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Décisions

CCE, 16 janvier 1991, n° 91-50

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

IJsselcentrale

CCE n° 91-50

16 janvier 1991

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, vu le règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par l'acte d'adhésion de l'Espagne et du Portugal, et notamment son article 3, vu la demande déposée le 26 mai 1988 auprès de la Commission en application de l'article 3 du règlement n° 17 par NV IGMO à Meppel, Centraal Overijsselse Nutsbedrijven NV à Almelo, NV Regionaal Energiebedrijf Salland à Deventer et la commune de Hoogeveen, visant à faire constater l'infraction à l'article 85 commise par NV Samenwerkende Elektriciteitsproduktiebedrijven (ci-après dénommée "la SEP") et les sociétés productrices d'électricité aux Pays-Bas, après avoir donné à la SEP et aux producteurs d'électricité l'occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission conformément à l'article 19 paragraphe 1 du règlement n° 17 et au règlement n° 99-63-CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19 paragraphes 1 et 2 du règlement n° 17 du Conseil (2), vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, considérant ce qui suit :

I. LES FAITS

1. La plainte

(1) Le 26 mai 1988, la Commission a été saisie d'une plainte déposée, conformément à l'article 3 du règlement n° 17, par NV IGMO (intercommunaal Gasbedrijf Meppel en omstreken) de Meppel et la compagnie de distribution de la commune de Hoogeveen, actuellement fusionnées dans les sociétés Rendo NV, NV Regionaal Energiebedrijf Salland de Deventer et Centraal Overijsselse Nutsbedrijven NV de Almelo.

La plainte est dirigée contre IJC et trouve son origine dans les procédures civiles engagées en raison de l'application par IJC d'une interdiction à l'importation et à l'exportation combinée à une obligation d'achat exclusif, ainsi que de l'imposition d'un supplément de péréquation des coûts.

La plainte est fondée sur les trois parties suivantes :

1) l'interdiction explicite d'importer figurant tant dans la convention générale SEP de 1971 (article 2) que dans l'accord de coopération ("OVS") de 1986 (article 21) ;

2) l'obligation d'achat exclusif découlant des accords passés par les plaignantes avec IJC - en particulier de l'article 2 paragraphe 2 des conditions générales qui y sont applicables. Cette obligation d'achat, qui comporte implicitement une interdiction d'importer, découle cette fois, selon la plaignantes, notamment des stipulations de l'accord de coopération en la matière ;

3) le droit d'IJC de fixer les prix unilatéralement et le supplément de péréquation imposé de fait unilatéralement aux plaignantes par IJsselcentrale conformément à la décision de son conseil de surveillance du 26 octobre 1984.

La charge d'égalisation est une taxe imposée par IJsselcentrale afin d'éliminer les différences de coûts de distribution aux petits et gros consommateurs entre IJC, d'une part, et les distributeurs régionaux ou municipaux, d'autre part, et est basée sur le fait que IJsselcentrale approvisionne principalement des régions rurales tandis que les distributeurs régionaux ou municipaux approvisionnent principalement des zones urbaines.

Toutefois, l'application de cette charge n'est pas en cause dans la présente procédure encore que l'interdiction d'importer permette, à ce qu'affirment les plaignantes, d'imposer la charge d'égalisation.

Les entreprises plaignantes sont des sociétés locales de distribution qui sont elles-mêmes approvisionnées par une entreprise de distribution régionale, en l'espèce IJC.

2. Les entreprises d'électricité

(2) Actuellement, il existe aux Pays-Bas quatre producteurs d'électricité, à savoir : NV Elektriciteitsbedrijt Zuid-Holland (EZH) à Voorburg, NV Energieproduktiebedrijf UNA à Utrecht, NV Provinciale Zeeuwse Energie-Maastschappij à Middelburg, NV Elektriciteits-Produktiemaatschappij Zuid-Nederland EPZ à Eindhoven et NV Elektriciteitsproduktiemaatschappij Oost en Noord-Nederland (EPON) à Zwolle, et trente-huit compagnies de distribution.

Les entreprises de production sont des sociétés dont les parts sont détenues soit par les collectivités locales, c'est-à-dire les provinces et les communes, soit directement (dans le cas de EZH et de UNA), soit indirectement par le biais des entreprises de distribution qui desservent la région (dans le cas de EPZ et de EPON).

Les parts des entreprises de distribution, actuellement au nombre de cinquante-cinq, appartiennent également, directement ou indirectement, à des collectivités locales (communes et provinces) pour autant qu'il ne s'agisse pas de services publics.

(3) Ces entreprises, ou leurs prédécesseurs, ont créé le 3 juin 1949 la NV Samenwerkende Elektriciteitsproduktiebedrijven (la SEP).

La SEP est une société anonyme qui a pour but de structurer la collaboration entre producteurs d'électricité. A l'origine, elle avait pour tâche d'assurer une assistance mutuelle en cas de panne grâce à l'utilisation optimale du réseau d'interconnexion national et international.

Au total, les Pays-Bas ont actuellement quatre liaisons haute tension avec l'Allemagne et trois avec la Belgique. Toutes ces liaisons, à l'exception d'une (Musselkanaal-Lathen) qui appartient à Elektriciteitsbedrijjf voor Groningen en Drenthe (EGD), sont la propriété de la SEP. La liaison qui n'appartient pas à la SEP est mise à la disposition de cette société.

Selon les statuts de la SEP, peuvent seuls être actionnaires de la SEP des organismes de droit public ou des organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique, qui soit exploitent aux Pays-Bas une entreprise publique de production d'électricité soit y assurent la collaboration d'un groupe d'exploitants d'entreprises publiques productrices d'électricité.

Les tâches statutaires de la SEP sont les suivantes :

- la fixation d'un plan "électricité" commun,

- la gestion (principalement en tant que propriétaire) du réseau 380/220 kV,

- la conclusion d'accords avec des entreprises d'électricité étrangères concernant l'importation et l'exportation ainsi que l'utilisation des liaisons internationales du réseau d'interconnexion,

- l'achat en commun de combustibles pour la production d'électricité,

- la mise en commun des coûts énergétiques et des coûts de production,

- l'optimisation de la production nationale d'électricité.

L'entrée en vigueur de la loi sur l'électricité de 1989 a donné à ces tâches une base juridique plus générale (3).

3. Les accords

(4) L'accord de coopération OVS, signé le 22 mai 1986 par les prédécesseurs en droit des quatre producteurs actuels, d'une part, et par la SEP, d'autre part, a remplacé l'accord général SEP du 1er février 1971 et a une durée de validité de vingt-cinq ans. L'accord prévoit en son article 2 paragraphe 1 notamment que les participants doivent être actionnaires de la société (c'est-à-dire de la SEP). En outre, les participants doivent notamment être en possession d'une autorisation valable du ministre chargé de l'approvisionnement en électricité de construire et/ou d'exploiter un ou plusieurs moyens de production aux fins de la distribution publique d'électricité.

(5) L'importation et l'exportation sont régies plus particulièrement par l'article 21 de l'OVS libellé comme suit :

"1. La mise à disposition de puissance électrique et/ou la fourniture d'énergie électrique à et par des fournisseurs d'électricité établis en dehors des Pays-Bas est réservée à la société.

2. Dans les accords de fourniture qu'ils passent avec les entreprises distributrices d'énergie électrique, les participants sont tenus de stipuler - et responsables du respect de cette obligation - que ces dernières ne fourniront pas d'énergie électrique avec la puissance électrique correspondante éventuelle à des entreprises d'électricité établies en dehors des Pays-Bas et n'en recevront pas de ces dernières.

3. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 du présent article ne sont pas applicables aux livraisons ne dépassant pas un plafond fixé dans un règlement d'application arrêté conformément à l'article 32 du présent accord, qui ne sont effectuées que pour des raisons liées à la distribution locale d'énergie électrique."

(Le règlement d'application visé au paragraphe 3 qui concerne la fourniture des fermes situées près de la frontière, exempte de l'interdiction les livraisons d'une puissance de 5 000 kW maximum pour une tension de 15 kV.)

