CA Paris, 1re ch. sect. concurrence, 5 juillet 1994, n° ECOC9410132X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Bronzo (SA), Société d'études et de réalisations paysagères (SA), Avenir Paysages (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Montanier
Avocat général :
M. Jobard
Avoué :
SCP Fisselier Chiloux Boulay
Avocats :
Mes Donnedieu de Vabres, Pfligersdorffer, Charoux
Saisi par le ministre de l'Economie et des Finances de pratiques imputées à un certain nombre de sociétés parmi lesquelles les entreprises Bronzo, Avenir Paysages et Société d'études et de réalisations paysagères (SERP) dans le domaine des marchés d'aménagement paysager dans le département des Bouches-du-Rhône, le Conseil de la concurrence (le conseil) a, par décision n° 93-D-47 du 3 novembre 1993, infligé à ces trois entreprises des sanctions pécuniaires respectivement de 300 000 F, 100 000 F et 70 000 F.
Référence étant faite à cette décision pour l'énoncé des faits, seront rappelés les éléments essentiels suivants, nécessaires à la solution du litige.
A l'occasion de la mise en œuvre entre 1988 et 1990 de la " réhabilitation " de cités appartenant aux offices publics d'HLM de la ville de Marseille et d'aménagement et de construction du département des Bouches-du-Rhône, les enquêteurs de la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont relevé des pratiques concernant un certain nombre de marchés publics et privés, susceptibles d'être anticoncurrentielles.
Aux motifs de sa décision, le conseil a estimé, sur le fondement de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, que :
- la société Bronzo avait participé, à l'occasion du marché négocié de l'aménagement d'un espace vert, rue Emile-Delacour à La Ciotat, à une concertation avec la SERP ;
- la société Avenir Paysages s'était concertée avec l'entreprise Irrigation Service, pour l'élaboration de son offre dans les marchés publics d'aménagement des rives de l'étang de Berre et d' aménagement de la résidence Là Chênaie à Vitrolles ;
- Avenir Paysages s'était en outre concertée avec Irrigation Service et les, entreprises Chailan et Saurin pour l'élaboration de leurs offres dans le cadre des marchés privés d'espaces verts des Villages du soleil à Ailes et des SCI, 6, rue Rocca et 424, avenue du Prado à Marseille.
Au soutien de son recours en ce qu'il tend à l'annulation de la décision déférée, l'entreprise Bronzo expose que :
- la thèse de l'échange d'informations entre Bronzo et SERP, retenue comme fondement de la pratique de ,concertation qui lui est reprochée, n'est étayée par aucun élément probant et ne consiste qu'en une demande unilatérale de Bronzo à SERP en vue de la conclusion d'un accord de sous-traitance ;
- la mise en œuvre de cette concertation n'aurait eu, en tout état de cause, aucun sens dès lors que, les deux entreprises n' étaient pas en situation de concurrence, SERP, entreprise de travaux paysagers, n'ayant pas la qualification professionnelle de Bronzo dans le domaine des travaux publics, et réciproquement ;
- en toute hypothèse la pratique reprochée n'a pas porté atteinte de façon sensible au jeu de la concurrence, le simple fait d'avoir déposé une offre de principe en omettant d' informer le maître de l'ouvrage de la relation de sous-traitance établie avec SERP ne pouvant qu'avoir un impact particulièrement, faible.
Subsidiairement Bronzo sollicite la réformation de la décision du conseil en faisant observer que :
- en refusant de, retenir pour assiette de la sanction le chiffre d'affaires du secteur d'activité des espaces verts, le conseil n'à pas retenu un chiffre d'affaires pertinent ;
- en toute hypothèse, la sanction de 300 000 F prononcée est disproportionnée compte tenu, d'une part, du plafond de 500 000 F fixé en cas de procédure simplifiée, procédure qui a été choisie en l'espèce, et, d'autre part, des éléments de fait inexacts retenus par le conseil pour qualifier la gravité des infractions, l'importance de l'entreprise et son degré de participation.
