TPICE, 1re ch., 13 décembre 1990, n° T-113/89
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Nederlandse Associatie van de Farmaceutische Industrie, Bond van Groothandelaren in het Farmaceutische Bedrijf
Défendeur :
Commission des Communautés européennes, Royaume des Pays-Bas
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cruz Vilaça
Juges :
MM. Kirschner, Schintgen, Garcia-Valdecasas, Lenaerts
Avocats :
Mes Ter Kuile, Pijnacker Hordijk.
LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES (première chambre),
LES FAITS A L'ORIGINE DU RECOURS
1. Le présent litige s'inscrit dans le cadre des efforts menés par les pouvoirs publics néerlandais depuis les années 70 pour maîtriser les coûts des médicaments délivrés en dehors des hôpitaux et autres établissements de soins. Il est étroitement lié aux affaires T-114-89 (VNZ/Commission) et T-116-89 (Prodifarma/Commission I), ainsi qu'à l'affaire T-3-90 (Prodifarma/Commission II). Les recours introduits dans chacune de ces affaires sont dirigés contre la réaction manifestée par la Commission à l'égard d'un accord qui prévoit une réduction du niveau des prix auxquels les médicaments sont fournis aux pharmaciens, en liaison avec une modification de la réglementation néerlandaise sur la marge bénéficiaire des pharmaciens. Cet accord a été souscrit par la quasi-totalité des organisations néerlandaises représentatives des entreprises du secteur pharmaceutique, des caisses publiques et des organismes privés d'assurance maladie ainsi que des professions concernées par l'approvisionnement en médicaments, d'où son nom de "Omni-Partijen Akkoord" (ci-après "accord OPA"). En constatant les faits à l'origine du recours, le Tribunal a tenu compte, d'office, des éléments de fait contenus dans les dossiers des affaires parallèles T-114-89 et T-116-89.
1. La réglementation nationale
2. Le principal instrument d'intervention des pouvoirs publics néerlandais en ce qui concerne les coûts des médicaments est la Wet tarieven gezondheidszorg (loi sur la tarification des soins de santé, ci-après "WTG"), qui a été adoptée le 20 novembre 1980 (Stb. 1980, p. 646) et qui contient un certain nombre de règles relatives aux tarifs des établissements ou personnes dispensant des soins, parmi lesquels comptent les pharmaciens et les médecins généralistes tenant pharmacie. L'article 2, paragraphe 1, de la WTG interdit de manière générale d'appliquer un tarif qui n'a pas été approuvé ou fixé conformément à la loi.
3. La WTG a confié la fixation et l'approbation des tarifs des soins de santé au Centraal Orgaan Tarieven Gezondheidszorg (office centrale des tarifs de soins de santé, ci-après "COTG") organisme de droit public. Le COTG peut adopter des directives relatives au niveau, à la structure et aux modalités d'application d'un tarif en tout ou en partie. Ces directives doivent être approuvées par le ministre du Bien-être, de la Santé publique et de la Culture, par le ministre des Affaires économiques et par le ministre concerné du fait de sa responsabilité dans la politique à mener vis-à-vis de la catégorie d'établissements ou de personnes dispensant des soins qui est en cause. Aux termes de l'article 13 de la WTG, le COTG doit tenir compte de ces directives lorsqu'il prend des décisions portant approbation ou fixation de tarifs. L'article 14 donne au ministre du Bien-être, de la Santé publique et de la Culture et au ministre des Affaires économiques le pouvoir d'adresser, de commun accord, au COTG des recommandations sur le contenu des directives, que le COTG est tenu de respecter lors de leur adoption.
4. C'est conformément à cette disposition que le secrétaire d'Etat au bien-être, à la santé publique et à la culture et le secrétaire d'Etat aux affaires économiques ont émis, le 21 avril 1987, une recommandation relative à l'adoption de directives modifiant le régime des remboursements versés aux pharmaciens pour la fourniture de médicaments, en vue de réaliser des économies dans ce secteur.
5. La recommandation visait, d'une part, à déduire du remboursement auquel pouvait prétendre un pharmacien les ristournes que le fournisseur du médicament lui avait accordées, pour autant que celles-ci excédaient 2 % du prix de ce médicament tel qu'il figurait sur une liste homologuée par le COTG.
6. D'autre part, elle visait à encourager l'achat et la fourniture, par les pharmaciens, de médicaments génériques ou d'importation parallèle, meilleur marché que les spécialités pharmaceutiques mises sur le marché néerlandais par le producteur ou l'importateur officiel. S'il est vrai que le choix du médicament qui sera acheté par le consommateur revient, en principe, au médecin qui le prescrit, le pharmacien conserve toutefois la possibilité de fournir un autre médicament équivalent si le consommateur en fait la demande. De cette manière, le pharmacien peut jouer un rôle dans la substitution aux spécialités pharmaceutiques de médicaments d'importation parallèle ou génériques. La recommandation envisageait de permettre au pharmacien de conserver, en tant que prime d'incitation, un tiers de la différence entre le prix plus élevé de la spécialité pharmaceutique prescrite et celui du médicament meilleur marché qu'il avait délivré.