De plus, l'article 10 paragraphe 4 de l'OVS précise que :

"Les participants sont tenus - et responsables de l'application de cette disposition - de stipuler dans les accords de fourniture avec les distributeurs d'électricité que toute l'électricité d'une capacité nominale donnée, générée par leurs installations, ne sera délivrée à la compagnie qu'au travers du réseau du participant où l'installation en question est localisée. Cette capacité est au moins égale au seuil mentionné dans l'article 12 paragraphe 3."

L'ancien accord général SEP du 1er février 1971, remplacé par l'OVS, prévoyait déjà un régime tel que celui qui est mis en place par l'accord de coopération, notamment en ce qui concerne le plan "électricité", les liaisons d'interconnexion, la fourniture et le règlement et, implicitement, l'importation et l'exportation.

(6) Les conditions générales applicables à la livraison d'énergie aux communes ayant leur propre entreprise de distribution dans la zone concédée à IJC, en vigueur depuis le 1er avril 1965, prévoient en leur article 2 paragraphe 2 une disposition selon laquelle la commune s'engage "à s'approvisionner en énergie électrique exclusivement auprès d'IJC pour la distribution d'électricité sur son territoire et à n'utiliser cette énergie que pour son usage propre, ou pour les livraisons à des tiers, en vue de la consommation sur le territoire de la commune". Cette clause impose à la commune une obligation d'achat exclusif ainsi que l'interdiction de revendre à son tour à des tiers en dehors de son territoire. Conformément à l'article 13 paragraphe 1, IJC s'engage, outre quelques exceptions nommément précisées, à ne pas fournir d'énergie électrique à des tiers sur le territoire de la commune sans l'autorisation de celle-ci.

Les plaignantes dans la présente procédure qui agissent en qualité d'entreprises de distribution et clients de IJC, laquelle fournit uniquement en tant qu'entreprise de distribution (principale), appliquent elles aussi une obligation d'achat exclusif. Ainsi la commune de Deventer applique-t-elle à l'article 1er de l'accord d'abonnement pour les gros consommateurs la disposition suivante : "Le consommateur s'oblige à s'approvisionner auprès de la commune pour l'énergie électrique utilisée dans son entreprise à Deventer."

Dans les conditions générales types pour la livraison d'énergie électrique aux gros consommateurs de 1984 de la "Vereniging van Exploitanten van Elektriciteitssberdrijven in Nederland (VEEN), les entreprises de distribution prévoient, à l'article 19 paragraphe 2, une disposition qui est libellée comme suit :

"Il est interdit au consommateur, sans l'autorisation écrite de l'entreprise :

a) de s'approvisionner en énergie électrique auprès de tiers ;

b) d'exploiter ou de faire exploiter une installation de production parallèlement au réseau public ;

c) d'utiliser l'énergie fournie à d'autre fins que pour sa propre consommation."

Cette disposition entraîne également pour les clients une obligation d'achat exclusif et l'interdiction de revente.

(7) Avant l'entrée en vigueur de la "Elektriciteitswet" (loi néerlandaise sur l'électricité) de 1989, les pouvoirs publics accordaient couramment des concessions aux fournisseurs. La production et la distribution étaient souvent le fait d'une même société. C'est aussi le cas d'IJC, qui a reçu une concession par arrêté royal n° 54 du 13 juin 1918. Ces concessions portaient, comme dans le cas d'IJC, sur l'installation et l'exploitation d'équipements et de travaux pour produire, transporter, transformer, distribuer et fournir de l'électricité, à l'exception de ceux destinés au télégraphe et au téléphone et ne comportaient pas de droit d'exclusivité dans le territoire concédé, du moins dans le cas d'IJC. La concession comporte une obligation de fourniture. Si cette obligation n'est pas satisfaire, la concession peut être révoquée.

(8) Le 5 juin 1975, donc pendant la durée de validité de la convention générale SEP du 1er février 1971, un accord a été conclu entre l'Etat néerlandais, la NV SEP et les onze producteurs d'électricité qui existaient à cette date et qui étaient partie (avec la SEP) à la convention générale SEP. Cette première convention est appelée couramment le "convenant" de 1975. Ce "convenant" prévoyait pour l'essentiel l'obligation, pour la SEP, de présenter à l'approbation du ministre des affaires économiques le plan "électricité" qu'elle était chargée d'établir. Ce "convenant" est entré en vigueur le 3 juillet 1975 et reste applicable pour la durée de validité de l'OVS.

4. Les dispositions légales

(9) Le cadre législatif du marché de l'électricité aux Pays-Bas était jusque récemment très restreint. Seule une partie de la loi néerlandaise sur l'électricité du 22 octobre 1938 (Staatsblad 1938, 523) était entrée en vigueur. Les concessions octroyées par les pouvoirs publics aux fournisseurs n'étaient pas fondées sur cette législation. La loi susmentionnée, en vigueur jusqu'au 8 décembre 1989, n'interdisait pas aux entreprises autres que les fournisseurs d'importer elles-mêmes de l'électricité. Conformément à la loi du 10 décembre 1936 (Staatsblad 524), ces importations étaient toutefois subordonnées à une autorisation, qui était, en principe, accessible à tout le monde.

Les prix pratiqués au stade du consommateur final (prix maximaux) étaient, sous le régime juridique précédent, soumis à l'approbation du ministre des affaires économiques sur la base d'un accord entre les sociétés de distribution et les autorités néerlandaises. Les prix appliqués aux gros consommateurs étaient le résultat de négociations entre les organisations des gros consommateurs et les fournisseurs.

L'évolution qui se dessine sur le marché néerlandais se caractérise, d'une part, par une concentration encore plus poussée de la production - on prévoit qu'il ne restera bientôt plus que quatre sociétés de production - et, d'autre part, par une réglementation plus stricte du marché par la loi. Le 8 décembre 1989, la nouvelle loi sur l'électricité de 1989 est entrée en vigueur à l'exception de certaines dispositions pour lesquelles une période transitoire a été prévue. Ainsi un pas important vers un marché de l'électricité plus ouvert a été accompli aux Pays-Bas.

A maints égards, le régime actuellement prévu par l'OVS qui est décrit plus haut a reçu une base législative. Pour certains aspects, la loi instaure plus de liberté que l'OVS.

Les principales caractéristiques de cette loi qui intéressent la présente affaire sont les suivantes :

- En ce qui concerne la distribution nationale, l'article 2 prévoit que les titulaires d'une autorisation (c'est-à-dire les producteurs d'électricité assurant la distribution publique d'électricité qui exploitent des centrales électriques) et la société désignée (4) doivent, dans le respect des dispositions prises par et en vertu de la loi, veiller en commun au fonctionnement fiable et efficace de la distribution publique d'électricité dans des zones rurales aux coûts les plus bas possible et de manière responsable du point de vue de l'intérêt commun.

- La société désignée établit tous les deux ans un plan "Electricité" où elle indique l'évolution de la distribution d'électricité aux Pays-Bas (article 15 paragraphe 1).

- Quiconque exploite une ou plusieurs centrales électriques pour les besoins de la distribution publique d'électricité ne peut livrer l'électricité, qu'il produit ou non dans ces centrales et qui est disponible lorsque la capacité de production excède un certain plafond, qu'à la société désignée et ne peut livrer l'électricité qui lui est fournie par cette dernière qu'à des distributeurs (article 11 paragraphe 1).

- Quiconque est le propriétaire d'une entreprise de distribution a droit, nonobstant toute disposition contraire, à la fourniture d'électricité et à la mise à sa disposition de puissance électrique par le titulaire de l'autorisation (article 12 paragraphe 1). Cet article contient donc une obligation de livraison des producteurs à l'égard des distributeurs. En outre, l'article 12 paragraphe 3 dispose que quiconque peut, nonobstant toute disposition contraire, faire valoir un droit à la fourniture d'électricité et à la mise à sa disposition de puissance électrique à l'égard de quiconque livre de l'électricité à des consommateurs finals dans le cadre du réseau public de distribution sur le territoire où il demande cette fourniture ou cette mise à disposition.

Cette disposition contient donc une obligation de livraison des distributeurs à l'égard des consommateurs finals.