La société Bronzo sollicite en outre la condamnation du ministre de l'économie au paiement d'une somme de 60000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société SERP, concluant à l'annulation de la décision déférée, fait valoir que :
- le conseil a fait un 'amalgame entre la notion juridique, de concertation en vue de présenter des offres privilégiant l'une ou l'autre des entreprises et la circonstance qu'une entreprise dont l'activité d'espaces verts est complémentaire de celle de travaux publics de Bronzo communique à celle-ci les prix des plantations qui lui seraient sous-traitées ;
- il n'existe pas de preuve d'une concertation ou d'un contact pour un marché individualisé et aucune réglementation n'oblige les entreprises à déclarer les travaux qu'elles sous-traiteront en communiquant leurs offres ;
- il n'est établi aucune restriction de concurrence sur le marché considéré, SERP, bien que la moins-disante, n'ayant pas été retenue.
Poursuivant l'annulation de la décision, la société Avenir Paysages expose que :
- les pratiques qui lui sont reprochées à l'occasion des marchés de l'étang de Berre et de la résidence La Chênaie, s'inscrivant dans le cadre de rapports de sous-traitance entre elle-même et la société Irrigation Service, ne tombent pas sous le coup des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
- les pratiques relevées à l'occasion du marché privé des Villages du soleil en Ailes sont prescrites, la saisine du conseil étant intervenue plus de trois ans après la passation du marché ;
- la prescription n'a pu être interrompue par le procès-verbal du 20 juin 1990, intitulé à tort " procès-verbal de saisie ", qui est en réalité un procès-verbal d'audition auquel est annexé un inventaire de pièces communiquées et qui doit être annulé comme ayant été de nature à induire en erreur Avenir Paysages sur la procédure dont elle faisait l'objet ;
- le délai de rédaction de ce procès-verbal, non conforme aux dispositions de l'article 31 du décret du 29 décembre 1986, doit également en entraîner la nullité ;
- ce procès-verbal ne saurait, en tout état de cause, être interruptif de prescription dès lors qu'il ne contenait aucune constatation faisant grief à Avenir Paysages ;
- les pratiques' constatées à l'occasion des trois marchés privés Rocca, Prado et Villages du soleil ne constituent pas des soumissions à des appels d'offres ;
- en tout état de cause, la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée au regard de la gravité du dommage causé à l'économie du secteur concerné.
Par mémoire complémentaire, déposé au greffe de la cour le 9 mai 1994, la société Avenir Paysages demande à bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le ministre de l'économie, aux termes de ses observations, estime que :
- la qualification impropre de " procès-verbal de saisie ", au demeurant rectifiée par le conseil, donnée au procès-verbal du 20 juin 1990 ne cause pas de grief à la requérante, à l'égard de laquelle le principe du contradictoire a été respecté devant le conseil, et n'a donc pas à être annulée ;
- ce document, qui fait état des échanges d'informations entre Avenir Paysages et les entreprises Chailan et Saurin, constitue un acte interruptif de prescription ;
- contrairement à leurs allégations, les requérantes, qui, notamment, ne prouvent pas les accords de sous-traitance qu' elles invoquent, ont participé à une concertation prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
- il ne peut être déduit de l'utilisation de la procédure simplifiée de l'article 22 de 'l'ordonnance précitée que. les pratiques n'auraient pas porté atteinte de façon sensible au jeu de la concurrence;
- en tout état de cause, l'objet anticoncurrentiel d'une pratique' suffit à lui seul à caractériser l'illicéité de celle-ci ;
- en ce qui concerne les sanctions, les requérantes ne démontrent pas que les secteurs des espaces verts et des travaux publics, d'une part, des espaces verts et de l'arrosage, d'autre part, mettent en œuvre des techniques différentes justifiant de cantonner l'assiette de la sanction au chiffre d'affaires réalisé dans l'un de ces secteurs.
Estimant que l'objet anticoncurrentiel des relations d'Avenir Paysages avec Irrigation Service n'est pas établi, le ministre de l'économie propose de ne pas retenir les pratiques invoquées contre ces deux sociétés pour le marché public de La Chênaie.
Le Conseil de la concurrence, usant de la faculté de présenter des observations écrites, souligne que :
- si des entreprises ayant entre elles des liens de donneur d'ordre à sous-traitant peuvent toujours renoncer à leur liberté commerciale et présenter des offres distinctes pour un marché, elles ne peuvent le faire qu'à la condition, lors du dépôt de leurs offres, de faire connaître aux maîtres d'œuvre et d'ouvrage, même s'ils ne le réclament pas expressément, la nature des liens qui les unissent et le fait qu'elles ont échangé des informations entre elles ;
- le texte de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne permet pas d'écarter une atteinte à la concurrence qui aurait peu d'effet dès lors que les pratiques relevées ont un objet ou une potentialité d'effet anticoncurrentiel ;
- l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne permet pas, à la différence de l'ordonnance du 30 juin 1945, de prendre en considération la notion de secteur d'activité pour la détermination de l'assiette de la sanction.
