CA Paris, 1re ch. sect. concurrence, 14 juin 1995, n° ECOC9510160X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Association des maires des stations françaises de sports d'hiver et d'été, Syndicat national des téléphériques et téléskis de France, Fédération française de ski, Comité régional de Savoie, Comité régional du Dauphiné, Comité régional de Côté d'Azur
Défendeur :
Ministre de l'Économie, des Finances et du Budget
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guerin
Avocat général :
Mme Thin
Conseillers :
Mme Favre, M. Cailliau
Avoués :
SCP Fisselier, Chiloux, Boulay, SCP Fanet, SCP Taze, Bernard, Belfayol Broquet
Avocats :
Mes Valluis, Laviron, Pecnard, Coffy de Boisdeffre, SCP Chain de Lagger
Ayant créé un produit d'assurance à la journée dit " vignette ski assurance ", proposé dans les stations de sports d'hiver à partir de la saison de 1985/1986, M. André Guillouard, assureur-conseil, et la société " General Accident Fire and Live " ont, par lettre du 19 décembre 1989, saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la Fédération française de ski (FFS) et le Syndicat national des téléphériques et téléskis de France (SNTF) dans le secteur de l'assurance ski.
L'enquête effectuée à la suite de cette plainte a constaté :
- que jusqu'en 1985, la FFS bénéficiait d'un monopole de fait pour la commercialisation de la " carte-neige ", par elle créée en 1980, qui comporte, en plus de la souscription d'une assurance-assistance, l'adhésion à cette fédération contre paiement d'une cotisation ;
- qu'en présence de l'apparition sur le marché de produits concurrents, la " vignette ski assurance " créée par M. Guillouard et le " ticket-neige Orion ", assurance journalière pour la pratique du ski créée en 1986 à l'initiative de quelques gestionnaires de remontées mécaniques regroupés dans l'association " Orion - Stations de l'an 2000 ", la FFS a conclu avec ses comités régionaux de Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, le SNTF et l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver (AMSFSH) divers accords en vue de l'éviction des produits d'assurance concurrents de la " carte-neige ".
Au vu des résultats de cette enquête, le Conseil de la concurrence a, par décision n° 94-D-40 du 28 juin 1994 " relative à la situation de la concurrence dans le secteur de l'assurance ski " :
Sursis à statuer en vue d'un complément d'instruction sur la demande présentée par le commissaire du Gouvernement et tendant à la notification d'un grief complémentaire à la Fédération française de ski sur le fondement du premier alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Infligé, sur le fondement de l'article 7 de cette ordonnance, des sanctions pécuniaires de :
1 000 000 F à la Fédération française de ski ;
50 000 F au comité régional de ski de la Côte d'Azur ;
100 000 F au comité régional de ski du Dauphiné ;
100 000 F au comité régional de ski de la Savoie ;
200 000 F à l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver ;
150 000 F au Syndicat national des téléphériques et téléskis de France ;
Enjoint à la Fédération française de ski et aux comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie de mettre fin aux pratiques ayant pour objet de faire obstacle à la présence sur le marché d'offre d'assurances sportives concurrentes de celles distribuées par la fédération ;
Enjoint à la Fédération française de ski de diffuser le texte de cette décision à l'ensemble des comités régionaux et des clubs affiliés à cette fédération ;
Ordonné la publication de cette décision :
Dans le premier numéro mensuel de la saison d'hiver 1994/1995 de la revue Ski français ;
Dans le rapport annuel de la Fédération française de ski pour l'année 1994, ainsi que dans les rapports annuels des comités régionaux de la Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie, pour la même année.
Les 29 juillet, 9 et 10 août 1994, l'AMSFSP, le SNTF, la FFS et les trois comités régionaux sanctionnés ont formé recours contre cette décision dont ils sollicitent l'annulation ou subsidiairement la réformation en faisant valoir :
- que le Conseil de la concurrence était incompétent pour statuer sur les pratiques dénoncées ;
- qu'il ne pouvait simultanément surseoir à statuer sur l'application de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et prononcer des sanctions sur le fondement de son article 7 :
- que la preuve des ententes sanctionnées n'est pas établie.
