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Décisions

Conseil Conc., 6 novembre 1996, n° 96-D-68

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques mises en œuvre par des entreprises de transports sanitaires lors de la passation d'un marché avec le centre hospitalier régional de Metz-Thionville

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de M. André-Paul Weber, par MM. Barbeau, président, Cortesse, vice-président, , Bon, membre, désigné en remplacement de M. Jenny, empêché.

Conseil Conc. n° 96-D-68

6 novembre 1996

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 23 novembre 1995, sous le numéro F 822, par laquelle le ministre délégué aux finances et au commerce extérieur a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par des entreprises de transports sanitaires lors de la passation d'un marché avec le centre hospitalier régional de Metz-Thionville ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié pris pour son application ; Vu la lettre du président du Conseil de la concurrence en date du 2 juillet 1996 notifiant aux parties et au commissaire du Gouvernement sa décision de porter l'affaire devant la commission permanente, en application de l'article 22 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; Vu les observations présentées par l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA, par l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de la Moselle ATSU 57 et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de la Moselle ATSU 57 entendus, l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA ayant été régulièrement convoquée, Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :

I- CONSTATATIONS

A- Les caractéristiques de l'activité :

L'activité de transporteur sanitaire privé est étroitement réglementée.

L'article L. 51-2 du code de la santé publique dispose que toute personne effectuant un transport sanitaire doit avoir été préalablement agréée par le préfet du département. L'agrément, sa suspension ou son retrait sont délivrés après avis du sous-comité des transports, défini par l'article 5 du décret n° 87-964 du 30 novembre 1987. L'avis est donné sur le rapport du médecin inspecteur de la santé après examen des moyens de transport engagés et au vu des observations de l'intéressé.

En application des dispositions de l'article L. 51-3 du code de la santé publique, le décret du 30 novembre 1987 susmentionné a défini les catégories de moyens de transport affectés aux transports sanitaires, les catégories de personnes habilitées à effectuer des transports sanitaires, leurs missions respectives ainsi que la qualification et la composition des équipages. L'article 13 de ce texte fixe les obligations des ambulanciers en ce qui concerne le service de garde organisé par le préfet pour l'ensemble du département : le titulaire de l'agrément est tenu de participer au service de garde selon un tableau départemental de garde établi en concertation avec les professionnels concernés. Le titulaire de l'agrément qui est de garde doit assurer l'écoute des appels, satisfaire aux demandes de transport, informer le centre de réception et de régulation des appels médicaux, de son départ en mission et de l'achèvement de celle-ci.

La participation à ce service de garde suppose l'organisation de permanences qui sont tenues de nuit (entre 20 heures et 8 heures) ainsi que les dimanches et jours fériés (entre 8 heures et 20 heures). En application des dispositions de la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, tout personnel ambulancier soumis à ces astreintes de permanence perçoit, lors de chaque permanence, une indemnité complémentaire équivalant à une heure trente de travail. A cette indemnité d'astreinte s'ajoute la rémunération du temps d'intervention. Le temps d'intervention est calculé sur la base de la durée réelle de l'intervention. Toutefois, toute intervention d'une durée inférieure à une heure équivaut à une heure de travail. En l'absence de toute intervention, l'indemnité de permanence correspond à la valeur de deux heures de travail. Les heures supplémentaires ainsi comptabilisées sont payées sur la base du salaire réel du bénéficiaire.

Le caractère réglementé de l'activité résulte également des dispositions de l'article L. 51-6 du code de la santé publique. Dans chaque département, la mise en service de véhicules affectés aux transports sanitaires terrestres est soumise à l'autorisation du représentant de l'Etat. Aucune autorisation n'est délivrée si le nombre de véhicules déjà en service égale ou excède un nombre fixé en fonction des besoins sanitaires de la population.