- La SEP, en tant que "société désignée", est la seule à pouvoir importer de l'énergie électrique destinée à la distribution publique (article 34) à l'exception de l'électricité fournie avec une tension inférieure à 500 V. Par conséquent, il est interdit aux distributeurs d'importer de l'électricité destinée à la distribution publique étant donné que la SEP en a obtenu le droit exclusif en tant que "société désignée". En revanche, certains consommateurs finals pourront importer de l'énergie électrique pour leur propre consommation (découle de l'article 34) (2).

- Les gros consommateurs privés ne seront plus liés aux distributeurs locaux par une obligation d'achat exclusif à leur égard (article 13 paragraphe 2) (5).

- Les entreprises distributrices et les gros consommateurs qui estiment que leur entreprise de production ou, selon le cas, de distribution est trop chère peuvent s'adresser (aux Pays-Bas) à un autre fournisseur (qui exerce généralement ses activités en dehors de leur territoire) ; cette possibilité est intitulée "horizontaal winkelen" (achats horizontaux) (6).

- Il est prévu que les consommateurs peuvent produire eux-mêmes du courant et en redistribuer les excédents à des entreprises distributrices (article 41).

- Quiconque exploite, au profit du réseau public, des lignes pour le transport d'électricité, y compris les transformateurs, postes de sectionnement et autres équipements connexes, est tenu de faire offre à quiconque en fait la demande écrite pour transporter pour ce dernier de l'électricité en faisant usage de ces lignes avec les équipements, pour autant qu'il s'agisse d'électricité destinée au réseau de distribution publique, d'électricité destinée à de gros consommateurs spéciaux et d'électricité importée (article 47 paragraphe 1) (7).

- Quiconque est propriétaire d'une entreprise de distribution est tenu d'accepter une offre de fourniture d'électricité si cette offre est faite par :

a) une personne physique ou morale qui produit cette électricité dans la zone dans laquelle l'électricité est livrée aux consommateurs par le distributeur en question, ou par un distributeur auquel ce distributeur fournit de l'électricité ;

b) un distributeur auquel le distributeur en question fournit de l'électricité.

Cette obligation n'est pas applicable à l'électricité :

a) produite dans une centrale électrique ;

b) produite par une personne physique ou morale qui, là où elle est établie, dispose également d'électricité importée (article 41).

- Il est interdit à la société désignée de conclure sans l'approbation du ministre un accord prévoyant la mise à la disposition de cette société d'une réserve de puissance électrique hors des Pays-Bas. Le ministre ne peut refuser son approbation à un tel accord que si tel est l'intérêt d'une bonne alimentation en électricité (article 35).

- La nouvelle loi sur l'électricité de 1989 élargit la possibilité pour les distributeurs de produire de l'électricité au niveau local au moyen de leurs propres capacités d'autoproduction : en tout cas, l'exploitation d'une installation autonome de production d'une puissance de 25 MW maximum est autorisée, alors que l'autorisation de construire ou d'exploiter une installation autonome de production d'une capacité plus élevée ne peut être refusée que si certaines exigences techniques ne sont pas respectées (article 40).

- Etant donné que la loi sur l'électricité de 1989 ne réglemente pas l'exportation, on peut considérer que celle-ci est libre, et cela tant pour les distributeurs que pour les consommateurs finals. Toutefois, cette loi ne prévoit pas d'obligation de transport pour l'exportation, contrairement à ce qui se passe pour l'importation.

La loi sur l'électricité de 1989 est entrée en vigueur le 8 décembre. Elle dispose en outre que certains articles et, pour ce qui concerne la présente affaire, les articles 11 et 34 entrent en vigueur le 1er juillet 1990 (article 61), que les articles 2 à 11 de la loi sur l'électricité de 1938 (Staatsblad 1938, 523) sont abrogés et que la loi du 10 décembre 1936 (Staatsblad 524) est abrogée (articles 58 et 59).

5. Consommation, importation et exportation d'électricité et électricité autoproduite aux Pays-Bas

(10) La consommation d'énergie électrique aux Pays-Bas est couverte par la production des compagnies d'électricité responsables de la distribution publique, par de l'énergie importée et par l'énergie produite par les usagers eux-mêmes.

EMPLACEMENT TABLEAU

Le chiffre d'affaires de la consommation intérieure représentait en 1988 environ 8,3 milliards de florins néerlandais sur la base des prix à la consommation finale (8).

Outre les importations, la quantité d'énergie autoproduite est considérable ; elle a augmenté ces dernières années pour atteindre environ 15,6 % de la production totale en 1988 (9).

En outre, les autoproducteurs revendent une quantité considérable au réseau public, soit, en 1988, 3 % environ de la consommation intérieure et 18 % de l'énergie électrique autoproduite.

Le solde des échanges avec l'étranger pour les années 1984 à 1988 démontre que les Pays-Bas sont importateurs nets. Ces échanges importations/exportations ont eu lieu jusqu'en 1985 par l'intermédiaire de quatre connexions internationales ; à l'heure actuelle il y a sept interconnexions de ce type. De plus amples informations figurent dans le tableau.

(11) La gestion technique des réseaux de connexion internationaux entre les Pays-Bas et d'autres pays se fait dans le cadre de l'Union pour la coordination de la production et du transport de l'électricité (UCPTE) dont font partie, outre les Pays-Bas, notamment la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse. Ce trafic est donc techniquement coordonné depuis plus de trente ans par une structure de droit privé des entreprises (nationales) d'électricité, lesquelles passent elles-mêmes des accords commerciaux sur les échanges d'énergie électrique fondés sur trois types de collaboration :

- échange d'heure en heure sur la base des coûts,

- contrats (généralement à court terme) pour transferts nets,

- accords plus permanents, comme dans le cas d'une centrale en propriété commune située dans un pays limitrophe.

Environ 8 % de la consommation totale des pays adhérents est échangée pour ces réseaux d'interconnexion (10).

La collaboration est donc fondée sur la coopération volontaire entre monopoles nationaux et n'a pas de caractère obligatoire.

6. Les évolutions des importations d'électricité aux Pays-Bas

(12) Le réseau néerlandais d'électricité est relié à des réseaux d'interconnexion étrangers, c'est-à-dire à ceux d'autres Etats membres, par des lignes qui appartiennent à la SEP ou sont mises à la disposition de la SEP qui les gère. Selon l'année, en moyenne annuelle, les Pays-Bas sont importateurs nets d'une quantité d'électricité représentant 4 à 9 % de leur consommation intérieure.

La SEP établit régulièrement des plans "électricité" qui contient notamment des prévisions en matière d'importation et d'exportation d'énergie électrique et une estimation en matière d'énergie produite par les autoproducteurs industriels. L'OVS prévoit à cet égard des règles spécifiques.

(13) Dans le plan "électricité" 1989-1998, la SEP prévoit les importations futures escomptées. C'est ainsi qu'on peut lire à la page 8 de ce plan :

"Un accord a pu être réalisé avec des fournisseurs étrangers sur des contrats d'importation avec garantie de puissance pour une puissance de 1 050 MW. Il est prévu 300 MW pour la période qui commence en 1996 et se termine en 2006 et 750 MW pour la période commençant en 1997 et se terminant en 2008. [...] Avec les importations garanties déjà convenues précédemment avec VEW, les possibilités d'importation sont ainsi exploitées au maximum."

On peut lire en outre à la page 39 du même plan :

"Importation d'électricité

L'une des mesures utiles qui ont été mises en place pour couvrir provisoirement une partie des besoins en puissance nouvelle a consisté à passer des accords d'importation pour une période limitée avec des garanties en ce qui concerne la puissance mise à disposition. Pour la période 1990-2000, une livraison garantie avait déjà été convenue avec VEW, encore que pour d'autres raisons. Pour la période à compter de 1993, elle concerne une puissance de 800 MW.

Après achèvement du réseau de 380 kV, actuellement en cours de réalisation, ainsi que du raccordement à ce réseau de 380 kV de la connexion Meeden-Diele, avec le réseau d'Allemagne du nord, décidé dans ce plan, il devrait en principe être possible de couvrir des besoins en puissance d'environ 2 000 MW au moyen d'importations avec garantie de puissance. En outre, les lignes d'interconnexion avec l'étranger continueront à jouer leur rôle d'assistance mutuelle et d'échange sur la base du marché spot.

[...]"

