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Décisions

CJCE, 6e ch., 7 décembre 2000, n° C-214/99

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Neste Markkinointi (Oy)

Défendeur :

Yötuuli (Ky)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Gulmann

Avocat général :

M. Fennelly.

Juges :

MM. Skouris, Puissochet, Schintgen, Mme Macken

CJCE n° C-214/99

7 décembre 2000

LA COUR (sixième chambre),

1. Par décision du 1er juin 1999, parvenue à la Cour le 7 juin suivant, le Tampereen käräjäoikeus a posé, en application de l'article 234 CE, une question préjudicielle sur l'interprétation de l'article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE).

2. Cette question a été soulevée dans le cadre d'un litige opposant Neste Markkinointi Oy (ci-après "Neste") à Yötuuli Ky (ci-après "Yötuuli") et aux associés commanditaires responsables de celle-ci, à propos d'un accord de stations-service.

Le litige au principal

3. En 1986, les sociétés de droit finlandais Yötuuli et Kesoil Oy ont conclu, avec effet au 7 octobre 1986, un contrat de coopération et de distribution (ci-après le "contrat") par lequel la première adhérait à la chaîne de distribution de la seconde en achetant et en vendant dans ses stations-service exclusivement les produits pétroliers et les produits spécialisés commercialisés par celle-ci.

4. Le contrat a été conclu pour une durée de dix ans. Il prévoyait que, au-delà de cette durée, la société adhérente pourrait dénoncer le contrat moyennant un préavis d'un an.

5. Le 31 décembre 1995, Kesoil Oy a été absorbée par une société qui, à son tour, a fusionné avec deux autres sociétés pour constituer la société Neste, laquelle est ainsi devenue l'autre partie au contrat.

6. Par lettre recommandée du 23 juin 1998, Yötuuli a notifié à Neste sa décision de mettre fin à ses achats de carburants auprès de cette dernière à compter du 1er juillet 1998.

7. Neste a repris possession des biens lui appartenant, puis elle a introduit devant le Tampereen käräjäoikeus, contre Yötuuli et ses associés commanditaires responsables, un recours en indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la dénonciation du contrat sans que le préavis d'un an ait été respecté.

8. Devant la juridiction nationale, les défendeurs concluent au rejet de ce recours, au motif que le contrat portant accord d'achat exclusif est contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, de sorte qu'il est nul de plein droit en application du paragraphe 2 de la même disposition.

9. Neste soutient en revanche que ledit contrat n'est pas contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

10. La juridiction de renvoi relève que le litige pose la question de l'interprétation et de l'application de l'article 85, paragraphes 1 et 2, du traité. Selon elle, le litige soulève également la question de l'interprétation et de l'application des articles 10 et 12 du règlement (CEE) n° 1984/83 de la Commission, du 22 juin 1983, concernant l'application de l'article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d'accords d'achat exclusif (JO L 173, p. 5). En effet, la demanderesse prétend devant elle que l'article 85, paragraphe 1, du traité est inapplicable au contrat en vertu de l'article 10 de ce règlement, au motif que ledit contrat n'a pas été conclu pour une durée indéterminée au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous c), de celui-ci, tandis que les défendeurs soutiennent le contraire, faisant valoir que le contrat, reconduit automatiquement après dix ans, doit être qualifié de contrat à durée indéterminée.

11. Ladite juridiction précise cependant que le renvoi préjudiciel ne porte que sur l'interprétation de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

12. Elle se réfère aux arrêts de la Cour du 12 décembre 1967, Brasserie de Haecht (23/67, Rec. p. 525), et du 28 février 1991, Delimitis (C-234/89, Rec. p. I-935), rendus à propos de contrats d'achat exclusif de bière.

13. Elle déduit en particulier des points 19 à 27 de l'arrêt Delimitis, précité, que l'application de l'interdiction énoncée à l'article 85, paragraphe 1, du traité exige d'abord que le contrat, compte tenu de son contexte économique et juridique, rende plus difficile l'accès au marché ou l'accroissement d'une part de marché. À cette fin, il faudrait tenir compte du fait que le contrat fait partie d'un réseau d'accords analogues qui a un effet cumulatif sur la concurrence. Toutefois, l'application de l'interdiction supposerait aussi que le contrat ait un effet important sur la fermeture du marché réalisée par le réseau. À cet égard, l'ampleur de l'effet d'un contrat particulier dépendrait de la position des parties au contrat sur les marchés concernés et de sa durée.

14. La juridiction nationale constate qu'un contrat tel que celui en cause devant elle, considéré en liaison avec d'autres contrats analogues en raison de leur durée, ne paraît pas produire des effets sensibles sur le cloisonnement du marché des carburants. Selon elle, des contrats à durée déterminée conclus pour plusieurs années restreignent beaucoup plus l'accès au marché que ceux auxquels il peut être mis fin à tout moment, en respectant un préavis bref. Il ne serait donc pas arbitraire de les scinder en ne soumettant que les premiers, et non les seconds, à l'interdiction reposant sur l'effet cumulatif du réseau lorsque les seconds ne représentent qu'une part minime des contrats d'un seul fournisseur qui contribuent de façon importante à l'effet cumulatif.

15. Dès lors, la juridiction de renvoi estime que les défendeurs auraient dû respecter la clause de dénonciation.

16. Cependant, elle considère que le droit communautaire n'est pas dénué d'ambiguïté dans le domaine concerné et elle se demande si la solution à laquelle l'analyse de l'arrêt Delimitis, précité, la conduit ne pourrait pas être contraire au principe de sécurité juridique.

17. Elle relève que, dans son arrêt du 8 juin 1995, Langnese-Iglo/Commission (T-7/93, Rec. p. II-1533), le Tribunal a jugé, à propos de contrats d'achat exclusif de glaces, que, dans l'appréciation de la contribution d'accords litigieux à l'effet cumulatif éventuellement constaté, il n'est pas possible de procéder au fractionnement du réseau de contrats d'un seul et unique producteur pour limiter l'interdiction à ceux des contrats qui ont un effet significatif, l'appréciation devant s'appliquer, pour chaque producteur, à l'ensemble des contrats individuels constituant son réseau.

18. Elle ajoute que, dans son arrêt du 8 juin 1995, Schöller/Commission (T-9/93, Rec. p. II-1611), également relatif à des contrats d'achat exclusif de glaces, le Tribunal ne s'est pas prononcé expressément sur l'affirmation de la société requérante selon laquelle la Commission n'avait pas suffisamment tenu compte de la durée relativement courte des accords, qui pouvaient être dénoncés à la fin de chaque année civile après l'expiration de la deuxième année suivant leur entrée en vigueur.

19. Dans ces conditions, le Tampereen käräjäoikeus a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

"L'interdiction visée à l'article 85, paragraphe 1, du traité CE trouve-t-elle application à l'accord d'achat exclusif conclu par un fournisseur, que le revendeur a la faculté de dénoncer à tout moment avec un préavis d'un an, lorsque tous les accords d'achat exclusif de ce fournisseur, pris soit séparément, soit globalement, combinés dans le réseau des accords similaires de l'ensemble des fournisseurs, ont un effet sensible sur la fermeture du marché, mais que les accords du même genre que celui en cause de par leur durée de validité ne représentent qu'une part très faible de tous les accords d'achat exclusif du même fournisseur, dont la plupart sont des contrats à durée déterminée conclus pour plus d'un an?"

Sur la question préjudicielle

20. Neste soutient que, au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité, le contrat, qui pouvait être dénoncé à tout moment moyennant un préavis d'un an, doit être distingué de ses autres contrats conclus pour une durée de plusieurs années. En effet, la durée d'un contrat serait d'une importance capitale pour apprécier la liberté d'action accordée au cocontractant tenu par une obligation d'achat exclusif, ce que confirmerait le point 26 de l'arrêt Delimitis, précité. À cet égard, un délai de dénonciation d'un an donnerait, dans des conditions raisonnables, à chacune des parties la faculté de se préparer à un changement d'enseigne et permettrait notamment au détaillant de procéder aux modifications nécessaires après avoir décidé de changer de compagnie pétrolière. Ainsi, le contrat ne constituerait pas une contrainte commerciale pour le cocontractant du fournisseur.

21. Il y aurait donc lieu d'apprécier différemment, au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité, des contrats passés par un même fournisseur pour un même produit, mais comportant des clauses différentes.

22. Neste soutient par ailleurs que, même considérés cumulativement, les contrats qu'elle a conclus, tels que celui en cause au principal, n'ont eu qu'une incidence tout à fait minime sur les conditions de concurrence sur le marché pertinent des carburants, ces contrats étant en tout et pour tout au nombre de 27 au mois de juillet 1998. Ils n'auraient donc pas relevé de l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

23. Le gouvernement français fait valoir qu'il n'existe guère de justification d'un fractionnement des réseaux d'un même opérateur en fonction de la durée d'un groupe de contrats, dans le but d'opérer une modulation en fonction du nombre de ces contrats. Une telle distinction serait complexe, voire difficilement applicable, dans certains cas.

