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Décisions

Conseil Conc., 28 juin 1994, n° 94-D-40

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Situation de la concurence dans le secteur de l'assurance ski

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Jeanne Texier, par M. Barbeau, président, MM. Cortesse, vice-président, Blaise, Robin, Rocca, Sloan, Thiolon, Urbain, membres

Conseil Conc. n° 94-D-40

28 juin 1994

Le Conseil de la concurrence,

Vu la lettre enregistrée le 19 décembre 1989 sous le numéro F 290 par laquelle la société General Accident Fire and Live et M. André Guillouard, assureur-conseil à Cannes, représentés par Me Coffy de Boisdeffre, ont saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France dans le secteur de l'assurance ski; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application; Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives; Vu la décision n° 88-D-19 du Conseil de la concurrence relative à des pratiques de la Fédération française de ski en matière de commercialisation d'assurances sportives; Vu les observations présentées par la société General Accident Fire and Live et M. Guillouard, par la Fédération française de ski et les comités régionaux de ski de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, par l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, par le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, par le ministre de la jeunesse et des sports et le commissaire du Gouvernement; Vu les autres pièces du dossier; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la société General Accident Fire and Live et M. André Guillouard, de la Fédération française de ski et des comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France et de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver entendus, Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci-après exposés:

I.- CONSTATATIONS

A.- Les caractéristiques du marché

1. La demande d'assurance sportive liée à la pratique du ski

Il ressort du rapport de synthèse de l'audit carte-neige de mai 1989, réalisé à la demande de la Fédération française de ski, que le nombre de personnes pratiquant le ski en France peut être estimé à 6 600 000.

La loi n'impose pas d'être assuré pour la pratique du ski; de fait, seuls 48 p. 100. des skieurs sont assurés.

La protection des skieurs en matière d'assurance peut couvrir les dommages que la pratique de ce sport peut occasionner à des tiers, les dommages personnels que peut subir le skieur lui-même, et enfin les frais de secours et d'assistance, plus ou moins importants selon la tarification de la station et l'éloignement du skieur secouru par rapport à celle-ci.

Certains de ces risques sont couverts par les assurances diverses souscrites par les pratiquants dans le cadre de leurs autres activités, mais il est exceptionnel que ces contrats, souscrits à un autre effet, couvrent l'ensemble de ces risques; en outre, ils sont rarement perçus comme tels par ceux qui les souscrivent. Par ailleurs, la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985, relative au développement et à la protection de la montagne et son décret d'application (décret n° 87-141 du 3 mars 1987) permettent aux communes de demander le remboursement des frais de secours engagés à l'occasion d'accidents consécutifs à la pratique du ski. Ceci explique l'apparition et le développement, surtout depuis la saison 1985/1986, de produits d'assurance spécifiques, strictement limités à la pratique du ski et couvrant l'ensemble des risques inhérents à cette pratique.

Ces produits d'assurance sont parfois souscrits avant l'arrivée en station auprès des différents professionnels avec lesquels le skieur est en contact pour l'organisation de son séjour (organisateurs de voyages, locations de vacances, clubs...). Mais le plus souvent, c'est une fois sur place que les skieurs prennent conscience de la nécessité de souscrire une assurance, car il n'est pas rare de voir affiché en station le prix ou la mention du coût élevé des frais de secours et l'intérêt de s'assurer pour ce risque.

Les pratiques relevées dans la présente affaire portent sur les produits d'assurance ski proposés dans les stations.

2. La structure de l'offre en produits d'assurance ski vendus en stations

a) La situation existant jusqu'en 1986

Elle se caractérise par l'existence d'un monopole de fait des produits offerts par la Fédération française de ski en effet, jusqu'en 1986-1987, mises à part quelques expériences sporadiques, la seule assurance susceptible d'être acquise en station l'était dans le cadre de la "carte-neige".

La création de la "carte-neige" date de la fin de l'année 1980. Ce titre, également appelé "licence pratiquant", est destiné aux skieurs ne participant pas à des compétitions de haut niveau. La "carte-neige" vient donc compléter la licence unique qui existait antérieurement, dénommée "licence compétition-dirigeant", qui comprend une assurance destinée aux skieurs participant aux compétitions de haut niveau.

L'acquisition de la "carte-neige" entraîne, d'une part, l'adhésion à un club et à la Fédération française de ski, donc le paiement d'une cotisation, et, d'autre part, la souscription d'une assurance-assistance. En outre, "la carte-neige" permet à son titulaire de bénéficier d'avantages sur le prix de certains services (forfaits de remontées mécaniques, location de matériels de sport dans les magasins agréés, leçons de ski...).

Son prix est composé de quatre parts : une part assurance-assistance, une part Fédération française de ski, une part comité régional et une part club.

La "carte-neige", qui est à l'origine un produit annuel, s'est diversifiée pour adapter les produits d'assurance-assistance qu'elle comporte à la nature des risques encourus et à la durée des séjours; sont ainsi apparues entre 1981 et 1986 la "carte-neige 8 jours", la "carte-neige fond" et la "cane-neige familiale".

En 1987-1988 est créé le produit "carte-neige flash", valable pour 1, 2 ou 3 jours. Il sera remplacé, pour les saisons 1988-1989 et 1989-1990, par un produit intitulé "carte-neige week-end" valable pour deux jours (exclusivement samedi et dimanche).

Les produits "carte-neige" sont distribués par les clubs locaux et éventuellement par différents relais qui sont des points de passage obligés pour la clientèle (écoles de ski, syndicats d'initiative, offices de tourisme...).

La mise en place de la "carte-neige" a permis à la Fédération française de ski d'augmenter le nombre de ses adhérents, qui est passé de 540 000 on 1980 à 900 000 en 1990.

b) L'évolution à partir de 1986

Elle se caractérise par l'apparition de produits nouveaux qui viennent concurrencer les produits d'assurance offerts par la Fédération française de ski.

Il s'agit de deux produits d'assurance journaliers : la "vignette ski assurance" (VSA) et le "ticket-neige Orion".

La vignette "ski assurance", créée par M. Guillouard (courtier en assurances), est le premier produit d'assurance à la journée proposé en station. Il permet de souscrire un contrat d'assurance-assistance pour un nombre de jours correspondant à la durée du séjour envisagé, même si celui-ci ne dure qu'une journée. Apparu au cours dc la saison 1985-1986, il est commercialisé dans les stations du comité régional de ski de la Côte d'Azur.

Le titre d'assurance se présente sous la forme d'une vignette autocollante destinée à être apposée sur les forfaits de remontées mécaniques. Dans ces conditions, les caisses des remontées mécaniques apparaissent comme le moyen de commercialisation le plus adapté.

La VSA est vendue au même tarif à toutes les remontées mécaniques qui acceptent de la commercialiser. Son prix était fixé à 6 F pour les saisons 1985-1986 et 1986-1987; il a été ramené à 4,50 F on 1987-1988, puis est remonté à 5 F pour les deux saisons suivantes.

Le prix de vente au consommateur est laissé à la libre appréciation des gestionnaires des remontées mécaniques. Dans les petites stations, il a été fixé d'abord à 8 F puis à 10 F; dans les stations plus importantes, il était fixé à 14 F.

La mise en place de ce produit s'est faite avec l'accord du comité régional et des clubs locaux qui y trouvaient un double avantage : le cabinet Guillouard rétrocédait au comité régional de la Côte d'Azur 0,40 F pour chaque vignette vendue; la plupart des directeurs des remontées mécaniques acceptaient de rétrocéder une partie de leur marge au club local.

La VSA a connu une progression rapide de ses ventes :

36 572 vignettes ont été vendues au cours de la saison 1985-1986;

69 673 vignettes ont été vendues au cours de la saison 1986-1987;

89 913 vignettes ont été vendues au cours de la saison 1987-1988.

Le "ticket-neige Orion" est apparu sur le marché au cours de la saison 1986-1987, à l'initiative de quelques gestionnaires de remontées mécaniques regroupés dans l'association "Orion - Stations de l'an 2000", dont la vocation essentielle, même si elle n'apparaît pas dans ses statuts, réside dans la mise en place et la commercialisation d'une assurance journalière pour la pratique du ski.