Au sujet des accords retenus par la décision déférée, la FFS fait en outre valoir d'une part qu'il ne pouvait y avoir d'entente avec ses comités régionaux, dès lors qu'il s'agit de la même structure, d'autre part que les autres accords ne tendaient qu'à l'élaboration d'un produit commun.
Le SNTF soutient pour sa part :
- qu'il n'est pas un opérateur économique sur le marché litigieux ;
- que " l'autolimitation " de la vente de son propre produit ne peut constituer une entente ;
- que les accords qui lui sont reprochés revêtent un caractère purement défensif ;
- qu'ils n'ont eu aucun effet sensible sur le marché ;
- et qu'ils doivent bénéficier de l'exemption prévue à l'article 10-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.
L'AMSFSH estime, quant à elle, que n'ayant aucune activité économique, elle ne peut se voir reprocher des pratiques anticoncurrentielles, alors qu'elle n'a entendu jouer qu'un rôle de médiateur.
Les requérants invoquent enfin le caractère disproportionné des sanctions prononcées.
Intervenant en tant que plaignant, le cabinet Guillouard-Cattan a conclu à la confirmation de la décision entreprise.
Répliquant aux divers moyens soulevés par les requérants, le ministre de l'Economie a présenté des observations écrites tendant au rejet de leur recours.
Le ministère publié a conclu oralement aux mêmes fins.
Sur ce, LA COUR :
Sur la compétence :
Considérant que si le 4 janvier 1995, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a déposé un déclinatoire de compétence au sujet des présents recours, il a ultérieurement fait connaître, par courrier du 17 mars, qu'en accord avec le ministre de la jeunesse et des sports, il avait décidé de le retirer ;
Considérant qu'en dépit de ce retrait, la FFS persiste à soutenir que les faits qui lui sont reprochés relèvent de la compétence du juge administratif, dès lors qu'ils s'inscrivent dans le cadre de ses prérogatives de puissance publique pour l'organisation des compétitions et que l'article 38 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives lui faisait l'obligation d'informer ses adhérents de leur intérêt à souscrire un contrat d'assurance propre à garantir les risques occasionnés par la pratique du ski ;
Mais considérant que les accords incriminés n'ont pas trait à l'organisation de compétitions, mais aux moyens mis en œuvre par la FFS pour tenter de se réserver le monopole de l'assurance ski vendue en station, et que le refus d'attribuer des compétitions aux stations proposant un produit concurrent ne saurait s'inscrire dans le cadre de sa mission de service public ;
Considérant par ailleurs que le devoir d'information prévu par la loi susvisée, qui ne confère aucun monopole à la FFS en matière d'assurance, doit s'exercer de manière objective en présentant au public concerné les diverses formules d'assurance susceptibles d'être souscrites et qu'il ne saurait être confondu avec la commercialisation d'un produit d'assurance qui ne peut constituer un acte administratif ;
Considérant que la diffusion par la FFS de l'un de ces produits constitue une activité de service au sens de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, détachable de ses prérogatives de puissance publique, et que c'est à juste titre que le Conseil de la concurrence a retenu sa compétence pour en connaître;
Sur le sursis à statuer :
Considérant que, tout en statuant d'ores et déjà sur le grief d'ententes prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, la décision déférée a décidé de " surseoir à statuer en vue de procéder à un complément d'instruction " sur la demande du commissaire du Gouvernement tendant à la notification à la FFS du grief complémentaire d'abus de position dominante visé à l'article 8 de la même ordonnance ;
Considérant que la FFS demande à la cour de ne pas maintenir cette décision, en faisant valoir que l'appréciation d'un abus supposé dans l'organisation des compétitions relèverait de la compétence du Conseil d'Etat ;
Mais considérant que la notification éventuelle du grief complémentaire susvisé ne pourra, aux termes de l'article 8, porter que sur " l'abus de position dominante sur le marché " de référence relatif aux produits d'assurance pour la pratique du ski et qu'il a été vu plus haut que le contrôle de son activité sur ce marché relevait de la compétence du Conseil de la concurrence conformément aux dispositions de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Considérant par ailleurs que, bien qu'il ne soit pas visé par la notification de ce grief, le SNTF conteste cette décision en soutenant que le sursis à statuer crée un risque de contrariété de décisions ;