7. Un régime conforme à la recommandation décrite ci-dessus a été mise en œuvre par le COTG avec effet au 1er janvier 1988. Si la controverse demeure ouverte quant au caractère bénéfique ou néfaste des effets produits par ce régime, il est par contre largement reconnu qu'il n'a pas permis de réaliser toutes les économies escomptées. C'est pourquoi le Gouvernement néerlandais a envisagé de prendre des mesures de contrôle des prix plus strictes encore. Dans ce but, il a présenté un plan, dénommé "ijkprijzensysteem", selon lequel un plafond unique serait établi pour le remboursement par les caisses d'assurance maladie de tous les médicaments qui peuvent être prescrits pour le traitement d'une maladie déterminée de sorte que, si le médecin prescrivait un médicament dont le coût excédait le montant fixé, le patient serait tenu de payer la différence lui-même. Ces suggestions n'ont toutefois pas été mises en œuvre, en partie parce que les organisations professionnelles du secteur des soins de santé ont proposé aux autorités l'accord OPA comme solution alternative pour réaliser les économies considérées comme nécessaires lesquelles, ainsi que le Gouvernement néerlandais l'avait décidé, devaient atteindre 420 millions de florins par an.
2. L'accord OPA
a) Les parties à l'accord OPA
8. Résultat des initiatives antérieures de l'association néerlandaise de l'industrie pharmaceutique "Nefarma", l'une des requérantes dans la présente affaire, et de l'association des caisses de maladie néerlandaises, "VNZ", l'une des requérantes dans l'affaire T-114-89, l'accord OPA a été conclu le 18 août 1988.
9. Il regroupe - à une exception près - les organisations représentatives de toutes les parties concernées par la prescription et la fourniture de médicaments : les producteurs et les fournisseurs, les médecins qui les prescrivent et les pharmaciens qui les délivrent, ainsi que les assureurs et les caisses d'assurance maladie qui en supportent le coût. Les parties requérantes dans la présente affaire et dans l'affaire T-114-89 comptent parmi les parties à l'accord.
10. L'exception susmentionnée concerne la Prodifarma, partie requérante dans les affaires T-116-89 et T-3-90, association regroupant des entreprises de plus petites dimensions et qui ne font par partie de l'industrie des médicaments de marque, à savoir des entreprises produisant des médicaments génériques ou des spécialités pharmaceutiques ou encore se livrant à l'importation parallèle de médicaments génériques. Bien qu'elle ait été associée à la phase de concertation qui a précédé la conclusion de l'accord, la Prodifarma et les entreprises qui lui sont affiliées n'y sont pas partie. Le Gouvernement néerlandais ne compte pas non plus parmi les parties à l'accord.
b) Le contenu de l'accord OPA
11. L'accord OPA se divise en deux parties principales, chacune de caractère différent. En premier lieu, il comprend un accord entre les parties, sur le plan du droit privé, par lequel les producteurs et distributeurs s'engagent à pratiquer vis-à-vis des pharmaciens des réductions sur les prix de vente des produits pharmaceutiques. En second lieu, il contient des propositions des parties sur les modifications de la réglementation nationale décrite ci-dessus qu'elles désirent voir arrêtées par les pouvoirs publics et auxquelles elles subordonnent la mise en œuvre de leur accord sur le plan du droit privé. Ces deux points principaux sont complétés par un certain nombre de dispositions concernant le champ d'application de l'accord et les engagements des parties relatifs à la mise en œuvre du régime qu'elles préconisent.
12. Les dispositions principales de l'accord OPA peuvent être résumées comme suit. Les membres des deux organisations requérantes dans la présente affaire, Nefarma et Bond van Groothandelaren in het Pharmaceutische Bedrijf (union des grossistes du secteur pharmaceutique), se déclarent prêts, au point 7.1. de l'accord, à baisser de 7 % en moyenne les prix de vente des spécialités pharmaceutiques qu'ils pratiquent envers les pharmaciens. Le point 8 de l'accord prévoit un "gel des prix" jusqu'au 1er janvier 1991. Les parties déclarent en outre qu'elles renoncent à procéder à des "hausses de rattrapage" après cette date. Au point 9 de l'accord, la Nefarma et le Bond van Groothandelaren s'engagent à fixer les prix des médicaments nouvellement introduits à un niveau correspondant à la moyenne des prix pratiqués dans d'autres Etats membres.
13. Les modifications de la réglementation nationale proposées par les parties à l'accord aux pouvoirs publics concernent, en premier lieu, une majoration, de 2 % à 4 %, des ristournes dont un pharmacien peut bénéficier sans qu'elles soient prises en compte lors des remboursements effectués par les caisses d'assurance maladie (point 10). En deuxième lieu, les pouvoirs publics sont invités à réduire de 33,3 % à 15 % le taux de la prime d'incitation décrite ci-dessus qui est accordée aux pharmaciens pour la fourniture de médicaments meilleur marché (point 11).