L'association Orion, créée sous la forme d'association de la loi du 1er juillet 1901, regroupe à l'origine six personnes morales exploitant toutes des remontées mécaniques et appartenant au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France.

Le principe de la commercialisation du "ticket-neige Orion" est le même que celui de la "vignette ski assurance" ; il est vendu aux caisses des remontées mécaniques on même temps que les titres de transport, dans les stations où les remontées mécaniques sont exploitées par les adhérents de l'association.

Pour la saison 1986-1987, qui constitue une saison expérimentale, le "ticket-neige Orion" est commercialisé dans dix stations des départements de l'Isère et de la Savoie; pour la saison 1987-1988, l'association Orion enregistre dix-neuf adhésions nouvelles d'exploitants de remontées mécaniques de stations situées dans les départements de l'Isère, des Alpes du Sud, de la Savoie et de la Haute-Savoie, des Pyrénées et des Vosges; en 1988-1989, deux adhésions nouvelles sont enregistrées, mais cinq stations se retirent de l'association.

Le coût du "ticket-neige" est modeste, puisqu'il s'établit à 4 F par jour et par personne, se décomposant de la façon suivante :

- assurance: 1,65 F;

- gestion locale (incluant la rémunération commerciale des services de remontées mécaniques et un prélèvement pour le club sportif local): 1 F;

- part sportive (fonds destinés au ski français de compétition et réservés à la FFS) : 0,60 F.;

- part destinée au Fonds de promotion nationale pour le ski alpin : 0,75 F;

- part destinée à l'Association nationale pour l'étude de la neige et des avalanches : 0,10 F.

Cette formule de base constitue un produit d'assurance pur, mais les skieurs peuvent opter pour une formule plus complète, au prix de 5 F par jour, incluant une assistance rapatriement ainsi qu'un remboursement des forfaits non utilisés.

B.- Les pratiques constatées

1. Les auteurs des pratiques

a) La Fédération française de ski

La Fédération française de ski est une fédération sportive constituée sous la forme d'une association de la loi du 1er juillet 1901. Fondée en 1924, elle s'est vu reconnaître la qualité d'établissement d'utilité publique par un décret en date du 29 octobre 1970.

Agréée par le ministre chargé des sports par arrêté on date du 23 juillet 1986, elle participe à l'exécution d'une mission de service public définie par l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, qui prévoit que les fédérations sportives "sont chargées notamment de promouvoir l'éducation par les activités physiques et sportives, de développer et d'organiser la pratique des activités physiques et sportives. Elles assurent la formation et le perfectionnement de leurs cadres bénévoles. Elles délivrent des licences et des titres fédéraux".

Pour l'exécution de cette mission, la Fédération française de ski a été dotée de prérogatives de puissance publique, et elle a notamment, par arrêté on date du 31 décembre 1985, reçu la délégation prévue par l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984 qui dispose: "Dans chaque discipline sportive et pour une période déterminée, une seule fédération reçoit délégation du ministre chargé des sports pour organiser les compétitions sportives à l'issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux et procéder aux sélections correspondantes."

Les règles de fonctionnement de la Fédération française de ski sont définies par ses statuts, annexés à l'arrêté d'agrément du 23 juillet 1986 et conformes aux statuts types des fédérations sportives approuvés par le décret n° 85-236 du 13 février 1985, ainsi que par le règlement intérieur adopté par l'assemblée générale.

Depuis une décision de son assemblée générale en date du 17 juin 1989, le siège de la fédération est situé 50, rue des Marquisats, à Annecy (74000).

b) Les comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie

Les groupements et associations sportifs affiliés à la Fédération française de ski sont réunis en comités régionaux, constitués eux-mêmes sous la forme d'associations déclarées.

Ces comités régionaux, qui sont représentés en tant que tels à l'assemblée générale de la fédération, sont dotés de pouvoirs propres. L'article 5 du règlement intérieur de la fédération prévoit qu'ils sont "dépositaires de l'autorité fédérale sur leur territoire".

Il existe à l'heure actuelle dix-sept comités régionaux répartis dans toute la France.

Le comité régional de la Côte d'Azur a son siège 39, rue Pastorelli, à Nice (06000). Pour la saison 1992-1993, dernière saison dont les résultats ont été communiqués, il regroupait 87 clubs ou associations sportifs et a délivré 1 058 licences; pendant la même saison, il a délivré 10 827 cartes-neige (dont 7 020 cartes-neige annuelles) pour un montant de 1 284 722,40 F.

Le comité régional du Dauphiné a son siège à Grenoble (BP 193, 38005 Grenoble Cedex). Le nombre de ses adhérents s'établissait à 72 167 pour la saison 1991-1992.

Le comité régional de la Savoie a son siège 18, rue Croix-d'Or, à Chambéry (BP 813, 73008 Chambéry Cedex). Le nombre de ses adhérents s'établissait à 71 604 pour la saison 1991-1992.

c) Le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France

Le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France est la seule organisation professionnelle existante chargée de représenter, défendre et informer les exploitants d'appareils de remontées mécaniques.

Créé en 1938 pour permettre aux quelques exploitants de téléphériques existants d'étudier les problèmes techniques et administratifs que soulevait ce mode nouveau de transport, ce groupement s'est développé parallèlement à l'essor du transport par câble. Au 1er janvier 1994, il comptait 236 adhérents exploitant plus des deux tiers des appareils existant en France (en juin 1989, le parc français était constitué de 3 934 appareils, dont notamment 2 949 téléskis, 750 télésièges, 146 télécabines, 62 téléphériques).

Les exploitations d'appareils de remontées mécaniques adhérant au syndicat sont pour 51 p. 100 d'entre elles des entreprises privées, les 49 p. 100 restant étant constituées par des sociétés d'économie mixe (18 p. 100) et par des entreprises publiques (31 p. 100).

Le siège du syndicat est situé 21, chemin des Sources, à Meylan (38240).

d) L'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver

L'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, créée en novembre 1977, est issue de la transformation du Comité des stations françaises de sports d'hiver, créé en 1945 pour promouvoir dans les villages de montagne une exploitation touristique hivernale orientée principalement vers la pratique du ski.

Constitué sous la forme d'association régie par la loi du 1er juillet 1901, cet organisme, dont le siège est situé 108, boulevard Haussmann, à Paris (75008), comptait, en mars 1990, 98 adhérents (ce nombre est passé à 100 pour la saison 1993-1994). Pour l'année 1992, dernière année dont les résultats ont été communiqués, le produit des cotisations versées par les adhérents s'est élevé à 6 243 964 F.

Outre le rôle d'information et de conseil à destination de ses adhérents, l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver siège dans différents organismes nationaux intervenant dans la politique de la montagne (Conseil national de la montagne, Conseil supérieur des sports de montagne, Conseil national du tourisme...).

2. Les accords intervenus entre la Fédération française de ski et ses comités régionaux de Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie

Dès que la Fédération française de ski a eu connaissance de la commercialisation dans les stations de produits d'assurance journaliers, elle a développé à leur encontre une attitude de rejet, voire d'hostilité, très clairement affinée dans des lettres adressées par le président de la Fédération française de ski à différents correspondants, ou dans les procès-verbaux des réunions du comité directeur de la fédération.

C'est ainsi que, dans une lettre adressée le 3 septembre 1987 au président de l'association Orion, M. Chevallier, président de la FFS, indique notamment :

"Le développement du ticket-neige, concurrent direct de la carte-neige, constitue un facteur important de déstabilisation de la FFS, à un moment où, dans la perspective des jeux Olympiques d'Albertville, la FFS a besoin d'être soutenue par tous ses partenaires ...

"Il est maintenant établi de façon indiscutable que l'initiative Orion et ceux qui la soutiennent risquent de porter un coup très dur à la FFS ...

"Souhaitant par dessus tout sauvegarder la mission de service public confiée par l'Etat à la FFS et optimiser les chances du ski français pour les jeux Olympiques d'Albertville, je me dois de tout faire pour contrer votre projet dans sa forme actuelle..."

