CCE, 14 janvier 2000, n° M.1807
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
FNAC / COIN / JV
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
1. Le 7-12-1999, la Commission a reçu une notification d'un projet de concentration aux termes duquel, d'une part, les sociétés Gruppo Coin SpA, Italie, et Gruppo Coin International, SA, société de droit luxembourgeois contrôlée par le Gruppo Coin (" Coin ") et, d'autre part, Fnac, SA (" Fnac "), France, contrôlée par le groupe Pinault Printemps Redoute SA (" PPR "), France, acquièrent le contrôle en commun d'une entreprise destinée à la vente au détail de produits de loisirs et produits à caractère culturel en Italie.
2. Après examen de la notification, la Commission est arrivée à la conclusion que l'opération notifiée relève du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil, et ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun.
I- LES ACTIVITES DES PARTIES
3. Coin opère sur le marché italien de la grande distribution d'articles d'habillement et accessoires à travers quatre divisions : Coin (habillement de moyen et haut de gamme), Oviesse (habillement bas de gamme), Bimbus (magasins pour enfants) et La Standa.
4. PPR opère dans le secteur de la distribution " grand public " au travers des sociétés Printemps (grands magasins), Conforama (équipement de la maison), Fnac (biens culturels et de loisirs) et Redcats (vente à distance) ; dans la distribution de produits de luxe au travers de la société Gucci, dans la distribution professionnelle de matériel électrique basse tension, de matériaux de construction et de fourniture, mobilier de bureau et bureautique ; dans la distribution spécialisée en Afrique ; et dans le secteur du crédit à la consommation.
II- L'OPERATION NOTIFIEE
5. Coin et Fnac ont signé le 30 novembre 1999 un contrat d'entreprise commune. L'opération de concentration se réalise par le transfert à Fnac d'une participation de 50 % du capital de l'entreprise Scricchio, du groupe Coin, qui, à l'issue de l'opération notifiée deviendra une entreprise commune des parties notifiantes. L'entreprise commune aura pour objet la création, la gestion et le développement en Italie d'une chaîne de magasins sous enseigne Fnac. À cet égard Coin cédera à l'entreprise commune un certain nombre de magasins localisés dans de grandes ou moyennes villes en Italie.
III- LA CONCENTRATION
a) contrôle conjoint
6. Le capital de l'entreprise commune sera détenu à 50 % par Coin et Fnac. Le Conseil d'administration se composera de huit administrateurs, dont quatre seront choisis parmi les candidats proposés par la Fnac et quatre parmi les candidats proposés par Coin. Le Président du Conseil d'administration sera choisi parmi les administrateurs proposés par Coin et le vice-président sera choisi parmi les administrateurs proposés par la Fnac et ne pourront engager la société qu'après avoir obtenu l'avis conforme du Conseil d'administration. Le Business plan pour la période 2000/2005 a été élaboré d'un commun accord par les parties. Les budgets annuels seront approuvés par le Conseil d'administration aux dispositions du Business plan.
7. Il en résulte que les décisions concernant les plus importants aspects de la politique commerciale de la nouvelle entité devront être approuvée par les deux parties et que celles-ci exerceront dont une influence déterminante sur l'entreprise commune. En conséquence Coin et Fnac exercent le contrôle en commun de l'entreprise commune au sens du paragraphe 3 de l'article 3 du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil.
b) Entité économique autonome
8. L'entreprise commune opérera sur le marché de la vente au détail de produits culturels et de loisirs indépendamment des entreprises mères et en concurrence avec toutes les autres entreprises qui opèrent sur les marchés concernés par l'opération. L'entreprise commune disposera de sa propre chaîne de magasins, d'une direction autonome, de ressources financières et de son propre personnel ainsi que de ses propres services d'approvisionnement. Elle aura aussi un droit exclusif pour l'utilisation en Italie du concept " Fnac " et un droit d'utilisation des marques et des logos " Fnac ".
9. Il s'ensuit que l'entreprise commune disposera de toutes les ressources nécessaires en termes de financement, de personnel et d'actifs pour exercer d'une façon durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome. En conséquence, l'opération notifiée constitue une concentration au sens du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement CEE mentionné.
IV. DIMENSION COMMUNAUTAIRE
10. Les groupes des entreprises Coin et PPR réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 000 millions d'écus (Coin 728 millions d'écus et PPR 16 514 millions d'écus). Chacune d'entre elles réalise un chiffre d'affaires dans la Communauté de plus de 250 millions d'écus (Coin 728 millions d'écus ; PPR 12 302 millions d'écus), mais aucune d'entre elles ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires dans un seul et même État membre. L'opération a donc une dimension communautaire, mais elle ne constitue pas un cas de coopération au sens de l'Accord EEE, en vertu de son article 57.