14. L'annexe 2 de l'accord OPA reproduit les estimations des parties à l'accord quant au développement que devrait connaître le marché après l'introduction d'une prime de 15 %. Le volume des ventes de spécialités pharmaceutiques devrait, de 1988 à 1990, baisser de 1 750 à 1 700 millions de florins, celui des médicaments génériques augmenter de 250 à 360 millions de florins et celui des produits provenant d'une importation parallèle passer de 135 à 200 millions de florins.
3. Le déroulement des procédures administratives
15. Par lettre du 6 septembre 1988, l'accord OPA a été soumis, par le président de Nefarma, au secrétaire d'Etat au bien-être, à la santé publique et à la culture et au secrétaire d'Etat aux affaires économiques. A la fin du mois de novembre 1988, le pouvoirs publics néerlandais se sont déclarés prêts à lui donner une chance. Il a été envisagé que les réductions de prix prévues par l'accord entrent en vigueur le 1er janvier 1989.
16. Deux procédures parallèles concernant l'accord OPA ont alors été entamées devant la Commission. D'une part, Prodifarma, requérante dans l'affaire T-116-89, a déposé le 2 décembre 1988 une plainte visant à ce que la Commission constate, conformément à l'article 3 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204, ci-après "règlement n° 17), que l'accord OPA est incompatible avec les dispositions de l'article 85 du traité CEE. D'autre part, Nefarma, partie requérante dans la présente affaire, a notifié l'accord OPA à la Commission, le 9 décembre 1988, au nom de toutes les parties signataires. Elle a demandé la délivrance d'une attestation négative conformément à l'article 2 du règlement n° 17 ou du moins - à titre subsidiaire - l'octroi d'une exemption au titre de l'article 85, paragraphe 3, du traité.
17. Dans une lettre du 14 décembre 1988 signée par M. Rocca, directeur à la direction générale de la concurrence, la Commission a informé les parties que, selon l'avis provisoire de ses services, l'accord OPA était incompatible avec l'article 85, paragraphe 1, du traité en raison de l'entente sur les prix qu'il contenait et que les parties n'avaient pas avancé d'arguments permettant de justifier une exemption au titre de l'article 85, paragraphe 3. La Commission ajoutait que ses services examinaient la possibilité d'entamer une procédure sur la base de l'article 15, paragraphe 6, du règlement n° 17. Une copie de cette lettre a été adressée à Prodifarma.
18. A la suite de cette première réaction négative de la Commission, plusieurs parties à l'accord OPA, ainsi que le Gouvernement néerlandais, représenté par les deux secrétaires d'Etat concernés, sont intervenus, à plusieurs reprises, auprès des services de la Commission et auprès du membre chargé de la concurrence afin de leur fournir de plus amples informations au sujet de l'accord OPA et de plaider en sa faveur.
19. Entre-temps, la procédure visant à adapter la réglementation nationale, notamment les directives du COTG, au contenu de l'accord OPA, s'est poursuivie. Toutefois, le 23 décembre 1988, le Gouvernement néerlandais a informé les parties à l'accord OPA, ainsi que Prodifarma et consorts, que les pouvoirs publics néerlandais n'envisageaient pas d'approuver les modifications des directives nécessaires à la mise en œuvre de l'accord avant de pouvoir apprécier, à la lumière de " l'avis définitif de la Commission", si une telle approbation constituerait ou non une violation du traité. De fait, lorsque le COTG a décidé de modifier ses directives le 29 décembre 1988, cette modification n'a pas été approuvée par les secrétaires d'Etat compétents. Contrairement à ce que les parties à l'accord OPA et le Gouvernement néerlandais avaient initialement envisagé, l'accord n'a donc pas pu entrer en vigueur le 1er janvier 1989.
20. Les parties à l'accord OPA et le Gouvernement néerlandais ont poursuivi leurs efforts au début de l'année 1989 pour convaincre la Commission des mérites de cet accord. Notamment, le 7 février 1989, le secrétaire d'Etat aux affaires économiques et son homologue du ministère du Bien-être, de la Santé publique et de la Culture ont eu, à leur demande, un entretien avec le nouveau membre chargé de la concurrence, Sir Léon Brittan. Cet entretien a été suivi d'une lettre du 9 février, adressée à Sir Léon Brittan par le secrétaire d'Etat aux affaires économiques, M. Evenhuis, fournissant des explications supplémentaires pour justifier l'abaissement de la prime d'incitation de 33,3 % à 15 %.
21. En réponse, Sir Léon Brittan a adressé aux deux secrétaires d'Etat la lettre du 6 mars qui est attaquée par les requérantes dans la présente affaire ainsi que dans les affaires T-114-89 et T-116-89. Dans cette lettre, dont le projet avait déjà été transmis aux autorités néerlandaises, par téléfax, quelques jours auparavant, le membre de la Commission déclarait, "en tant qu'ancien ministre des Finances", qu'il souscrivait à l'objectif du Gouvernement néerlandais qui était de maîtriser le coût de l'approvisionnement en médicaments aux Pays-Bas. Il constatait cependant que l'effet anticoncurrentiel des dispositions de l'accord OPA relatives à l'abaissement de la prime d'incitation et à l'élargissement de la marge de réduction autorisée devrait être atténué avant qu'une décision favorable puisse être adoptée.