Enfin, l'article L. 51-4 du code de la santé publique dispose que les tarifs des transports sanitaires " sont établis par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget, de la concurrence et de la consommation ". Les arrêtés interministériels pris en application de ce texte fixent les " tarifs limites des transports sanitaires terrestres " qui déterminent les valeurs maximales du forfait départemental, du tarif kilométrique, du tarif réduit et du forfait agglomération, servant de base au calcul du prix des prestations. Ces mêmes textes prévoient en outre diverses majorations pour les services de nuit (opérés entre 20 heures et 8 heures) et pour les services assurés les dimanches et jours fériés (opérés entre 8 heures et 20 heures). Par ailleurs, l'assurance maladie garantit, entre autres risques, la couverture des frais de transport de l'assuré ou des ayants droit se trouvant dans l'obligation de se déplacer pour recevoir des soins ou subir des examens appropriés à leur état ainsi que pour se soumettre à un contrôle prescrit en application des textes régissant la sécurité sociale.

B- Les faits à qualifier :

Le 3 août 1993, le centre hospitalier régional de Metz-Thionville a lancé un appel d'offres ouvert afin de sélectionner les entreprises d'ambulances devant assurer " les transports sanitaires terrestres nécessaires au fonctionnement des services mobiles d'urgence (SMUR) du CHR de Metz-Thioiwille (groupement des hôpitaux de Metz et de Thionville) ". Afin de tenir compte de la double localisation des services mobiles d'urgence et de la nature différente des prestations à réaliser, le marché a été réparti en cinq lots.

Les lots n° 1 et 4 correspondaient respectivement aux " transports primaires " des services mobiles d'urgence et de réanimation de Metz et de Thionville. Il s'agissait, pour chacune des zones d'intervention, d'assurer le " relevage de tous malades, blessés et femmes en couches dont la prise en charge est confiée au SMUR, à l'exclusion des interventions sur la voie publique qui relèvent des missions statutaires des services d'incendie et de secours ". En 1992, pour le lot n° 1, 3.200 sorties avaient été enregistrées et le nombre de kilomètres parcourus s'était établi à 50.000 km ; pour le lot n° 4, les 3.400 sorties enregistrées avaient représenté des déplacements évalués à 40.000 km.

Les lots n° 2 et 5 correspondaient respectivement " aux déplacements des moyens médicalisés SMUR " de Metz et de Thionville. Il revenait à l'attributaire de chacun de ces lots de mettre à la disposition de l'hôpital Bon-Secours de Metz et de l'hôpital Bel-Air de Thionville deux véhicules médicalisés de liaison ainsi que le personnel de conduite. En 1992, la demande s'attachant à chacun de ces lots s'était, dans l'ordre, élevée à 2950 et 2 900 sorties, représentant respectivement 40 000 et 36 000 kilomètres.

Le lot n° 3 avait enfin trait aux " transferts secondaires médicalisés Metz ". Le titulaire du lot devait mettre à la disposition du centre hospitalier un véhicule de type A ou B pour assurer des transports sanitaires principalement en direction du centre hospitalier régional de Nancy. 430 sorties avaient été enregistrées en 1992, correspondant à 20500 kilomètres.

La date limite de remise des plis a été fixée au 8 septembre 1993 et l'ouverture des plis a eu lieu le 7 octobre 1993. Le centre hospitalier régional de Metz-Thionville a enregistré deux offres émanant, l'une de l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA, l'autre de l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57.

L'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA a présenté, le 3 septembre 1993, une offre pour les lots n° 4 et 5. Pour le lot n° 4, correspondant aux transports primaires des services mobiles d'urgence et de réanimation de Thionville, le forfait agglomération proposé s'établissait à 379 F (TTC), le tarif kilométrique supplémentaire hors agglomération à 11,64 F (TTC). Pour le lot n° 5, concernant les " déplacements des moyens médicalisés SMUR " sur la zone de Thionville, le montant du forfait par sortie se montait à 348 F (TTC) et le forfait mensuel pour la fourniture et la mise à disposition de deux véhicules médicalisés de liaison s'élevait à 99.400 F (TTC).