24. La Commission soutient que, lorsqu'un fournisseur met en place un réseau de contrats similaires, l'incidence de ce réseau sur le jeu de la concurrence doit être appréciée globalement. Si, pris dans leur ensemble, ces contrats restreignent de manière significative le jeu de la concurrence, ils sont tous, selon elle, contraires à l'article 85, paragraphe 1, du traité. Un fractionnement de contrats ou de groupes de contrats d'achat exclusif selon qu'ils sont "insignifiants" ou non serait inévitablement arbitraire. C'est ce qu'aurait explicitement jugé le Tribunal, respectivement aux points 129 et 95 des arrêts précités Langnese-Iglo/Commission et Schöller/Commission.

25. Il y a lieu de rappeler que, si des accords d'achat exclusif n'ont pas pour objet de restreindre la concurrence, au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité, il convient toutefois de vérifier s'ils n'ont pas pour effet de l'empêcher, de la restreindre ou d'en fausser le jeu. L'appréciation des effets d'un accord d'achat exclusif implique la nécessité de prendre en considération le contexte économique et juridique au sein duquel celui-ci se situe et où il peut concourir, avec d'autres, à un effet cumulatif sur le jeu de la concurrence. Il convient, par conséquent, d'analyser les effets que produit un tel contrat, en combinaison avec d'autres contrats de même type, sur les possibilités, pour les concurrents nationaux ou originaires d'autres États membres, de s'implanter sur le marché de référence ou d'y agrandir leur part de marché (arrêt Delimitis, précité, points 13 à 15).

26. À cet effet, il importe d'examiner la nature et l'importance de l'ensemble des contrats similaires qui lient un nombre important de points de vente à plusieurs fournisseurs et de prendre en compte, parmi les autres éléments du contexte économique et juridique dans lequel les contrats s'insèrent, ceux qui déterminent les possibilités d'accès au marché de référence. À cet égard, il convient d'examiner s'il existe des possibilités réelles et concrètes pour un nouveau concurrent de s'infiltrer dans le faisceau de contrats. Il y a lieu de tenir compte également des conditions dans lesquelles s'accomplit le jeu de la concurrence sur le marché de référence (arrêt Delimitis, précité, points 21 et 22).

27. Si l'examen de l'ensemble des contrats similaires révèle que le marché en cause est difficilement accessible, il convient d'apprécier dans quelle mesure les contrats conclus par le fournisseur concerné contribuent à l'effet cumulatif produit par cet ensemble de contrats. La responsabilité de cet effet de fermeture du marché doit être imputée, selon les règles de concurrence communautaires, aux fournisseurs qui y contribuent de manière significative. Les contrats conclus par des fournisseurs dont la contribution à l'effet cumulatif est insignifiante ne tombent dès lors pas sous le coup de l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité. Afin d'apprécier l'importance de la contribution des contrats conclus par un fournisseur à l'effet de blocage cumulatif, il faut prendre en considération la position des parties contractantes sur le marché. Cette contribution dépend, en outre, de la durée desdits contrats. Si cette durée est manifestement excessive par rapport à la durée moyenne des contrats généralement conclus sur le marché en cause, le contrat individuel relève de l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité (arrêt Delimitis, précité, points 24 à 26).

28. Dans sa décision de renvoi, la juridiction nationale a constaté que le contrat fait partie d'un réseau d'accords d'achat exclusif qui ferment la plus grande partie du marché des carburants.

29. En outre, selon les indications qui lui ont été fournies sans être contestées au principal:

-le nombre de stations-service liées à Neste par un contrat tel que celui en cause était, au 1er juillet 1998, de 27, sur un total de 573 stations-service composant le réseau de ce fournisseur, soit moins de 5 % de ce total, soit encore 1,5 % des 1 799 stations-service implantées en Finlande;

-les 27 stations-service susvisées assuraient 8 % des ventes d'essence et 10,48 % des ventes de gas-oil du réseau de Neste, soit encore 2,48 % des ventes d'essence et 1,07 % des ventes de gas-oil réalisées sur tout le territoire de la Finlande;

-une part importante des contrats conclus par Neste avec d'autres revendeurs avaient été modifiés pour être couverts par le règlement n° 1984/83 ou étaient déjà exemptés en vertu de l'article 12, paragraphe 2, de celui-ci.

30. Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi vise essentiellement à savoir si, dans les circonstances de fait caractérisant le marché de la distribution des carburants en Finlande, des contrats de fourniture de carburants résiliables à tout moment moyennant un préavis d'un an peuvent être considérés comme contribuant de manière insignifiante à l'effet cumulatif de fermeture dudit marché, et donc comme échappant à l'interdiction édictée par l'article 85, paragraphe 1, du traité, alors même qu'ils sont compris dans un ensemble de contrats conclus par un même fournisseur qui, globalement, contribuent de façon significative à cette fermeture.