Quatre jours plus tard, le 7 novembre 1987, le président de la FFS écrit à M. Morand, président de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver et lui envoie une copie de la lettre adressée au président de l'association Orion; il indique :

"Je suis tout à fait déterminé à m'opposer vigoureusement à "ticket-neige", projet qui peut provoquer l'éclatement du milieu du ski et des situations critiques dans les stations."

Dans une interview accordée au Dauphiné libéré est novembre 1987, le président de la FFS explicite les mesures qu'il envisage de prendre :

"Je suis optimiste de nature mais je ne marchanderai pas. Le plus étonnant de l'histoire, c'est que les gens ne comprennent pas que nous puissions réagir. Je n'ai rien contre les directeurs de remontées qui ont choisi le ticket-neige à la journée. Ils raisonnent apparemment en commerçants. C'est leur droit le plus absolu. Mais en agissant ainsi, ils se démarquent de la politique fédérale. Ils démontrent qu'ils n'ont pas les mêmes intérêts que la fédération. Tant pis ! Nous n'organiserons plus la moindre course dans leurs stations."

Lors de la réunion du comité directeur tenue à Annecy le 9 juillet 1988, M. Degus, président du comité régional de ski de la Côte d'Azur, expose les modalités et les raisons de la distribution dans son ressort territorial de produits d'assurance autres que la carte-neige (il s'agit du produit VSA). Le procès-verbal de cette réunion mentionne :

"Le président estime que cette politique est néfaste et dangereuse pour la fédération et demande à Guy Degus, président du comité régional Côte d' Azur, de stopper cette action".

Lors de la réunion du comité directeur qui s'est tenue le 22 octobre 1988, les problèmes relatifs au "ticket-neige Orion" sont évoqués par le président de la fédération. Le procès-verbal de cette réunion mentionne :

"S'agissant du comité régional du Dauphiné, particulièrement concerné par ce problème, le comité directeur souhaite que ce CR soit très vigilant et prenne des sanctions à l'égard des clubs-qui ne jouent pas le jeu fédéral".

Le procès-verbal de la réunion du comité directeur du 22 novembre 1988 mentionne sous la rubrique "Carte neige" :

"Le président informe le comité directeur de l'évolution de la situation relative au "ticket neige Orion" ...

"A l'issue d'un tour d'horizon sur les situations particulières au sein de certains comités, le président Chevallier rappelle que l'organisation de compétitions ne peut être attribuée qu'aux stations qui jouent le jeu fédéral.

"A ce propos, le comité directeur demande que sa décision antérieure relative au contrôle du calendrier soit effective avant établissement définitif et diffusion de celui-ci.

"Décision.

"Le président de la FFS adressera un courrier :

"Au président du comité régional du Dauphiné au sujet :

"- de la coupe de France de ski de fond prévue à Villard-de-Lans;

"- de la traversée du Vercors...;

"- du tour des massifs, à Corrençon;

"- d'une compétition de surf, à l'Alpe-du-Grand-Serre.

"Au président du comité régional Côte d'Azur au sujet du championnat de France de saut prévu à Valberg et d'une compétition de surf à Isola 2000."

Enfin, le procès-verbal de la réunion du comité directeur qui s'est tenue le 18 février 1989 mentionne sous la rubrique "Carte-neige", ticket-neige, problème des clubs vendant un produit concurrent :

"Suite à la lecture par Alain Methiaz de la liste des stations vendant le ticket-neige Orion, le comité directeur décide de maintenir son opposition à l'organisation de compétitions fédérales par ces stations.

"En conséquence: les championnats de France des jeunes (féminines) sont retirés à la station d'Isola 2000.

"Cette suppression sera notifiée au président du comité régional concerné."

En exécution des décisions adoptées par le comité directeur de la FFS, le président de la fédération adresse le 1er décembre 1988 au président du comité régional de ski du Dauphiné la lettre suivante :

"Monsieur le président,

"Conformément aux décisions prises lors du comité directeur du 22 novembre 1988, je vous rappelle que la FFS adoptera dorénavant une attitude sans équivoque face aux manquements graves que l'on a pu constater de la part de certains clubs par rapport aux directives fédérales.

"Il est tout à fait inadmissible que l'attitude de tous ne soit pas unitaire face à une concurrence très dure et que certains, très égoïstement, ne voient, à court terme, que l'intérêt local.

"En conséquence, je vous prie de faire connaître:

"- à M. le président du Ski-Club de l'Alpe-du-Grand-Serre que la compétition de surf inscrite au calendrier FFS lui sera retirée s'il n'est pas en mesure de nous donner toute garantie quant à l'attitude de sa station par rapport à notre fédération en matière de concurrence à la carte-neige.

"- à MM. les présidents des ski-clubs de Villard-de-Lans et de Corrençon, qu'afin de ne pas perturber les organisations déjà mises en place, l'attribution du tour des massifs, de la traversée du Vercors et de la coupe de France de ski de fond ne sera pas modifiée cette saison; mais qu'en tout état de cause la position du comité du Dauphiné sera rigoureuse pour la saison 1989-1990 si les présidents de ces clubs ne sont pas en mesure de nous donner toute garantie quant à l'attitude de leurs stations par rapport à notre fédération, en matière de concurrence à la carte-neige..."

Une lettre similaire est adressée le même jour, soit le 1er décembre 1988, au président du comité régional de ski de la Côte d'Azur :

"Monsieur le président,

"Conformément aux décisions prises lors du comité directeur du 22 novembre 1988, je vous rappelle que la FFS adoptera dorénavant une attitude sans équivoque face aux manquements graves que l'on a pu constater de la part de certains clubs par rapport aux directives fédérales.

"Il est tout à fait inadmissible que l'attitude de tous ne soit pas unitaire face à une concurrence très dure et que certains, très égoïstement, ne voient, à court terme, que l'intérêt local.

"En conséquence, je vous prie de faire connaître :

"- à M. le président du club de Beuil que le championnat de France de saut inscrit au calendrier FFS lui sera retiré s'il n'est pas en mesure de nous donner toute garantie quant à l'attitude de sa station par rapport à notre fédération, en matière de concurrence à la carte-neige.

"- à M. le président du ski-club d'Isola 2000 que la compétition de surf inscrite au calendrier FFS lui sera retirée s'il n'est pas en mesure de nous donner toute garantie quant à l'attitude de sa station par rapport à notre fédération, en matière de concurrence à la carte-neige."

Ces décisions seront effectivement transmises aux clubs par les comités régionaux.

Ainsi, le 9 janvier 1989, le président du comité régional de la Côte d'Azur adresse à M. Ginésy, sénateur des Alpes-Maritimes et maire de Péone, la lettre suivante :

"Monsieur le président et cher ami,

"En votre qualité de président du syndicat de Valberg et principale autorité chargée de la définition de la politique de la station, je me permets d'attirer votre attention sur le problème posé par les stations qui procèdent à la commercialisation d'assurances concurrentes à la carte neige de la Fédération française de ski (cas de Valberg).

"Cette concurrence est particulièrement préjudiciable à la FFS, qui se voit ainsi privée d'une ressource importante. De ce fait, les instances fédérales nationales, estimant que la station de Valberg ne joue pas le jeu, m'ont fait part de leur mécontentement et ne sont pas certains, à l'avenir, si rien ne devait être changé, de maintenir des manifestations FFS dans votre station. De plus, l'apport logistique actuellement consenti par la Fédération à titre gratuit lors de certaines manifestations pourrait devenir payant.

"Je tenais à attirer votre attention sur ce point particulièrement grave qui pourrait venir perturber le développement sportif d'une station à laquelle, vous le savez, je suis particulièrement attaché..."

Le procès-verbal de l'assemblée générale du comité régional de ski du Dauphiné qui s'est tenue le 18 octobre 1987 mentionne :

"Le secrétaire général Michel Virot exposa les grandes lignes du principe Orion, concurrent direct de la cane-neige, et menaçant la vie même de la fédération, du comité régional et des clubs, en s'attaquant à leur principale ressource. Ce système Orion touche particulièrement le comité du Dauphiné: sept stations l'ont adopté en 1987... et il risque de s'étendre beaucoup plus pour la prochaine saison...

"Un débat s'engage sur les moyens de lutter contre cette pratique...

