Il s'agit de la liste des 26 lots, avec, pour chacun, le montant maximum prévu pour 1985 et la liste des entreprises ayant été admises à présenter une offre en décembre 1984. Le nom de l'attributaire du lot en 1980 est précédé d'un astérisque, sauf pour le lot 29 où le nom de Guignardat (admise au règlement judiciaire) n'est pas porté. Les numéros de lots pour lesquels Perrier était candidat sont surlignés en jaune avec, au crayon, l'indication du rabais proposé par Perrier. En bas à gauche de cette 2e page on trouve une liste manuscrite ainsi composée : EI, SGE, Nouvetra, GTM, Petavit, Albertazzi, Eltra, Serpollet, Canaly, TPO, Mazza. Ces noms sont ceux des entreprises admises à déposer une offre en 1984 et qui n'avaient eu aucun lot en 1980. Certains de ces noms sont cochés d'une barre verticale. Interrogé sur ce document, M. Perrier déclare (ann. VI-15) qu'"il s'agit d'un montage d'un document de la Courly et d'une liste des entreprises retenues, faite par M. Souc, ingénieur d'études à l'époque, qui a quitté l'entreprise. Les noms en bas à gauche sont probablement ceux des entreprises qui n'avaient rien eu". Les entreprises Eltra, TPO, Nouvetra entreront sur le marché des lots d'assainissement en 1984 comme conjoints d'exploitants précédents, Serpollet comme nouvel exploitant du seul lot vacant. L'entreprise Perrier a admis (ann. VII-17 et mémoire du 5 janvier 1990) que le tableau avait pu être confectionné avant la remise des plis.

La pièce n° 5 de l'annexe II-5, saisie au siège de STTP, est un tableau relatant, par entreprise, le chiffre d'affaires réalisé avec la Courly durant les années 1981 à 1984, en travaux neufs et en entretien. Ce document est la photocopie d'un original établi à la main par un agent de la Courly. Le tableau a été mis à jour le 24 août 1984 pour les travaux neufs, ainsi que le 26 octobre 1984, ce qui "reflète les paiements fin août" d'après les mentions manuscrites qui viennent de la Courly et figurent en photocopie. Des mentions manuscrites ont été ajoutées par M. Hardy, président-directeur général de STTP (annexe VI-30), qui représentent la part de marché de chaque entreprise dans les travaux de la Courly (à part quelques incertitudes tenant aux groupements). Une liste d'entreprises qui figure en haut à droite se présente ainsi :

"Serpollet) demandeur lot Guignardat ou Guillet ;

" Eltra)

" Mazza

" TPO) demandeurs lot Guignardat ;

" Nouvetra)

" (Petavit

" (Albertazzi

" Galeries

" GTM

" Borie

" Montcocol

" Sobea

" Maia-Sonnier ".

Les sept entreprises de la première liste, de même que GTM, Borie, Montcocol, n'avaient pas eu de lot d'assainissement en 1980. Les quatre entreprises mentionnées comme "demandeurs" à la date de rédaction de ces notes seront les quatre à entrer sur le marché en 1984 ; les notes ont donc été portées, avant l'ouverture des plis, ainsi que le reconnaît d'ailleurs M. Hardy (annexe VI-30).

La pièce n° 4 de cette même annexe II-5 est une feuille entièrement manuscrite au crayon à papier. Saisie dans le bureau même de M. Hardy, comme le document n° 5, ce feuillet porte les coordonnées de toute une série d'entreprises mais non celles de STTP, mentionnée en premier ce document a été rédigé par M. Hardy. Dans l'entreprise STTP ont été saisies d'autres listes d'entreprises comportant des noms de responsables et des numéros de téléphone.

Ce feuillet comporte, dans sa partie gauche, une liste d'entreprises. Il s'agit de : STTP, Monin, Deluermoz, Maia, GG, Blondet, Asphalteurs (ligne effacée - on peut deviner : Pommier), Deal, Artale, Bourdin, Beylat, Collet, C de Filippis, STPA, Carriers des S (deux lignes effacées où l'on devine SVTP et Carrion), S-Ex de Filippis, Perrier, Schevack, Gauthey, Legros et Cie, Bouhey, Sobea, Coiro, Eltra, Nouvetra, Petavit. Suivent, dans la colonne de droite, Guillet, puis quelques noms rayés (TP des Mts du Lyonnais, Gerland, Cochery, Lefèbvre, Dafflon, Sade, Menusar, CLGB, Chapelle, Mialor).

Interrogé sur ce document, M. Hardy déclare (ann. VI-30) qu'il s'agit d'entreprises à toucher pour une réunion technique au syndicat.

Les noms rayés, à droite, sont les noms de dix entreprises potentiellement intéressées par le marché de la maintenance du réseau d'assainissement Courly, dont certaines poseront leur candidature en 1984, mais n'obtiendront pas de lot.

L'ordre des noms de la colonne de gauche ressemble à celui des résultats de l'appel d'offres des lots d'entretien de la Courly pour 1980 et pour 1984 mais ne coïncide exactement ni avec l'un ni avec l'autre Guignardat, seule entreprise sortie du marché du fait de sa mise en règlement judiciaire, qui ne sera pas candidate en 1984, ne figure pas sur le document mais y figurent de nouvelles entreprises par rapport à 1980 : Eltra, Nouvetra, Petavit. Les noms de ces trois entreprises se trouvaient également sur la liste établie par Perrier (ann. II-17 pièce 4) et sur celle dressée par STTP (ann. II-5 pièce 5) ci-dessus décrites. Eltra et Nouvetra seront attributaires d'un lot en décembre 1984.