Le ministère public, dans ses observations orales, conclut à l'irrecevabilité de la demande formée tardivement par Avenir Paysages au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et au rejet du moyen tiré de la prescription des faits relatifs au marché privé pour l'aménagement paysager des Villages du soleil en Arles.
Sur le fond, il estime que la concertation anticoncurrentielle entre les sociétés concernées ne paraît pas formellement démontrée et qu'à la supposer établie il conviendrait d'intégrer dans les critères à prendre en considération pour le prononcé de sanctions le fait que l'effet sensible n'est que faiblement démontré ;
Sur quoi, LA COUR,
Considérant que le marché pertinent concerné par les pratiques critiquées est celui des chantiers d'aménagement paysager du département des Bouches-du-Rhône ;
Que vingt-trois entreprises, parmi lesquelles les sociétés Avenir Paysages et SERP, disposent dans ce département d'un agrément délivré par le Comité national interprofessionnel de l'horticulture florale et ornementale et des pépinières (CNIH) ;
Que la société Bronzo exerce une activité de travaux publics ;
Sur le moyen tiré de la prescription par la société Avenir Paysages :
Considérant que la société Avenir Paysages soulève la prescription des faits relatifs au marché privé pour l'aménagement paysager des Villages du soleil en Arles pour lequel elle a été consultée le 20 février 1988, c'est-à-dire plus de trois ans avant la saisine du conseil en date du 27 juin 1991 ;
Mais, considérant que le procès-verbal du 20 juin 1990, dont la requérante conteste l'effet interruptif en invoquant sa nullité, est, en dépit de l'appellation qui a pu lui être donnée de procès-verbal de saisie, un procès-verbal d'audition auquel a été annexé un inventaire de documents remis par M. Lombard, gérant de la société ;
Que ce procès-verbal, comme celui du 5 septembre 1990, établi au siège de la société par les agents de contrôle, signés le jour même par M. Lombard à qui un double a été remis, est conforme aux exigences de l'article 46 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et de l'article 31 du décret du 29 décembre 1986 ;
Que la déclaration de M. Lombara consignée dans ce document concerne les pratiques habituelles de son entreprise, la nature de ses relations professionnelles avec notamment la société Irrigation Service et que ces documents, tels qu'ils sont décrits dans l'inventaire, portent sur des dossiers d'étude de prix pour divers marchés, dont celui des Villages du soleil ;
Que cet acte d'enquête, portant à la fois le visa de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et la mention, faisant foi jusqu' à preuve contraire, que les agents de contrôle ont fait connaître l'objet de leur enquête à l'intéressé, est suffisamment clair et précis pour ne pas créer une méprise sur son objet ;
Que ledit acte, qui n'a pas, dès lors, été établi en violation des droits de la défense, a interrompu la prescription, laquelle n'était pas acquise à la date de la saisine du conseil;
II - Sur la preuve de l'existence d'une concertation prohibée :
A - Entreprise Avenir Paysages avec les entreprises Chailan et Saurin :
Considérant qu'en ce qui concerne les marchés des Villages du soleil en Arles, de la rue Rocca et de l'avenue du Prado à Marseille la société Avenir Paysages n'établit ni ne soutient avoir eu d'accord de sous-traitance avec les entreprises Chailan et Saurin ;
Que ces deux entreprises n'ont pas formé de recours contre la décision du conseil ;
Qu'il y a lieu d'approuver, en ce qui concerne la concertation de ces trois entreprises sur ces marchés, les motifs pertinents de la décision qui ne font l'objet d'aucune critique sérieuse et argumentée de la part d'Avenir Paysages ;
B - Entreprises Avenir Paysages et Irrigation Service :
Considérant que la société Irrigation Service n'a pas formé de recours contre la décision du conseil ;
Que la société Avenir Paysages. fait valoir que, se trouvant dans une relation de donneur d'ordre à sous- traitant avec Irrigation Service, il ne peut lui être reproché d'avoir eu avec celle-ci des pratiques de concertation prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Considérant que s'il n'est produit aucune convention écrite de sous-traitance, au demeurant non exigée par un texte, il n'est pas contesté que Avenir Paysages ne se trouve pas en concurrence sur le marché concerné avec Irrigation Service dont le titre de classification et de qualification délivré par le CNIH certifie sa compétence exclusive en matière d'arrosage ;