De son côté, l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 a, le 8 septembre 1993, présenté des offres pour les lots n° 1, 2 et 3. S'agissant du lot n° 1 correspondant aux transports primaires des services mobiles d'urgence et de réanimation de Metz, l'association ATSU 57 a proposé une offre en tous points identique à celle présentée par l'association TSA pour la zone de Thionville (lot n° 4). Pour le lot n° 2 concernant les " déplacements des moyens médicalisés SMUR " sur la zone de Metz, l'association ATSU 57 a également formulé une offre identique à celle que l'association TSA avait établie pour la zone de Thionville (lot n° 5).

Par procès-verbal de déclaration en date du 16 novembre 1994, M. Friser, gérant de la Sarl Société des taxis et ambulances Friser et membre de l'association TSA, a soutenu avoir assisté " .lors de la mise en place de l'appel d'offres CHR Metz-Thionville d'août 1993 (...) avec M. Buttgen, directeur de l'association TSA, à une réunion qui s'est tenue (...) dans les locaux des établissements Hunault à Metz. Durant cette réunion, nous avons évoqué l'appel d'offres du CHR Metz-Thionville d'août 1993 et le risque d'attribution de ce marché aux sapeurs-pompiers. M. Hunault Roland (président d'ATSU 57) a notamment indiqué, durant cette réunion, que les sapeurs-pompiers pourraient proposer, hors marché, leurs services à un prix de 400 F TTC pour les transports primaires. Il a donc proposé la remise, par TSA et ATSU, d'offres de prix inférieures à celles des sapeurs-pompiers, donc inférieurs à 400 F TTC MM. Buttgen et Hunault devaient se concerter téléphoniquement pour arrêter le montant définitif de l'offre de prix à remettre au CHR Metz-Thionville ".

De même, par procès-verbal du 22 novembre 1994, M. Sieber, exploitant l'entreprise Lorraine Ambulances et membre de l'association ATSU 57, a déclaré : " S'agissant de l'appel d'offres 1993: une réunion préparatoire s'est tenue avant la remise des offres dans les locaux des établissements Hunault à Metz. Lors de la réunion nous avons évoqué deux sujets : principalement la répartition géographique entre l'ATSU et TSA Nous sommes convenus que l'ATSU soumissionnerait aux lots 1, 2 et 3 (région messine) et TSA aux lots 4 et 5 (région Thionvilloise) ; en second lieu, nous avons évoqué la détermination des prix de soumission. Celle-ci s'est faite sur une base commune définie à partir du tarif ministériel. Sur cette base établie d'un commun accord entre l'ATSU et TSA chacune des associations était libre d'appliquer un rabais ou une majoration. "

Selon les indications portées sur l'un des documents remis aux agents de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes par un représentant de l'association TSA le 15 novembre 1994, les dirigeants de l'association TSA et de l'association ATSU 57 se sont réunis antérieurement à la remise des offres. Sous l'en-tête TSA, le document comporte les mentions ci-après reproduites :

- " Réunion: le 2 septembre 1993 Mets aux Ets Hunault.

Réunion des associations: TSA et ATSU

- TSA Buttgen; Friser;

- ATSU Hunault père et fils; Lorraine Ambulances.

Ordre du jour :

- appel d'offres du CHR Metz-Thionville ;

- tour d'horizon sur l'appel d'offres ;

- étude détaillée des cahiers des charges.

Résultats :

- accord sur les zones et la tarification ;

- décision de nouvelle réunion après résultat d'appel d'offres ;

- action sur appel d'offres en cas de non-attribution. "