31. Neste et le gouvernement français soulignent à juste titre qu'un contrat d'achat exclusif de carburants diffère sur un point de façon importante d'un contrat d'achat exclusif d'autres produits, tels que la bière ou les glaces, dans la mesure où, d'un point de vue strictement matériel, il n'est vendu qu'une seule marque de carburants dans une station-service déterminée.

32. Il résulte de cette constatation que, pour le type de contrat en cause au principal, l'élément fondamental pour le fournisseur est moins la clause d'exclusivité considérée en elle-même que la durée de l'obligation d'approvisionnement souscrite par le revendeur et que cette durée constitue le facteur déterminant de l'effet de fermeture du marché.

33. À cet égard, il y a lieu d'admettre, ainsi que le suggère la juridiction de renvoi, que des contrats à durée déterminée conclus pour plusieurs années sont susceptibles de restreindre davantage l'accès au marché que ceux auxquels il peut être mis fin à tout moment en respectant un préavis bref.

34. Dans le domaine des accords de stations-service, les obligations souscrites par le fournisseur sont généralement importantes en termes d'investissements, aux fins de l'adaptation du point de vente à l'image de la marque distribuée. Dès lors, un changement de fournisseur implique le plus souvent, d'un point de vue technique, l'écoulement d'un certain délai.

35. Au regard de ces éléments particuliers, un délai de résiliation d'un an est de nature à préserver raisonnablement les intérêts économiques et juridiques de chacune des parties au contrat et à limiter la restriction apportée par celui-ci au jeu de la concurrence sur le marché de la distribution des carburants.

36. Dans ces conditions, lorsque, comme dans le litige au principal, les contrats résiliables à tout moment moyennant un préavis d'un an ne représentent qu'une part très faible de tous les accords d'achat exclusif conclus par un même fournisseur, il convient de considérer qu'ils contribuent de manière insignifiante à l'effet cumulatif au sens de l'arrêt Delimitis, précité, et donc qu'ils échappent à l'interdiction édictée par l'article 85, paragraphe 1, du traité.

37. Le fait de fractionner à titre exceptionnel le réseau d'un même fournisseur ne relève pas de l'arbitraire et ne compromet pas le principe de sécurité juridique. En effet, un tel fractionnement procède d'une appréciation concrète de la position de l'opérateur concerné sur le marché de référence, ladite appréciation visant, sur le fondement d'un critère objectif, particulièrement pertinent en ce qu'il tient compte des particularités de ce marché, à limiter la nullité encourue aux seuls contrats d'un fournisseur qui ont, ensemble, une incidence significative sur l'effet cumulatif de fermeture du marché.

38. Contrairement à ce que soutient la Commission dans ses observations, cette solution ne se heurte pas à l'arrêt Delimitis, précité. Si cet arrêt, dans le contexte de l'affaire alors examinée, a précisé, dans ses points 25 et 26, les critères d'appréciation de l'importance de la contribution à l'effet cumulatif de fermeture du marché de référence "des contrats", sans autre précision, d'un même fournisseur, il n'a pas exclu la possibilité d'une appréciation distributive de cette contribution en fonction de différentes catégories de contrats qu'un fournisseur déterminé pourrait avoir conclus.

39. Il y a donc lieu de répondre à la question posée que l'interdiction visée à l'article 85, paragraphe 1, du traité ne s'applique pas à l'accord d'achat exclusif conclu par un fournisseur de carburants, que le revendeur a la faculté de dénoncer à tout moment avec un préavis d'un an, lorsque tous les accords d'achat exclusif de ce fournisseur, pris soit séparément, soit globalement, combinés dans le réseau des accords similaires de l'ensemble des fournisseurs, ont un effet sensible sur la fermeture du marché, mais que les accords du même genre que celui en cause au principal de par leur durée de validité ne représentent qu'une part très faible de tous les accords d'achat exclusif du même fournisseur, dont la plupart sont des contrats à durée déterminée conclus pour plus d'un an.

Sur les dépens

40. Les frais exposés par le gouvernement français et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par le Tampereen käräjäoikeus, par décision du 1er juin 1999, dit pour droit:

L'interdiction visée à l'article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) ne s'applique pas à l'accord d'achat exclusif conclu par un fournisseur de carburants, que le revendeur a la faculté de dénoncer à tout moment avec un préavis d'un an, lorsque tous les accords d'achat exclusif de ce fournisseur, pris soit séparément, soit globalement, combinés dans le réseau des accords similaires de l'ensemble des fournisseurs, ont un effet sensible sur la fermeture du marché, mais que les accords du même genre que celui en cause au principal de par leur durée de validité ne représentent qu'une part très faible de tous les accords d'achat exclusif du même fournisseur, dont la plupart sont des contrats à durée déterminée conclus pour plus d'un an. Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 décembre 2000.