22. Selon lui, l'accord OPA devrait satisfaire à deux conditions pour que la Commission envisage de prendre une décision favorable à son égard, à savoir :
- premièrement, que la prime d'incitation pour la fourniture de médicaments meilleur marché soit réduite à 20 %, plutôt qu'à 15 % de la différence de prix entre lesdits médicaments et les spécialités pharmaceutiques plus chères ;
- deuxièmement, que les effets de la réduction de la prime soient évalués, pendant une période d'un an, à l'aide d'un système de contrôle instauré à cet effet.
23. La lettre utilisait notamment le langage suivant :
"Dans ces conditions, je vous propose de limiter à 20 % la réduction de l'incitant de 33 % au lieu des 15 % prévus dans l'accord OPA et je vous propose de tester pendant une période d'un an l'effet de la prime de 20 % dans la pratique."
24. Pour ce qui est du système de contrôle, Sir Léon Brittan observait que les autorités néerlandaises et communautaires pourraient coopérer en vue de sa mise en œuvre, en procédant notamment à un échange de données statistiques relatives au marché des médicaments. Le membre de la Commission ajoutait :
"Il va de soi que mes conclusions relatives à l'accord OPA ne portent pas atteinte aux droits procéduraux des parties qui l'ont notifié ni de Prodifarma, qui a formulé une plainte à son encontre."
25. Une copie de cette lettre a été transmise, le 16 mars 1989, à Nefarma. Elle était accompagnée d'une lettre du directeur Rocca, dans laquelle ce dernier précisait que la question de savoir si la mise en œuvre de l'accord OPA aurait pour effet de provoquer une distorsion de la concurrence entre les spécialités pharmaceutiques et les produits génériques ou d'importation parallèle devrait être examinée à la lumière des estimations concernant l'évolution du marché qui avaient été établies, dans la perspective d'une prime d'incitation de 15 %, par les parties à l'accord OPA et qui figuraient en annexe 2 à leur accord.
26. Le 17 mars 1989, les membres de Nefarma se sont déclarés, à la majorité, prêts à accepter que le taux de la prime d'incitation soit fixé à 20 %. les autres parties à l'accord OPA ont également accepté de l'appliquer aux conditions énoncées dans la lettre du 6 mars 1989. le COTG a adapté ses directives en conséquence et le Gouvernement néerlandais a donné son approbation. Les propositions faites dans l'accord OPA ont donc été mises en œuvre avec effet au 1er avril 1989.
27. Neferma et Prodifarma ayant demandé à la Commission des précisions concernant le contrôle que celle-ci se proposait d'exercer, le directeur Rocca a spécifié, dans une lettre du 4 avril 1989, que l'évaluation aurait lieu sur la base de rapports mensuels relatifs aux parts du marché occupées respectivement par les spécialités pharmaceutiques, les médicaments génériques et les produits importés parallèlement. Ces données seraient comparées, par la Commission, aux pronostics des parties à l'accord OPA.
28. Le 28 avril 1989, le directeur Rocca a adressé aux requérantes une lettre contenant un relevé détaillé des données dont la Commission désirait disposer aux fins du contrôle envisagé et leur demandant de fournir lesdites données.
LA PROCEDURE
29. Par requête déposée au greffe de la Cour le 10 mai 1989, les parties requérantes ont introduit le présent recours contre la Commission, visant à l'annulation des décisions que contiennent, selon elles, la lettre de Sir Léon Brittan du 6 mars 1989 et les lettres du directeur Rocca en date du 16 mars et des 4 et 28 avril 1989.
30. A l'appui de leur demande, les requérantes font valoir deux griefs principaux. D'une part, elles soutiennent que c'est à tort que la Commission a estimé que l'accord OPA relève de l'interdiction énoncée à l'article 85, paragraphe 1, du traité. D'autre part, elles considèrent que la Commission n'est pas justifiée à subordonner une décision positive sur la comptabilité de l'accord OPA avec les règles communautaires de concurrence aux deux conditions qu'elle a posées dans les lettres attaquées.
31. Par mémoire déposé le 30 juin 1989, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité au titre de l'article 91, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.
32. Le Royaume des Pays-Bas a demandé, par requête déposée au greffe de la Cour le 20 octobre 1989, à intervenir dans la présente affaire à l'appui des conclusions de la partie défenderesse.
33. Par ordonnance du 15 novembre 1989, la Cour a renvoyé l'affaire devant le Tribunal en application de l'article 14 de la décision du Conseil, du 24 octobre 1988, instituant un tribunal de première instance des Communautés européennes.