Par rapport aux résultats de 1984, les noms de vingt-neuf entreprises non rayées, figurant sur cette liste ou y étant encore visibles, correspondent à 29 des 34 attributaires des 26 lots 18 Lots ont dans la liste l'attributaire qu'ils auront en décembre 1984 il s'agit des lots attribués à STTP, Monin, Deluermoz- Maia-Sonnier, Gantelet-Galaberthier, Blondet, Asphalteurs, Pommier, Deal, Bourdin-Beylat, Collet, Charles de Filippis, STPA, SVTP-Camers des Saignes, Carrion, Perrier, Gauthey, Legros, Sobea .Huit entreprises - Artle, Société d'exploitation de Filippis, Eltra, Nouvetra, Coiro, Schevack, Bouhey, Guillet - mentionnées dans cette liste, obtiendront un lot différent de celui correspondant à l'ordre du document Petavit figure dans la liste et n'aura pas de lot Paulet-TPO, Serpollet, Fleitou et Guilbaud n'y figurent pas alors qu'ils obtiendront un lot, seuls ou conjoints. Ainsi, cette liste apparaît comme un schéma de répartition des lots établi avant la remise des offres. En outre, divers signes et mentions figurant à côté des noms des entreprises Monin, Deluermoz, Maia, GG, Blondet, Asphalteurs, Deal, Artale, Bourdin, Beylat, Collet, C. de Filippis, STPA, Carriers des S, S- Ex de Filippis, Perrier, Schevack, Gauthey, Legros et Cie, Bouhey, Sobea, Coiro, Eltra, Guillet, donnent à penser que des échanges d'informations ont pu avoir lieu.

La pièce 6 de l'annexe II-5 est datée du 12 décembre 1984, c'est-à-dire quelques jours après l'ouverture des plis (le 5 décembre 1984), et avant la notification officielle des résultats.

Le texte en est le suivant :

" Communauté urbaine de Lyon

" Travaux de maintenance du réseau d'assainissement

" Nous soussignés : Paul Blondet, Jean-Claude Hardy, Georges Picolo, Joseph Perrier, représentant les entreprises déclarées adjudicataires pour les travaux d'entretien des égouts et maçonneries ainsi que pour les branchements particuliers pour l'année 1985 avec possibilité de reconduction (délai total maximum quatre ans) ainsi que Gérard Gantelet et Jacques Altobelli, représentant respectivement les entreprises Gantelet et Galaberthier et Collet, reconnaissons ce qui suit :

" - l'ensemble des entreprises déclarées adjudicataires reconnaît devoir à l'entreprise Mazza de Champagne-au-Mont-D'Or, un montant de travaux égal à la moitié du montant exécuté sur le lot 16, évalué dans un premier temps donc à la moitié de 800 000 F. Ce montant sera réajusté en fin de chaque année suivant le montant réellement exécuté.

" Ce dû sera réglé de la façon suivante :

" - sur le lot n° 4, commune de Champagne, pour un montant de 150 000 F ;

" - sur le lot n° 11, commune de La Tour-de-Salvagny, pour un montant de 150 000 F ;

" - sur le lot n° 10, commune de Marcy-l'Etoile, pour un montant de 150 000 F.

Au cas où ces sommes ne pourraient être atteintes sur ces trois communes, une compensation en travaux neufs serait servie."

Les signatures sont celles de MM. Paul Blondet, Jean-CLaude Hardy, Georges Picolo, Joseph Perrier, Gérard Gantelet, Jacques Altobelli, Alain Mazza.

L'entreprise Mazza, entreprise de travaux publics qui, connaissant quelques difficultés à cette période, amorçait en 1984 une reconversion vers des travaux d'entretien alors qu'elle ne s'y était guère intéressée auparavant, avait demandé à présenter une offre sur tous les lots et avait été admise à soumissionner sur les lots 16, 26 et 29 les lots 4 et 10 sur lesquels elle n'avait pas été admise à présenter d'offres, mais les plus proches de son siège de Champagneau-Mont-d'Or, ont été ensuite dévolus respectivement aux entreprises Collet et Gantelet-Galaberthier faute d'avoir été sélectionnée pour ces lots, Mazza (ann. VI-35) portait sa préférence sur le lot 16, Le plus important. Certains entrepreneurs, dont M. Blondet (ann. VI-1), M. Gantelet (ann. VI-5), M. Picolo (ann. VI-19), M. Perrier (ann. VI-15) se sont étonnés de ce que Mazza ait été intéressée par le lot 16 situé à l'opposé de son siège. C'est ce lot 16, convoité par Mazza, qui sert de référence dans l'accord signé le 12 décembre 1984.

Ainsi, la société Mazza, écartée de l'attribution du lot 16 qu'elle convoitait, a obtenu une compensation financière en travaux sur les lots proches de son siège, garantie par six entreprises adjudicataires - dont Perrier attributaire du lot 16 - déclarant agir au nom de tous Les autres attributaires.

C. - Le marché du collecteur de la vallée des Razes

1. Ses caractéristiques

Le collecteur de la vallée des Razes est un égout visitable (2,10 mètres de diamètre) construit en 1985-1986 sur La commune de Sainte-Foy-lès-Lyon. L'ouvrage sera réalisé en trois tranches successives. La première et la troisième tranche sont des marchés publics passés par la communauté urbaine de Lyon la seconde tranche, située dans la voirie du lotissement du Baron-du-Marais, sur le terrain d'un promoteur privé - la société Deviq Rhône-Alpes - devait ultérieurement [aire partie intégrante de l'ouvrage de la Courly mais, tant pour des raisons financières que de délai, la société Deviq fut chargée de réaliser les travaux, à condition que l'entrepreneur auquel ils seraient confiés soit agréé par la Courly. La société Pommier est attributaire de la première tranche de travaux, avec un rabais de 8,2 p. 100 sur un montant de 1 021 092 F (HT), le 23 octobre 1985. Le marché de la seconde tranche (situé à Francheville), pour laquelle la remise des plis est fixée au 7 février 1986 sera signé en avril 1986 entre Deviq et l'entreprise Bouhey pour 980 000 F (HT). La troisième tranche (avenue du Chater), d'un montant de 979 933 F (HT), sera attribuée à STTP avec un rabais de 6 p. 100 par la Courly Le 16 avril 1986.

Le marché passé par la société Deviq, seul en cause ici, commence par la consultation des différentes entreprises agréées par la Courly pour les égouts visitables, à savoir : Montcocol, Cochery-Bourdin-Chaussé, SGE-BTP, Borie SAE, Sobea, EI Coca, Perrier, GTM, SVTP, Gantelet-Galaberthier, Monin-TP, Blondet, STTP, STPA, EGBTP Maia-Sonnier, Deluermoz, Pommier. Les entreprises Pommier, EI, SVTP, STPA, Montcocol ne présentent pas d'offre. Les douze autres entreprises remettent les offres suivantes : le moins-disant est STTP avec 1 177 118 F (HT), puis se trouvent Monin (1 218 150 F), Blondet (1 220 973 F), Gantelet-Galaberthier (1 226 569 F), Perrier (1 253 539 F), Deluermoz (1 253 970 F), EGBTP Maia-Sonnier (1 267 385 F), Cochery (1 312 225 F), SGE (1 352 828 F), GTM (1 362 518 F), Sobea (1 392 253 F), Borie SAE (1 393 669 F).