7. L'achat d'électricité à l'étranger par Elektro-Schmelzwerk delfzijl BV (ESD)

(14) Cette entreprise, établie à Delfzijl, est une filiale du groupe Wacker-Chemie qui a son siège à Munich. ESD a acheté de l'électricité en Allemagne entre 1982 et 1987 au moyen de la ligne d'interconnexion internationale Musselkanaal-Lathen. Les importations ont eu lieu à la demande de ESD mais c'est en fait la SEP qui a agi comme importateur. Ces importations se sont heurtées à des difficultés en 1987, qui étaient, selon la SEP, d'ordre technique. De ce fait, ESD a alors exprimé le souhait d'importer directement elle-même, et non plus par l'intermédiaire de la SEP. Lorsqu'il s'est avéré qu'elle ne pouvait le faire sans autorisation en vertu de la loi susmentionnée de 1936, ESD a sollicité cette autorisation qu'elle a obtenue du ministre des affaires économiques le 23 janvier 1987. Le ministre a fait savoir par lettre du 23 janvier 1987 à la deuxième chambre que la SEP ne souhaitait pas continuer à importer pour ESD durant 1987 bien que cela eût été possible sur le plan technique (par exemple par la connexion internationale Meeden-Diele). Dans sa lettre, le ministre précise qu'en cas de nouvelle importation ESD dépendra de la bonne volonté de la SEP, mais que celle-ci émet de "sérieuses réserves" à ce sujet.

(15) Il ressort de la lettre en date du 17 février 1987 adressée par la SEP au ministère que la SEP a été désagréablement surprise par l'octroi de l'autorisation et qu'elle n'avait elle-même consenti qu'une importation temporaire "en faveur" de ESD. La SEP considérait que cette importation se ferait moyennant "son attribution spécifique" à un client particulier.

Il s'agissait donc toujours d'importations pour les besoins d'un client et non par celui-ci. La SEP faisait observer dans la même lettre que les gros consommateurs spéciaux avaient la possibilité d'obtenir un "tarif dérogatoire" si bien que les importations ne constitueraient plus une solution de rechange (11).

(16) Dans sa lettre du 5 mars 1987, le ministère constate que la possibilité d'importations effectuées par les clients eux-mêmes a été plusieurs fois discutée mais qu'à chaque fois la SEP a expressément rejeté cette possibilité, et il insiste encore une fois auprès de la SEP afin qu'elle importe pour le compte de ESD. La lettre mentionne aussi la pratique "d'affectation spécifique" de l'électricité et constate que l'utilisation de cette terminologie se situe au centre de la politique de la SEP, notant que seule la SEP importe et, en tant que monopoleur décide si un consommateur individuel peut se voir attribuer une partie de l'électricité importée. En réponse, la SEP précise, dans sa lettre du 17 mars 1987, notamment que l'application de l'article 27 de l'OVS (tarif dérogatoire pour un gros consommateur spécial) rendrait superflues "les importations par des tiers" dès lors que la catégorie des gros consommateurs spéciaux manifesterait de l'intérêt à cet égard, ce que la SEP escomptait.

Par lettre du 13 octobre 1987, la SEP a offert à ESD d'importer à son compte de l'électricité produite par la société d'électricité allemande PREAG, qui serait livrée par la ligne Meeden-Diele. Les conditions étaient les suivantes : la SEP importait en vue de la livraison à EPON et ses importations concernaient exclusivement ESD. La SEP facturait les coûts de transport et autres frais.

La SEP faisait en outre savoir qu'elle pourrait offrir un tarif spécial aux gros consommateurs après le 1er janvier 1988 et conseillait par conséquent à ESD de ne convenir d'importations éventuelles que jusqu'à cette date.

Par lettre du 14 octobre 1987, ESD déclarait à la SEP qu'elle acceptait cette offre, vu l'urgence, la durée de validité du contrat expirant au 1er avril 1988, avec option jusqu'au 1er janvier 1989. On constate donc que ESD n'a pas fait usage de l'autorisation d'importer directement qui lui avait été octroyée mais a continué à acheter par l'intermédiaire de la SEP.

C'est aussi ce qui ressort de la lettre adressée par ESD à la SEP le 30 décembre 1987, dans laquelle ESD se déclare d'accord pour s'approvisionner auprès de la société de distribution EGD (Elektriciteitsbedrijf voor Groningen en Drenthe) pendant le premier trimestre de 1988. ESD continue à s'intéresser aux importations, à ce qu'elle déclare dans sa lettre, et assisterait volontiers, en tant qu'intéressée directe, aux négociations sur les importations, si celles-ci reprenaient.

La pratique de la SEP décrite ci-dessus est en cohérence avec sa conception de la fonction de "planning" telle que décrite dans sa lettre du 22 septembre 1988 adressée à la Commission. Elle est liée à son obligation de fourniture vis-à-vis de ses consommateurs finals. Le monopole d'importation accordé à la SEP en est la conséquence logique et, dès lors, importations et exportations doivent être intégrées dans la fonction de planification des capacité, laquelle est nécessaire du fait de l'obligation de fourniture.

8. "Avantages liés à l'importation"

(17) Ainsi qu'il ressort des rapports annuels de la SEP depuis 1984 au moins, la SEP a constitué une réserve financière à partir de ce qu'elle appelle les "avantages liés à l'importation". Il s'agit apparemment d'une réserve, formée par la différence entre les coûts de l'énergie électrique importée par la SEP et le coût de l'électricité générée aux Pays-Bas. Ceci signifie que la SEP ne répercute pas, ou du moins pas totalement, sur les consommateurs, le prix inférieur qu'elle paie pour l'énergie électrique importée. De plus, ceci signifie que les consommateurs privé pourraient tirer un bénéfice des importations.

En page 37 du rapport annuel de 1985, il est dit que cette réserve était destinée à limiter autant que possible à l'avenir des hausses brutales des tarifs. En 1985, environ 73 millions de florins néerlandais tirés des avantages liés à l'importation ont été ajoutés à cette réserve.

Cette réserve s'élevait en 1985 à environ 277 millions de florins néerlandais et le rapport annuel mentionne que, sur cette somme, 193 millions de florins néerlandais seront affectés à une destination indiquée par le ministre des affaires économiques. Au cours de l'année qui fait l'objet du rapport, les importations provenaient principalement de France (EDF) et d'Allemagne de l'Ouest (RWE) et, en moindre quantité, de Belgique et de Suisse.

Pour 1986, il est dit dans le rapport annuel que la réserve de péréquation des tarifs, qui s'élève à environ 341 millions de florins néerlandais, sera affectée à raison d'environ 235 millions de florins néerlandais à un but à fixer par la ministère des affaires économiques. Selon le rapport annuel, les avantages liés aux importations d'électricité s'amenuisent fortement et tendent à disparaître du fait que les prix néerlandais et étrangers se retrouvent au même niveau.

(18) Les rapports annuels de 1987 et 1988 ne mentionnent plus les profits tirés des importations comme source de constitution de la réserve de péréquation des tarifs. En 1988, cette réserve s'élevait à environ 381 millions de florins néerlandais dont environ 350 millions devraient également recevoir leur destination du ministre des affaires économiques.

Le dernier rapport annuel pour 1988 précise ce qui suit (page 30) en ce qui concerne la production et les importations :

"L'augmentation de la consommation est presque totalement compensée par le développement des importations. Les importations d'électricité ont atteint un niveau total de 5 840 GWh, soit environ 9 % de la consommation du pays. Le solde des importations n'avait jamais atteint un niveau aussi élevé."

(19) La Commission n'a pas connaissance de cas dans lesquels les exportations d'électricité par d'autres que par la SEP ont été entravées dans le passé. Au contraire, il existe même un cas d'exportation effective par le distributeur Provinciale Limburgse Elektriciteits-Maatschappij, lequel approvisionne depuis peu Vereinigte Glaswerke GmbH (VEGLA) à Aix-la-Chapelle en Allemagne. Selon la SEP, cette situation n'est pas criticable dans la mesure où VEGLA s'approvisionne grâce à sa propre ligne à partir d'un point d'alimentation situé sur le territoire néerlandais. On peut en déduire que la SEP considère qu'il n'y a pas d'importation tant que le point d'approvisionnement du consommateur se trouve localisé sur le territoire néerlandais.

9. L'OVS et l'entrée en vigueur de la loi sur l'électricité de 1989

(20) Bien que ladite loi soit entrée en vigueur le 8 décembre 1989, les dispositions de l'article 34 qui portent sur les importations sont applicables depuis le 1er juillet 1990.

Entre-temps, l'article 21 de l'OVS serait maintenu, ainsi que la SEP l'avait fait savoir à la Commission par lettre du 15 décembre 1989, et, selon la SEP, cet article ne serait pas adapté en fonction de la nouvelle loi, même après le 1er juillet 1990. A la connaissance de la Commission, cet article n'a pas encore été adapté. Il en va de même quant aux termes et conditions générales de la livraison d'électricité aux gros consommateurs de VEEN. La disposition en question s'applique donc tant à la période précédant l'entrée en vigueur de la loi sur l'électricité de 1989 qu'à la période subséquente.

L'objet direct de la présente décision est l'article 21 de l'OVS dans la mesure où il se rapporte, ou est appliqué par la SEP, aux importations faites par des consommateurs privés et où cette disposition a pour effet, par le contrôle exercé par la SEP sur les réseaux d'interconnexion, d'entraver les importations et les exportations faites par ces consommateurs ainsi que les exportations par les distributeurs.

II. APPRECIATION JURIDIQUE

A. Article 85 paragraphe 1

1. Accord entre entreprises

(21) L'OVS est un accord entre entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1. Il doit être examiné en tenant compte du fait que les quatre sociétés productrices d'électricité sont actionnaires de la SEP et qu'elles collaborent par le biais de cette filiale commune.

L'OVS est un accord relevant exclusivement du droit privé. En dépit de l'influence des pouvoirs publics néerlandais sur la planification et la production d'électricité pour la distribution publique, rien n'indique que l'OVS aurait été passé sous la pression des autorités. De même, le "convenant" susmentionné passé entre l'Etat et les producteurs d'électricité n'enlève rien à la responsabilité propre de ces derniers. La convention générale SEP, qui a précédé l'OVS, est du reste antérieure à ce "convenant".

(22) La SEP a fait valoir à ce propos que les producteurs d'électricité participants forment ensemble une unité économique parce qu'ils font partie du "système unique et indivisible de la distribution publique d'électricité". L'article 21 de l'OVS aurait en réalité pour objet de mettre en œuvre une répartition des tâches, certaines d'entre elles lui étant confiées en tant qu'organisme central. La SEP excipe à ce propos de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 juillet 1984, dans l'affaire 170-83, Hydrotherm contre Compact (12). La SEP conclut qu'il n'existe donc aucune virtualité de concurrence entre les participants, si bien que l'article 85 ne saurait être applicable.

(23) Cette thèse doit être rejetée. Certes, l'article 85 ne vise pas les accords entre entreprises qui, en tant que sociétés mères et sociétés filiales, appartiennent à un même groupe, si ces entreprises forment une unité économique où la filiale ne peut déterminer de façon autonome son comportement sur le marché et si ces accords visent une répartition interne des tâches entre les entreprises [voir arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 4 mai 1988, Bodson (13)], mais tel n'est pas le cas en l'espèce.

(24)D'abord, les quatre participants n'appartiennent pas à un même groupe. Il s'agit de personnes morales ayant une organisation distincte et qui ne sont pas contrôlées par une même personne physique ou morale. Chaque société de production assure de façon autonome sa propre gestion.On ne voit pas sinon comment expliquer les différences de prix de l'électricité fournie par chacune d'entre elles qui font qu'il peut être intéressant, pour les distributeurs, de s'approvisionner dans une autre zone (pratique précitée des "achats horizontaux"). Cette description s'applique à la situation instaurée par la loi sur l'électricité de 1989, qui autorise en effet expressément les "achats horizontaux".

Le fait que les producteurs fassent tous partie du système unique et indivisible de la distribution publique ne modifie en rien les constatations qui précèdent. Les sociétés de distribution font elles aussi partie dudit système, mais on ne voit pas de quelle manière elles formeraient elles aussi, de ce seul fait, une unité économique avec les sociétés de production.

Enfin, on ne peut dire que la SEP forme elle-même une unité économique avec une ou plusieurs sociétés de production. C'est au contraire une entreprise commune (joint-venture) contrôlée conjointement par les sociétés mères.

2. Restriction de la concurrence

(25) L'article 21 de l'OVS, qui fait l'objet de la présente décision, contient une interdiction d'importation et d'exportation d'énergie électrique effectuées par des entreprises autres que la SEP :

- au niveau horizontal : l'interdiction faite aux sociétés de production d'importer ou d'exporter (paragraphe 1),

- au niveau vertical : l'obligation des sociétés de production de répercuter cette interdiction sur leurs sociétés de distribution par le biais de leurs accords de livraison (paragraphe 2).

Ces interdictions constituent une restriction de la concurrence.

(26) En outre, les parties à l'OVS se sont engagées, conformément à son article 10 paragraphe 4, à stipuler dans leurs accords de livraison que les sociétés de distribution revendent à la SEP toute l'énergie qu'elles produisent (à raison d'une puissance minimale par lieu d'implantation égale ou supérieure à 5 MW) par l'intermédiaire de la partie à l'accord établie dans la zone d'approvisionnement dans laquelle l'installation en question est située. Les sociétés de distribution étant ainsi entravées dans leurs possibilités d'importer ou de fournir directement aux clients la puissance qu'elles produisent au niveau local, cette production décentralisée ne constitue par une solution de rechange aux importations interdites par l'article 21.

Par conséquent, l'article 10 paragraphe 4 de l'OVS renforce l'effet restrictif de l'article 21.

(27) Dans la procédure administrative, la SEP a souligné que l'article 21 ne contiendrait pas d'interdiction d'importer ou d'exporter pour d'autres que des sociétés distributrices. Après enquête, la Commission est au contraire parvenue à la conclusion que la façon dont la SEP applique en pratique cet article 21 dans l'ensemble de la distribution d'électricité aux Pays-Bas lui permet en fait d'exercer un contrôle total sur les importations et les exportations.

(28) A ce propos, il convient de rappeler que les distributeurs imposent une obligation d'achat exclusif à leurs clients (généralement des producteurs locaux d'énergie), et ces derniers, agissant de même, à leur tour avec leurs propres clients (gros consommateurs), par des conditions générales de livraison, ce qui a pour effet d'exclure les importations. Les distributeurs qui imposent cette obligation d'achat exclusif sont eux-mêmes liés par une obligation similaire auprès des producteurs réunis dans la SEP. Ainsi cette obligation d'achat imposée par les producteurs est répercutée par les sociétés de production, si bien que les gros consommateurs qui achètent au réseau public ne peuvent importer parallèlement. Ceci ressort aussi du fait que ces obligations d'achat figurent dans les conditions générales de livraison de l'énergie électrique aux gros consommateurs établies par VEEN en 1984, qui sont généralement appliquées par tous les distributeurs. Ces obligations d'achat exclusif répercutées en aval constituent par conséquent un tout cohérent avec l'article 21 de l'OVS tel qu'il est appliqué par la SEP et par les producteurs ; par conséquent, ces clauses des conditions générales et l'article 21 forment un tout qui s'applique à la fois mutuellement entre les producteurs et, finalement, par l'intermédiaire des sociétés de distribution, entre producteurs et consommateurs industriels privés.

(29) En deuxième lieu, on notera que la SEP possède et/ou gère les réseaux d'interconnexion internationaux par lesquels doivent se faire toutes les importations et exportations, en vue de la distribution tant publique que privée. Les lignes privées appartenant aux clients ne constituent pas une véritable alternative.

La SEP importe elle-même des quantités substantielles d'électricité, notamment d'autres Etats membres (voir considérants 10 et suivants). En principe, il est possible techniquement de mettre les liaisons à la disposition d'importateurs privés moyennant une rémunération raisonnable et dans la mesure où la SEP a une capacité disponible suffisante, comme la loi sur l'électricité de 1989 le prévoit à présent. Il s'est avéré toutefois que la SEP n'est pas disposée à mettre à disposition ses lignes de transport. L'affaire ESD (voir considérants 14 à 16) en est une bonne illustration : ce n'est pas ESD, mais la SEP qui a finalement assuré les importations en provenance d'Allemagne. Il ressort de la correspondance susmentionnée échangée entre la SEP et le ministère des affaires économiques que la SEP était opposée à des importations directes par ESD et que les importations faites par la SEP elle-même pour les besoins de ESD étaient considérées comme une mesure temporaire. On peut lire dans la lettre adressée par ESD à la SEP en date du 30 décembre 1987 que la SEP a empêché les contacts entre ESD et le fournisseur allemand. En tout cas, il apparaît que la SEP voulait, et veut toujours, se réserver les importations, même à titre de solution temporaire. Comme ultime solution, la SEP s'était résolue à appliquer un tarif différentiel qui était de toute façon si favorable que ESD a renoncé à importer et a accepté de s'approvisionner auprès de EGD.

La SEP applique ainsi l'article 21 de l'OVS de manière à empêcher en fait les consommateurs industriels privés d'importer eux-mêmes de l'électricité. Ce faisant, elle exige donc pour elle-même un monopole de fait des importations. Notons du reste à ce propos que le refus absolu de la SEP de mettre ses lignes à disposition peut être considéré comme un accord ou une pratique concertée entre les sociétés de production parties à la SEP, ce qui peut constituer une infraction distincte à l'article 85.

(30) En troisième lieu, la SEP a elle-même déclaré qu'on ne peut pratiquer de distinction entre l'électricité importée destinée à l'autoconsommation et l'électricité destinée à la distribution publique. En effet, en établissant sa planification, la SEP doit tenir compte des importations. En pratique, un consommateur final qui a l'intention d'importer devra de toute façon en faire part en temps utile au fournisseur avec lequel il a un contrat de livraison. La SEP en sera informée parce que sa collaboration est indispensable pour le transport sur les connexions internationales et le réseau de haute tension. Les consommateurs finals ne peuvent rétrocéder au réseau public des excédents de leurs importations d'énergie.

(31) La Commission conclut que l'article 21 de l'OVS permet à la SEP de contrôler les importations et les exportations d'électricité dans l'intérêt de ses actionnaires. La possibilité théorique des utilisateurs finals d'importer eux-mêmes est donc rendue illusoire dans la pratique et ils n'ont donc plus d'accès à d'autres sources d'approvisionnement.

3. Influence sur le commerce entre Etats membres

(32) L'interdiction d'importer et d'exporter figurant à l'article 21 peut affecter sensiblement le commerce entre Etats membres, d'autant plus que l'OVS a été conclu pour une période de vingt-cinq ans et qu'il s'applique à la totalité du territoire néerlandais. En outre, ainsi qu'il est dit plus haut, il entrave les importations effectuées par des consommateurs finals industriels d'une manière incompatible avec la formation d'un marché commun de l'énergie.

B. Le fonctionnement de l'OVS dans le cadre de la loi sur l'électricité de 1989

(33) Selon la SEP, l'article 21 de l'OVS reste applicable même après l'entrée en vigueur de la loi sur l'électricité de 1989, et notamment son article 34. La SEP considère manifestement que la nouvelle loi n'a en rien modifié l'article 21 de l'OVS. La Commission formule à cet égard les observations suivantes :

1. Importations

(34) L'article 34 de la loi sur l'électricité de 1989 interdit les importations d'électricité destinées à la distribution publique par d'autres que la SEP. En revanche, les importations qui ne sont pas destinées à la distribution publique ne sont plus soumises à autorisation préalable. Les importations par les consommateurs finals, surtout les consommateurs industriels, sont donc libres, si elles sont destinées à leur propre consommation : l'électricité importée ne peut être revendue à des tiers (article 37 paragraphe 1 de la nouvelle loi), ni être rétrocédée à la distribution publique [article 41 paragraphe 2 sous b)].

L'article 47 paragraphe 1 sous c) impose dorénavant une obligation de transport pour toute importation d'énergie : la SEP doit donner à l'importateur l'accès au réseau de connexion à des conditions raisonnables, à condition que la capacité disponible soit suffisante.

Sous le nouveau régime, le consommateur final industriel a donc bien la possibilité d'importer mais reste pour ce faire dépendant sur le plan technique de la SEP, qui, du fait de sa maîtrise du réseau de haute tension, peut toujours entraver ces importations. Ce cas pourrait notamment se présenter lorsque le réseau est saturé du fait des importations d'électricité effectuées par la SEP elle-même.

(35) Contrairement à ce qu'affirme la SEP, l'article 21 n'est donc pas repris comme tel dans la loi. Si tel était le cas, l'article 21 serait devenu sans objet. Le fait que la SEP ait voulu maintenir ledit article indique donc que l'article 21 garde toute sa portée par rapport à la loi. Tout ceci confirme la Commission dans sa position selon laquelle l'article 21 est appliqué d'une manière qui outrepasse la loi.

2. Exportations

(36) La loi sur l'électricité de 1989 ne fixe pas de règles en ce qui concerne l'exportation d'électricité, sauf sur l'obligation faite aux producteurs de fournir l'électricité exclusivement à la SEP (article 11). Interrogé à ce propos, le gouvernement néerlandais a fait savoir à la Commission que les exportations des Pays-Bas sont totalement libres. Selon le gouvernement néerlandais, outre la SEP, les sociétés de distribution et les consommateurs privés peuvent donc exporter. Cette disposition s'appliquerait tant pour l'électricité fournie par le réseau public que pour l'électricité autoproduite.

(37) Or, tout comme l'importateur, l'exportateur reste dépendant de la SEP pour le transport. La loi sur l'électricité de 1989 ne contient pas d'obligation en matière de transport pour les besoins d'exportation. L'exportateur potentiel devra donc s'entendre avec la SEP et avec les propriétaires étrangers de réseaux : la SEP conserve donc un rôle clé. La façon dont elle remplit ce rôle dépend de la façon dont elle applique l'article 21 de l'OVS.

3. Conclusion

(38) Il y a lieu de conclure que le maintien de l'article 21 de l'OVS en liaison avec le régime instauré par la nouvelle loi constitue encore toujours une infraction à l'article 85.

C. L'article 90 paragraphe 2 : distribution non publique

(39) Aux termes de l'article 90 paragraphe 2, les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général sont soumises aux règles du traité, et notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait à la mission particulière qui leur a été impartie. De plus, le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté.

La SEP fait valoir cette exception prévue à l'article 90 paragraphe 2. Elle affirme que le secteur de l'électricité présente des caractéristiques particulières : d'une part, l'obligation de fournir une garantie de livraison et, d'autre part, et indissolublement lié à cette garantie, le contrôle sur la production, les importations et les exportations.

1. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général

(40) La SEP a pour mission essentielle de veiller au fonctionnement fiable et efficace de la distribution publique d'électricité sur le territoire national à des coûts aussi bas que possible et de manière raisonnable pour la société (voir article 2 de la loi sur l'électricité de 1989). Cette description de sa mission est complétée par l'obligation de livrer aux sociétés de distribution, qui est imposée aux entreprises de production (voir article 12 paragraphe 1 de la loi).Cette description de sa mission se fonde de toute évidence sur le contenu des concessions qui avaient été accordées par le ministre des affaires économiques et qui fixaient également l'obligation de livraison des producteurs (voir à ce propos la concession de Ijsselcentrale, considérant 7).

Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que tant la SEP que les sociétés de production qui y sont parties fournissent "des services d'intérêt économique général".

(41) La gestion de ces services a reçu un fondement juridique qui faisait défaut avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Ladite mission était néanmoins confiée précédemment aux sociétés de production par un acte de droit public, à savoir l'octroi de concessions par le ministre des affaires économiques. Il y a donc lieu de conclure que, avant comme après l'entrée en vigueur de la loi sur l'électricité de 1989, la SEP et les sociétés de production ont été "chargées" des services en question.

(42) La première condition de l'article 90 paragraphe 2 est par conséquent remplie.

2.L'application des règles de concurrence ne fait pas échec à l'accomplissement de la mission impartie aux entreprises.

(43) De l'avis de la Commission, l'application des règles de concurrence n'empêche pas la SEP d'accomplir sa mission convenablement, parce qu'un contrôle absolu sur les importations et les exportations, également sur celles des consommateurs finals privés, à savoir les consommateurs industriels auquel l'article 21 de l'OVS donne lieu comme il est dit plus haut, n'est pas indispensable à cet effet.

(44) Cette conclusion peut être tirée des éléments suivants en ce qui concerne les importations :

a) En 1988, 15,6 % de la production totale d'électricité aux Pays-Bas était le fait d'autoproducteurs (voir considérant 10). Ces autoproducteurs revendent leurs excédents au réseau public. L'autoproduction ne fait manifestement pas obstacle à la mission de la SEP. On ne voit pas comment il en irait autrement des importations.

La SEP a fait observer à ce propos que les importations constitueraient un phénomène temporaire, alors que l'autoproduction présenterait un caractère structuré et donc plus durable. En fait, la SEP suggère une distinction qui en réalité n'existe pas. En effet, les importations ont elles aussi un caractère planifié : l'une des tâches de la SEP est d'ajuster sa propre production en fonction des importations et de la production locales d'électricité. Les importations (voir considérant 30) doivent elles aussi être communiquées en temps utile à la SEP. Les importations sont également prévues dans le plan "électricité". Il n'y a donc pas de différence sur ce point avec l'autoproduction.

A cela s'ajoute que, dans le cas de l'autoproduction comme dans celui des importations, l'obligation de livraison des sociétés de distribution disparaît : le consommateur qui déclare vouloir couvrir ses besoins d'électricité pour tout ou partie par des importations ou de l'autoproduction ne peut, en cas d'urgence, faire appel purement et simplement à la distribution publique. Il n'en va autrement que s'il a passé avec la société distributrice un contrat de réservation ou d'appoint selon lequel une certaine quantité de capacité lui est réservée moyennant rémunération de sa part. La nouvelle loi n'oblige pas à conclure un tel contrat.

b) Les autorités néerlandaises ne jugent pas elles non plus qu'un contrôle absolu des importations par la SEP soit nécessaire à l'exercice de la mission qui lui est impartie. On ne voit pas sinon pourquoi la nouvelle loi libère expressément les importations pour l'autoconsommation.Lors de la discussion au Parlement de la loi sur l'électricité de 1989, le ministre des affaires économiques a fait allusion à ces accords entre autoproduction et importation mentionnés plus haut (voir Kamerstukken n° 19 591 Verslag van een schriftelijk overleg, n° 15, pages 8, 17 et 18). Dans les deux cas, "l'obligation de livraison absolue" est supprimée. Dans ces conditions, le "contrôle absolu sur la production et les importations" devient lui aussi superflu.

Par conséquent, le contrôle absolu sur les importations dont la SEP dispose en vertu de l'article 21 de l'OVS n'est pas considéré comme indispensable par les autorités néerlandaises elles-mêmes pour l'accomplissement de ladite mission d'intérêt général.

c) Enfin, le contrôle total des importations ne peut non plus être justifié par le droit de propriété de la SEP sur les liaisons de connexion internationales. Mêmes avant que l'obligation de transport de la SEP ne fût instaurée par la loi [voir article 47 paragraphe 1 sous c) de la nouvelle loi], il était tout à fait possible de mettre les lignes à la disposition de tiers à des conditions raisonnables pour transporter l'électricité importée par ces derniers.Les autres conditions que la SEP pourrait poser à ce transport sont que la fiabilité du réseau ne doit pas être compromise et qu'il doit s'agir d'opérations raisonnables sur le plan financier et caractérisées par une certaine régularité (pas d'opérations ponctuelles), que ces opérations doivent présenter une certaine continuité pour une période d'une durée raisonnable et à des tarifs normaux et non discriminatoires. D'une manière générale, ce sont des conditions auxquelles ne pourront répondre que les consommateurs privés qui représentent une demande d'un certain volume, comme les gros consommateurs ou les groupements de plusieurs consommateurs industriels. Il n'y avait et il n'y a donc pas de raison justifiant un contrôle absolu sur les importations par le biais de la gestion des lignes.

(45) En ce qui concerne l'exportation de l'électricité par des consommateurs industriels privés, c'est en principe pour les mêmes raisons que le contrôle exercé par la SEP ne peut être justifié conformément à l'article 90 paragraphe 2 du traité :

a) Ainsi que la SEP l'a déclaré elle-même, le principe applicable à l'électricité fournie par le réseau public est que les sociétés d'électricité néerlandaise "ne s'inquiètent pas de l'usage qui en est fait" : elles fournissent l'électricité à un client et ce que ce dernier en fait - autoconsommation, exportation ou revente - ne les concerne pas. De même, pour l'électricité autoproduite, il n'y a pas de raison pour que celle-ci ne puisse être exportée, puisqu'elle est sans effet sur la distribution publique (raison pour laquelle la nouvelle loi la libère).

b) Dans ce cas-ci également, le législateur néerlandais laisse aux consommateurs industriels, et notamment aux autoproducteurs, la liberté d'exporter.

c) De même, le contrôle absolu des exportations ne peut être justifié par un droit de propriété sur le réseau.

(46) Il y a lieu de conclure que la deuxième condition de l'article 90 paragraphe 2 n'est pas remplie.

3. Le développement des échanges

(47) Eu égard à ce qui précède, il n'y a pas lieu d'examiner la disposition de la dernière phrase de l'article 90 paragraphe 2. Il est clair toutefois qu'une entrave aux importations et aux exportations telle que celle qui découle de l'article 21 de l'OVS affecte le commerce dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté. Eu égard à l'objectif de la Communauté de réaliser un marché intérieur de la fourniture d'énergie, de telles entraves aux importations et aux exportations, qui sont en outre conclues pour vingt-cinq ans, sont inacceptables.

(48) Par conséquent, cette disposition de l'article 90 paragraphe 2 n'est de toute façon pas non plus remplie en tout état de cause.

D. Article 90 paragraphe 2 du traité CEE : distribution publique

(49) Dans la mesure où l'article 21 est appliqué aux importations destinées à assurer la distribution publique et aux exportations effectuées par les sociétés de production et de distribution, il convient d'observer ce qui suit.

1. Importation

(50) L'interdiction faite aux sociétés de production et de distribution d'importer pour l'approvisionnement public sans passer par la SEP est à présent fixée à l'article 34 de la loi sur l'électricité de 1989. Dans le cadre de la présente procédure engagée conformément au règlement n° 17, la Commission s'abstiendra de se prononcer sur la question de savoir si cette restriction à l'importation se justifie au regard de l'article 90 paragraphe 2 du traité, car ce faisant elle préjugerait la question de la comptabilité de la nouvelle loi avec le traité CEE, ce qui n'est pas l'objet de la présente procédure.

2. Exportation

(51) Une interdiction d'exporter faite aux sociétés de production dans le domaine de l'approvisionnement public peut être déduite de l'obligation de livraison imposée à l'article 11 de la loi sur l'électricité de 1989 qui oblige les producteurs à ne livrer leur électricité qu'à la SEP et à fournir exclusivement les distributeurs de l'électricité livrée par eux-mêmes à la SEP. A nouveau, la Commission s'abstiendra de se prononcer sur cette interdiction d'exportation dans le cadre de la présente procédure.

L'interdiction d'exporter, y compris dans le domaine d'approvisionnement public, faite aux sociétés de distribution par l'article 21 de l'OVS va à l'encontre de l'économie de la nouvelle loi, qui libère précisément les exportations.Bien que la Commission juge douteux que les parties à l'OVS puissent maintenir et appliquer cette interdiction d'exporter - qui est donc contraire à la loi - la SEP considère manifestement que cette possibilité existe si l'on en croit la lettre qu'elle a adressée le 15 décembre 1989 à la Commission.

Dans l'hypothèse où l'interdiction d'exporter faite aux sociétés de distribution par l'article 21 de l'OVS est maintenue, la Commission estime que celle-ci ne peut être justifiée par l'article 90 paragraphe 2. En effet, on ne voit pas en quoi les exportations faites par ces sociétés de distribution compromettraient la distribution publique. Aussi longtemps que les sociétés de distribution sont en mesure de respecter leurs obligations en matière de livraison aux Pays-Bas, il n'y a aucune raison de leur interdire de réaliser des excédents éventuels par le biais des exportations.