34. Par ordonnance du 7 décembre 1989, le Tribunal (première chambre) a admis le Royaume des Pays-Bas à intervenir dans la présente affaire à l'appui des conclusions de la Commission. Dans un mémoire déposé le 19 janvier 1990, la partie intervenante a indiqué qu'elle souhaitait s'abstenir de prendre position sur la question de la recevabilité, tout en se réservant de présenter ultérieurement des observations sur le fond.
35. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé de donner suite à la demande de la Commission de statuer sur l'exception d'irrecevabilité sans engager le débat au fond. Les représentants des requérantes et de la Commission ont été entendus en leurs plaidoiries et en leur réponses aux questions posées par le Tribunal à l'audience du 20 juin 1990.
36. Les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
1. annuler
- la décision de la Commission inscrite dans la lettre adressée le 6 mars 1989 par M. Léon Brittan, membre de la Commission, aux secrétaires d'Etat AJ Evenhuis et DJD Dees ;
- les décisions de la Commission contenues dans les lettres adressées à Nefarma respectivement le 16 mars, le 4 avril et le 28 avril 1989 par M. G Rocca, directeur à la direction générale de la concurrence de la Commission, dans la mesure où, par cette ou ces décisions, la Commission a constaté que l'accord OPA relève du champ d'application de l'interdiction énoncée à l'article 85, paragraphe 1 du traité CEE et dans la mesure où, par cette ou ces décisions, la Commission a subordonné à deux conditions sa décision de rendre un avis favorable sur la compatibilité de l'accord OPA avec les règles communautaires en matière de concurrence ;
2. condamner la Commission aux dépens.
37. La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
- déclarer le recours irrecevable ;
- condamner les requérantes aux dépens.
38. En ce qui concerne l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission, les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :
- rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission
et
- condamner la Commission - dans l'arrêt définitif - aux dépens de l'incident.
39. La partie intervenante déclare s'en remettre à la sagesse du Tribunal sur la question de la recevabilité du recours formé par les requérantes.
40. Le président a prononcé la clôture de la procédure orale sur l'exception d'irrecevabilité à l'issue de l'audience.
Sur la recevabilité de la demande en annulation
41. A l'appui de l'exception d'irrecevabilité qu'elle a soulevée, la Commission fait valoir, à titre principal, qu'un acte d'une institution communautaire ne peut faire l'objet du recours prévu à l'article 173 du traité que s'il engendre des effets juridiques contraignants.
42. Selon la Commission, la lettre de Sir Léon Brittan n'a produit que des conséquences d'ordre factuel et est dépourvue d'effets juridiques. la Commission soutient que cette lettre ne lie ni le Gouvernement néerlandais qui en était le destinataire, ni des tiers tels que les requérantes, ni même la Commission elle-même. Elle estime que la simple lecture de la lettre litigieuse révèle qu'il s'agit de l'expression d'une opinion dépourvue d'effets contraignants, et qu'il ne s'agit donc pas d'un "acte" au sens de l'article 173 du traité.
43. Pour étayer sa thèse, la Commission souligne tout d'abord certains termes de la lettre qui, dans la mesure où ils réservent expressément une décision postérieure de la Commission dont ils ne préjugent d'aucune façon, font apparaître son caractère provisoire. Ladite lettre ne contiendrait que des propositions et ne marquerait ni la clôture de l'affaire, ni la fin de l'enquête menée par les services de la Commission, laquelle, au contraire, n'aurait véritablement débuté qu'avec la mise en œuvre du système de contrôle. A l'audience, l'institution défenderesse a ajouté que si elle prenait à l'avenir une décision sur le fond de l'affaire, celle-ci aurait un effet rétroactif et se substituerait à la lettre attaquée. Ce ne serait qu'au moment où une telle décision définitive serait prise que les requérantes pourraient invoquer la nécessité d'une protection juridictionnelle.
44. La Commission fait ensuite valoir que la lettre attaquée n'enlève aucun avantage juridique aux parties à l'OPA et qu'en particulier, elle n'affecte pas la protection contre les amendes dont elles bénéficient en raison de la notification de l'accord. Elle observe que la lettre attaquée est sans rapport avec l'adoption de mesures provisoires au sens de l'ordonnance de la Cour du 17 janvier 1980 (Camera Care/Commission, 792-79 R, Rec. p. 119) et qu'elle ne porte pas atteinte aux droits procéduraux des parties, tels que les définissent le règlement n° 17 du Conseil et le règlement n° 99-63-CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 17 du Conseil (JO 1963, 127, p. 2268).
45. La Commission soutient que ce n'est pas la lettre litigieuse qui a produit des effets juridiques contraignants à l'égard des requérantes, mais la décision prise par le Gouvernement néerlandais, agissant de sa propre autorité et sous sa propre responsabilité, de mettre en œuvre l'accord OPA en tenant compte des amendements proposés dans la lettre attaquée.La Commission reconnaît que le Gouvernement néerlandais a fait dépendre sa décision de mettre en place les conditions nécessaires à la mise en œuvre de l'accord OPA du "feu vert" de la Commission. Elle souligne cependant que les autorités néerlandaises se sont conformées volontairement au point de vue de la Commission.