Le maître d'ouvrage, la société Deviq, avait, avec le bureau d'études RREA, maître d'œuvre, estimé Le coût du collecteur, long de 350 mètres environ, à une somme comprise entre 900 000 et 1 000 000 F (HT). Jugeant les offres présentées trop élevées, et estimant impossible, vu l'écart de prix, de négocier avec le moins-disant, il choisit de faire appel à une autre entreprise, jusque-là non agréée pour ce type d'ouvrage auprès de la Courly. Il s'agit de Bouhey, qui présente une première offre le 12 mars 1986 à 986 506 F. Des négociations sont entreprises et Bouhey fait un rabais de 4 p. 100, ce qui mène à 940 000 F, puis Bouhey demande que l'on prenne en compte dans le forfait la présence de rochers qui risque de rendre plus difficiles les travaux après sondages, le marché est signé, le 28 avril 1986, pour un montant de 980 000 F (HT) avec Bouhey et STPA, conjoints ; STPA, qui appartient en partie à Bouhey, avait l'agrément de la Courly et les personnels, matériels et qualifications des entreprises se complétaient. Le prix de 980 000 F (HT) est "un prix global et forfaitaire, ferme et non révisable, sauf terrassement en rocher ou maçonnerie" (ann. VI-48).

2. Les pratiques relevées

Au siège de l'entreprise STTP a été saisi un ensemble de fiches contenues dans une chemise intitulée " Deviq Rhône-Alpes, Les Razes-Francheville A 210, février 1986 ". Chaque feuillet porte le titre "Francheville A 210", le nom d'une des seize entreprises admises à déposer une offre à part STTP et, sur un cadre commun préétabli comportant dix-sept postes du bordereau remis aux entreprises, les prix unitaires, quantités, prix totaux et montant global HT de chacune des offres. Ces documents ont été trouvés dans le bureau de M. Hardy, président-directeur général de STTP, et ont tous été écrits par lui.

Montcocol, Pommier, SVTP, STPA, EI n'ont pas déposé d'offre pour ce marché alors que le nom de chacune de ces entreprises figure sur une des fiches saisies chez STTP Par procès-verbal d'audition du 9 septembre 1986 (ann. II-22), M. Echassoux, ingénieur de l'Entreprise industrielle, a déclaré "En ce qui concerne l'affaire Deviq, nous n'avons pas soumissionné. Nous avons donné par téléphone nos prix, mais je ne me souviens plus du nom de mon correspondant. Cela nous arrive parfois de communiquer nos prix. Il s'agit, dans ce cas, d'affaires qui ne nous intéressent pas." Par procès-verbal d'audition du 3 janvier 1989 (ann. VI-97), il a précisé : "Pour le collecteur de la vallée des Razes, c'était un marché de la société Deviq. L'Entreprise industrielle a retiré un dossier et étudié l'affaire. L'étude aboutissait à un prix de 52 p. 100 plus élevé que le prix résultant du bordereau. Une telle différence n'est pas exceptionnelle tout dépend de la manière dont on estime le risque. Quand on obtient un tel écart, on préfère s'excuser, ce que nous avons fait dans cette affaire. Avant la remise des offres, j'ai eu une communication téléphonique avec STTP - car j'avais besoin de lui pour une exploration par caméra - au cours de laquelle il m'a parlé de ce marché. Je lui ai dit que le marché ne m'intéressait pas ; il m'a alors demandé mes prix ; comme je ne remettais pas d'offre, je lui ai donné mes prix qui ont dû être transmis par téléphone par un de mes collaborateurs. Le document saisi chez STTP et intitulé "EI" n'a pas été rédigé dans mon entreprise. Le maître d'ouvrage n'a pas eu connaissance de ces chiffres. Ils n'ont été communiqués qu'à STTP"

Pour les entreprises Cochery, Gantelet-Galaberthier, SGE, Borie SAE, EGBTP Maia-Sonnier, Blondet, GTM, Monin, Deluermoz, les prix totaux portés sur les feuillets de STTP correspondent exactement au montant des offres remises à Deviq, de même que les dix-sept prix unitaires figurant sur les fiches correspondant exactement aux prix mentionnés par chacune des entreprises dans sa soumission. Pour l'entreprise Perrier, le montant de l'offre totale indiqué par M. Hardy est voisin de celui de l'offre finalement déposée mais non identique (1 262 795 F et 1 253 539 F). Pour Sobea, le montant total de l'offre est de 1 393 664 F dans la fiche de STTP, et 1 392 253 F sur l'offre remise ; les prix unitaires B 02, C 010, C 020, C 021, C 030, C 031, C 04, C O5 sont les mêmes dans l'offre et dans la fiche au nom de Sobea ; les prix unitaires A 010, A012, A014, A03 sont majorés de 1 F dans la fiche par rapport à l'offre déposée, tandis que les prix unitaires A 011, A 013, B 01 sont minorés de 1 F dans la fiche par rapport à l'offre faite.

Pour Cochery, l'étude figurant au dossier (ann. V-7) comporte des prix unitaires strictement identiques, pour chaque poste, à ceux de la fiche "Bourdin" saisie chez STTP.

M. Parhault avait d'ailleurs reconnu (ann. II-11) qu'il s'agissait bien de ses prix unitaires. De même, pour l'entreprise Monin, M. Favero reconnaissait (ann. II-6) que les prix figurant sur la fiche de STTP "correspondent bien à l'étude que nous avons réalisée pour le chantier de l'égout de type A 210 à Francheville". L'étude présentée par Blondet (ann. VII-26) comprend aussi un certain nombre de prix que l'on retrouve sur la fiche de STTP à son nom. Il en est de même de l'étude de l'Entreprise industrielle (ann. V-7). Pour GTM, les prix unitaires de l'étude produite (ann. VII-32) correspondent, si on leur applique un coefficient uniforme de 1,3 environ, aux prix figurant dans l'offre remise et sur le bordereau de STTP (ann. V-8).