"Finalement, une motion est préparée et votée par les présents à une large majorité :

"Les clubs du comité régional du Dauphiné, réunis à l'assemblée générale à Tain-l'Hermitage le 18 octobre 1987, ont décidé de cesser de pratiquer leurs activités : compétitions, sorties loisirs, écoles du mercredi pour la saison 1987-1988 dans les stations du Dauphiné qui adopteraient le système ticket-neige (Orion) car il apparaît comme une concurrence déloyale à la carte-neige qui est leur principale ressource. Ils invitent tous leurs adhérents et sympathisants à faire de même."

Par ailleurs, M. Jacquet, président du comité régional du Dauphiné jusqu'en mai 1988, et M. Cahour, son successeur, entendus le 21 mars 1990 par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), déclarent :

"Pour les stations commercialisant Orion, nous avions décidé de cesser de leur attribuer les courses nationales et internationales, c'est-à-dire les plus valorisantes. Les coupes du monde sont programmées trois années à l'avance, les coupes d'Europe deux ans à l'avance, les autres courses internationales un an à l'avance.

"Nous n'avons pas supprimé de compétitions internationales dans les stations Orion où elles étaient décidées au préalable de la saison 1987-1988, mais nous avons écarté du calendrier ultérieur d'organisation de compétitions toutes ces stations Orion. La fédération a aussi étendu la suppression de compétitions dans les disciplines autres que le ski alpin... Cependant, ces compétitions de ski de fond ou de surf organisées à Villard-de-Lans, Corrençon et l'Alpe-du-Grand-Serre n'ont pas eu à être annulées car elles n'ont plus commercialisé Orion en 1989-1990, saison prévue pour ces compétitions, suite à nos contacts personnels avec les différents partenaires locaux (club, remontées mécaniques, maire)..."

Le 15 septembre 1987, le président du comité régional de ski de la Savoie adresse aux présidents de club une circulaire au contenu suivant :

"Objet: ticket-neige Orion.

"Lors de la dernière assemblée générale du SNTF, les exploitants de remontées mécaniques ont voté la mise en place du ticket-neige (assurance à la journée du skieur) pour la saison 1987-1988.

"Vous trouverez ci-joints les différents courriers échangés pendant l'été.

"A leur lecture, vous comprendrez que vous devez être vigilants dans votre station et prendre contact avec l'exploitant des remontées mécaniques de façon à lutter de la façon la plus active contre la mise en place de ce produit."

Le 7 octobre 1987, deux courriers identiques étaient adressés par le président du comité régional de ski de la Savoie aux responsables des stations du Margeriaz et de La Norma:

"Monsieur le directeur (Madame la présidente),

"Nous venons d'apprendre que la station du Margeriaz (de La Norma) va diffuser cet hiver le ticket-neige Orion.

"Cette initiative est une concurrence directe à notre carte-neige qui, elle, apporte la majorité des moyens nécessaires au fonctionnement de nos clubs, des comités régionaux, de la fédération et de ses équipes nationales.

"La Fédération française de ski soutenue par l'Association des maires de station de sports d'hiver et par le Syndicat national des moniteurs de ski a déjà réagi face à ce danger.

"Le comité directeur du comité régional de ski de Savoie réuni à Chambéry le 6 octobre a décidé à l'unanimité de prendre une première mesure consistant à retirer à votre station l'organisation de toutes les compétitions prévues pour la prochaine saison, qu'il s'agisse dès épreuves de ski alpin ou des autres disciplines.

"Nous vous prions d'agréer..."

Le procès-verbal de l'assemblée générale du comité régional du Dauphiné, qui s'est tenue le 25 octobre 1987, mentionne:

"Jean Brunier expose la situation en Savoie: La Norma, Les Aillons, Le Margeriaz se sont engagés à vendre le ticket-neige.

Le comité a appliqué les directives de la FFS c'est-à-dire de ne pas attribuer de compétitions FFS à ces stations.

"Le président Chevallier confirme la décision du comité directeur. Il n'y pas de négociations car la FFS ne peut pas rentrer dans le jeu commercial. Il comprend les stations qui rentrent dans le système mais il faut choisir entre Orion et la FFS"

Le 24 novembre 1987, le président du comité régional de ski de Savoie adresse au président de la Fédération ainsi qu'aux présidents des autres comités régionaux et aux présidents des bureaux techniques régionaux, la lettre suivante:

"Messieurs,

"Le comité régional de ski de Savoie vous informe de l'adhésion des stations suivantes au systèmes Orion :

"Les Aillons ;

"Le Margeriaz ;

"La Norma.

"Conformément aux décisions prises par le comité directeur de la Fédération française de ski, entérinées par notre comité, nous vous demandons de n'organiser aucune compétition dans ces stations."

Enfin, le comité directeur du comité régional de ski de Savoie adopte, le 15 decembre 1987, la délibération suivante :

"Le comité directeur du comité régional de ski de Savoie réuni le mardi 15 décembre 1987 en son siège à Chambéry a pris connaissance de la circulaire du président Bernard Chevallier du 1er décembre 1987 et des différentes interventions émises à l'occasion du comité directeur de la FFS tenu à Annecy le 10 décembre 1987.

"Compte tenu de ces informations et directives le comité régional de Savoie confirme son accord pour que certaines compétitions soient organisées cette saison par les deux clubs de Savoie concernés par le ticket-neige Orion.

"Par ailleurs et à l'unanimité le comité régional de Savoie confirme qu'il s'opposera avec force et avec tous les moyens à sa disposition à toutes les stations qui adhéreront la saison prochaine au système Orion ou aux autres concurrents de la carte neige."

3. Les accords intervenus entre la Fédération française de ski, le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France et l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver

a) L'accord intervenu en 1987 entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France afin de limiter la commercialisation du ticket-neige Orion

Dans une motion adoptée à l'unanimité par le comité directeur du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France le 4 novembre 1987, celui-ci "s'indigne des attaques dirigées par la Fédération française de ski et ses comités régionaux contre le SNTF même et certains de ses adhérents participant au ticket-neige. Il se déclare solidaire de ses adhérents injustement critiqués et soumis à des pressions inadmissibles. Le comité directeur espère un prompt retour à une situation normale et l'examen réaliste de ses propositions de travail en commun pour l'assurance des skieurs et la promotion du ski alpin. Dans cette attente, il regrette de ne pouvoir accepter le renouvellement du protocole qui fixe chaque année les accords entre la FFS et le SNTF".

Mais la situation va très rapidement évoluer. Le président de la Fédération française de ski est invité à participer à la réunion du comité directeur du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France qui a lieu le 24 novembre 1987 ainsi qu'à l'assemblée générale qui a lieu le lendemain 25 novembre 1987.

Le procès-verbal de l'assemblée générale du 25 novembre 1987 mentionne :

"Devant les menaces écrites de la FFS de retrait des compétitions aux adhérents d'Orion, le SNTF a pris la défense des exploitants face à cette attitude inacceptable de la FFS. Ce soutien s'est traduit par une motion du comité directeur répondant à la position de blocage de la FFS et par la suspension, pour l'instant, de la signature du protocole.

"M. Chevallier a été invité par le président Viard au comité directeur du 24 novembre et s'est vu proposer l'arrêt immédiat de toute discussion au niveau des médias avec l'annonce de la mise au point d'un accord...

"M. Aubonnet résume la proposition du SNTF de signature d'un accord prévoyant :

"- le statu quo des deux côtés par gel des adhésions à Orion..., non-application des courriers réciproques (sanctions FFS contre les adhérents d'Orion, non-signature du protocole);

"- la mise à l'étude pour l'an prochain d'un produit d'assurance nouveau ayant l'assentiment des partenaires."

Après des discussions très serrées sur le point de savoir si le gel des adhésions à Orion doit prendre en compte la situation de la saison dernière (cinq ou six stations) ou celle existant au jour de l'assemblée générale, il est indiqué au procès-verbal :

"Le président Viard rappelle encore une fois la proposition du SNTF arrêt des adhésions à Orion au chiffre actuel de trente-cinq, levée des sanctions par les comités régionaux et les clubs...