46. La Commission fait également valoir que le présent recours n'est pas dirigé contre une décision collégiale de la Commission qui aurait été prise à l'issue de la procédure interne d'usage en la matière, mais contre une lettre dans laquelle un seul membre de la Commission donne, après y avoir été instamment invité par le Gouvernement de l'Etat membre concerné, son opinion personnelle sur un dossier dont l'examen ne se trouve encore qu'à un stade peu avancé.
47. La Commission ajoute que des tiers auxquels la lettre de Sir Léon Brittan n'était pas adressée ne sauraient donc être concernés, de quelque manière que se soit, par celle-ci.Elle estime que, pour que des tiers puissent être directement et individuellement concernés au sens de l'article 173, deuxième alinéa, du traité, il est nécessaire que l'acte attaqué ait produit des effets juridiques à l'égard d'un premier destinataire et que tel n'est pas le cas de la lettre litigieuse à l'égard du Gouvernement néerlandais.
48. Pour ce qui est des lettres du directeur Rocca, la Commission estime qu'elles constituent des actes de gestion courante, qu'elles ont un caractère purement factuel et ne peuvent avoir la moindre influence sur la situation juridique des requérantes. Selon la Commission, le système de surveillance prévu par les lettres attaquées n'a pas modifié la position juridique des requérantes étant donné que la participation à ce système est volontaire. Elle ajoute qu'elle s'est abstenue de demander des renseignements par voie de décision obligatoire, comme elle aurait pu le faire, conformément à l'article 11 du règlement n° 17 et elle fait valoir que la requérante Nefarma elle-même ne s'est pas considérée liée par ce système puisqu'elle a cessé, en janvier 1990, de fournir les données statistiques prévues dans le cadre de ce dernier.
49. A l'appui de son exception d'irrecevabilité, la Commission fait valoir à titre subsidiaire que les requérantes ne justifient pas d'un intérêt à agir. Ce défaut d'intérêt résulterait du fait que les requérantes auraient accepté que le taux de la prime d'incitation soit fixé à 20 %, au lieu des 15 % initialement prévus dans l'accord OPA, ainsi qui résulterait d'une lettre du 21 mars 1989, selon laquelle la majorité des membres de Nefarma aurait donné leur accord à ce nouveau pourcentage.
50. A l'audience, la Commission a finalement exprimé la crainte qu'un nouvel assouplissement des conditions de recevabilité n'entraîne une vague de recours contre les différentes sortes de lettres que ses services sont amenés à adresser aux entreprises au cours des enquêtes les concernant, de sorte qu'elle devrait s'abstenir, à l'avenir, d'accéder aux nombreuses demandes qui lui sont adressées visant à obtenir de ses services une prise de position informelle.
51. Les requérantes, pour leur part, soutiennent que les lettres attaquées contiennent des décisions qui produisent des effets obligatoires et irréversibles à leur égard. Elles estiment que, dans les lettres attaquées, la Commission s'est irrévocablement engagée à donner, à certaines conditions qu'elle a précisées en détail, un avis favorable à l'accord OPA.
52. Les requérantes estiment que dans sa lettre du 6 mars 1989 Sir Léon Brittan s'est prononcé, à la demande du Gouvernement néerlandais, de manière définitive sur la comptabilité de l'accord OPA avec les dispositions de l'article 85 du traité et qu'il s'agit là d'une décision qui affecte leur position juridique, en tant que parties audit accord, indépendamment du fait que cette décision a pris la forme d'une lettre adressée au Gouvernement néerlandais. Elles font valoir que la mise en œuvre de l'accord OPA dépendait entièrement de la modification préalable des règles de droit public alors en vigueur, mesure que les autorités néerlandaises avaient, quant à elles, subordonnée à l'accord préalable de la Commission. Le sort de l'accord OPA aurait donc entièrement dépendu de l'appréciation portée par la Commission qui, avec la lettre du 6 mars 1989, aurait donné le signal requis pour permettre la réalisation des propositions inscrites dans l'accord.
53. Selon les requérantes, la teneur de cette lettre a empêché le Gouvernement néerlandais de prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre l'accord OPA dans sa version initiale parce qu'un tel comportement aurait entraîné, de la part de la Commission, un recours en manquement fondé sur les articles 5, 3, sous f) et 85 du traité. Elles ajoutent que le droit néerlandais s'opposait également à ce que les pouvoirs publics donnent le "feu vert" à la version originelle de l'accord OPA tant que subsistaient des doutes sur sa validité au regard du droit communautaire. En outre, elles estiment que la lettre avait donné aux tiers, notamment à l'association Prodifarma, la possibilité, en l'invoquant devant les juridictions néerlandaises, d'empêcher la mise en œuvre de l'accord OPA dans sa forme originelle.