Mais considérant que tout en estimant d'ores et déjà établi le grief d'entente sanctionné par la décision déférée, le Conseil de la concurrence pouvait légitimement renvoyer l'affaire à l'instruction pour la notification d'un grief complémentaire à l'une des parties poursuivies, dès lors que cette mesure n'est susceptible de porter atteinte ni au principe du contradictoire ni aux droits de la défense ;
Considérant en outre que le risque de contrariété de décisions invoqué n'apparaît pas fondé, dès lors que la décision qui sera prise à l'issue du complément d'information émanera de la même juridiction que celle qui a rendu la décision déférée et sera soumise à la même voie de recours,
Au fond :
Considérant que la décision déférée est fondée sur les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, aux termes desquelles " sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalition, notamment lorsqu'elles tendent à limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises... " ;
Qu'elle sanctionne à ce titre plusieurs accords qu'il convient d'examiner successivement ;
Sur les accords entre la Fédération française de ski et ses comités régionaux de Côte d'Azur, du Dauphiné et de la Savoie :
Considérant qu'il ressort des éléments de l'enquête :
- que la FFS a exprimé son opposition à la mise sur le marché de produits d'assurance concurrençant la carte-neige commercialisée par cette fédération, en décidant de ne plus organiser de compétitions dans les stations les proposant ;
- que, conformément à ces directives, le comité régional de ski de Savoie a adressé le 15 septembre 1987 aux clubs de son ressort une circulaire leur demandant " de prendre contact avec l'exploitant des remontées mécaniques de façon à lutter de la façon la plus active contre la mise en place de ce produit " et a décidé lors d'une délibération du 15 décembre suivant de " s'opposer avec force et avec tous les moyens à sa disposition à toutes les stations qui adhéreront la saison prochaine au système Orion ou aux autres concurrents de la carte-neige ;
- que le comité régional de ski du Dauphiné a décidé lors de son assemblée générale du 18 octobre 1987 de cesser d'organiser " des compétitions, sorties loisirs, écoles du mercredi dans les stations qui adopteraient le système ticket-neige Orion " ;
- qu'enfin le 9 juillet 1988 la FFS a demandé au comité régional de ski de la Côte d'Azur de " stopper " la distribution dans son ressort de produits d'assurance autres que la carte-neige, et notamment de la vignette ski assurance ;
- que la Fédération française de ski a maintenu son opposition à l'organisation de compétitions dans les stations vendant un produit concurrent de la carte-neige lors des réunions de ses comités directeurs des 22 octobre 1988, 22 novembre 1988 et 18 février 1989 ;
Considérant que ces résolutions prises simultanément par la FFS et les trois comités régionaux susvisés manifestent une action concertée en vue d'évincer du marché de l'assurance ski les concurrents de la carte-neige commercialisée par la FFS ;
Considérant que, par conclusions communes, cette fédération et les comités régionaux sanctionnés contestent l'application des dispositions précitées de l'article 7 à leur égard, en faisant valoir qu'il ne peut y avoir d'entente entre des organismes faisant partie d'une même structure ;
Mais considérant que, en tant qu'associations déclarées, les comités régionaux ont chacun une personnalité morale distincte de la fédération qui les regroupe et que celle-ci ne saurait soutenir qu'ils ne jouissent d'aucune autonomie à son égard, alors que les compétitions par elle organisées ne peuvent se faire que sur leur proposition et avec leur accord, une circulaire du 1er décembre 1987 reproduite à la décision déférée leur reconnaissant même " toute liberté " à cet égard ;
Considérant qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que le Conseil de la concurrence a relevé que les instructions de la FFS pour évincer les produits d'assurance ski concurrents de la carte-neige et leur application par les comités régionaux de Savoie, du Dauphiné et de la Côte d'Azur constituaient une entente prohibée ayant pour objet d'empêcher le libre jeu de la concurrence sur le marché des produits d'assurance vendus en station ;
Sur les accords intervenus entre la FFS et le SNTF :
Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats :
- que, lors de son assemblée générale du 25 novembre 1987, le SNTF a, tout en protestant contre " les menaces écrites de la FFS de retrait des compétitions aux adhérents d'Orion ", accepté la signature d'un accord prévoyant, en échange de la levée des sanctions prises à l'encontre des stations ayant adopté le ticket-neige, " le gel des adhésions à Orion" en s'opposant à la commercialisation de son produit d'assurance dans d'autres stations ;
- que, lors de son assemblée générale extraordinaire du 10 mai 1988, le SNTF a, " à l'issue de trois réunions avec la FFS et, malgré la demande importante de la clientèle d'une assurance à la journée, souhaité que ses adhérents ne dispersent pas leurs actions en dehors des produits utilisés actuellement, qu'il convient toujours de développer, en attendant la création d'un produit commun " ;
- que, lors de son assemblée générale du 16 novembre 1988, il a, à nouveau, incité ses adhérents à " utiliser en premier la carte-neige de la FFS et, quand cela paraît nécessaire aux exploitants en ayant la possibilité, le ticket-neige, mais en évitant les autres formules issues du monde extérieur aux sports d'hiver " ;
- qu'enfin, par lettre-circulaire du 4 décembre 1989, le SNTF a invité les exploitants à mettre en place la commercialisation du nouveau produit d'assurance à la journée " FFS Neige ", en les incitant à " s'abstenir de tout soutien à un produit concurrent, sauf si celui-ci, comme le ticket-neige Orion, assure des répartitions financières sensiblement voisines à la FFS et au SNTF " ;
Considérant que c'est en vain que la FFS prétend que ces accords n'avaient d'autre but que d'assurer la création d'un produit commun dès lors qu'ils avaient expressément pour objet, contrairement aux prescriptions de l'article 7 précité, d'éliminer du marché tout produit concurrent ;
Considérant que le SNTF conteste pour sa part l'application des dispositions de cet article à son égard en faisant valoir que son activité de transport est étrangère au marché de référence ;
Mais, considérant que cet argument ne saurait être retenu dès lors qu'il intervient sur ce marché en proposant aux skieurs transportés à l'aide des téléphériques et des remontées mécaniques des produits d'assurance pour la pratique du ski ;
Considérant qu'il fait valoir en second lieu qu'il ne peut lui être reproché d'avoir " autolimité " la vente de son propre produit ;
Mais, considérant que, si le ticket-neige Orion concurrençant la carte-neige de la FFS a été créé par des gestionnaires de remontées mécaniques, ceux-ci sont regroupés dans l'association Orion, qui constitue une personne morale distincte du SNTF et que ce syndicat ne saurait prétendre que " le gel des adhésions à Orion " n'a pas eu d'effet sensible, alors que cette association avait connu un taux de développement rapide de 27 à 47 p. 100 sur les forfaits d'assurance à la journée et se trouvait en présence d'un marché potentiel important, 48 p. 100 seulement des skieurs étant assurés ;
Qu'au surplus,même si la preuve de cet effet ne pouvait être rapportée, les accords susvisés n'en seraient pas moins répréhensibles au sens de l'article 7 précité dès lors qu'ils avaient " pour objet " de restreindre le jeu de la concurrence sur le marché concerné ;
Considérant que le SNTF prétend en outre que les accords litigieux ne devraient pas, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, être poursuivis, dès lors qu'aux termes d'une convention dite " protocole de Val-d'Isère ", signée le 5 décembre 1980, notamment par la FFS, l'AMSFSH, le SNTF et le ministre de la Jeunesse, des sports et des loisirs, " l'ensemble des partenaires s'engageaient, pendant la durée de la convention, à favoriser la vente de la carte-neige et à ne pas promouvoir de produit concurrent " ;
Mais, considérant que cette convention ne saurait être assimilée à " un texte législatif ou un texte réglementaire pris pour son application ", qui seuls pourraient constituer le motif d'exemption prévu à l'article 10-1 ;
Qu'au surplus la référence à ce protocole apparaît inopérante dès lors qu'il avait été conclu en 1980, "pour une période de quatre ans", et se trouvait donc caduc lors de l'apparition, à partir de 1986, des produits concurrents de la carte-neige, créés en 1980 ;
Considérant que le SNTF invoque enfin le caractère défensif des accords qui lui sont reprochés en faisant valoir qu'ils sont intervenus à la suite des " menaces de retrait des compétitions aux adhérents d'Orion " ;