"M. Chevallier, après une petite sortie de séance, pénètre à nouveau dans la salle et déclare: ... J'accepte de lever les sanctions au niveau des stations Orion...

"Le président Viard propose, compte tenu de l'attitude de M. Chevallier, la signature du protocole initiateurs et dirigeants."

Le 1er décembre 1987, le président de la Fédération française de ski adresse aux membres du comité directeur une lettre faisant ainsi le point sur les négociations intervenues :

"Cher(e) ami(e),

"Au terme d'une semaine de contacts et de négociations avec des personnalités du ski, des maires de stations, le SNTF réuni en comité directeur et en assemblée générale, je viens, par la présente, vous apporter les informations relatives au problème carte-neige FFS, ticket-neige Orion.

"Dans un esprit d'apaisement et afin de ne pas obérer l'avenir, j'ai obtenu que:

"- le SNTF marque clairement sa différence avec Orion;

"- le SNTF demande à Orion de ne pas développer ticket-neige dans d'autres stations que celles qui adhéraient au système à la date de l'assemblée générale du SNTF (25 novembre 1987); ce nombre est d'environ trente stations;

"- le SNTF reconduise le protocole avec la FFS (carte demi-tarif et carte d'invitation pour la saison 1987-1988);

"- la FFS et le SNTF s'engagent à ouvrir des négociations dans la perspective de rechercher un accord sur le produit assurance ski.

"En conséquence de quoi, la FFS renonce à interdire l'attribution de compétitions aux clubs des stations ayant adopté le ticket neige.

"Dans ce cadre-là, toute liberté est laissée aux présidents de comités régionaux dans l'attribution des compétitions."

Lors de sa réunion du 10 décembre 1987, le comité directeur de la FFS prend acte du résultat de ces négociations.

b) L'accord négocié entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France en vue de l'éviction du marché des produits d'assurance concurrents des produits offerts par la FFS.

Cet accord est intervenu au terme de plusieurs réunions qui se sont tenues dans la perspective de reçhercher un accord sur un produit d'assurance ski, ainsi que le prévoyait l'un des points de l'accord intervenu en 1987.

Le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France qui s'est tenue à Tours le 10 mai 1988 mentionne :

"Conformément aux souhaits de l'assemblée générale de novembre 1987, dès janvier, le SNTF a eu une importante réunion avec la FFS au cours de laquelle cette dernière, tout en reconnaissant que le ticket-neige allait dans le sens de l'histoire, a exigé que certaines de ses contraintes soient prises en considération: garantie de recettes, indépendance, garantie du volume d'adhérents (afin de conserver le même poids face aux autres fédérations)...

"M. Chevallier a fait une contre-proposition: si le SNTF renonçait à concurrencer la carte-neige, la FFS apporterait 10 millions de francs à un fonds commun de promotion du ski alpin avec, en outre, mise à l'étude, en collaboration avec les maires, des moyens de faire échec aux frais de secours impayés."

M. Chevallier, président de la Fédération française de ski, invité à participer à cette assemblée générale, a expliqué que "le seul point d'accrochage actuel est la perte éventuelle et quasi certaine du nombre d'adhérents. Cette perte entraînerait une perte financière qui peut être compensée par ailleurs; par contre, il n'est pas possible pour la troisième fédération de France (après le football et le tennis) de voir passer le nombre de ses adhérents de 1 million à 500 000 ou 600 000 et se retrouver 7e, 8e ou l0e fédération. Globalement, pour la fédération elle-même et pour le ski en général, ce serait politiquement une erreur."

Finalement, à l'issue des débats sur cette question, la motion suivante est adoptée :

"A l'issue des trois réunions avec la FFS et malgré la demande importante de la clientèle d'une assurance à la journée, le SNTF prend acte du refus actuel de la fédération de participer au ticket-neige; il souhaite que ses adhérents ne dispersent pas leurs actions en dehors des produits utilisés actuellement, qu'il convient toujours de développer, en attendant la création d'un produit commun, très largement diffusé, seul à même de procurer les moyens d'une promotion plus que jamais nécessaire."

L'assemblée générale ordinaire du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France qui se tient à Paris le 16 novembre 1988 est l'occasion de faire le point plus précisément, avant la saison 1988-1989. Après avoir évoqué l'existence d'une commission tripartite, SNTF-FFS-AMSFSH, créée à l'initiative de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, le comité directeur du syndicat va proposer à l'assemblée générale la conduite à tenir.

Le procès-verbal de la réunion mentionne :

"Le comité directeur du SNTF, constatant l'état d'esprit positif de l'Association des maires et aussi de la FFS, propose à l'assemblée générale d'en rester à l'état d'esprit de la motion de Tours, c'est-à-dire de donner, comme l'Association des maires, au partenaire et ami de la FFS jusqu'au printemps pour convenir de la façon dont va être bâti le produit commun voulu par la clientèle, en vue de la saison 1989-1990. Dans cette attente, tout en rappelant qu'il serait catastrophique pour le monde des sports d'hiver d'adopter des formules diverses, les adhérents du SNTF sont invités à une neutralité absolue; néanmoins, à côté de la cane-neige, produit fédéral soutenu par le SNTF, il y a, en plus, quand les exploitants le souhaitent, le produit ticket-neige présenté par Orion en attendant le produit commun largement diffusé: c'est donc une liberté d'action avec incitation à utiliser en premier la carte-neige de la FFS et, en plus, quand cela paraît nécessaire aux exploitants et s'ils en ont la possibilité, le ticket-neige, mais en évitant les autres formules issues du monde extérieur aux sports d'hiver."

L'assemblée générale adopte ces propositions, ainsi qu'en fait mention le procès-verbal :

"A une large majorité, l'assemblée générale décide de reporter sa décision, de prôner une liberté dirigée pour la saison 1988-1989 sous réserve d'une décision avec les partenaires le 20 mars 1989."

Des instructions conformes à cette décision sont adressées aux exploitants de remontées mécaniques et sont maintenues pour la saison 1989-1990 afin de privilégier le titre "FFS-Neige", nouveau produit d'assurance mis en place par la Fédération française de ski avec la collaboration du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France. Ainsi la circulaire n° 1736 du 4 décembre 1989, après avoir présenté le produit "FFS-Neige", qui est un produit d'assurance à la journée, indique, sous la rubrique "Rôle des exploitants" :

"Nous invitons tous les exploitants qui ne l'ont pas encore fait à prendre attache avec leur club afin de déterminer les modalités pratiques et financières de la mise en place de FFS-Neige.

"En cas d'impossibilité, nous vous incitons à vous abstenir de tout soutien à un produit concurrent, sauf si celui-ci, comme le ticket-neige Orion, assure des répartitions financières sensiblement voisines à la FFS et au SNTF".

c) L'accord négocié entre la Fédération française de ski et l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, en vue de l'éviction du marché des produits d'assurance concurrents de la carte-neige.

Lors de la réunion du conseil d'administration de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver qui s'est tenue le 29 janvier 1987, le premier point de l'ordre du jour porte sur la "présentation par M. Barthalais, président de la FFS, des problèmes relatifs à la carte-neige (diffusion produit concurrent)".

Selon les termes du procès-verbal de cette réunion, M. Morand, président de l'association, "remarque qu'en ce moment sont en train de s'installer dans certaines stations et certains départements des produits totalement parallèles et concurrentiels qui risquent de mettre la FFS en difficulté. La carte-neige est intéressante à la fois pour nos clubs locaux et pour la FFS et c'est pourquoi il a invité M. Barthalais à nous exposer ces différents problèmes, après quoi nous délibérerons sur la position qu'adoptera notre association".

A l'issue des différentes interventions relatées dans le procès-verbal, il est mentionné:

"En conclusion de ce premier point de l'ordre du jour :

"Le conseil d'administration, conscient de l'importance de la carte-neige pour les clubs et la FFS, soutient le président Barthalais et demandera aux communes membres de notre association d'intervenir auprès des exploitants de remontées mécaniques pour ne pas créer un produit concurrentiel à la carte-neige tant qu'un accord national entre la FFS, le syndicat des moniteurs, le SNTF et notre association ne sera pas intervenu.