Deux entreprises ont reconnu avoir effectué des corrections, par rapport à leurs études initiales, lors de la rédaction définitive de leur offre. D'une part, Perler a fait une première étude manuscrite qui aboutit à 1 106 964 F l'étude définitive, dactylographiée, fixe le prix total à 1 253 539 F. La différence entre ces deux montants provient de la majoration des prix des postes B 02 et C 04. M. Perrier déclare (procès- verbal d'audition ann. II-17) : "J'avais demandé à M. Ménager de ne pas porter une attention particulière à cette affaire et de ne pas faire trop d'efforts. Pour le reste, je n'ai aucun souvenir" ; il précise (ann. VI-15) : "Ces deux postes ont un caractère forfaitaire, assez difficile à chiffrer précisément car ils ne relèvent pas de notre spécialité technique ; il faut demander une idée de prix à un sous-traitant ; comme nous n'avions pas vraiment besoin de ce marché à ce moment-là, j'ai demandé à M. Ménager de ne pas faire de prix trop serrés. Sur ces postes à caractère forfaitaire, on a corrigé à la hausse pour ne pas prendre de risque, car le marché ne nous intéressait pas vraiment. " La fiche "Perrier" saisie à STTP comporte pour le poste B 02 un montant de 1 550 F, soit une valeur intermédiaire entre les deux valeurs retenues par Perrier dans ses deux études successives et pour le poste C 04 un montant de 40 000 F, qui est celui proposé par Perrier dans l'offre finalement remise.

D'autre part, le représentant de Deluermoz a déclaré "J'ai réalisé une étude sérieuse mais ce chantier me faisait peur, j'ai rajouté 25 p. 100 par rapport à mon estimation initiale. "

STTP, entreprise chez Laquelle ont été saisies les 17 fiches que M. Hardy,son président-directeur général, reconnaît avoir rédigées, et qui s'est trouvée la moins disante des 17 entreprises consultées, affirme avoir été très intéressée par ce marché à la fois pour des raisons techniques et géographiques ; elle obtiendra de la Courly l'attribution des travaux de la troisième tranche lors de l'appel d'offres du 16 avril 1986.

II. - A la lumière des constatations qui précèdent, le conseil de la concurrence

Considérant que les faits constatés sont antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et doivent être appréciés au regard des dispositions des articles 50 et 51 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, qui demeurent applicables en l'espèce ;

Considérant que notamment les sociétés Sobea et Cochery soutiennent que les pratiques relevées à l'occasion de deux procédures d'appel d'offres distinctes ne sauraient avoir par elles-mêmes un effet sur le marché au sens de l'article 7 de l'ordonnance de 1986 susvisée ;

Mais considérant que l'un des objets essentiels d'une procédure d'appel d'offres est de favoriser et de garantir le libre jeu de la concurrence sur le marché économique sur lequel elle intervient ; que dès lors l'adoption ou la mise en œuvre, par des entreprises, de pratiques destinées à faire échec aux règles de concurrence qui s'imposent dans une telle procédure revêt nécessairement le caractère d'une action sur le marché et relève de l'application des dispositions de l'article 50 de l'ordonnance de 1945 susvisée et de l'article 7 de celle de 1986 ;

Sur la prescription :

Considérant que les plus anciens des procès-verbaux de saisie, datés du 22 avril 1986, ont interrompu le cours de la prescription ; que les faits antérieurs au 22 avril 1983 ne peuvent être qualifiés par le Conseil de la concurrence qu'ils peuvent cependant être relatés à seule fin de permettre la compréhension des griefs retenus et relatifs à des faits encore susceptibles d'être sanctionnés ;

Sur la procédure :

Considérant que les entreprises GTM et Borie estiment qu'en l'absence d'audition de leurs responsables, il ne saurait être articulé ni maintenu contre elles de grief que, selon la société EGBTP Maia-Sonnier, il y aurait violation des droits de la défense à notifier des griefs à une entreprise sans qu'elle ait été mise en mesure de s'exprimer ni mise au courant de l'enquête qui la concernait ; que cette société soutient que l'expression "le cas échéant"employée par l'article 20 du décret n° 86-1309 susvisé à propos des auditions signifierait que le rapporteur doit entendre toutes les entreprises auxquelles il notifie des griefs, puisque selon l'article 18 de l'ordonnance, la procédure est "pleinement contradictoire" ; que cependant, en l'absence d'obligation légale en la matière, la circonstance que des responsables ou des cadres de ces entreprises n'ont pas été entendus au cours de l'instruction par le rapporteur est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors que, comme en l'espèce, toutes les parties intéressées ont été en mesure de déposer en temps utile leurs observations tant sur la notification de griefs que sur le rapport, ainsi que de présenter leurs observations orales devant le conseil;

Considérant que, si l'entreprise Montcocol fait valoir que la saisine ne mentionnait pas le nom de cette société, il est constant qu'elle concerne à la fois l'attribution des lots d'entretien des égouts de la Courly à 34 entreprises et celle de la construction du collecteur de la vallée des Razes pour laquelle 18 entreprises ont été consultées ; que du fait de cette saisine, qui n'avait pas à mentionner les noms de toutes ces entreprises, le conseil se trouvait saisi de la situation d'ensemble de ces deux marchés ;

Considérant que les entreprises EGBTP Maia-Sonnier et Deluermoz allèguent que la visite d'un agent de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, pour demander communication de leurs chiffres d'affaires, constitue une violation des droits de la défense, la sanction étant calculée avant que la nécessité en ait été établie par le conseil ; qu'elles ajoutent que cette visite, effectuée pendant le délai de réponse des entreprises au rapport, constitue une pression sur celles-ci ;

Mais considérant qu'il est matériellement nécessaire que le conseil dispose, avant que l'affaire soit appelée en séance, de l'ensemble des éléments indispensables à sa complète information ; que le fait de recueillir ces données ne préjuge en rien de sa décision ;

Considérant que, les griefs n'ayant pas été notifiés au liquidateur de la société Eltra, la procédure ne peut être poursuivie à l'encontre de cette entreprise ;

Sur l'administration de la preuve :