L'agenda de M. Dominique Hunault, responsable administratif de la Sarl Ambulances Hunault, comporte, à la date du 31 août 1993, les mentions suivantes : " Budgen soumission SAMU. réunion Ambulanciers ". Par un procès-verbal non signé, en date du 24 novembre 1993, M. Roland Hunault a enfin déclaré : " Préalablement à la remise des offres au CHR une rencontre a eu lieu dans les locaux de mon établissement entre les membres de l'ATSU que je préside et des adhérents de TSA. L'initiative de cette rencontre revient à M. Buttgen qui m'avait téléphoné pour connaître ma position dans le cadre des soumissions de prix au CHR Les discussions portaient sur les thèmes suivants : détermination des prix de soumission sur la base d'études que j'avais élaborées en 1990 (...) lors de cette rencontre j'ai fait connaître le prix de soumission plafond que l'ATSU 57 envisageait de déposer. Je suppose que les représentants de TSA se sont simplement alignés sur ma proposition de prix de soumission. Au cours de cette rencontre nous n'avons pas évoqué la répartition géographique qui avait déjà été mise en œuvre en 1990 entre les associations ATSU et TSA et qui avait été déposée auprès des services de la DDASS " Dans les observations qu'elle a présentées à la suite de la notification de griefs, l'association ATSU 57 n'a pas contesté les déclarations de son président.

II- SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL

Sur les pratiques constatées :

Considérant que les dispositions du cahier des clauses administratives particulières relatives au marché des transports sanitaires terrestres nécessaires au fonctionnement des services mobiles d'urgence du centre hospitalier régional de Metz-Thionville précisaient à l'article 2 que " seront admises à soumissionner les personnes physiques ou morales qui assurent l'exploitation de véhicules de transports sanitaires terrestres agréées (...) ainsi que les associations ou organismes ayant signé une convention nationale de participation aux soins médicaux d'urgence. Ces personnes pourront soumissionner dans le cadre d'une association locale ou départementale dûment constituée, dans les mêmes conditions. Sont également admis à soumissionner le corps des sapeurs-pompiers et la Croix-rouge française " ; que, selon l'article 4 de ces mêmes dispositions, les soumissionnaires devaient " avoir leur siège social ou une agence locale représentative :

- dans la zone d'intervention du SMUR de Mets pour celles soumissionnant pour les lots afférents au SMUR du groupement des hôpitaux de Mets;

- dans la zone d'intervention du SMUR de Thionville pour les lots afférents au SMUR du groupement des hôpitaux de Thionville " ;

Considérant que les dispositions de l'article 2 du cahier des clauses techniques particulières de ce marché imposaient différentes contraintes complémentaires :

- pour le lot n° 1, " La simultanéité des interventions dans 30 p. 100 des cas implique la présence de deux ambulances. Ces deux véhicules dont le point d'attache sera situé à Metz devront pouvoir être appelés sur un seul et même numéro " ;

- pour le lot n° 2, " Le personnel assurant la médicalisation du SMUR et le matériel appartenant au CHR seront acheminés sur les lieux du sinistre à bord d'un véhicule de type VML avec pour point de départ l'hôpital Bon-Secours. Il en résulte que deux véhicules de ce type et leur chauffeur devront être maintenus en état d'alerte permanente dans cet établissement hospitalier " ;

- pour le lot n° 4, " La simultanéité des interventions dans 25 à 30 p. 100 des cas implique la présence de deux ambulances. Ces deux véhicules dont le point d'attache sera situé à Thionville devront pouvoir être appelés sur un seul et même numéro " ;

- pour le lot n° 5, " Le personnel assurant la médicalisation du SMUR et le matériel appartenant au CHR seront acheminés sur les lieux du sinistre à bord d'un véhicule de type VML avec pour point de départ l'hôpital Bel Air. Il en résulte que deux véhicules de ce type, et leur chauffeur, devront être maintenus en état d'alerte permanente dans cet établissement hospitalier ".