"Le conseil d'administration demande au président Barthalais, compte tenu du soutien de l'association, de bien vouloir s'associer financièrement à certaines actions de promotion, ce qu'il accepte."

Entendu par les enquêteurs de la DGCCRF le 17 janvier 1990, M. Morand, président de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, déclare :

"Le SNTF a décidé de lancer lors de la saison 1986-1987 un produit journalier intégré... Il l'a distribué sous l'égide d'une association nommée Orion... Au début de la saison 1986-1987, notre association a adopté une attitude neutre vis-à-vis de cette situation en laissant à nos exploitants de remontées mécaniques... toute latitude pour décider de commercialiser ou non ce type de produit. Cependant, dès le début de l'année 1987, nous avons rallié la position de la FFS à l'encontre de ce produit, à savoir une réaction de refus de voir se développer un produit concurrent à la carte-neige... C'est dans cet état d'esprit qu'une lettre portant ma signature, datée du 25 août 1987, a été envoyée à l'ensemble des adhérents de notre association afin que cette prise de position soit adoptée par chacun de nous."

L'accord intervenu entre la FFS et l'AMSFSH est concrétisé par trois lettres circulaires adressées par le président de l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver aux maires des communes adhérentes.

La lettre du 24 août 1987 est rédigée en ces termes :

"Monsieur le maire et cher collègue,

"Lors de notre assemblée générale de printemps, le problème de l'assurance intégrée a été posé; la majorité s'est prononcée en faveur de la carte-neige et de son maintien, et un avis défavorable à la création de produits concurrentiels a été émis.

"Le fait que la loi Montagne et le décret d'application concernant les secours aux skieurs autorisent le remboursement des frais de secours a conduit :

"- le SNTF, au cours de son assemblée générale de printemps, à accepter la mise en place d'une assurance intégrée;

"- les compagnies d'assurances à proposer différentes formules aux exploitants.

"Le président de la FFS, Bemard Chevallier, s'inquiète à juste titre des graves répercussions que pourrait engendrer la mise en place de ces systèmes.

"C'est pourquoi je vous demande d'agir auprès de vos exploitants de remontées mécaniques afin qu'ils sursoient à la vente d'une assurance intégrée pour la saison 1987-1988.

"Une carte-neige journalière est à l'étude et sera proposée dès cet hiver par la FFS.

"Le conseil d'administration du 2 septembre proposera une rencontre avec la FFS, le SNTF et les moniteurs afin de préparer, pour l'hiver 1988-1989, une convention définissant les caractéristiques d'une carte-neige new look qui assurerait aux clubs des sports, à la FFS, au SNTF, aux moniteurs et à notre association (Ski France) des ressources nouvelles.

"Les maires des stations de Savoie et de Haute-Savoie que j'ai rencontrés adoptent ce point de vue, et je compte sur votre autorité et votre esprit de solidarité pour soutenir la carte-neige."

Une nouvelle lettre circulaire adressée aux maires des stations et datée du octobre 1987 vient confirmer la teneur de celle du 25 août :

"Monsieur le maire et cher collègue,

"Lors de la réunion de notre conseil d'administration du 2 septembre 1987, notre collègue Bernard Chevallier a confirmé ses inquiétudes et son opposition totale à l'égard de toute assurance intégrée proposée par différents organismes, en particulier le système Orion.

"Unanimement, notre conseil d'administration :

"- confirme son soutien à la FFS;

"- demande aux maires d'intervenir auprès de leurs exploitants afin de les dissuader de mettre en place pour cet hiver une assurance intégrée;

"- approuve les termes de la lettre que je vous ai adressée le 25 août dernier à ce sujet et que je vous confirme aujourd'hui.

"Je vous remercie, monsieur le maire et cher collègue, de toute disposition que vous voudrez bien prendre dans ce sens..."

Le 19 septembre 1988, une nouvelle lettre circulaire, adressée aux maires des stations, maintient les mêmes instructions pour la saison suivante:

"Lors de la réunion du conseil d'administration de notre association, le mardi 13 septembre 1988, à Paris, les problèmes posés par la carte-neige et le ticket-neige ont fait l'objet d'une étude approfondie, en présence de M. Bemard Chevalier, président de la FFS, et de M. Gabriel Viard, président du SNTF.

"A l'issue de cette réflexion, le conseil d'administration a décidé, pour cet hiver encore, de maintenir le soutien de notre association à la FFS et je vous renouvelle donc mon invitation à ne pas promouvoir le ticket-neige et à agir en conséquence auprès de vos exploitants..."

II.- SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRÉCEDENT, LE CONSEIL

Sur la compétence :

Considérant que la Fédération française de ski soutient que le Conseil de la concurrence est incompétent pour connaître des pratiques qui lui sont reprochées, car celles-ci, mises en œuvre à l'occasion de l'organisation de compétitions sportives, se rattacheraient à la mission de service public qui lui a été confiée par la loi et constitueraient la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique; qu'ainsi, l'appréciation du litige ressortirait à la seule compétence du Conseil d'Etat;

Considérant que la Fédération française de ski est, en application de l'article 16 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, chargée notamment de promouvoir l'éducation par les activités physiques et sportives, de développer et d'organiser la pratique de ces activités, d'assurer la formation et le perfectionnement de ses cadres, et de délivrer les licences et les titres fédéraux ; que, pour l'exercice de cette mission, elle a, en application des dispositions de l'article 17 de la loi précitée du 16 juillet 1984, reçu délégation du ministre chargé des sports pour organiser les compétitions sportives à l'issue desquelles sont délivrés les titres nationaux, régionaux et départementaux; qu'à ce titre, la Fédération française de ski exerce une mission de service public exclusive de toute activité commerciale, économique ou spéculative, qui n'entre pas dans le champ de compétence du Conseil de la concurrence;

Considérant que la diffusion par la Fédération française de ski de produits d'assurance destinés à couvrir les risques occasionnés par la pratique du ski ne fait pas partie de la mission de service public dont ladite fédération est investie par la loi du 16 juillet 1984; qu'une telle activité constitue une activité de services au sens de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986; que,dès lors, le Conseil de la concurrence est compétent pour un connaître;

Sur le marché de référence:

Considérant que le marché à prendre un considération est celui où se confrontent l'offre de produits d'assurance liée à la pratique du ski et une demande, exprimée par les skieurs désirant souscrire une assurance couvrant les risques occasionnés par cette activité; que, d'une part, la pratique de ce sport crée des risques justifiant une assurance spécifique; que, d'autre part, les skieurs ne prennent le plus souvent conscience qu'une fois arrivés sur place de l'intérêt de souscrire une assurance et qu'ainsi, la possibilité de souscrire de telles assurances dans les stations elles-mêmes constitue, un raison de sa commodité, un service qui ne se confond pas avec l'offre du produits d'assurance hors stations; ainsi, le marché de référence doit être défini comme le marché des produits d'assurance lié à la pratique du ski vendus un station;

Sur l'application des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986:

En ce qui concerne les accords intervenus entre la Fédération française de ski et ses comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie :

Considérant, un premier lieu, qu'il résulte dus faits mentionnés au I-B-2 de là présente décision que la Fédération française de ski a décidé, dès l'automne 1987, de ne pas organiser de compétitions et de supprimer celles qui étaient prévues dans les stations où étaient commercialisés des produits d'assurance journaliers autres que les produits d'assurance accessoires aux différentes formules de "carte-neige" qu'elle diffuse; qu'elle a adressé des instructions aux comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, pour que ceux-ci prêtent leur concours à l'éviction des produits d'assurance journaliers concurrents de la "carte-neige" en informant la Fédération sur le comportement des stations, en élaborant des propositions de localisation des compétitions et leur calendrier par référence au comportement des stations, et en se faisant le relais des injonctions et des sanctions de la fédération à leur égard; que de telles pratiques concertées, qui se sont poursuivies pendant les saisons 1987-1988 et 1988-1989, avaient directement pour objet d'empêcher ou de restreindre le jeu de la concurrence sur le marché des produits d'assurance vendus un station, un limitant l'accès au marché des entreprises offrant ce type de produit ;