Qu'il résulte du document intitulé " détail estimatif, bordereau de prix " portant la mention manuscrite " brouillon ", et relatif à l'appel d'offres du marché de l'étang de Berre, que les tarifs demandés par le gérant d'Avenir Paysages à Irrigation Service afin de répondre à cet appel d'offres concernant exclusivement les prestations relatives à l'arrosage qui n'entrent pas dans la spécialité d'Avenir Paysages mais en sont complémentaires ;
Qu'en ce qui concerne le marché de La Chênaie pour lequel le ministre de l'économie conclut lui-même que l'objet anticoncurrentiel n'est pas établi, il apparaît une situation inverse dans laquelle Avenir Paysages n'ayant pas soumissionné, le dossier d'appel d'offres lui a été communiqué par Irrigation Service, soumissionnaire pour les prestations d'arrosage, qui prévoyait de lui sous-traiter les prestations de plantation et de pelouses ;
Que si l'appartenance à des secteurs distincts d'entreprises employant des personnels ayant des qualifications différentes ne peut en soi faire présumer qu'elles ne sont pas en situation de concurrence, il convient cependant d'examiner si cet indice est corroboré par d'autres éléments de l'espèce ;
Que selon les constatations mêmes de la notification de griefs (page 6) faite aux entreprises par le conseil " il ressort, par ailleurs, de l'enquête que les entreprises Avenir Paysages et Irrigation Service travaillent ensemble de façon régulière... " ;
Qu'en effet, la liste fournie par M. Lombard le 20 juin 1990 répertorie une série de marchés dans lesquels les deux entreprises sont intervenues dans un contexte de sous-traitance au cours des années 1987 à 1989 et qu'un document daté du 6 juin 1989 relatif au marché du groupe Vallon des Tuves à Marseille est dénommé " acte spécial, désignation en cours de marché d'un sous-traitant " ;
Que de l'ensemble de ces indices résulte l'existence d'accords de sous-traitance pour les marchés d'aménagement des rives de l'étang de Berre et d'aménagement de la résidence de La Chênaie à Vitrolles entre les entreprises Avenir Paysages et Irrigation Service ;
C - Entreprises Bronzo et SERP :
Considérant que l'entreprise Bronzo expose que sa relation de sous-traitance avec l'entreprise SERP était exclusive de la pratique anti-concurrentielle qui lui est reprochée ;
Considérant qu'il est constant que ces entreprises auxquelles est reprochée une entente sur le marché négocié de l'aménagement d'un espace vert, rue Emile-Delacour à La Ciotat, ont des activités distinctes, Bronzo étant spécialisée dans les travaux publics et SERP dans les travaux d'espaces verts ;
Considérant que des relations habituelles de sous-traitance entre ces deux entreprises résultent notamment des pièces versées aux débats concernant le marché d'espaces verts Athélia I à La Ciotat non visé dans la présente espèce, ainsi que du tableau du chiffre d'affaires " sous-traitant, espaces verts " de l'entreprise Bronzo révélant pour l'entreprise SERP, de 1989 à 1991, des montants de chiffres d'affaires respectivement de 46059 F, 198 290 F et 43900 F ;
Considérant encore que, si M. Pichon, ingénieur des travaux publics de la société Bronzo, déclare spontanément avoir demandé à l'entreprise SERP de lui communiquer ses prix de prestations en matière d'espaces verts afin de pouvoir établir son offre pour le marché de la rue Emile-Delacour, il n'est aucunement rapporté la preuve que Bronzo ait communiqué ses tarifs de travaux à SERP et qu'un échange d'informations ait ainsi réalisé une concertation entre ces deux entreprises ;
Considérant enfin qu'il convient de relever l'absence d'intérêt pour Bronzo à se concerter avec SERP dans la mesure où il n'est pas soutenu que ces deux sociétés auraient eu connaissance des positions prises par les sept autres entreprises consultées, et que s'agissant d'un marché négocié le maître de l'ouvrage disposait d'un pouvoir d'appréciation l'ayant d'ailleurs conduit à choisir une société qui n'était pas la moins-disante ;
Que de l'ensemble de ces indices met en évidence l'existence d'un projet de sous-traitance entre les entreprises Bronzo et SERP pour le marché de la rue Emile-Delacour à La Ciotat ;
III - Sur l'absence d'information de l'existence d'accords de sous-traitance :