(52) Il y a lieu de conclure que l'interdiction d'exporter imposée par l'article 21 de l'OVS, même après l'entrée en vigueur de l'article 34 de la loi sur l'électricité de 1989, aux sociétés de distribution, ne peut être justifiée par l'article 90 paragraphe 2.

E. Applicabilité de l'article 85 paragraphe 3

(53) L'OVS n'a pas été notifié à la Commission alors qu'une telle notification est prescrite par l'article 4 du règlement n° 17, pas plus que les accords antérieurs passés entre les parties à la SEP. Même si l'OVS avait été notifié, il ne saurait bénéficier d'une exemption au sens de l'article 85 paragraphe 3. En effet, ainsi qu'il découle de ce qui précède, l'effet absolu que la SEP a donné à l'interdiction d'importer et d'exporter de l'article 21 de l'OVS n'était pas indispensable pour atteindre les objectifs visés par l'OVS. En tout état de cause, la troisième condition de l'article 85 paragraphe 3 ne serait donc pas remplie.

F. Conclusion

(54) La Commission conclut de ce qui précède que l'article 21 de l'OVS passé entre la SEP et les producteurs néerlandais d'électricité, tel qu'il a été appliqué en liaison avec le contrôle de fait et l'influence de fait exercés sur les livraisons internationales d'électricité, constitue une infraction à l'article 85 paragraphe 1 dans la mesure où ledit article 21 a pour objet ou pour effet :

a) d'empêcher les consommateurs industriels privés d'importer

et

b) d'empêcher les sociétés de distribution et les consommateurs industriels, et notamment les autoproducteurs, d'exporter,

et que les conditions de l'article 90 paragraphe 2 dudit traité ne sont pas remplies.

G. Article 3 du règlement n° 17

(55) Conformément à l'article 3 du règlement n° 17, la Commission peut constater une infraction pour le passé afin de clarifier la situation juridique et obliger les entreprises intéressées à mettre fin à cette infraction dans la mesure où celle-ci subsiste. Etant donné que la SEP a fait savoir qu'elle maintiendrait l'article 21 de l'OVS, on ne peut dire qu'elle-même et les sociétés productrices d'électricité qui y sont parties aient mis fin à l'infraction. Il y a donc lieu de les obliger à le faire. L'une des façons de mettre fin à l'infraction pourrait consister, pour la SEP, à faire savoir aux parties à l'OVS et aux clients que l'OVS doit être interprété et appliqué dans ce sens que les exportations d'énergie électrique qui ne sont pas destinées à la distribution publique, de même que les importations directes effectuées par des consommateurs industriels privés, seront libres et ne seront pas entravées en raison de la possession ou de la gestion du réseau par la SEP et les parties à l'OVS, sans qu'il y ait pour cela des raisons fondées.

La Commission accordera aux parties un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision pour lui soumettre des propositions visant à mettre fin à l'infraction.

A ARRETE LA PRESENTE DECISION :

Article premier

L'article 21 de l'accord de collaboration passé le 22 mai 1986 entre les prédécesseurs en droit des quatre sociétés actuelles de production d'électricité, d'une part, et NV Samenwerkende Elektriciteitsproduktiebedrijven, d'autre part, et tel qu'appliqué en liaison avec le contrôle le fait et l'influence de fait exercés sur les livraisons internationales d'électricité, constitue une infraction à l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE, dans la mesure où ledit article 21 a pour objet ou pour effet d'entraver les importations effectuées par des consommateurs industriels privés et les exportations de la production en dehors du domaine de l'approvisionnement public effectuées par des sociétés de distribution et des consommateurs industriels privés, et notamment des autoproducteurs.

Article 2

Les sociétés visées à l'article 3 prennent toute mesure utile pour mettre fin à l'infraction définie à l'article 1er. A cet effet, elles soumettent à la Commission, dans un délai de trois mois suivant la notification de la présente décision, des propositions visant à mettre fin à l'infraction.

Article 3

Les entreprises ci-après sont destinataires de la présente décision :

- NV Samenwerkende Elektriciteitsproduktiebedrijven, Utrechtseweg 310, NL-6812 AR Arnhem,

- NV Elektriciteitsbedrijf Zuid-Holland, Von Geusaustraat 193, NL-2274 RJ Voorburg,

- NV Energieproduktiebedrijf UNA, Keulsekade 189, NL-3534 AC Utrecht,

- NV Elektriciteits-Produktiemaatschappij Zuid-Nederland EPZ, Begijnenhof 1, NL-5611 - EK Eindhoven,

- NV Elektriciteits-Produktiemaatschappij Oost- en Noord-Nederland, Dr. Stolteweg 92, NL-8025 AZ Zwolle.

Leon BRITTAN, Vice-président.

(1) JO n° 13 du 21. 2. 1962, p. 204/62.

(2) JO n° 127 du 20. 8. 1963, p. 2268/63.

(3) Le titre intégral de la loi est le suivant : "Loi du 16 novembre 1989, portant réglementation de la production, de l'importation, du transport et de la vente d'électricité" (loi sur l'électricité de 1989), publiée au journal officiel néerlandais Staatsblad 535 du 7 décembre 1989.

(4) En l'espèce, la SEP. Cette désignation a eu lieu par décret ministériel du 20 mars 1990 (Staatscourant 58, du 22 mars 1990).

(5) L'une des "incitations à la concurrence", suivant un résumé de la loi sur l'électricité de 1989 établie par le ministère des affaires économiques.

(6) L'une des "incitations à la concurrence", suivant un résumé de la loi sur l'électricité de 1989 établie par le ministère des affaires économiques.

(7) En ce qui concerne l'obligation de transport, il est notamment précisé dans l'exposé des motifs :

"En cas de demande de transport, l'exploitant des lignes devra le cas échéant démontrer qu'il ne peut donner suite à la demande faute de capacité de transport. La SEP, en tant qu'exploitant des lignes d'interconnexion avec l'étranger, peut faire valoir les contrats qu'elle a passés il y a plusieurs années pour l'importation d'électricité destinée à la distribution publique."

[Document deuxième chambre, année parlementaire 1987/1988 : 19 591 (ci-après dénommé "Kamerstukken n° 19 591"), Kamerstukken n° 19 591, n° 3, page 56.]

En outre, on peut lire ce qui suit dans l'exposé des motifs à propos du rapport final :

"Cette obligation vaut tant pour les "achats horizontaux" faits par les entreprises de distribution que pour les consommateurs spéciaux. Elle s'applique également aux achats de courant à l'étranger des consommateurs finals et notamment des gros consommateurs spéciaux. Pour le reste, cette obligation ne vaut pour les importations que si la capacité est raisonnablement suffisante. Cette obligation de transport en peut être entravée par l'exigence d'un prix excessif par le ou les propriétaires du réseau. C'est pourquoi le projet de loi prévoit que le transport doit être effectué contre rémunération des coûts qui peuvent raisonnablement être imputés au transport en question en fonction de l'utilisation. Afin d'éviter tout malentendu, rappelons que, dans la pratique, il s'agit évidemment presque toujours de transports fictifs."

(Kamerstukken n° 19 591, n° 9, page 8.)

(8) Source : "L'électricité aux Pays-Bas 1988".

(9) Source : "L'électricité aux Pays-Bas 1988".

(10) Source : brochure "L'Europe électrique", édition UCPTE, 1987.

(11) En ce qui concerne les tarifs des gros consommateurs, on peut lire ce qui suit à la page 9 du rapport annuel 1987 de la SEP :

"Tout acheteur de cette catégorie est d'ailleurs libre d'opter entre un contrat fondé sur le LBT (Landelijk Basis Tarief, c'est-à-dire, le tarif national de base), les importations de l'étranger, l'autoproduction d'électricité ou le nouveau tarif pour gros consommateurs. S'il opte pour cette dernière solution, elle ne peut porter que sur la totalité de la demande d'électricité et ce choix ne peut être modifié pendant la durée du contrat."

(12) Recueil de la jurisprudence de la Cour (1984), page 2999.

(13) Recueil de la jurisprudence de la Cour (1988), page 2479.