Considérant que les groupements et associations sportifs affiliés à la Fédération française de ski sont réunis en comités régionaux constitués sous la forme d'associations déclarées; que ces comités régionaux, qui sont représentés en tant que tels à l'assemblée générale de la fédération, disposent de ressources propres et sont dotés de pouvoirs propres; quel'article 5 du règlement intérieur de la fédération prévoit qu'ils sont dépositaires de l'autorité fédérale sur leur territoire et leur attribue notamment le rôle de développer, contrôler et diriger les activités du ski par tous les moyens qui leur paraissent propices; qu'enfin,si la fédération décide de la localisation des compétitions qu'elle a pour mission d'organiser en vue de la délivrance des titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux, elle ne peut le faire que sur proposition et avec l'accord des comités régionaux concernés; que,dans ces conditions, il ne peut être soutenu que des comités régionaux de ski ne disposeraient d'aucune autonomie par rapport à la fédération et qu'il ne pourrait ainsi y avoir d'entente entre la fédération et ses comités régionaux;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Fédération française de ski et les comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie se sont livrés à des pratiques prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne l'accord intervenu un 1987 entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France afin de limiter la commercialisation du "ticket-neige Orion":

Considérant qu'il résulte des faits mentionnés au I-B-3 de la présente décision que des négociations ont eu lieu en novembre 1987 entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France; que M. Chevallier, président de la Fédération française de ski, a été invité à participer à la réunion du comité directeur du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France qui s'est tenue le 24 novembre 1987, ainsi qu'à l'assemblée générale qui a eu lieu le lendemain, 25 novembre 1987; que ces négociations ont abouti à un accord selon lequel le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France s'engageait notamment à demander à l'association Orion de ne pas développer le "ticket-neige Orion" dans d'autres stations que celles qui adhéraient au système à la date du 25 novembre 1987, la Fédération française de ski renonçant, en contrepartie, à interdire l'attribution de compétitions aux clubs des stations ayant adopté le "ticket-neige"; que ces faits sont clairement établis par le procès-verbal de l'assemblée générale du Syndicat national des téléphériques et téléskis de France du 25 novembre 1987, ainsi que par la lettre du 1er décembre 1987 adressée par le président de la Fédération française de ski aux membres du comité directeur; que,si ces négociations n'ont pas donné lieu à la rédaction d'un protocole d'accord formel, elles ont abouti à une entente expresse qui avait directement pour objet de restreindre le jeu de la concurrence en faisant obstacle à la diffusion du produit d'assurance journalier proposé par l'association Orion;

Considérant que la Fédération française de ski ne peut soutenir valablement qu'il n'y aurait pas substituabilité entre le "ticket-neige Orion" et les produits qu'elle diffuse, dès lors qu'il résulte des constatations mentionnées ci-dessus qu'il s'agit dans les deux cas de produits d'assurance liée à la pratique du ski;

Considérant que si le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France fait valoir qu'il ne serait pas opérateur sur le marché de la commercialisation des assurances ski, il résulte de l'instruction que l'accord intervenu entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France a un pour effet d'empêcher la diffusion du "ticket-neige Orion" dans d'autres stations que celles où il était distribué pendant la saison 1987-1988 et a abouti à une diminution très importante de la vente de ce produit en 1989 et 1990;

Considérant que la Fédération française de ski ne peut utilement soutenir que la concurrence n'aurait pas été affectée de façon sensible dès lors que les pratiques un cause avaient un objet et une potentialité d'effet anticoncurrentiel; qu'au surplus, il y a lieu de prendre en compte le succès remporté par le "ticket-neige Orion", vendu à 300 000 exemplaires pour la saison 1987-1988, avec un taux de pénétration allant de 25 à 47 p. 100 sur les forfaits journée, de l'importance du marché potentiel et de l'absence d'autres offreurs sur le marché;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques ci-dessus mentionnées, imputables à la Fédération française de ski et au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, et que la première de ces organisations a d'ailleurs admises dans les observations qu'elle a présentées à la suite de la notification du rapport, sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne l'accord négocié entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, un vue de l'éviction du marché des produits d'assurance concurrents de la "carte-neige"

Considérant qu'il résulte des faits mentionnés au I-B-3 de la présente décision, qu'à l'occasion de l'accord intervenu un 1987 entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, les parties s'étaient engagées à ouvrir des négociations afin de mettre au point un commun un produit d'assurance; que ces négociations, qui se sont déroulées dans le courant de l'année 1988, ont porté sur la conduite à adopter en attendant la mise au point de ce produit et ont conduit le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France à préconiser à ses adhérents la diffusion prioritaire de la "carte-neige" ; que les négociations entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France ont finalement abouti à la création d'un produit d'assurance à la journée, objet de la "convention FFS-SNTF"conclue dans le courant de l'année 1989, mis un place pour la saison 1989-1990 sous le nom de "FFS-Neige"; que le SNTF a alors adressé à ses adhérents des instructions afin qu'ils participent à la diffusion de ce produit et que, en cas d'impossibilité, ils s'abstiennent de tout soutien à un produit concurrent; que, si la création du produit "FFS-Neige" ne peut, en elle-même, être regardée comme constituant une entente anticoncurrentielle, les pratiques concertées qui l'ont accompagnée, tendant à l'éviction du marché des produits d'assurance susceptibles de concurrencer les produits offerts par la Fédération française de ski, ont eu directement pour objet de restreindre le jeu de la concurrence sur le marché des produits d'assurance vendus en stations;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques ci-dessus mentionnées, imputables à la Fédération française de ski et au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, constituent des pratiques prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne l'accord négocié entre la Fédération française de ski et l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, un vue de l'éviction du marché des produits d'assurance concurrents de la "carte-neige":

Considérant qu'il résulte des faits mentionnés au I-B-3 de la présente décision que M. Barthalais, alors président de la Fédération française de ski, a été invité à participer à la réunion du conseil d'administration de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver qui s'est tenue le 29 janvier 1987 pour y exposer les problèmes relatifs à la "carte-neige"; qu'au cours de cette réunion, un accord est intervenu entre la Fédération française de ski et l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, aux termes duquel cette dernière s'engageait à demander aux communes membres de l'association d'intervenir auprès des exploitants de remontées mécaniques pour ne pas créer un produit concurrent de la "carte-neige", la Fédération française de ski acceptant en contrepartie de s'associer financièrement à certaines actions de promotion de l'association; que cet accord avait pour objet de soutenir la "carte-neige" en l'opposant à la généralisation du "ticket-neige Orion", mis en place à titre expérimental au cours de la saison 1986-1987, ainsi qu'à tout système d'assurance intégrée qui pourrait être proposé aux exploitants de remontées mécaniques par les compagnies d'assurance; qu'en application de cet accord, l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver a diffusé à ses membres des lettres circulaires un date des 24 août 1987, 1er octobre 1987 et 19 septembre 1988, les invitant à intervenir auprès de leurs exploitants de remontées mécaniques pour les dissuader de mettre un place une assurance intégrée; que de telles pratiques avaient pour objet d'empêcher ou de restreindre le jeu de la concurrence sur le marché des produits d'assurance vendus un station, en faisant obstacle à l'accès au marché de produits concurrents de la "carte-neige";

Considérant que si l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver soutient que les circulaires adressées à ses adhérents contenaient "de simples recommandations émises par 1'AMSFSH en sa qualité d'organisme professionnel conformément à sa mission d'information, de conseil et de défense des intérêts collectifs professionnels de ses adhérents", il résulte des termes mêmes desdites circulaires qu'il est demandé aux maires d'user de leur autorité auprès des exploitants de remontées mécaniques de leur commune afin de les dissuader de promouvoir le "ticket-neige Orion";

Considérant, enfin, que l'article 7 précité de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe les ententes ayant un objet ou pouvant avoir un effet anticoncurrentiel; qu'ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, l'accord intervenu entre la Fédération française de ski et l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver avait un objet anticoncurrentiel; que si l'Association des maires des stations françaises de sport d'hiver soutient que l'effet anticoncurrentiel de l'envoi de ces circulaires n'est pas établi, une telle circonstance est, en toute hypothèse, sans influence sur la qualification des pratiques ci-dessus mentionnées, qui sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