54. les requérantes estiment que, dans un tel contexte, la Commission a eu parfaitement conscience des effets que sa décision allait produire et qu'en l'adaptant, elle a entendu entériner ou, selon le cas, modifier la situation juridique des diverses parties concernées par l'accord OPA. Elles estiment qu'il n'est pas nécessaire à cet égard de rechercher si la Commission disposait d'une base juridique l'habilitant à adresser une décision contraignante au Royaume des Pays-Bas.
55. Les requérantes sont d'avis que la lettre de Sir Léon Brittan constitue bien une décision à l'égard du Royaume des Pays-Bas, mais elles estiment que, même s'il n'en était pas ainsi, elle constituerait néanmoins une décision à leur égard. Selon elles, en effet, l'élément décisif pour retenir une telle qualification réside dans le fait que ladite lettre affecte directement et individuellement leur position juridique.
56. En ce qui concerne les lettres du directeur Rocca, les requérantes considèrent qu'elles ont également produit des effets juridiques, ne serait-ce qu'en ce qui concerne les suites à donner au système de contrôle dont il était question dans la lettre de Sir Léon Brittan. Elles ont cependant déclaré, à l'audience, qu'elles n'entendaient pas former contre ces lettres un recours indépendant de celui dirigé contre la lettre du membre de la Commission et que ce n'est qu'à titre subsidiaire que le présent recours vise également les lettres du directeur Rocca.
57. Les requérantes font valoir que les arguments développés par la Commission a l'appui de son exception d'irrecevabilité ne portent que sur la forme des actes attaqués. Elles soulignent que la forme choisie par la Commission n'est pas décisive, mais qu'il convient de tenir compte du contenu et des conséquences des lettres litigieuses.
58. Bien que son libellé semble indiquer qu'elle ne revêt qu'un caractère provisoire, les requérantes estiment qu'un examen approfondi de la lettre du 6 mars 1989 révèle qu'il s'agit d'une décision définitive, même si la durée de sa validité est limitée dans le temps. Ce point de vue se trouve confirmé, selon les requérantes, par les lettres ultérieures du directeur Rocca, à la lumière desquelles les effets de la lettre de Sir Léon Brittan doivent être appréciés. Le caractère définitif des lettres attaquées serait attesté par la présence des éléments suivants :
- elles constatent de façon définitive qu'en abaissant à 15 % le taux de la prime d'incitation, l'accord OPA tombe sous le coup de l'interdiction énoncée à l'article 85, paragraphe 1, du traité, et refusent de façon définitive de faire bénéficier ledit accord d'une dérogation à cette interdiction ;
- elles autorisent de façon définitive et irréversible la mise en œuvre de l'accord OPA pendant une période d'un an, à condition que le taux de la prime d'incitation soit fixé à 20 % ;
- elles prévoient l'instauration définitive et irréversible, pendant une période d'au moins un an, d'un système de contrôle en vue de vérifier si l'accord OPA pourra continuer à s'appliquer à l'issue de cette période d'essai.
59. Les requérantes affirment que, même si la Commission devait prendre ultérieurement à l'égard de l'accord OPA une décision formelle au titre du règlement n° 17, une telle décision ne pourrait avoir pour effet de faire disparaître rétroactivement ces conclusions définitives.
60. A l'encontre de l'argument tiré de l'absence d'une décision collégiale de la Commission, les requérantes font valoir qu'il ressort des lettres ultérieures du directeur Rocca que la lettre de Sir Léon Brittan du 6 mars 1989 ne reflétait pas uniquement son point de vue individuel, mais celui de la Commission.
61. Les requérantes font ensuite valoir que les décisions qu'elles attaquent échappent au cadre procédural du règlement n° 17, mais que leurs effets pratiques et juridiques sont néanmoins équivalents à ceux que comporterait une décision formelle d'interdiction prise en vertu de l'article 3 du règlement n° 17, sous réserve, dans le cadre de cette deuxième comparaison, du pouvoir que conserve, en l'espèce, le juge national pour vérifier la validité de l'accord au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité.
62. Les requérantes s'abstiennent de prendre position sur la question de savoir si la Commission est compétente pour prendre de pareilles mesures en dehors du cadre du règlement n° 17, tout en soulignant que ce règlement présente des inconvénients dans le cas d'affaires présentant une certaine urgence, telles que celle qui fait l'objet du présent litige, puisqu'il ne prévoit pas la possibilité d'accorder des exemptions (provisoires) dans un délai très bref. Elles affirment que, indépendamment de sa licéité, une telle dérogation, de la part de la Commission, aux règles du règlement n° 17, ne saurait priver les justiciables des voies de recours dont ils disposent contre les décisions formelles prises au titre dudit règlement.