Considérant que les dispositions des articles 2 du code des marchés publics et 3 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, faisant obligation à l'entrepreneur donneur d'ordre de faire accepter chaque sous-traitant par le maître de l'ouvrage, régissent les rapports contractuels entre les parties ;
Que l'inobservation desdites dispositions ne saurait, en soi, constituer des pratiques prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 mais seulement dans la mesure où elle fausserait le jeu de la concurrence en induisant en erreur le maître de l'ouvrage sur la réalité et l'étendue du champ de ses choix ;
Que la preuve n'est pas rapportée dans le cas d'espèce qu'ait pu avoir un objet ou un effet anticoncurrentiel le fait par les entreprises Bronza et Avenir Paysages de ne pas avoir indiqué au maître de l'ouvrage, lors de la communication de leurs offres, leur intention de sous-traiter l'exécution de certaines parties des marchés ci-avant rappelés à des entreprises ayant des compétences bien spécifiques;
Considérant qu'il y a lieu en conséquence d'annuler la décision attaquée en ce qu'elle a retenu à la charge des sociétés Bronzo et SERP le grief de concertation à l'occasion du marché d'aménagement d'un espace vert rue Emile-Delacour à La Ciotat et à la charge de l'entreprise Avenir Paysages le grief de concertation avec la société Irrigation Service à l'occasion des marchés d'aménagement de l'étang de Berre et de la résidence La Chênaie à Vitrolles ;
IV - Sur le montant de la sanction prononcée à l'encontre de l'entreprise Avenir Paysages :
Considérant qu'est établie à l'encontre d'Avenir Paysages sa participation à une entente prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 à l'occasion des marchés d'aménagement des Villages du soleil à Arles, de la rue Rocca et de l'avenue du Prado à Marseille ;
Considérant que le conseil, retenant la participation d'Avenir Paysages dans cinq marchés, a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 100.000 F par application de la procédure de l'article 22 de l'ordonnance précitée ;
Que le montant cumulé des trois marchés sur lesquels la cour retient en définitif la concertation illicite de cette entreprise s'élève, hors entretien, à 194.282 F ;
Que la société Avenir Paysages, employant onze salariés, a réalisé en 1992, date du dernier exercice connu, un chiffre d'affaires net de 3.161.390 F et a dégagé la même année un bénéfice de 75.691 F ; qu'elle avait, l'année précédente, enregistré une perte de 226.820 F ;
Que le dommage à l'économie est de faible importance en raison du caractère restreint des concertations commises avec deux autres entreprises sur un marché dont la fluidité résulte de la présence de vingt-trois entreprises agréées par le CNIH exerçant la même activité ;
Que le montant de la sanction pécuniaire infligée à Avenir Paysages doit, en fonction des éléments d'appréciation généraux et individuels ci-dessus rappelés, être fixé à la somme de 50000 F ;
Considérant que la société Avenir Paysages a formé une demande sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure par un mémoire dit " complémentaire " du 9 mai 1994 ;
Mais, considérant que le magistrat délégataire du premier président ayant, par ordonnance du 31 janvier 1994, fixé au 26 avril la date limite de dépôt des mémoires en réplique, cette demande est irrecevable ;
Considérant que l'équité et les faits de la cause ne commandent pas de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure au profit des autres requérants.
Par ces motifs, Rejette le moyen de prescription soulevé par la Société Avenir Paysages ; Déclare irrecevable la demande formée par Avenir Paysages sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Annule la décision du conseil en ce qu'elle a retenu et sanctionné : - une pratique d'entente à l'encontre des entreprises Bronzo et SERP ; - des pratiques d'entente à l'encontre de l'entreprise Avenir Paysages à l'occasion des marchés d'aménagement de l'étang de Berre et de la résidence La Chênaie à Vitrolles ; Retient contre la société Avenir Paysages les pratiques concernant les marchés des Villages du soleil en Arles, de la rue Rocca et de l'avenue du Prado à Marseille, relevées à son encontre par le Conseil de la concurrence ; Réformant le quantum, prononce à l'encontre de la société Avenir Paysages une sanction pécuniaire d'un montant de 50000 F ; Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au bénéfice des sociétés Bronzo et SERP ; Condamne la société Avenir Paysages au paiement des dépens afférents à son recours ; Laisse le surplus des dépens à la charge du Trésor.