En ce qui concerne l'accord intervenu entre la Fédération française de ski et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France pour la mise un place du produit "carte-flash" :

Considérant que la Fédération française de ski a mis en place, pour la saison 1987-1988, un produit dénommé "Carte-Flash", comportant une assurance journalière valable pour un, deux ou trois jours ; que, si elle a choisi de ne pas faire de publicité nationale pour ce produit et a décidé du n'approvisionner que les remontées mécaniques des stations du Dauphiné et de la Côte d'Azur concernées par la diffusion des produits "ticket-neige Orion" et "Vignette Assurance", une telle décision, à caractère purement unilatéral, ne relève pas d'une entente avec le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France et n'est donc pas prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Sur la demande tendant à la notification d'un grief complémentaire sur le fondement du 1 de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986:

Considérant que le commissaire du Gouvernement demande la notification d'un grief complémentaire sur le fondement des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, de surseoir à statuer un vue de procéder à un complément d'instruction;

Sur l'application de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986:

Considérant, un premier lieu, que si le Syndicat national dus téléphériques et téléskis de France invoque, sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, une convention dite "Protocole de Val d'Isère", qu'il a signée le 5 décembre 1980 avec notamment la Fédération française de ski, l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, le Syndicat national des moniteurs de ski français, l'Association française des entraîneurs de ski alpin et le ministère de la jeunesse, des sports et des loisirs et qui prévoit que "l'ensemble des partenaires s'engagera pendant la durée de la convention à favoriser la vente de la carte-neige telle qu'elle résultera d'accords à réviser tous les ans, et à ne pas promouvoir de produit concurrent", ce texte ne constitue ni un texte législatif ni un texte réglementaire pris pour l'application d'une loi;

Considérant, en second lieu, que si le ministre de la jeunesse et des sports expose que les règlements des fédérations sportives sont pris un application d'un texte législatif au sens du 1 de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, il ne peut être soutenu que les pratiques anticoncurrentielles qui sont reprochées à la Fédération française de ski et à ses comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, seraient la conséquence inéluctable des règles d'organisation et de fonctionnement de ladite fédération, telles qu'elles résultent de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, ou des règlements pris pour son application;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France et le ministre de la jeunesse et des sports ne sont pas fondés à soutenir que les pratiques relevées résulteraient de l'application d'un texte législatif ou réglementaire pris, pour son application au sens du 1 de l'article 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Sur les sanctions et injonctions:

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986: "Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit on cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. 100 du montant du chiffre d'affaires taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le maximum est de 10 millions de francs. Le Conseil de concurrence peut ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'il désigne, l'affichage dans les lieux qu'il indique... Les frais sont supportés par la personne intéressée";

Considérant que les faits reprochés à la Fédération française de ski et aux comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, ainsi qu'au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France et à l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver, qui avaient pour objet et pouvaient avoir pour effet d'exclure du marché des entreprises offrant des assurances sportives concurrentes des produits d'assurance accessoires à la "carte-neige" sont, par leur nature même, particulièrement graves; que si la Fédération française de ski a pu avoir le souci légitime de maintenir, voire d'augmenter le nombre de ses adhérents, cette préoccupation ne l'autorisait pas à mettre en œuvre à cette fin des pratiques prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986; que ces pratiques, dont elle a pris l'initiative, sont d'autant plus graves qu'elles ont perduré pendant plus de trois ans et se sont poursuivies après que le Conseil de la concurrence eut, par une décision en date du 19 avril 1988, attiré l'attention de ladite fédération sur cette question en estimant qu'il n'était pas établi, alors, que la fédération et les clubs qui lui sont affiliés aient utilisé le titre "carte-neige" dans le but de faire obstacle à la présence sur le marché d'offres d'assurances sportives concurrentes de celles distribuées par la fédération, les comités régionaux et les clubs;

Considérant que, pour apprécier l'importance du dommage causé à 1' économie, il y a lieu de tenir compte du fait que seuls 48 p. 100 des skieurs sont assurés; qu'ainsi, même si la souscription d'une assurance n'est pas obligatoire pour la pratique du ski de loisir, la demande potentielle est forte; que, par ailleurs, les pratiques imputables à la Fédération française de ski ont eu pour effet de contraindre les skieurs désirant souscrire une assurance à adhérer, en même temps, à la fédération, et à payer ainsi un prix sensiblement plus élevé que celui d'une simple assurance-assistance ;

Considérant que pour la période du 1er mai 1991 au 30 avril 1992, dernier exercice dont les résultats sont connus, la Fédération française de ski comptait 593 578 adhérents; que les ressources de l'exercice se sont élevées à 46 629 886 F, dont 19 375 835 F, représentant le produit net des adhésions et des titres; qu'il y a lieu, au vu des éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger à la Fédération française de ski une sanction pécuniaire de 1 000 000 F;

Considérant que pour l'année 1991-1992, le comité régional de ski de la Côte d'Azur comptait 13 572 adhérents; que le compte de résultats, au 31 décembre 1992 fait apparaître un montant total des produits s'élevant à 1 584 262 F dont 1 284 722 F provenant de la vente de titres FFS; qu'il y a lieu, au vu dus éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger au comité régional de ski de la Côte d'Azur une sanction pécuniaire de 50 000 F;

Considérant que pour la saison 1991-1992, le comité régional de ski du Dauphiné comptait 72 167 adhérents; que le compte de résultats pour la période du 1er octobre 1992 au 30 septembre 1993 fait apparaître un montant total de produits d'exploitation s'élevant à 1 789 786 F dont 1 675 210 F provenant du produit net des ventes de titres ; qu'il y a lieu, au vu des éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger au comité régional de ski du Dauphiné une sanction pécuniaire de 100 000 F;

Considérant que pour la saison 1992-1993, le comité régional de ski de Savoie comptait 72 042 adhérents; que ses ressources se sont élevées à 5 398 941 F dont 1 720 703 F provenant dus ventes de titres; qu'il y a lieu, au vu des éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger au comité régional du ski de la Savoie une sanction pécuniaire de 100 000 F;

Considérant que l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver regroupe 100 communes adhérentes; que les produits d'exploitation au 31 décembre 1992 s'élevaient à 6 363 437 F dont 6 327 780 F provenant des cotisations de ses membres; que pour la même année le résultat d'exploitation est de 2 344 827 F; qu'il y a lieu, au vu des éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger à l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver une sanction pécuniaire de 200 000 F;

Considérant qu'au 1er janvier 1994, le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France comptait 236 adhérents et 72 membres associés; que les ressources du syndicat se sont élevées, pour l'année 1993, à 3 796 077 F dont 3 293 817 F provenant des cotisations des adhérents et 189 000 F provenant des cotisations des membres associés; qu'il y a lieu, au vu des éléments d'appréciation indiqués ci-dessus, d'infliger au Syndicat national dus téléphériques et téléskis de France une sanction pécuniaire de 150 000 F ;

Décide:

Article 1er

Il est sursis à statuer un vue d'un complément d'instruction sur la demande présentée par le commissaire du Gouvernement et tendant à la notification d'un grief complémentaire à la Fédération française de ski sur le fondement des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2

Il est enjoint à la Fédération française de ski et aux comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie de mettre fin aux pratiques ayant pour objet de faire obstacle à la présence sur le marché d'offre d'assurances sportives concurrentes de celles distribuées par la fédération.

Article 3

Il est enjoint à la Fédération française de ski de diffuser le texte de la présente décision, dans un délai de trois mois à compter de sa notification, à l'ensemble des comités régionaux et des clubs affiliés à la fédération.

Article 4

Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes:

1 000 000 F à la Fédération française de ski;

50 000 F au comité régional de ski de la Côte d'Azur;

100 000 F au comité régional de ski du Dauphiné;

100 000 F au comité régional de ski de la Savoie;

200 000 F à l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver;

150 000 F au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France.

Article 5

La présente décision sera publiée dans le premier numéro mensuel de la saison d'hiver 1994-1995 de la revue Ski français, à la charge de la Fédération française de ski.

Article 6

La présente décision sera publiée dans le rapport annuel de la Fédération française de ski pour l'année 1994, ainsi que dans les rapports annuels des comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, pour la même année.