Mais, considérant qu'il reconnaît lui-même dans ses conclusions que le fait qu'une entente soit défensive ne peut constituer qu'un simple facteur d'atténuation de la sanction encourue et non une cause d'exonération ;
Or considérant qu'il ressort de la comparaison entre le montant des sanctions pécuniaires infligées à la FFS et au SNTF que la décision déférée a largement pris en compte le contexte invoqué ;
Sur l'accord entre la FFS et l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver :
Considérant que cet accord se trouve établi par les éléments suivants, relevés par la décision déférée, desquels il ressort :
- que, lors d'une réunion du 29 janvier 1987, le conseil d'administration de l'Association des maires des stations françaises de sports d'hiver a décidé, après avoir entendu le président de la FFS, de demander aux communes membres de cette association " d'intervenir auprès des exploitants de remontées mécaniques pour ne pas créer un produit concurrentiel à la carte-neige " ;
- que cette résolution a été adoptée après audition du président de la FFS qui a, " compte tenu du soutien de l'association ", accepté de s'associer à certaines actions de promotion ;
- que cet accord a été suivi de trois lettres-circulaires adressées aux maires des communes adhérentes pour leur demander :
- " d'agir auprès des exploitants de remontées mécaniques afin qu'ils sursoient à la vente d'une assurance intégrée pour la saison 1987-1988 " (lettre du 24 août 1987) ;
- " d'intervenir auprès de ces exploitants afin de les dissuader de mettre en place pour cet hiver une assurance intégrée " (lettre du 1er octobre 1987) ;
- " de ne pas promouvoir le ticket-neige et d'agir en conséquence auprès des exploitants " (lettre du 19 septembre 1988) ;
Considérant que l'AMSFSH conteste avoir enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 en faisant valoir qu'elle n'exerce aucune activité économique et n'a joué qu'un rôle de médiateur pour demander à la FFS de lever son refus d'autorisation de compétitions dans les stations vendant des produits concurrents de la carte-neige ;
Mais, considérant qu'en demandant à ses adhérents, par les trois lettres susvisées, de s'opposer à la commercialisation de ces produits, l'AMSFSH est personnellement intervenue sur le marché litigieux et qu'elle a outrepassé son rôle de conseil et de défense des maires des stations de sports d'hiver en leur recommandant de s'opposer, contrairement à l'intérêt des skieurs, à la commercialisation, sur leur commune, de tout produit d'assurance concurrençant celui de la FFS ;
Que, ce faisant, elle a personnellement enfreint les prescriptions de l'article 7 susvisé ;
Sur les sanctions :
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, modifié par la loi du 31 décembre 1992, les sanctions pécuniaires doivent être "proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'organisme sanctionné" ;
Or, considérant que la décision déférée a, à juste titre, relevé :
- d'une part, que les sanctions concertées ayant eu pour objet d'exclure du marché des entreprises offrant des assurances sportives concurrentes des produits d'assurance accessoires à la carte neige revêtaient un caractère de gravité certain, d'autant plus qu'elles ont perduré pendant plus de trois ans ;
- d'autre part, qu'elles ont causé à l'économie un dommage important en présence d'une forte demande potentielle, 48 p. 100 seulement des skieurs étant assurés ;
Considérant qu'elle a en outre pris soin de se référer à la situation propre de chacun des organismes en cause en notant que les ressources du dernier exercice se sont élevées à :
46 629 886 F pour la FFS ;
1 584 262 F pour le comité régional de la Côte d'Azur ;
1 789 786 F pour celui du Dauphiné ;
5 398 941 F pour celui de la Savoie ;
6 363 437 F pour l'AMSFSH ;
3 796 077 F pour le SNTF ;
Considérant que les sanctions déférées tiennent également compte du rôle respectif de chacun des participants aux ententes constatées ;
Qu'elles se trouvent donc justifiées ;
Considérant que si la FFS produit une attestation de son commissaire aux comptes, datée du 7 septembre 1994, de laquelle il ressort que le produit annuel des cotisations de ses adhérents s'élève à 38 753 317 F, cette légère minoration par rapport aux ressources visées par la décision déférée n'est pas de nature à justifier une modification de la sanction prononcée à son encontre eu égard au rôle déterminant par elle joué dans les divers accords incriminés,
Par ces motifs : Rejette les recours formés contre la décision du Conseil de la concurrence n° 94-D-40 du 28 juin 1994. Condamne les requérants aux dépens.