Considérant que le centre hospitalier régional de Metz-Thionville a réparti le marché en cinq lots ; que chacun des groupements et entreprises de transports sanitaires terrestres agréés disposant des moyens requis et répondant aux conditions de l'article 4 du cahier des clauses administratives particulières et de l'article 2 du cahier des clauses techniques particulières restait libre de soumissionner pour le lot ou les lots qui l'intéressait ; que si les dispositions des cahiers des clauses administratives particulières et des clauses techniques particulières imposaient différentes conditions et sujétions, l'association ATSU 57 ne peut soutenir qu'elle avait " l'obligation de ne soumissionner que pour les lots afférents au SMUR du groupement des hôpitaux de Metz, et ne (pouvait) soumissionner pour les lots afférents au SMUR, de Thionville " et que " l'association TSA (avait) l'obligation de ne soumissionner que pour les lots afférents au SMUR de Thionville et ne (pouvait) soumissionner pour les lots afférents au SMUR de Mets " ; qu'en concluant un " accord sur les zones " et en convenant que " l'ATSU soumissionnerait aux lots n° 1, 2 et 3 (région messine) et TSA aux lots n° 4 et 5 (région thionvilloise) ", les deux associations se sont concertées pour se répartir le marché et se prémunir des incertitudes liées à l'exercice de la concurrence.

Considérant que l'accord de répartition de marché a été prolongé par un accord de prix ; qu'ainsi les associations ATSU 57 et TSA ont présenté des offres de prix en tous points identiques s'agissant des lots n° 1 et 4 (transports primaires des services mobiles d'urgence de Mets et de Thionville) et des lots n° 2 et 5 (déplacements des moyens médicalisés SMUR pour les zones de Metz et de Thionville); que l'association TSA ne peut utilement soutenir que le CHR de Metz-Thionville a " depuis 1990, imposé à l'ATSU et à TSA d'appliquer uniformément à l'ensemble des tarifs le taux d'augmentation autorisé pour établir le forfait relatif aux transports primaires ", dès lors que cette prescription s'appliquait aux prix fixés dans le cadre du marché conclu antérieurement et que l'article 12 du CCAP du marché lancé en 1993 prévoyait expressément que " l'arrêté (ministériel) fixant des prix plafonds, les soumissionnaires proposeront lot par lot les rabais qu'ils entendent appliquer sur ces tarifs ".

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA et l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 ont conclu une entente de prix et de répartition du marché; que l'entente a eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché des transports terrestres nécessaires au fonctionnement des services mobiles d'urgence du centre hospitalier régional de Metz-Thionville; que ces associations ont ainsi contrevenu aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986;

Sur les sanctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. 100 du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos " ; qu'en application de l'article 22, alinéa 2, de la même ordonnance, la commission permanente peut prononcer les mesures prévues à l'article 13, les sanctions infligées ne pouvant, toutefois, excéder 500.000 F pour chacun des auteurs des pratiques prohibées.

Considérant que les pratiques ci-dessus dénoncées avaient pour objet et ont eu pour effet d'affecter l'exercice de la concurrence sur le marché des transports sanitaires terrestres nécessaires au fonctionnement des services mobiles d'urgence du CHR de Metz-Thionville, dont le montant, sur la base des factures enregistrées en 1995 par le centre hospitalier régional de Metz au titre des lots n° 1 à 3 et du lot n° 4, a été évalué à 4.997.460,85 F; que les lots n' 1 à 3 ont été attribués à l'association ATSU 57 sur la base des prix établis par la concertation ; que, dans les mêmes conditions, le lot n° 4 a été attribué à l'association TSA ; que, pour apprécier la gravité des faits, il y a lieu de tenir compte du fait que le marché, conclu pour une période d'un an à partir du 1er janvier 1994, était reconductible pour une période de deux ans conformément à l'article 16 du cahier des clauses administratives particulières ;

En ce qui concerne l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 :

Considérant que le montant des ressources de l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, est de 3.038.606,43 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'ils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 120.000 F.

En ce qui concerne l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA :

Considérant que le montant des ressources de l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, est de 1.510.693,00 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'ils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 60.000 F.

Décide :

Article 1er - Il est établi que l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 et l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2 - Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

- 120.000 F à l'Association pour la promotion et le développement des transports sanitaires d'urgence de Moselle ATSU 57 ;

- 60.000 F à l'Association des transports sanitaires agréés de la Moselle TSA.