V- ANALYSE DU MARCHE
A- Marchés des produits en cause
11. L'opération notifiée concerne uniquement la vente au détail d'un ensemble de produits à caractère culturel et de loisirs en Italie : essentiellement livres, disques (y compris les cassettes) et films enregistrés sur tous supports, matériels informatiques et logiciels et CD-Rom, hi-fi, télévisions, bureautique, télécommunication et téléphonie filaire et sans fil, photographie et services de développement des photographies, billetterie de spectacle et de sport, billetterie de voyage.
12. Les parties notifiantes considèrent que chaque famille de produits mentionnés constitue a priori un marché séparé étant donné que ces familles de produits ne sont pas interchangeables, du point de vue de la demande, mais également pour la plupart d'entre eux, du point de vue de l'offre.
13. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de définir les marchés de produits en cause avec plus de précision car, sur tous les marchés considérés, le projet d'opération n'aurait pas pour effet d'entraver la concurrence de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.
B- Marchés géographiques de référence
14. Les magasins Fnac seront établis dans certaines villes en Italie pour la vente au grand public des produits concernés. Les parties notifiantes considèrent qu'il ressort du comportement des consommateurs que ce type de magasins, plutôt de destination que de proximité, se concurrencent sur le territoire de chaque bille (et sa périphérie) ou province concernée où ils sont situés.
15. Il n'est pas nécessaire de déterminer les marchés géographiques de référence avec plus de précision car, quelle que soit la dimension du marché géographique considérée, l'opération prévue n'aurait pas pour effet d'entraver la concurrence de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.
C- Appréciation
16. Ni PPR ni Coin n'opèrent sur les marchés sur lesquels l'opération a une incidence. PPR n'exerce aucune activité en Italie qui soit liée avec les produits décrits ci-dessus. Coin n'exerce aucune activité dans les secteurs concernés par l'opération notifiée. Par conséquent, la concentration ne provoque pas de chevauchement entre les activités des parties.
17. Compte tenu de la position sur le marché des parties à la concentration, il apparaît que l'opération notifiée n'aboutit pas à la coordination des comportements concurrentiels des entreprises mères et elle ne créée pas ou ne renforce pas une position dominante qui aurait pour résultat d'entraver la concurrence effective de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.
VI- RESTRICTIONS ACCESSOIRES
18. Les parties demandent à la Commission de considérer les restrictions suivantes comme accessoires à l'opération de concentration et sollicitent leur appréciation en même temps que la présente opération :
19. a) L'engagement de Coin et Fnac (PPR) de ne pas entamer sur le territoire italien (dont San Marin et Le Vatican) une activité en concurrence avec elle de l'entreprise commune, y compris l'acquisition de participations, de majorité ou de minorité, dans le capital d'entreprises qui exercent la même activité.(Section XI-1 " Obligations de parties " du contrat signé le 30 novembre 1999). Selon les parties notifiantes, cette clause de non-concurrence permet à l'entreprise commune de développer en Italie de façon indépendante un réseau de magasins sous le concept Fnac.
20. Cette clause peut être considérée comme accessoire en ce qu'elle garantir la valeur des investissements réalisés par les sociétés mères dans l'entreprise commune.Toutefois, sa durée doit être limitée à ce qui est strictement nécessaire pour garantir la valeur des investissements réalisés, durée qui peut être estimée à 5 ans. La présente décision ne couvre donc cette clause que pour une durée de 5 ans.
21. b) L'engagement de Coin de ne pas entamer en Europe une activité en concurrence avec celle de l'entreprise commune et de ne pas utiliser le concept original des magasins Fnac pendant toute la durée de sa participation dans son capital et pendant les cinq premières années suivant la cession de ladite participation. (Section XI-2 " Obligations du Gruppo Coin " du contrat signé le 30 novembre 1999). Selon les parties, cette clause garantit à PPR que Coin ne profitera pas de son partenariat avec PPR pour s'approprier le know how développé par PPR dans le secteur de la vente au " Grand public ". PPR n'aurait pas intérêt à développer en Italie son concept de vente par le biais de l'entreprise commune, si elle n'était pas assurée que la divulgation à l'entreprise commune (et donc à Coin) de ses connaissances ne sera pas utilisée par Coin à des fins propres.
22. L'interdiction de concurrence à charge de Coin en faveur de l'entreprise commune en Europe, c'est-à-dire au-delà du territoire géographique assigné à l'entreprise commune, ne peut être considérée comme accessoire à l'opération notifiée.
23. Dans la mesure où l'engagement de Coin de ne pas utiliser le concept original des magasins Fnac se limite à poursuivre une protection contre l'usage par Coin à des fins propres du know how est dévoilé et confirmer des droits dont PPR disposerait déjà et par conséquent, elle ne constituerait pas une restriction de concurrence.
VII- CONCLUSION
24. Pour les motifs exposés ci-avant, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et la déclare compatible avec le marché commun. La présent décision est adoptée en application de l'article 6 paragraphe 1 point b du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil.