TPICE, 2e ch. élargie, 27 avril 1995, n° T-12/93
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Comité central d'entreprise de Vittel (SA), Comité d'établissement de Pierval, Fédération générale agroalimentaire, Comité central d'entreprise de la société générale des grandes sources, Comité d'établissement de la source Perrier, Syndicat CGT de la source Perrier, Comité groupe Perrier
Défendeur :
Commission des Communautés européennes
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vesterdorf
Juges :
MM. Barrington, Saggio, Kirschner, Kalogeropoulos
Avocats :
Mes Nativi, Rousseau, Bienayme-Galaz, May, Mélaux, Ottan
LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES (deuxième chambre élargie),
FAITS ET PROCEDURE
1 Le 25 février 1992, Nestlé SA (ci-après "Nestlé") a notifié à la Commission, conformément à l'article 4, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO L 395, p. 1 ; ci-après "règlement n° 4064-89"), une offre publique d'achat (ci-après "OPA") portant sur les actions de Source Perrier SA (ci-après "Perrier"). Cette OPA avait été lancée, le 20 janvier 1992, par Demilac SA (ci-après "Demilac"), filiale commune de Nestlé et de la banque Indosuez. Nestlé et Demilac se seraient engagées à vendre, en cas de succès de l'OPA, une des filiales de Perrier, la société Volvic, au groupe BSN.
2 Après avoir procédé à l'examen de la notification, la Commission a décidé, le 25 mars 1992, en application de l'article 6, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 4064-89, d'engager la procédure au motif que l'opération de concentration notifiée soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun. De l'avis de la Commission, l'opération risquait d'entraîner la création d'une position dominante soit de l'entité Perrier-Nestlé prise isolément soit de Perrier-Nestlé et BSN pris dans leur ensemble.
3 Le 25 mai 1992, Nestlé et BSN ont été entendus par la Commission, en qualité de "parties intéressées".
4 Le 22 juillet 1992, au vu des engagements pris par Nestlé à son égard, la Commission a adopté la décision 93-553-CEE, relative à une procédure au titre du règlement n° 4064-89 (affaire n° IV/M.190 - Nestlé/Perrier, JO L 356, p. 1,) ci-après "décision", déclarant la concentration compatible avec le Marché commun. La décision subordonne cette déclaration de compatibilité au respect de toutes les conditions et obligations contenues dans les engagements pris par Nestlé (voir le cent trente-sixième considérant et l'article 1er du dispositif de la décision). Ces conditions et obligations, qui ont pour objet de faciliter l'entrée sur le marché français des eaux embouteillées d'un concurrent viable, disposant de ressources adéquates pour exercer une concurrence effective vis-à-vis de Nestlé et de BSN, peuvent être résumées comme suit :
- Nestlé doit vendre à ce concurrent les marques et les sources Vichy, Thonon, Pierval, Saint-Yorre et un certain nombre d'autres sources locales ;
- le choix de l'acquéreur, qui devra disposer de ressources financières et d'un savoir-faire suffisants dans le domaine des boissons ou des produits alimentaires de marque, sera soumis à l'agrément de la Commission ;
- Nestlé ne doit fournir aucune donnée remontant à moins d'un an concernant le volume de ses ventes à une association professionnelle ou à toute entité susceptible de les rendre accessibles à d'autres concurrents aussi longtemps que la structure oligopolistique étroite actuelle persiste sur le marché français de l'eau embouteillée ;
- Nestlé doit gérer de manière séparée l'ensemble des actifs et des intérêts qu'elle a acquis de Perrier, tant que la vente des marques et sources précitées n'aura pas été réalisée ;
- Nestlé ne pourra procéder, au cours de la période susvisée, à une quelconque modification structurelle au sein de Perrier, sans l'accord préalable de la Commission ;
- Nestlé ne doit pas transmettre à une entité commerciale de son groupe des informations commerciales ou industrielles ou des droits de propriété de nature confidentielle ou interne à la société, obtenus de Perrier ;
- Nestlé ne pourra pas vendre Volvic à BSN jusqu'à ce qu'intervienne la vente des marques et sources identifiées ci-dessus ;
- Nestlé ne pourra pas racheter, directement ou indirectement, pendant une période de dix ans, les marques et sources qu'elle est tenue de vendre et devra informer la Commission de l'achat éventuel qu'elle pourrait faire, pendant une période de cinq ans à compter de l'adoption de la décision, de toute entité présente sur le marché français des eaux embouteillées dont la part de marché serait supérieure à 5 %.
5 La source Pierval que Nestlé doit céder en vertu de la décision est exploitée par l'un des établissements de Vittel SA (ci-après "Vittel"), l'établissement de Pierval, sur le site duquel sont affectés 119 salariés. Selon les indications fournies par les requérants, Vittel est devenue, en 1992, une filiale du groupe Nestlé.
6 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 février 1993, le comité central d'entreprise de Vittel SA (ci-après "CCE Vittel"), le comité d'établissement de Pierval (ci-après "CE Pierval") et la Fédération générale agroalimentaire-CFDT (ci-après "FGA-CFDT") ont demandé, en vertu de l'article 173 du traité CE, l'annulation de la décision "en ce que cette décision impose à Nestlé des conditions à la reconnaissance de la compatibilité avec le Marché commun de l'opération de concentration Nestlé-Perrier, alors que ces conditions sont irrégulières et superfétatoires", en particulier dans la mesure où elles comportent "la cession par Vittel SA d'une branche complète d'activité, constituée par l'usine Pierval".
7 Par acte séparé, enregistré au greffe du Tribunal le 2 mars 1993, les requérants ont également introduit, en vertu des articles 185 et 186 du traité CE, une demande en référé tendant à obtenir, à titre principal, le sursis à l'exécution de la décision et, à titre subsidiaire, la suspension de la décision en ce que celle-ci exige la cession de Pierval, jusqu'à l'issue de la procédure au fond. Par ordonnance du 2 avril 1993, le président du Tribunal a ordonné à la Commission d'informer le Tribunal, dès qu'elle sera en possession des éléments y relatifs, de la réunion de l'ensemble des conditions afférentes à la cession des actifs prévues dans la décision et, en particulier, de la levée des obstacles au transfert des droits d'exploitation des sources de Vichy et de Thonon. Dans la même ordonnance, il a décidé de surseoir à l'exécution de ladite décision, en ce qu'elle comporte la cession de l'établissement de Pierval, jusqu'à ce que le juge des référés puisse se prononcer, à la lumière des informations qui lui seront communiquées par la Commission, sur les demandes de sursis à exécution (CCE Vittel et CE Pierval/Commission, T-12-93 R, Rec. p. II-449). A la suite de la communication desdites informations, le 14 juin 1993, les demandes en référé susvisées ont été rejetées, par ordonnance du président du Tribunal du 6 juillet 1993. Les dépens ont été réservés (T-12-93 R, Rec. p. II-785).
8 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 juin 1993, le comité central d'entreprise de la Société générale des grandes sources (ci-après "CCE Perrier"), le comité d'établissement de la Source Perrier à Vergèze (France, ci-après "CE Perrier"), le syndicat CGT de la Source Perrier (ci-après "CGT Perrier") et le Comité de groupe Perrier (ci-après "CG Perrier") ont demandé à intervenir dans l'affaire à l'appui des conclusions des parties requérantes. Ces demandes d'intervention ont été accueillies par le Tribunal par ordonnance du 16 décembre 1993.
9 Les parties intervenantes ont présenté les moyens et arguments à l'appui de leurs conclusions le 14 mars 1994. Les parties requérantes n'ayant pas déposé d'observations sur le mémoire en intervention dans le délai imparti, la procédure écrite s'est achevée avec le dépôt des observations de la partie défenderesse, le 27 avril 1994.
10 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre élargie) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. La procédure orale s'est déroulée le 7 octobre 1994.
Conclusions des parties
11 Les parties requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
- enjoindre à la Commission de produire l'ensemble des documents ayant servi à fonder sa décision ;
- dire que le présent recours tend à l'annulation de cette décision en ce qu'elle impose à Nestlé des conditions à la déclaration de compatibilité avec le Marché commun de l'opération de concentration Nestlé-Perrier, lesquelles comportent la cession par Vittel de l'usine de Pierval, alors que la Commission aurait dû prendre une décision de compatibilité pure et simple de l'opération de concentration avec le Marché commun sans imposer une quelconque condition ;
- en conséquence, annuler la décision attaquée avec toutes les conséquences de droit.
12 La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
- rejeter le recours ;
- condamner solidairement les parties requérantes aux dépens.
13 Les parties intervenantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
- faire droit aux conclusions des parties requérantes tendant à l'annulation de la décision ;
- condamner la Commission aux dépens de la présente intervention.
Sur la recevabilité
Exposé sommaire de l'argumentation des parties
14 Tout en engageant le débat au fond, la Commission excipe de l'irrecevabilité du présent recours. Elle fait valoir, à titre préliminaire, que la recevabilité d'un recours est subordonnée non seulement à la réunion des deux conditions énoncées à l'article 173 du traité CE, exigeant que les requérants soient directement et individuellement concernés par l'acte attaqué, mais également à la justification d'un intérêt à agir (voir les arrêts de la Cour du 31 mars 1977, Exportation des sucres/Commission, 88-76, Rec. p. 709, et du 10 juillet 1986, DEFI/Commission, 282-85, Rec. p. 2469). En l'espèce, la Commission estime que les requérants ne justifient pas d'un tel intérêt, au regard de la finalité essentielle du règlement n° 4064-89, qui tend à préserver et à développer une concurrence effective dans le Marché commun. Elle admet, certes, que son appréciation des effets d'une opération de concentration sur la concurrence doit s'inscrire dans le cadre général de la réalisation des objectifs fondamentaux visés à l'article 2 du traité, y compris celui du renforcement de la cohésion économique et sociale de la Communauté visé à l'article 130 A du traité CE, comme le rappelle le treizième considérant du règlement n° 4064-89. Toutefois, ce dernier considérant n'imposerait pas une analyse détaillée de l'impact d'une concentration sur la situation de l'emploi dans une entreprise donnée, mais la prise en compte de ses effets prévisibles sur la situation de l'emploi dans l'ensemble de la Communauté ou une partie de celle-ci. D'après la Commission, les représentants reconnus des travailleurs ne justifient donc d'un intérêt digne de protection que s'ils sont en mesure de montrer, au moins prima facie, qu'une opération de concentration, autorisée par cette institution, est de nature à porter atteinte de façon caractérisée aux objectifs sociaux visés à l'article 2 du traité CE.
15 Par ailleurs, la Commission soutient que les requérants n'ont pas qualité pour agir, dans la mesure où ils ne remplissent pas les deux conditions de recevabilité énoncées à l'article 173 du traité, susvisé. En premier lieu, elle conteste que les requérants soient individuellement concernés par la décision. Elle rappelle, à cet égard, que les tiers ne remplissent cette condition que si la décision en cause les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle du destinataire. Elle en déduit que les tiers intéressés qui ne se sont pas manifestés au cours de la procédure administrative n'ont pas qualité pour agir contre la décision adoptée à l'issue de cette procédure. Elle allègue que, tant en matière de concurrence que d'aides d'Etat, de dumping et de subventions, la Cour a reconnu la qualité pour agir des tiers disposant de garanties procédurales, dans le but, précisément, de lui permettre de contrôler le respect de ces droits procéduraux (voir les arrêts du 25 octobre 1977, Metro/Commission, 26-76, Rec. p. 1875, du 4 octobre 1983, Fediol/Commission, 191-82, Rec. p. 2913, et du 28 janvier 1986, Cofaz e.a./Commission, 169-84, Rec. p. 391). Admettre la qualité pour agir d'un requérant n'ayant pas souhaité se prévaloir de ses droits procéduraux reviendrait donc à instituer une procédure alternative à celle prévue par la réglementation communautaire, en l'occurrence par l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89.
16 En l'espèce, la Commission rejette l'argument des requérants, selon lequel ils ont été informés tardivement de la cession de l'établissement de Pierval et n'ont, de ce fait, pas été en mesure de se prévaloir de la faculté d'être entendus au titre de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89. Elle fait valoir que cette information tardive ne saurait lui être imputée, dans la mesure où le règlement n° 4064-89 ne lui assigne aucune obligation de ce type. Cette tardiveté devrait être mise sur le compte soit d'une négligence des dirigeants de Nestlé, soit d'une inadaptation de la législation française. Elle ne saurait, dès lors, justifier la recevabilité du recours, dans la mesure où le contrôle du juge ne porterait plus sur le respect, par la Commission, des droits procéduraux des tiers garantis par la réglementation communautaire.
17 De plus, la Commission conteste, dans son mémoire en défense, que la FGA-CFDT constitue un représentant reconnu des travailleurs de Vittel, au sens de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89. Il serait en particulier nécessaire que le droit national confère aux représentants des salariés, désireux de se prévaloir des dispositions dudit article, la mission de représenter les intérêts de la totalité du personnel de l'entreprise et non uniquement ceux de leurs propres membres. Dans son mémoire en duplique, la Commission prend acte de ce que les requérants ont soutenu, dans la réplique, que les organisations syndicales ont, en vertu de la législation française du travail, pour mission de défendre les intérêts collectifs de la profession. Elle souligne que, s'il appartient au Tribunal de trancher la question de l'interprétation de la notion communautaire de "représentants reconnus des travailleurs", l'application de cette notion donne lieu à une appréciation, dans chaque Etat membre, du rôle reconnu aux syndicats par le droit national.
18 En second lieu, la Commission conteste que les requérants soient directement concernés par l'acte attaqué. Elle soutient, d'abord, que les requérants se réfèrent pour la première fois, dans leur mémoire en réplique, à leurs intérêts propres, qui seraient directement affectés par la décision litigieuse. Ce moyen prétendument nouveau devrait donc être rejeté comme irrecevable, en vertu de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal. En tout état de cause, la Commission considère que les requérants ne sauraient se prévaloir d'intérêts propres - autres que le respect des garanties procédurales prévues à l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89 - qui seraient distincts des intérêts collectifs des salariés qu'ils sont chargés de représenter.
19 La Commission soutient, ensuite, que les possibles licenciements dans les services centraux de Vittel, du fait de la cession de Pierval, allégués par les requérants, ne sauraient résulter directement de la décision. A cet égard, la directive 77-187-CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements (JO L 61, p. 26, ci-après "directive 77-187"), disposerait en son article 4, paragraphe 1, que le transfert d'un établissement ne constitue pas en lui-même un motif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire.
20 Pour ce qui est de la prétendue remise en cause des avantages dont bénéficient les salariés de Pierval au titre de l'accord d'entreprise en vigueur au sein de Vittel, la Commission fait observer que, en vertu de l'article L. 132-8 du Code du travail français, lors d'une cession d'entreprise, toute convention ou accord collectif dans cette entreprise continue de s'appliquer pendant un an ou jusqu'à l'entrée en vigueur d'un accord de substitution. Si aucune convention n'est conclue pendant l'année qui suit le transfert, les salariés conserveraient les avantages individuels acquis en application de l'accord passé.
21 Les requérants soutiennent, pour leur part, que l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission n'est pas fondée. Ils contestent que leur recours puisse être déclaré irrecevable au motif qu'ils ne justifieraient pas d'un intérêt à agir. Ils soutiennent, d'abord, que l'article 173 du traité ne subordonne pas la recevabilité d'un recours à l'existence d'un intérêt à agir. Ils font observer, ensuite, qu'en toute hypothèse leur intérêt à agir ne saurait être mis en doute. Ils allèguent, notamment, que les comités d'entreprise remplissent, en France, un rôle important de préservation de l'instrument industriel dans l'intérêt des salariés et disposent, à cette fin, de réels pouvoirs de contrôle et d'intervention dans l'activité économique, financière et commerciale de l'entreprise. Dans ces conditions, il serait contraire à la fois au traité CE, qui vise, en son article 130 A, le renforcement de la cohésion économique et sociale à l'intérieur de la Communauté, et au principe de la bonne administration de la justice d'effectuer une "discrimination", en ce qui concerne l'accès au juge communautaire, entre, d'une part, les sociétés commerciales et, d'autre part, les personnes morales chargées de la défense des intérêts des travailleurs, qu'il s'agisse des syndicats ou des comités d'entreprise.
22 En ce qui concerne les conditions de recevabilité énoncées à l'article 173 du traité, les requérants sont d'avis que, dans la présente espèce, une "présomption de recevabilité repose sur la loi et sur la jurisprudence de la Cour". Ils font valoir, en premier lieu, qu'ils sont individuellement concernés par la décision adoptée dans le cadre du règlement n° 4064-89, dans la mesure où ce règlement protège les droits collectifs des travailleurs des entreprises concernées. Premièrement, l'article 18, paragraphe 4, dudit règlement consacrerait le droit des représentants reconnus de ces travailleurs d'être entendus à leur demande au cours de la procédure administrative. Or, selon une jurisprudence bien établie, lorsqu'un règlement accorde des droits procéduraux à des tiers durant la procédure administrative, ces derniers disposeraient d'une voie de recours destinée à protéger leurs intérêts légitimes (arrêts Metro/Commission, Fediol/Commission et Cofaz e.a./Commission, précités).
23 A cet égard, les requérants précisent que la notion communautaire de représentants reconnus des travailleurs d'une entreprise viserait non seulement les représentants élus par ces derniers, mais également, comme l'aurait reconnu la Commission, tout organisme dont la mission légale est de représenter les intérêts de la totalité du personnel de l'entreprise et non pas seulement de ses propres membres. Tel serait le cas de la FGA-CFDT, dont la représentativité serait reconnue au plan national. Cette fédération syndicale aurait ainsi vocation à défendre l'ensemble des salariés de la branche d'activité de l'agro-alimentaire, dont fait partie Vittel. En vertu de l'article L. 411-11 du Code du travail français, la FGA-CFDT pourrait, comme tout syndicat, exercer, devant toutes les juridictions, tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'elle représente.
24 Par ailleurs, les requérants contestent que, lorsque les représentants reconnus des travailleurs ne demandent pas à être entendus par la Commission au cours de la procédure administrative, ils ne peuvent être considérés comme individuellement concernés par la décision finale. En effet, l'accès au juge communautaire ne saurait être conditionné par l'exercice de la faculté d'être entendu, ouverte par le règlement n° 4064-89, sauf à priver de leur droit d'agir les personnes directement et individuellement concernées par une décision, qui n'ont pas exercé cette faculté, ce qui serait contraire à l'article 173 du traité. En pratique, la thèse de la Commission reviendrait à obliger toutes les personnes, éventuellement susceptibles d'être concernées par une décision, à demander à présenter leurs observations au cours de la procédure administrative à la seule fin de se réserver la possibilité de former, le cas échéant, un recours en annulation.
25 En toute hypothèse, dans la présente espèce, les requérants n'auraient pas été en mesure d'exercer leurs droits procéduraux, au titre de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89. Ils n'auraient été informés, par leur employeur, de la cession d'un certain nombre de sources, dont Pierval, qu'après l'adoption de la décision, comme le relève l'ordonnance du président du Tribunal du 2 avril 1993, précitée, en son point 24.
26 Deuxièmement, les requérants soulignent que l'obligation de prendre en considération les droits des travailleurs dans le cadre du règlement n° 4064-89 est confirmée par le trente et unième considérant de ce règlement, énonçant qu'il "ne porte en aucune manière atteinte aux droits collectifs des travailleurs, tels qu'ils sont reconnus dans les entreprises concernées". En l'espèce, les institutions représentatives des salariés de Vittel seraient d'autant plus individuellement concernées que l'une des conditions imposées par la décision, pour constater la compatibilité de l'opération de concentration en cause avec le Marché commun, consiste en la cession d'une branche complète d'activité de Vittel, l'établissement de Pierval. Cette cession imposerait une séparation artificielle à une communauté ancienne de salariés et affecterait les droits que ladite communauté avait acquis. La décision atteindrait ainsi les représentants reconnus des travailleurs de Vittel en raison des qualités qui leur sont particulières et de la situation de fait qui les individualise d'une manière analogue à l'entreprise Vittel, laquelle serait l'une des entreprises concernées par la décision, au même titre que son destinataire, Nestlé.
27 En second lieu, les requérants soutiennent que la décision les concerne directement. Ils font valoir que la cession d'une partie de l'entreprise Vittel, imposée par ladite décision, porte atteinte aussi bien aux droits propres qui leur sont conférés, en tant que représentants reconnus des travailleurs, qu'aux droits des salariés.
28 Dans leur mémoire en réplique, les requérants développent, à titre principal, l'argument selon lequel la décision affecte de manière directe et inéluctable leurs droits propres. D'une part, cette décision porterait "atteinte à la structure économique, industrielle, technique et financière de l'entreprise par l'obligation faite à Vittel de céder son établissement de Pierval, indépendamment des conséquences sur la communauté de travail et les droits des salariés". D'autre part, elle entraînerait la "destructuration des organes de représentation du personnel requérants, par la disparition au sein de Vittel du comité d'établissement de Pierval et, par voie de conséquence, la perte au sein du comité central d'entreprise des représentants issus de cet établissement de Pierval avec changement de la nature juridique du comité central d'entreprise devenant comité d'entreprise". La décision porterait ainsi atteinte aux droits que la législation française confère au comité central d'entreprise. Quant à la FGA-CFDT, qui est le syndicat largement majoritaire au sein de Vittel, elle serait directement concernée par la décision, dans l'exercice de sa représentation au sein de cette société, dans la mesure où la cession de son établissement de Pierval entraînera, en vertu de l'article L. 122-2 du Code du travail français, le transfert du personnel qui y est attaché.
29 Par ailleurs, les requérants soutiennent que la décision porte directement atteinte aux droits des salariés de Vittel et de Pierval, qui subissent les effets juridiques de la cession de la branche d'activité qu'elle impose. L'établissement de Pierval représenterait une part importante du patrimoine de Vittel et "la contrepartie légitime de la garantie de l'emploi". Or, la décision se proposerait d'agréer le cessionnaire sur la seule base de critères relatifs au développement de la concurrence. En outre, les salariés subiraient des pertes d'emploi, à la suite des mesures de licenciement consécutives à la concentration. Par ailleurs, les salariés de Pierval seraient directement atteints par la perte des avantages collectifs consentis au sein de l'entreprise Vittel. Pour ce qui est de la preuve de tels préjudices directs, les requérants renvoient expressément à leur recours en référé et aux pièces versées aux débats, dans le cadre de la procédure de référé.
30 Il résulterait de l'ensemble de ces considérations que les requérants ont, en tant que représentants reconnus des travailleurs, qualité pour saisir le Tribunal, en vue d'assurer la protection des droits collectifs des travailleurs garantie par le règlement n° 4064-89. Les requérants précisent, à cet égard, que, si en droit français les représentants des salariés peuvent saisir le juge en cas d'irrégularité d'une cession d'entreprise, ils ne sont pas pour autant admis à contester devant les tribunaux nationaux l'exécution d'une décision de la Commission, dont seul le juge communautaire peut contrôler la régularité.
31 Les parties intervenantes apportent leur soutien à l'ensemble des moyens de recevabilité invoqués par les requérants. Elles rappellent que l'article 173 du traité œuvre une voie de recours contre une décision d'une institution à toute personne directement et individuellement concernée par cette décision. Dans le cadre du règlement n° 4064-89, l'énonciation expresse de certaines personnes "privilégiées" parmi les tiers justifiant d'un intérêt suffisant établirait une véritable présomption de recevabilité des recours introduits par ces tiers contre ladite décision. Le fait que le règlement n° 4064-89 ne prévoit pas de procédure de plainte ainsi que l'absence de participation des tiers susvisés à la procédure devant la Commission seraient à cet égard sans influence. Les parties intervenantes allèguent que, dans la jurisprudence invoquée par la Commission, la justification d'un intérêt suffisant et la participation effective à la procédure administrative ont été considérées par la Cour comme des conditions de recevabilité alternatives et non pas cumulatives.
32 A cet égard, les parties intervenantes relèvent que, si l'article 15, paragraphe 1, du règlement (CEE n° 2367-90 de la Commission, du 25 juillet 1990, relatif aux notifications, aux délais et aux auditions conformément au règlement n° 4064-89 (JO L 219, p. 5), confère à certaines personnes le droit d'être entendues à leur demande, ce même article, en son paragraphe 3, permet en toute hypothèse à la Commission de prendre l'initiative de recueillir le point de vue de tout tiers. Or, dans la présente espèce, la Commission n'aurait pas estimé nécessaire d'entendre les représentants reconnus des travailleurs.
33 En ce qui concerne plus spécialement l'incidence directe de la décision sur la situation juridique des requérants, les parties intervenantes font observer que ces derniers se prévalent à juste titre d'un "préjudice composite", tant à raison de leur propre statut de personne morale que de leur mission légale de défense des droits collectifs des travailleurs. Elles allèguent à cet égard qu'une décision affectant le niveau ou les conditions d'emploi porte nécessairement atteinte aux droits propres des représentants reconnus des travailleurs, et vice versa. L'invocation de tels droits propres par les requérants, dans la réplique, ne saurait dès lors constituer un moyen nouveau.
34 Sur le fond, les parties intervenantes soulignent que les requérants sont directement affectés par la décision dans la mesure où elle prescrit la cession de l'établissement de Pierval, ce qui affecterait, d'une part, le niveau et les conditions d'emploi du personnel de Pierval et, d'autre part, les droits propres des représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées. En effet, ces derniers auraient dû être informés "en temps utile" de cette opération, en vertu de la réglementation nationale et de la directive 77-187. Or, la Commission n'aurait pas veillé à cette information et aurait délibérément négligé de s'enquérir de la situation sociale auprès des représentants reconnus des travailleurs de l'entreprise concernée, méconnaissant ainsi les dispositions combinées du traité (articles 2, 117, 118, 118 A et 118 B), de la charte communautaire du 9 décembre 1989, de la charte sociale européenne du 18 octobre 1961 et de la directive 77-187. Par ailleurs, les requérants seraient affectés financièrement par l'incidence de la cession de Pierval sur leur budget de fonctionnement et sur le budget social. Enfin, la représentation des salariés au CCE Vittel serait amoindrie à la suite de ladite cession.
Appréciation du Tribunal
35 Selon l'article 173 du traité, une personne physique ou morale ne peut former un recours contre une décision adressée à une autre personne que si cette décision la concerne directement et individuellement. La décision attaquée étant adressée à Nestlé, il y a lieu de vérifier si les requérants sont directement et individuellement concernés par cette décision.
36 A cet égard, la seule circonstance qu'un acte soit susceptible d'exercer une influence sur la situation juridique des requérants ne suffit pas pour considérer qu'il les concerne directement et individuellement. S'agissant, en premier lieu, de la condition de recevabilité relative à l'individualisation des requérants, il faut encore, selon une jurisprudence bien établie, que la décision attaquée les atteigne en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et les individualise d'une manière analogue à celle d'un destinataire (voir les arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25-62, Rec. p. 197, 223, et du 10 décembre 1969, Eridania e.a./Commission, 10-68 et 18-68, Rec. p. 459, point 7, ainsi que l'arrêt du Tribunal du 28 octobre 1993, Zunis Holding e.a./Commission, T-83-92, Rec. p. II-1169, points 34 et 36).
37 Dans la présente espèce, il convient dès lors de vérifier si la décision attaquée atteint les requérants en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et les individualise d'une manière analogue à celle d'un destinataire.
38 A cette fin, il y a lieu de relever liminairement que, dans le système du règlement n° 4064-89, la priorité accordée à l'instauration d'un régime de libre concurrence peut, dans certains cas, être conciliée, dans le cadre de l'appréciation de la compatibilité d'une opération de concentration avec le Marché commun, avec la prise en considération des incidences sociales de cette opération, lorsque celles-ci sont de nature à porter atteinte aux objectifs sociaux visés à l'article 2 du traité. La Commission peut ainsi être conduite à vérifier si l'opération de concentration est susceptible d'avoir des répercussions, même indirectes, sur la situation des salariés dans les entreprises concernées, de nature à affecter le niveau ou les conditions d'emploi dans la Communauté ou une partie substantielle de celle-ci.
39 En effet, l'article 2, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 4064-89 impose à la Commission d'effectuer un bilan économique de l'opération de concentration en cause, lequel peut faire intervenir, le cas échéant, des considérations d'ordre social, comme le confirme le treizième considérant de ce même règlement, énonçant que "la Commission se doit de placer son appréciation dans le cadre général de la réalisation des objectifs fondamentaux visés à l'article 2 du traité, y compris celui du renforcement de la cohésion économique et sociale de la Communauté visé à l'article 130 A". Dans ce cadre juridique, la consécration expresse, à l'article 18, paragraphe 4, du règlement, concrétisant le principe énoncé au dix-neuvième considérant, du droit des représentants des travailleurs des entreprises concernées d'être entendus, à leur demande, manifeste la volonté d'assurer la prise en considération des intérêts collectifs desdits travailleurs au cours de la procédure administrative.
40 Dans ces conditions, le Tribunal estime que, dans l'économie du règlement n° 4064-89, la situation des salariés des entreprises faisant l'objet de l'opération de concentration en cause peut, dans certains cas, être prise en considération par la Commission lorsqu'elle adopte sa décision. C'est pour cette raison que le règlement individualise les représentants reconnus des travailleurs de ces entreprises, lesquels constituent une catégorie fermée et clairement délimitée au moment de l'adoption de la décision, en leur conférant, de manière expresse et spécifique, le droit de présenter leurs observations au cours de la procédure administrative. Ces organismes, qui sont chargés de la défense des intérêts collectifs des salariés qu'il représentent, justifient en effet d'un intérêt pertinent par rapport aux considérations d'ordre social susceptibles, le cas échéant, d'être prises en compte par la Commission, dans le cadre de son appréciation de la régularité de l'opération de concentration au regard du droit communautaire.
41 Dans ces circonstances, les requérants font valoir à bon droit que, dans l'économie du règlement n° 4064-89, la désignation expresse des représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées par une opération de concentration, parmi les tiers justifiant d'un intérêt suffisant pour être entendus par la Commission, suffit à les caractériser par rapport à tout autre tiers, sans qu'il y ait lieu d'établir, comme le soutient l'institution défenderesse, aux fins de l'appréciation de la recevabilité du recours, si, au moins prima facie, cette opération est de nature à porter atteinte aux objectifs sociaux visés par le traité. Cette dernière question relève, en effet, d'une appréciation au fond.
42 Il s'ensuit que les représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées par une opération de concentration doivent, en principe, être considérés comme individuellement concernés par la décision de la Commission sur la compatibilité de cette opération avec le Marché commun.
43 Dans la présente espèce, la qualité de représentant reconnu des travailleurs des entreprises concernées, au sens de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89, précité, n'est pas contestée par la Commission en ce qui concerne deux des requérants, à savoir le CCE Vittel et le CE Pierval.
44 Dans ces conditions, s'agissant d'un seul et même recours, il n'y a pas lieu d'examiner la qualité pour agir du troisième requérant, la FGA-CFDT. Comme la Cour l'a jugé, dans son arrêt du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission (C-313-90, Rec. p. I-1125, point 31), il suffit que l'un au moins des requérants remplisse les conditions énoncées à l'article 173 du traité pour que le recours soit recevable.
45 En tout état de cause, il appartient aux Etats membres de définir quels sont les organismes compétents pour représenter les intérêts collectifs des salariés et de déterminer leurs droits et leurs prérogatives, sous réserve de l'intervention de mesures d'harmonisation (voir par exemple la directive 94-45-CE du Conseil, du 22 septembre 1994, concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs, JO L 254, p. 64). Dans la présente espèce, la Commission ne conteste d'ailleurs pas, à la suite des précisions apportées par la requérante dans la réplique, que la représentativité de la FGA-CFDT dans le secteur de l'agro-alimentaire et, par voie de conséquence, dans les entreprises de ce secteur, telle que Vittel - où ce syndicat est majoritaire -, est reconnue, en droit français, dans la mesure où cette fédération syndicale est affiliée à la confédération représentative CFDT. Cette circonstance suffit à considérer que la FGA-CFDT constitue un représentant reconnu des travailleurs des entreprises concernées par l'opération de concentration en cause, au sens de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89.
46 Par ailleurs, l'argumentation de la Commission, suggérant que, faute d'avoir demandé à être entendus en cours de procédure administrative, au titre de l'article 18, paragraphe 4, du règlement n° 4064-89, les requérants ne sont pas individuellement concernés par la décision, est privée de tout fondement. En subordonnant, en règle générale, la qualité pour agir des tiers qualifiés qui bénéficient de droits procéduraux au cours de la procédure administrative à leur participation effective à cette procédure, la thèse de la Commission introduit une condition de recevabilité supplémentaire, sous la forme d'une procédure précontentieuse obligatoire, laquelle n'est pas prévue à l'article 173 du traité. Ainsi que le font observer les requérants, cette interprétation restrictive est en contradiction avec les dispositions susvisées du traité prévoyant que toute personne a qualité pour attaquer une décision la concernant directement et individuellement.
47 L'analyse de la jurisprudence de la Cour confirme que la qualité pour agir des tiers, justifiant d'un intérêt suffisant pour être entendus au cours de la procédure administrative, n'est pas nécessairement subordonnée à leur participation à cette procédure.D'autres circonstances spécifiques peuvent, le cas échéant, être de nature à individualiser lesdits tiers d'une manière analogue à celle du destinataire de la décision attaquée. En effet, contrairement aux allégations de l'institution défenderesse, la Cour a uniquement pris en considération, tant en matière de concurrence et d'aides d'Etat que de dumping et de subventions, la participation de tiers qualifiés à la procédure administrative pour juger qu'elle entraîne, dans certaines conditions particulières, une présomption en faveur de la recevabilité de leur recours tendant à ce que le juge communautaire vérifie non seulement si leurs droits procéduraux ont été respectés mais également si la décision adoptée à l'issue de cette procédure n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'un détournement de pouvoir. La Cour n'a jamais jugé que leur participation à la procédure représentait une condition nécessaire pour admettre que ces tiers sont individuellement concernés par la décision de la Commission (voir notamment les arrêts de la Cour Metro/Commission, précité, point 13, Fediol/Commission, précité, points 28 à 31, du 11 octobre 1983, Demo-Studio Schmidt/Commission, 210-81, Rec. p. 3045, points 14 et 15, du 20 mars 1985, Timex/Conseil et Commission, 264-82, Rec. p. 849, points 11 à 17, Cofaz e.a./Commission, précité, point 25, et du 22 octobre 1986, Metro/Commission, 75-84, Rec. p. 3021, points 18 à 23).
48 Dans ces conditions, s'agissant plus particulièrement des représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées, dont le nombre et l'identité sont susceptibles d'être connus lors de l'adoption de la décision, la seule circonstance que le règlement n° 4064-89 les mentionne de manière expresse et spécifique, parmi les tiers justifiant d'un "intérêt suffisant" pour présenter leurs observations devant la Commission, suffit à les caractériser par rapport à toute autre personne et à considérer qu'ils sont individuellement concernés par la décision adoptée au titre dudit règlement, qu'ils se soient ou non prévalus de leurs droits au cours de la procédure administrative. Il en résulte que, dans la présente espèce, les requérants doivent, pour l'ensemble des raisons qui viennent d'être exposées, être considérés comme remplissant cette condition de recevabilité énoncée à l'article 173 du traité, indépendamment de la question de savoir s'ils ont ou non pris part à la procédure administrative.
49 S'agissant, en second lieu, de la question de savoir si la décision attaquée concerne directement les requérants, le Tribunal estime, tout d'abord, que l'argumentation développée par les intéressés dans la réplique, selon laquelle la décision attaquée porterait atteinte à leurs droits propres, ne constitue pas un moyen nouveau. En effet, cette argumentation se fonde sur la répercussion, sur les droits propres des requérants, des effets allégués de la cession de l'établissement de Pierval sur la structure de Vittel et sur le niveau d'emploi dans cette société. Elle présente, de ce fait, des liens avec le moyen tiré de l'atteinte que cette cession porterait aux droits collectifs des salariés des entreprises concernées, qui a été invoqué dans la requête. La fin de non-recevoir opposée par la Commission doit donc être rejetée.
50 Sur le fond, force est de constater que l'opération de concentration en cause ne saurait porter atteinte aux droits propres des représentants des salariés des entreprises concernées. Contrairement aux allégations des requérants, la circonstance que la cession de l'établissement de Pierval, imposée par la décision autorisant la concentration, entraîne notamment la disparition au sein de Vittel du CE Pierval et, par voie de conséquence, la disparition du comité central d'entreprise, ne porte pas atteinte aux droits propres de ce dernier. Celui-ci ne justifie d'aucun intérêt au maintien dans ses fonctions lorsque, du fait de la modification de la structure de l'entreprise concernée, les conditions dans lesquelles la réglementation nationale applicable prévoit son institution ne sont plus réunies. De même, la FGA-CFDT ne bénéficie d'aucun intérêt propre au maintien de l'établissement de Pierval au sein de Vittel, au motif que la cession d'une partie importante de cette société entraînerait des conséquences d'ordre structurel et financier pour ce syndicat, comme le soutiennent les parties intervenantes. En effet, les organismes représentatifs des salariés peuvent uniquement se prévaloir de droits propres en relation avec les fonctions et les prérogatives qui leur sont attribuées, en vertu de la réglementation applicable, dans une entreprise présentant une structure déterminée. Ils ne sauraient prétendre à la pérennité de la structure de l'entreprise. A cet égard, il ressort d'ailleurs, en substance, de l'article 5 de la directive 77-187, que, en cas de transfert d'entreprise, la garantie des droits propres des organismes représentatifs des salariés ainsi que les mesures de protection dont bénéficient les représentants des salariés doivent être assurées conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres. Il découle de l'ensemble de ces considérations que seule une décision susceptible d'exercer une incidence sur le statut des organismes représentatifs des salariés, ou sur l'exercice des prérogatives et des missions qui leur sont confiées par la réglementation en vigueur, peut affecter les intérêts propres de tels organismes. Tel ne saurait être le cas d'une décision autorisant une concentration.
51 Par ailleurs, il convient de relever, ensuite, que l'argumentation avancée à titre subsidiaire par les requérants, selon laquelle la décision attaquée porte directement atteinte aux intérêts des salariés qu'ils représentent, dans la mesure où elle impose la cession de l'établissement de Pierval, ce qui entraînerait, d'une part, la perte d'une partie importante du patrimoine de Vittel et, d'autre part, la perte d'avantages collectifs et la suppression d'emplois, ne résiste pas davantage à l'examen. A cet égard, il convient de rappeler, à titre liminaire, que, aux termes du trente et unième considérant du règlement n° 4064-89, ce règlement "ne porte en aucune manière atteinte aux droits collectifs des travailleurs, tels qu'ils sont reconnus dans les entreprises concernées".
52 En ce qui concerne en particulier le démantèlement du patrimoine de Vittel, allégué par les requérants, le Tribunal estime qu'une décision imposant la cession d'une partie des actifs de l'entreprise concernée ne peut être considérée comme affectant de manière directe les intérêts des salariés de cette entreprise, au motif que le patrimoine de cette dernière constituerait une garantie du maintien de l'emploi des salariés, qui figurent parmi les créanciers de premier rang de l'entreprise, comme le relèvent les requérants. En admettant même qu'une décision importante d'ordre patrimonial, financier ou industriel, adoptée par une entreprise, puisse, dans certains cas, produire des effets sur la situation des salariés - ce qui n'est d'ailleurs pas établi, en l'espèce, à l'égard de la vente de l'établissement de Pierval par le groupe Nestlé -lesdits effets ne sauraient, en tout état de cause, présenter qu'un caractère indirect. Cette analyse est confirmée par la jurisprudence de la Cour, qui a jugé irrecevable une simple demande en intervention présentée par un syndicat dans le cadre d'une action judiciaire relative à l'allocation d'une indemnité à des entreprises, susceptible, en cas de succès, d'avoir un effet favorable sur la prospérité économique desdites entreprises et, par voie de conséquence, sur le niveau de l'emploi dans celles-ci, au motif que ledit syndicat ne justifiait que d'un intérêt indirect et lointain à l'allocation de cette indemnité (ordonnance du 8 avril 1981, Ludwigshafener Walzmühle Erling e.a./CEE, 197-80 à 200-80, 243-80, 245-80 et 247-80, Rec. p. 1041, points 8 et 9). En outre, s'agissant plus spécialement du préjudice qui résulterait, d'après les requérants, de la vente de l'établissement de Pierval à un prix prétendument dérisoire, il convient de rappeler que, ainsi que le président du Tribunal l'a déclaré dans son ordonnance du 6 juillet 1993, CEE Vittel et CE Pierval/Commission, précitée, point 26, le prix de cession de cet établissement, à supposer même qu'il puisse être qualifié de dérisoire, ne découle pas de la décision de la Commission, mais résulte des négociations que Nestlé a menées avec Castel sur la cession de l'ensemble des actifs que Nestlé s'est engagée à vendre.
53 Quant aux effets allégués sur le niveau et les conditions d'emploi dans les entreprises concernées, il importe de souligner que la réglementation destinée à garantir les droits des salariés, notamment en cas de concentration, fait obstacle, ainsi que cela sera démontré aux points suivants, à ce que la réalisation d'une opération de concentration entraîne, à elle seule, de tels effets. La production de tels effets présuppose donc l'adoption préalable, selon le cas, par les seules entreprises en cause ou par les partenaires sociaux, dans les conditions strictement définies par les règles applicables, de mesures autonomes par rapport à la concentration elle-même. Compte tenu notamment de la marge de négociation des divers partenaires sociaux, l'éventualité que de telles mesures ne soient pas adoptées n'est pas purement théorique, ce qui exclut de considérer que les représentants des salariés sont directement concernés par la décision autorisant la concentration (voir les arrêts de la Cour du 17 janvier 1985, Piraiki Patraiki e.a./Commission, 11-82, Rec. p. 207, et Cofaz e.a./Commission, précité).
54 Sous cet aspect, le caractère non inéluctable, à la suite d'une opération de concentration, des suppressions d'emplois et de l'altération des avantages sociaux reconnus aux salariés de Pierval soit par l'accord collectif en vigueur au sein de Vittel soit par leur contrat individuel, ressort clairement de la réglementation applicable. En effet, la directive 77-187 prévoit, en son article 3, le transfert, au cessionnaire, des droits et obligations résultant pour le cédant d'un contrat de travail ou d'une relation de travail existant à la date du transfert d'entreprise. En outre, cette même directive précise, en son article 4, paragraphe 1, premier alinéa, que "le transfert d'une entreprise... ne constitue pas en lui-même un motif de licenciement pour le cédant ou le concessionnaire".
55 A cet égard, il est d'ailleurs à noter que l'annulation de la décision de la Commission, en ce qu'elle impose la cession de l'établissement de Pierval, ne constituerait pas une garantie contre toute mesure de suppression d'emplois, dans les termes prévus par la loi. Dans ce contexte, le fait que la disposition, précitée, de l'article 4 de la directive 77-187 se poursuive en indiquant qu'elle "ne fait pas obstacle à des licenciements pouvant intervenir pour des raisons économiques, techniques ou d'organisation impliquant des changements sur le plan de l'emploi", confirme que de tels licenciements ne peuvent en aucun cas résulter directement d'une opération de concentration, mais nécessitent l'adoption de mesures autonomes, soumises à un régime identique à celui qui s'applique en dehors de toute concentration.
56 De même, en ce qui concerne plus particulièrement les allégations relatives à la perte des avantages sociaux dont bénéficient les salariés de Pierval, il y a lieu de relever que cette même directive 77-187 énonce, en son article 3, paragraphe 2, premier alinéa, que, "après le transfert, le cessionnaire maintient les conditions de travail convenues par une convention collective dans la même mesure que celle-ci les a prévues pour le cédant, jusqu'à la date de la résiliation ou de l'expiration de la convention collective ou de l'entrée en vigueur ou de l'application d'une autre convention collective". A cet égard, il y a lieu de rappeler que l'article L. 132-8 du Code du travail français prévoit, ainsi qu'il est constant entre les parties, que toute convention collective - destinée, conformément à la définition retenue par l'article L. 132-1 dudit code, à traiter de l'ensemble des conditions d'emploi - et tout accord collectif de travail - qui ne traite, d'après ladite définition, que de certaines de ces conditions - à durée indéterminée peut être dénoncé par les parties signataires dans les conditions prévues dans la convention ou dans l'accord. Lorsque la convention ou l'accord est dénoncé en raison notamment d'une fusion, d'une cession ou d'une scission, le même texte indique que cette convention ou cet accord continuera à s'appliquer intégralement jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle convention ou d'un nouvel accord ou, à défaut, pendant une durée minimale d'un an à compter de la dénonciation, étant entendu que les salariés concernés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis si la convention ou l'accord dénoncé n'a pas été remplacé à l'issue de cette période. Par ailleurs, les garanties relatives au maintien des avantages sociaux sont encore renforcées par l'article 4, deuxième alinéa, de la directive 77-187, susmentionnée, aux termes duquel, lorsque le contrat de travail est résilié du fait que le transfert de l'entreprise entraîne une modification substantielle des conditions de travail au détriment du travailleur, la résiliation est considérée comme intervenue du fait de l'employeur.
57 Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les contrats individuels en cours sont intégralement transférés à la nouvelle société. Quant à l'accord collectif en vigueur au sein de Vittel, il continuera à s'appliquer dans les conditions définies par l'article L. 132-8 du Code du travail, précité. A cet égard, il y a lieu de souligner que, d'après cet article, la cession d'une entreprise, comme tel est le cas en l'espèce, n'entraîne pas, en elle-même, la dénonciation ou une quelconque modification des conventions ou accords collectifs en vigueur. Si cette cession devait néanmoins être suivie d'une mise en cause de l'accord collectif, l'article L. 132-8, septième alinéa, du Code du travail français prévoit un régime identique à celui applicable à toute dénonciation par une ou plusieurs des parties signataires, en dehors de l'hypothèse d'un transfert d'entreprise, conformément aux dispositions de la directive 77-187 (voir, notamment, l'arrêt de la Cour du 12 novembre 1992, Watson Rask et Christensen, C-209-91, Rec. p. I-5755, points 26 et suivants).
58 Il en résulte que, dans la présente espèce, la cession de l'établissement de Pierval n'entraîne, en elle-même, aucune conséquence directe sur les droits résultant pour les salariés de leur contrat ou de leur relation de travail. En l'absence de tout lien de causalité directe entre l'atteinte prétendument portée à ces droits et la décision de la Commission qui subordonne l'autorisation de la concentration notamment à la cession de l'établissement de Pierval, les intéressés doivent disposer d'une voie de droit appropriée pour défendre leurs intérêts légitimes non pas au stade du contrôle de la régularité de ladite décision, mais à celui des mesures directement à l'origine des atteintes ainsi alléguées, susceptibles d'être adoptées par les entreprises et, le cas échéant, par les partenaires sociaux concernés, en dehors de toute intervention de la Commission. C'est, en effet, au stade de l'adoption de telles mesures, dont le contrôle relève de la compétence du juge national, qu'interviennent les garanties conférées aux salariés par les dispositions tant du droit interne que du droit communautaire, telles que, notamment, la directive 77-187 (voir également la proposition de directive du Conseil présentée par la Commission le 8 septembre 1994, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements en vue de refondre ladite directive, JO C 274, p. 10), ainsi que la directive 75-129-CEE du Conseil, du 17 février 1975, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs (JO L 48, p. 29), telle que modifiée par la directive 92-56-CEE du Conseil, du 24 juin 1992 (JO L 245, p. 3).
59 Pour l'ensemble des raisons qui viennent d'être exposées, les requérants ne peuvent pas être considérés comme directement concernés par la décision attaquée, sous réserve de la garantie des droits procéduraux qui leur sont conférés par le règlement n° 4064-89, au cours de la procédure administrative. En effet, il y a lieu de rappeler que, en règle générale, lorsqu'un règlement accorde des droits procéduraux à des tiers, ces derniers doivent disposer d'une voie de recours destinée à protéger leurs intérêts légitimes, conformément à une jurisprudence bien établie (voir notamment l'arrêt du 25 octobre 1977, Metro/Commission, précité, point 13). A cet égard, en ce qui concerne plus spécialement le contentieux des personnes physiques ou morales, il convient de relever, en particulier, que le droit des tiers qualifiés d'être régulièrement entendus, à leur demande, au cours de la procédure administrative, ne peut, en principe, être sanctionné par le juge communautaire qu'au stade du contrôle de la régularité de la décision finale de la Commission. Il s'ensuit que, bien que, dans la présente espèce, les développements qui précèdent fassent apparaître que, dans sa substance, la décision finale ne concerne pas directement les requérants, ces derniers doivent cependant se voir reconnaître qualité pour agir à l'encontre de ladite décision dans le but précis d'examiner si les garanties procédurales auxquelles ils étaient en droit de prétendre, au cours de la procédure administrative, en vertu de l'article 18 du règlement n° 4064-89, ont été méconnues, ainsi que l'allèguent les parties admises à intervenir au soutien des conclusions des requérants. C'est uniquement si le Tribunal devait constater une violation caractérisée de ces garanties, de nature à porter atteinte au droit des requérants de faire valoir utilement leur position au cours de la procédure administrative, s'ils en ont exprimé la demande, qu'il lui appartiendrait d'annuler cette décision pour violation des formes substantielles. En l'absence d'une telle violation substantielle des droits procéduraux des requérants, le seul fait, pour ces derniers ou pour les parties admises à intervenir au soutien de leurs conclusions, de se prévaloir, devant le juge communautaire, de la violation de ces droits au cours de la procédure administrative ne saurait entraîner la recevabilité du recours en ce qu'il est fondé sur des moyens tirés de la violation de règles matérielles, dès lors que, ainsi que le Tribunal l'a déjà établi, ci-dessus, la situation juridique des requérants n'est pas directement affectée par la teneur de la décision. C'est uniquement si cette dernière condition était remplie que les requérants seraient habilités, en vertu de l'article 173 du traité, à demander au Tribunal d'examiner la motivation et la régularité matérielle de la décision.
60 Le présent recours doit, dès lors, être déclaré irrecevable, dans la seule mesure où il ne tend pas à assurer la protection des garanties procédurales reconnues aux requérants durant la procédure administrative. Il appartient au Tribunal de vérifier, au fond, si, comme le soutiennent les parties intervenantes, la décision attaquée méconnaît ces garanties.
Sur le bien-fondé du moyen tiré de la méconnaissance des droits procéduraux des requérants
61 Les parties intervenantes soutiennent que la Commission n'a pas assuré, au cours de la procédure administrative, le respect des droits conférés aux représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées par l'opération de concentration en cause, dans la mesure où elle ne les a pas informés en temps utile de cette opération.
62 Une telle thèse ne saurait être accueillie. En effet, le règlement n° 4064-89 se limite à consacrer, en son article 18, paragraphe 4, le droit desdits représentants à présenter leurs observations, à leur demande, devant la Commission. Il ne fait peser sur cette institution aucune obligation d'information à l'égard des représentants des travailleurs des entreprises concernées, relative à l'existence du projet de concentration qui lui a été notifié, comme dans la présente espèce, par l'entreprise acquérant le contrôle d'une autre entreprise. A cet égard, il y a lieu de rappeler que, en cas de transfert d'entreprise, d'établissement ou de partie d'établissement, l'information des représentants des travailleurs incombe, en vertu de l'article 6 de la directive 77-187, susmentionnée, au cédant et au cessionnaire, le premier étant, en particulier, tenu de communiquer aux représentants de ses travailleurs en temps utile avant la réalisation du transfert les informations concernant le motif du transfert, ses conséquences juridiques, économiques et sociales pour les travailleurs ainsi que les mesures envisagées à l'égard de ces derniers.
63 Il s'ensuit que, à supposer même que les représentants reconnus des travailleurs des entreprises concernées par l'opération de concentration en cause n'ont pas été informés en temps utile, cette carence ne saurait être imputée à la Commission. C'est, en effet, aux autorités nationales compétentes et aux juridictions nationales qu'il appartient de veiller au respect, par les entreprises, de leur obligation d'information des organismes représentatifs des salariés. Dans la présente espèce, il ne saurait, dès lors, être reproché à l'institution défenderesse d'avoir porté atteinte aux droits procéduraux des requérants.
64 Dans ces conditions, la décision ne saurait être viciée du fait de la prétendue tardiveté de l'information des parties requérantes. Le présent recours doit, dès lors, être rejeté comme non fondé, en ce qu'il tend au contrôle du respect des droits procéduraux des requérants.
Sur les dépens
65 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, ce même article prévoit, en son paragraphe 3, que le Tribunal peut décider que chaque partie supportera ses propres dépens, pour des motifs exceptionnels.
66 S'agissant, dans la présente espèce, du premier recours formé par des organismes représentatifs des salariés des entreprises concernées par une opération de concentration, contre la décision de la Commission autorisant cette opération au titre du règlement n° 4064-89, il convient de condamner la Commission à supporter ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Chacune des parties principales supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.
3) Les parties intervenantes supporteront leurs propres dépens.