Considérant que les entreprises GTM, Montcocol et Borie soutiennent qu'en l'absence de saisie de documents chez elles, il ne saurait être articulé ni maintenu contre elles de grief ; que Borie, Cochery, Deluermoz, Gauthey, GuilLet, Serpollet et Sogea allèguent qu'en l'absence de preuve matérielle de concertation provenant de leur entreprise, rien ne peut leur être reproché ; que les entreprises Beylat, Collet, Perler, Schevack et la société d'exploitation De Filippis déclarent que les documents établis par des concurrents n'engagent que la responsabilité de ceux-ci que Perrier et Collet arguent que les éléments de preuve ne peuvent être que des éléments matériels et non des analyses de résultats ; que STTP estime que les griefs ne reposent que sur des hypothèses ; que Monin souligne que certains documents retenus comme indices d'entente n'ont pas date certaine ; que Perler précise qu'"il est naturel que des entreprises aient cherché par des moyens que rien ne permet de qualifier d'anormal, à obtenir le nom d'entreprises intéressées" et ajoute que "s'il y a pu avoir sur ce point (identité des entreprises admises à soumissionner) un échange d'informations, cet échange n'a pu avoir en lui même pour objet ou effet de limiter l'exercice de la libre concurrence" ;

Considérant, d'une part, qu'en matière de marchés publics ou privés sur appels d'offres, une entente anticoncurrentielle peut prendre la forme, notamment, d'une coordination des offres ou d'échanges d'informations entre entreprises antérieurs à la date de dépôt des plis, qu'il s'agisse de l'existence de compétiteurs, de leur nom, de leur importance, de leur absence d'intérêt pour le marché considéré, ou des prix qu'ils envisagent de proposer ; que la preuve de l'existence de telles pratiques, qui sont de nature à limiter l'indépendance des offres, condition du jeu normal de la concurrence, peut résulter en particulier d'un faisceau d'indices constitué par le rapprochement de diverses pièces recueillies au cours de l'instruction, même si chacune de ces pièces prises isolément n'a pas un caractère suffisamment probant; que dès lors les arguments selon lesquels certains documents ne sont ni datés ni signés doivent être écartés, de même que l'argument selon lequel la preuve ne pourrait être que purement matérielle;

Considérant, d'autre part, qu'une pièce émanant d'une entreprise ou reçue par elle lui est opposable où qu'elle ait été saisie : que dés lors les entreprises ne sont pas fondées à dénier la valeur probante à leur égard de documents qui n'ont pas été saisis dans leurs locaux respectifs.

En ce qui concerne les marchés de maintenance de la communauté urbaine de Lyon :

Sur les pratiques constatées :

Considérant qu'il résulte des constatations consignées au 3 a) du B de la partie I de la présente décision que, pour l'appel d'offres de décembre 1984, la plupart des entreprises déclarent ne s'être vraiment intéressées qu'à un lot, qu'elles ont finalement obtenu, mais présentent plusieurs offres, avec des rabais moins élevés, voire des majorations, sur d'autres lots ; que chaque entreprise qui préfère un lot déterminé se retrouve en situation de l'emporter, aussi bien dans le cas où elle en est le précédent exploitant que dans le cas où elle se présente sur un nouveau lot ; que, lorsque le titulaire d'un lot propose un rabais plus intéressant en 1984 qu'en 1980, il conserve le lot que, lorsque le précédent titulaire n'augmente pas son rabais, ou même le diminue, il l'emporte tout de même ; que sur le lot 29 laissé vacant par la mise en règlement judiciaire du précédent exploitant, seule une société propose un rabais plus élevé que le rabais de l'entreprise attributaire en 1980 qu'en cas d'échange observé entre exploitants, le rabais proposé par l'ancien exploitant est égal ou inférieur au rabais consenti par lui lors du précédent appel d'offres, et moins élevé que celui de l'entreprise qui ne connaissait pas le lot et le convoite ;

Considérant que l'ensemble de ces constatations constitue un indice sérieux de concertation préalable et répétée entre les entreprises intéressées en vue de mettre dans chaque cas l'une d'entre elles en situation de remporter l'un des lots qu'elle convoite; que cet indice est corroboré par d'autres éléments du dossier; que notamment les pièces 4 de l'annexe II-17, 4, 5 et 6 de l'annexe II-5, dont l'analyse détaillée figure au paragraphe 3 b) du B de la partie I de la présente décision, révèlent l'existence d'échanges d'informations entre les entreprises; qu'il résulte des termes mêmes de la pièce 6 de l'annexe II-5 susmentionnée que "l'ensemble des entreprises déclarées adjudicataires" des travaux de maintenance du réseau d'assainissement se sont entendues pour accorder une compensation financière à l'entreprise Mazza, qui n'avait pas obtenu le lot qu'elle souhaitait ; qu'il importe peu, dans ces conditions, que les entreprises Sogea et Cochery n'aient pas expressément signé la pièce dont s'agit, dès lors qu'il ne peut être contesté que celle-ci reflète l'accord intervenu entre l'ensemble des adjudicataires des lots d'assainissement qu'enfin la faiblesse des rabais proposés et des écarts constatés entre eux ne peut être intégralement imputée à la précision des bordereaux de prix établis par La communauté urbaine de Lyon (Courly) ;

Considérant qu'il y a lieu de tenir compte du fait qu'en raison de leur nature les prestations d'entretien qui font l'objet des lots soumis en l'espèce à appel d'offres peuvent inciter les entreprises à souhaiter le maintien des positions acquises ; que peuvent jouer dans le même sens les dispositions du règlement adopté par la Courly qui font obstacle à ce qu'une entreprise emporte plus d'un lot, ainsi que la préoccupation dont la communauté urbaine ne fait pas mystère, de "protéger le tissu économique des entreprises locales" ;

Mais considérant que si ces divers facteurs de rigidité propres au marché considéré ne sont pas intégralement imputables aux entreprises, leur existence ne saurait pour autant les autoriser à se soustraire aux règles de libre concurrence ;

Sur les éléments de preuve :

Considérant qu'en admettant même que l'entreprise Coiro ait préféré obtenir le lot 30, cette seule circonstance ne saurait exclure l'existence d'une concertation, alors au demeurant qu'il résulte de l'examen des montants des soumissions auquel il a été procédé dans la partie I de la présente décision, que cette entreprise s'est mise en situation d'obtenir le lot 21 plus que le lot 30 ;

Considérant que l'ensemble des circonstances invoquées par les entreprises Deal et SVTP concernant les conditions d'exploitation des lots postérieurement à l'appel d'offres est sans influence sur l'existence de l'entente ;

Considérant qu'il est exact, comme le souligne l'entreprise Perler, que le seul document saisi chez elle, qui comportait les noms et adresses de concurrents, était une liste provenant de la Courly ; mais que le tableau figurant en annexe II-17 (pièce 4), dont la société reconnaît qu'il a pu être établi avant les résultats de l'appel d'offres, et comportant les noms d'entreprises n'ayant pas eu de lot en 1980, ainsi que la liste des entreprises autorisées à présenter une offre sur chaque lot, accompagnées de différents signes, n'a pu être établi qu'à partir d'informations communiquées par des tiers ;

Sur la situation de la société coopérative ouvrière "Les Asphalteurs réunis" ;

Considérant que la prohibition des ententes anticoncurrentielles édictées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 s'applique quel que soit le statut juridique des entreprises ; que, dans la mesure où l'action de la SCOP ne s'est pas bornée à solliciter son admission sur un lot réservé par application des articles 260 à 263 du livre III du code des marchés publics, mais qu'elle a procédé à des échanges d'informations avec des entreprises candidates sur d'autres lots et déposé une offre sur un lot non réservé, où elle entrait en concurrence avec ces entreprises, son comportement au regard des textes sur la concurrence doit être apprécié sans aucune référence à son statut particulier que dès lors il ne saurait être donné suite à la demande de mise hors de cause de la coopérative Les Asphalteurs réunis ;

Sur le montant des rabais :

Considérant que les entreprises Cochery, Collet, Monin, Perler et Sogea estiment normal que l'ensemble des rabais soit d'un niveau modéré dès lors que Le bordereau de la Courly est précis et bien fait ; que Guillet tire argument des rabais consentis par Mazza pour en déduire que Les rabais de 0 et - 1 sont normaux ; que les entreprises Collet, Deluermoz et Perler soutiennent que l'on ne peut faire aucune comparaison entre les rabais consentis en 1980 et en 1984, dès lors que le bordereau de la Courly a été complètement remodelé ; que, inversement, les entreprises Cochery, Guillet et Sogea, ainsi d'ailleurs que Perler, insistent sur le fait qu'elles ont proposé sur le lot qu'elles exploitaient un rabais plus intéressant en 1984 qu'en 1980, admettant ladite comparaison et expliquant cette amélioration par l'expérience de l'exploitation précédente, pour en tirer l'argument qu'il n'y a pas eu d'entente entre elles, les prix n'ayant pas augmenté à leur avantage ;

Considérant que la comparaison entre les rabais consentis par les diverses entreprises sur un même lot, d'une part, et par chacun des offreurs sur les différents lots pour lesquels il a été admis, d'autre part, révèle, quelle que soit l'importance des écarts, les préférences de chacun et fournit des indices d'échanges d'informations ; que la référence au rabais de 1980, connu de tous les entrepreneurs à la suite de l'information fournie par la Courly, et qu'un grand nombre d'entre eux déclare utiliser comme point de repère, permet d'éclairer le comportement des soumissionnaires ;

Sur l'argument tiré de la qualité des propositions :

Considérant que Guillet argue qu'elle maîtrisait mieux les contraintes de son lot, qu'elle exploitait depuis 1978, que ses concurrents que la société Gantelet- Galaberthier prétend que, par son expérience et ses qualifications, elle présentait le meilleur rapport qualité-prix sur son lot et que cela suffit à expliquer qu'elle l'ait emporté : que STTP et Blondet mettent en avant la spécificité de leur lot et les investissement nécessaires, peu réutilisables sur un autre lot ; qu'elles estiment, de même que Charles de Filippis, Cochery, Collet, les Carriers des Saignes, Perner et Sogea, qu'il est normal que le précédent exploitant fasse le meilleur prix ;

Mais considérant qu'après la sélection préalable opérée en fonction des qualifications des entreprises, le seul critère retenu par la Courly est celui du montant du rabais, puisque le moins-disant est systématiquement désigné ; que, sur des lots ayant des caractéristiques techniques très voisines, des entreprises ayant des qualifications analogues présentent des propositions assez différentes en fonction de leurs préférences ; que, si l'expérience précédente de l'exploitant en place peut lui permettre, par la meilleure maîtrise des contraintes du lot, de présenter une offre plus avantageuse financièrement que les autres entreprises, cette circonstance ne saurait expliquer l'ensemble des résultats de l'appel d'offres de 1984, et notamment le fait que tous les exploitants qui le souhaitaient ont été reconduits, qu'ils aient ou non amélioré leur rabais ;

Sur le rôle du maître d'ouvrage :

Considérant que les entreprises Blondet, Carriers des Saignes, Charles de Filippis, Cochery et Sogea estiment que la Courly se satisfait des comportements des entreprises, dont la reconduction sur les mêmes lots favorise le progrès technique et la productivité ; que, pour Monin, le choix juridique du maître d'ouvrage, avec la sélection des candidats en deux temps et la limitation à un lot par entreprise, limite nécessairement la concurrence ;

Considérant que l'ensemble des facteurs évoqués par les entreprises ne saurait justifier des échanges d'informations préalables à la remise des plis ; que la circonstance, à la supposer établie, que la reconduction des mêmes entreprises sur les mêmes lots correspondant au souhait de la Courly ne pourrait expliquer les résultats des appels d'offres, le maître d'ouvrage ayant toujours procédé à la désignation du moins-disant ;

Considérant que le tirage au sort de l'ordre d'attribution des lots, complément de la règle qui limite l'attribution à un lot par entreprise, ne suffit pas à rendre inopérantes les procédures de concertation ci-dessus constatées ; qu'aussi bien, en ce qui concerne les résultats de l'appel d'offres de 1984, le tirage au sort n'a pas eu pour effet de priver les entreprises de l'attribution du lot qu'elles souhaitaient par priorité :

Sur l'application de l'article 51 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail "s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise " ;

Considérant que les entreprises Monin, EGBTP Maia-Sonnier et Deluermoz se prévalent de cet article pour soutenir que les entreprises en place bénéficiaient d'une "rente de situation" alors que les nouveaux soumissionnaires sur un lot devaient prévoir un coût supplémentaire correspondant aux charges de personnel ; que EGBTP Maia-Sonnier estime que l'effet réducteur de concurrence découle incontestablement de l'application dé ce texte législatif ;

Mais considérant que cette obligation à la charge de l'employeur ne saurait justifier que les entreprises s'entendent pour conserver leur lot ; que dès lors la concertation destinée à déterminer les attributaires des lots ne saurait être regardée comme résultant de l'application de ce texte, au sens de l'article 51 susvisé ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les pratiques constatées à propos de l'appel d'offres relatif à des marchés d'entretien de la Courly tombent sous le coup des dispositions de l'article 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945 sans pouvoir bénéficier de celles de l'article 51, et sont également visées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; qu'il y a lieu, en vertu de l'article 13 de ladite ordonnance, d'infliger aux entreprises qui ont participé à ces pratiques des sanctions pécuniaires déterminées dans les conditions et limites fixées à l'article 53 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 susvisée ;

En ce qui concerne les pratiques relevées sur le marché de la construction du collecteur de la vallée des Razes (2e tranche).

Sur la procédure :

Considérant que si les entreprises Cochery, Monin et Sogea se bornent à rappeler qu'il s'agit d'un marché privé, la société Montcocol prétend que, s'agissant d'un contrat autre qu'un marché public, le ministre n'a pas qualité pour saisir le conseil ;

Mais considérant qu'en vertu de l'article 11 le conseil est compétent pour examiner, à la suite d'une saisine formée par le ministre, les entreprises ou les organismes visés au deuxième alinéa de l'article 5, ou sur saisine d'office, la situation de tout marché, qu'il relève ou non du code des marchés publics;

Sur les pratiques relevées :

Considérant qu'il résulte des constatations consignées au C de la partie I de la présente décision que les offres remises par les entreprises faisaient apparaître STTP, entreprise la plus fortement intéressée par ce chantier, comme moins-disante, les propositions des autres s'échelonnant de 20 à 40 p. 100 au-dessus de l'estimation maximale initiale faite pour le maître d'ouvrage par le bureau régional d'études et d'aménagements (BREA) ; qu'a été saisi au siège de la société STTP un ensemble de seize fiches concernant ce marché, écrites par M. Hardy, président-directeur général de cette société, présentant des prix unitaires et globaux, établis sur un cadre identique, au nom des seize concurrents de STTP consultés par la société Deviq ; que non seulement le montant de ces propositions coïncide avec les prix unitaires et globaux des offres déposées par Cochery, Gantelet-Galaberthier, SGE, Banc SAE, EGBTP Maia-Sonnier, Biondet, GTM, Monin, Deluermoz, mais que le montant des prix globaux ainsi que des prix unitaires figurant sur les fiches saisies chez STTP correspond à celui des études retrouvées chez les sociétés GTM, Cochery, Monin, Blondet et EI ; que les entreprises Perler et Deluermoz ont majoré les prix résultant de leur première étude technique de façon importante, pour tenir compte, selon elles, des risques particuliers, sur le plan technique et commercial, de ce chantier qu'il résulte de l'ensemble des éléments qui ont été analysés au C de la partie I de la présente décision que les entreprises ont procédé à des échanges d'informations sur le contenu de leurs offres préalablement à la remise des plis ;

Considérant que Sogea fait valoir que l'origine des fiches saisies n'est pas établie ; que Cochery, Deluermoz et Monin estiment que des informations ont pu être données à la STTP par le maître d'œuvre ou le maître d'ouvrage : que cependant aussi bien M. Giorgi pour la société Deviq que M. Clerc pour le BREA ont affirmé n'avoir communiqué le contenu des offres à quiconque ; qu'aucune des pièces du dossier ne permet d'établir que le contenu des offres ait été donné par la société Deviq ou le BREA à la STTP ;

Considérant que Les chiffres indiqués par M. Hardy sur Les fiches qu'il a rédigées ne peuvent, contrairement à ce qu'allèguent ses concurrents, notamment la société Gantelet-Galaberthier, résulter de suppositions unilatérales de sa part dès lors que les prix unitaires et globaux portés sur ces fiches correspondent de manière précise aux calculs faits dans les cinq entreprises dont les études ont pu être retrouvées et que les prix unitaires et totaux figurant sur Ces fiches correspondent exactement aux offres remises à Deviq par neuf sociétés ;

Considérant que les sociétés Borie, Cochery, Deluermoz, Monin, Sogea, STTP et GTM soutiennent que l'antériorité des fiches saisies chez STTP par rapport au dépôt des offres n'est pas établie ;

Mais considérant que ces fiches ne peuvent avoir été rédigées après la remise des plis car elles ne reflètent pas le montant des offres finalement déposées, cinq entreprises dont les devis chiffrés sont indiqués dans ces fiches n'ayant en définitive pas déposé d'offre, et deux des offres présentées différant quelque peu des données qui y figurent ;

Considérant que, pour contester la valeur probante desdites fiches, les sociétés Sobea et Perler se prévalent de différences existant entre les montants des offres qu'elles ont remises et ceux figurant sur ces fiches ;

Mais considérant qu'il ressort des pièces du dossier que ces différences sont respectivement de 1 p. 100 pour Sobea et de 0,7 p. 100 pour Perler ; que dans ces conditions l'existence d'écarts aussi limités ne suffit pas pour dénier aux fiches de la STTP la valeur d'un élément de preuve de la participation de ces sociétés à l'échange d'informations ;

Considérant que la société GTM fait valoir qu'elle n'aurait pas fait d'étude précise pour la communiquer ensuite à un concurrent ; qu'elle ajoute que la présence d'une fiche à son nom chez STTP est le seul indice retenu contre elle ;

Mais considérant que le contenu de cette fiche, tant en prix unitaires qu'en prix global, d'une part, est identique à celui de l'offre remise à la société Deviq, d'autre part, correspond aux montants unitaires de l'étude faite par la société ;

Considérant que les entreprises Blondet et Montcocol estiment que la concurrence n'a pu être faussée sur ce marché, le promoteur ayant calculé à l'avance le prix de l'ouvrage avec le maître d'œuvre et traité avec l'entreprise de son choix ;

Mais considérant que les échanges d'informations entre les candidats pour le marché du collecteur de la vallée des Razes pouvaient avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence ;

Sur l'abstention des entreprises SVTP, STPA, Pommier, Montcocol et EI :

Considérant que les entreprises SVTP, STPA, Pommier et Montcocol n'ont pas déposé d'offres ; que, si une fiche contenant des données chiffrées précises constituant des schémas d'offres au nom de chacune de ces entreprises a été trouvée à la société STTP, cette seule pièce du dossier ne permet pas d'établir avec certitude l'existence d'un échange d'informations ; qu'il ne résulte pas non plus du dossier que l'abstention des sociétés Montcocol, Pommier, STPA, SVTP, résulte d'une concertation avec STTP qu'il y a lieu dès lors de mettre hors de cause les sociétés SVTP, STPA, Pommier et Montcocol ;

Considérant en revanche qu'en ce qui concerne EI, qui n'a pas non plus déposé d'offre, il est établi, d'une part, que cette société a fait une étude précise du marché, étude qui aboutissait à un prix de 1 581 475 F (HT), alors que le feuillet au nom de EI saisi à la société STTP présente un montant total de 1 583 280 F, soit dans les deux cas plus de 50 p. 100 plus cher que l'estimation du maître d'ouvrage, d'autre part, que les prix unitaires indiqués sur le bordereau de STTP au nom de EI correspondent à plusieurs des prix figurant dans l'étude détaillée faite par EI qu'enfin M. Echassoux a admis par procès-verbal d'audition du 3 janvier 1989 qu'il avait communiqué les prix de EI à STTP sur la demande de cette entreprise préalablement à la remise des offres ; que, à la date du 26 janvier 1990, l'Entreprise industrielle fait état d'une lettre parvenue le 24 janvier 1990, soit plus d'un an après les déclarations de M. Echassoux, dans laquelle celui-ci affirme avoir communiqué ses prix après l'ouverture des plis ; que cette rétractation, qui n'est au demeurant assortie d'aucun élément de preuve, ne saurait être retenue dès lors que l'ensemble des pièces décrites au C de la partie I de la présente décision établissent que les feuillets saisis ont été rédigés avant la remise des offres ; que, dans ces conditions, l'abstention de EI, accompagnée de la communication à l'un de ses concurrents du montant détaillé de son étude sur cette affaire, a pu fausser le jeu de la concurrence ;

Sur l'application de l'article 51 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 :

Considérant qu'aucune entreprise n'a allégué que les pratiques en cause puissent entrer dans le champ d'application de l'article 51 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 relative aux prix ou de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant que les pratiques constatées à propos de l'appel d'offres concernant le collecteur de La vallée des Razes, qui tombent sous le coup des dispositions de l'article 50 de l'ordonnance du 30 juin 1945 sans pouvoir bénéficier de celles de l'article 51, sont également visées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 qu'il y a lieu, en vertu de l'article 13 de ladite ordonnance, d'infliger aux entreprises qui ont participé à ces pratiques des sanctions pécuniaires déterminées dans les conditions et limites fixées à l'article 53 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 susvisée,

Décide :

Art. 1er - Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes en ce qui concerne l'entente sur l'attribution des lots d'assainissement de la Courly :

A l'entreprise Anale SA : 40 000 F.

A l'entreprise Les Asphalteurs réunis : 20 000 F.

A l'entreprise Beylat SA : 200 000 F.

A l'entreprise Blondet SA : l50000 F.

A l'entreprise Bouhey SA : 100 000 F.

A l'entreprise Carriers des Saignes SARL : 40 000 F.

A l'entreprise Carrion : 100 000 F.

A l'entreprise Charles-de-Filippis SA : 40 000 F.

A l'entreprise Cochery-Bourdin-Chaussé : 600 000 F.

A l'entreprise Coiro SA : 30 000 F.

A l'entreprise Collet SA : 200 000 F.

A l'entreprise Deal SARL : 35 000 F.

A l'entreprise Deluermoz SA : 200 000 F.

A l'entreprise EGBTP Maia-Sonnier SA : 150 000 F.

A la société d'exploitation de Filippis SARL : 80 000 F.

A l'entreprise Fleitou : 80 000 F.

A l'entreprise Gantelet-Galaberthier : 30 000 F.

A l'entreprise Gauthey SA : 200 000 F.

A l'entreprise Guilbaud SARL : 30 000 F.

A l'entreprise Guillet SARL : 40 000 F.

A l'entreprise Legros SARL : 50 000 F.

A l'entreprise Monin TP SA :100 000 F.

A l'entreprise Nouvetra SARL : 50 000 F.

A l'entreprise Paulet SARL : l0 000 F.

A l'entreprise Perler SA : 200 000 F.

A l'entreprise Pommier SA : 80 000 F.

A l'entreprise Schevack SARL : 30 000 F.

A l'entreprise Serpollet SA : 25 000 F.

A l'entreprise Sogea au titre de Sobea : 600 000 F.

A l'entreprise STPA SA : 80 000 F.

A l'entreprise STTP SA : 200 000 F.

A l'entreprise SVTP SA : 80000 F.

A l'entreprise TPO SARL : 10 000 F.

Art. 2. - Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes en ce qui concerne l'entente sur le marché de construction du collecteur de la vallée des Razes :

A l'entreprise Blondet SA : 70 000 F.

A l'entreprise Borie SAE : 300 000 F.

A l'entreprise Cochery-Bourdin-Chaussé : 300 000 F.

A l'entreprise Deluermoz SA : 100 000 F.

A L'entreprise EGBTP Maia-Sonnier : 70 000 F.

A l'entreprise Entreprise Industrielle : 300 000 F.

A l'entreprise Gantelet-Galaberthier : 15 000 F.

A l'entreprise GTM-BTP : 300 000 F.

A l'entreprise Monin TP SA : 50 000 F.

A l'entreprise Perrier SA : l00 000 F.

A l'entreprise Sogea au titre de SGE BTP : 300 000 F.

A l'entreprise Sogea au titre de Sobea : 300 000 F.

A l'entreprise STTP SA : l00 000 F.

Art. 3. - Les entreprises feront publier, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, à frais communs et à proportion des sanctions pécuniaires qui leur sont infligées, La partie II de la présente décision dans Le Moniteur des travaux publics et du bâtiment, départements et communes, Le Progrès de Lyon et Le Dauphiné Libéré. Le texte de la décision sera précédé du titre "Décision du Conseil de la concurrence relative à des pratiques concertées à l'occasion de marchés de travaux d'assainissement de la communauté urbaine de Lyon et de la construction du collecteur de la vallée des Razes".