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Décisions

Cass. com., 25 janvier 2000, n° 97-20.199

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Heli-Inter assistance (SARL)

Défendeur :

Jet systems (SA), Ministre de l'Économie et des Finances

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

M. Dumas

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Tiffreau, Me Ricard.

Cass. com. n° 97-20.199

25 janvier 2000

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 septembre 1997), que, par convention du 26 avril 1988, modifiée en 1990, la société d'économie mixte Sena Sud a confié, moyennant une redevance annuelle et sous le régime général de l'occupation temporaire du domaine public, à la société Air assistance, aux droits de laquelle se trouve la société Héli-Inter assistance (société Héli-Inter), l'exploitation de l'hélistation de Saint-Crescent le Viel à Narbonne, comportant deux aires d'envol et d'atterrissage ainsi que divers locaux d'accueil, de garages et d'entretien ; que de 1989 à 1994, la société Héli-Inter a été titulaire du marché de fourniture de transports sanitaires héliportés pour le SMUR du Centre hospitalier de Narbonne ; qu'à l'issue d'un nouvel appel d'offres en 1994, ce marché a été attribué à la société Jet systems, moins disante ; qu'il était prévu qu'un hélicoptère devrait rester à la disposition du SMUR de Narbonne sur le terrain de l'hélistation qui effectuerait, de préférence, les avitaillements ; que le 6 janvier 1995, la société Jet systems interrogea la société Heli-Inter sur le prix des diverses prestations qu'elle lui consentirait pour le stationnement de l'appareil, les divers branchements, le lavage, le carburant, le bureau des pilotes et l'accès aux sanitaires ; que le même jour, il lui fut répondu que le montant de ces prestations s'élèverait à 40 800 F HT par mois ; qu'ayant refusé ces propositions, la société Jet systems a seulement pu utiliser la piste de décollage et d'atterrissage ; qu'elle a alors saisi, le 27 juin 1995, le Conseil de la concurrence pour faire constater, sur le fondement de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les pratiques discriminatoires dont elle était victime par abus de position dominante et de situation de dépendance économique ; que le Conseil a constaté l'existence de ces infractions, a prononcé une sanction de 70 000 F, et a enjoint à la société Héli-Inter de justifier dans le délai de deux mois d'une proposition de tarification des prestations de service litigieuses dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et orientées vers les coûts encourus pour répondre à cette demande ; que la société Héli-Inter a formé un recours en annulation et en réformation devant la Cour d'appel de Paris ;

Attendu que la société Héli-Inter fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours, alors, selon le pourvoi, que dans ses conclusions, elle faisait valoir que l'article 33 de la convention du 26 avril 1988 portant autorisation d'occupation du domaine public excluait l'existence d'un monopole d'utilisation de l'hélistation, dès lors que le concessionnaire était tenu de laisser atterrir et décoller tous hélicoptères sur l'hélistation, de sorte que l'accès des tiers à l'installation essentielle concédée par l'autorité publique était préservée ; qu'en fait, il n'était pas contesté qu'elle ne s'était jamais opposée aux atterrissages et décollages des hélicoptères des tiers et, notamment de ceux de la société Jet systems, de sorte qu'était exclu tout abus de position dominante ; qu'elle ajoutait dans ses conclusions que la société Jet systems ne lui a jamais payé de redevances pour l'utilisation de l'hélistation, alors que celles-ci constituent la contrepartie légale des obligations de l'exploitant de l'hélistation, de sorte qu'était également exclu tout état de dépendance économique au préjudice de la première et au profit de la seconde ; qu'elle ajoutait dans ses conclusions qu'elle était fondée à se prévaloir de justifications tirées de ses conditions d'exploitation, dès lors que les charges de celles-ci n'étaient pas couvertes par les redevances légalement prévues, notamment en raison de la dévolution du marché du SAMU à la société Jet systems, laquelle avait d'ailleurs refusé de payer toute redevance ; qu'en définitive, dans l'incapacité où elle était de faire face à ses charges avec les prix offerts en réponse à l'appel d'offres du Centre hospitalier pour capter à dumping le marché qui lui était antérieurement confié, la société Jet systems avait refusé de payer toute redevance, puis abusivement saisi l'Administration de la concurrence, tandis qu'elle était en déséquilibre financier par l'effet dudit dumping ; qu'en omettant de s'expliquer sur ce qui précède, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt répond aux conclusions prétendument délaissées en relevant "que sur le marché pertinent de l'exploitation de ladite hélistation la société Héli-Inter détient un monopole résultant de la convention conclue le 26 avril 1988 avec la société d'économie mixte locale Sena Sud et qu'elle occupe de ce seul fait une position dominante ; qu'elle soutient vainement qu'elle n'a pas contractuellement le monopole de l'utilisation de l'hélistation, dès lors qu'un tel monopole n'est pas en cause et que seules se trouvent incriminées les conditions dans lesquelles elle permet à ses concurrents d'accéder au marché dont elle est l'unique opérateur ; que la société Jet systems, qui ne peut disposer d'installations et d'équipements substituables à l'infrastructure essentielle sur laquelle la société Héli-Inter détient un monopole d'exploitation, se trouve nécessairement en situation de dépendance économique pour l'exécution du contrat public dont elle est titulaire" ; qu'ayant également, de façon concrète, examiné le montant des tarifs proposés et constaté que la société concessionnaire ne pouvait pas légitimement prétendre répercuter sur la société Jet systems la totalité des charges d'exploitation, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation de la société Héli-Inter, n'encourt pas les griefs du moyen; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.