63. A l'audience, les requérantes ont développé cet argument en soutenant qu'il existe une distorsion entre ce règlement, qu'elles ont qualifié de désuet, et la nécessité, pour la Commission et les Etats membres, de mener une politique efficace et appropriée en matière de concurrence. Elles se sont déclarées prêtes à accepter que la Commission ait recours à des procédures non prévues par le règlement n° 17, telles que celle adoptée en l'espèce. Cette pratique conduit cependant, selon les requérantes, à se demander dans quelle mesure la Commission peut mener, en matière de concurrence, une politique de concertation avec les autorités nationales sans être exposée à des recours introduits par les entreprises concernées. Les requérantes insistent sur la nécessité pour les entreprises en cause de bénéficier, dans de telles circonstances, d'une protection juridictionnelle. Elles craignent qu'un arrêt rejetant leur recours comme irrecevable ne permette à la Commission d'intervenir sur les marchés de la Communauté, en adoptant, à l'abri de tout contrôle juridictionnel, des actes produisant des effets sur le plan juridique aussi bien que dans le domaine des faits.
64. Quant à la question de savoir si les lettres qu'elles attaquent les concernent directement et individuellement, les requérantes estiment qu'une réponse affirmative s'impose aussi bien pour les décisions contenues dans les lettres qui leur étaient directement adressées que pour la décision contenue dans la lettre adressée aux deux secrétaires d'Etat. Etant donné que cette dernière n'exprime rien d'autre que la position de la Commission sur l'accord auquel les requérantes sont parties, elles se considèrent directement et individuellement concernées par cette décision comme si elles en étaient les destinataires. Les requérantes ajoutent que cette décision leur a été également communiquée par la lettre que le directeur Rocca a adressée à Nefarma le 16 mars 1988.
65. Finalement, les requérantes soulignent que leur intérêt à agir ne saurait être contesté en raison du fait qu'elles ont accepté les modifications apportées aux propositions inscrites dans l'accord OPA à la suite de la lettre de Sir Léon Brittan et consenti à leur mise en œuvre. Les requérantes estiment que la Commission les a placées devant un fait accompli, de sorte qu'elles n'ont eu d'autre possibilité que de collaborer - tout en protestant - à la mise en œuvre de l'accord OPA dans une version conforme aux indications données par la Commission, faute de quoi l'intervention de la Commission aurait eu pou r effet direct d'empêcher entièrement l'entrée en vigueur des mesures proposées par ledit accord.
Sur la nature juridique des lettres attaquées
66. En présence de ces éléments de fait et de droit, il y a lieu d'examiner si les lettres contre lesquelles le présent recours est dirigé sont des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation au sens de l'article 173 du traité. Ainsi qu'il ressort d'une jurisprudence constante de la Cour, il convient à cet effet de rechercher si elles ont produit des effets juridiques obligatoires (voir, en dernier lieu, l'ordonnance du 17 mai 1989, Italie/Commission, 151-88, Rec. p. 1255, 1261).
1. Sur les effets de la lettre de Sir Léon Brittan à l'égard du Royaume des Pays-Bas
67. Le Tribunal estime qu'il convient de déterminer, en premier lieu, si la lettre que Sir Léon Brittan a adressée, le 6 mars 1989, aux deux secrétaires d'Etat néerlandais a produit de tels effets à l'égard du Royaume des Pays-Bas.
68. A cet effet, il convient d'examiner, tout d'abord, si l'acte attaqué repose sur une base juridique habilitant la Commission à prendre une décision liant un Etat membre. En effet, il ressort de la jurisprudence de la Cour que les opinions exprimées par la Commission vis-à-vis des autorités d'un Etat membre dans des domaines où elle n'a pas compétence pour adopter des décisions obligatoires ne sont que de simples avis dépourvus d'effets juridiques(par exemple, arrêt du 4 février 1959, Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 17-57, Rec. V, p. 9, 25 ; du 27 mars 1980, Sucrimex/Commission, 133-79, Rec. p. 1299, 1310 ; ordonnance du 17 mai 1989, Italie/Commission, 151-88, précitée, p. 1261).
69. Il y a lieu de relever, à titre liminaire, qu'une pareille compétence ne saurait être présumée, en l'absence d'une disposition spécifique figurant dans le traité ou dans des actes de nature obligatoire pris par les institutions(ordonnance du 30 septembre 1987, Brogher Industries/Commission, 229-86, Rec. p. 3757, 3762 et suiv.).
70. Or, ainsi que la Commission l'a souligné à l'audience, ni l'article 85 du traité ni les dispositions du règlement n° 17 n'ont investi la Commission du pouvoir d'adopter des décisions obligatoires à l'égard des Etats membres.En effet, si l'article 3, paragraphe 1, de ce dernier règlement prévoit que la Commission peut obliger par voie de décision des entreprises ou associations d'entreprises à mettre fin aux infractions au droit de la concurrence qui leur sont reprochées, cette disposition n'habilite pas la Commission à obliger un Etat membre à arrêter certaines mesures dans son droit national comme, par exemple, à modifier la réglementation nationale relative à la prime d'incitation dont il est question dans la lettre attaquée.
71. Quant à l'article 11, paragraphe 1, du règlement n° 17, qui dispose que "dans l'accomplissement des tâches qui lui sont assignées... la Commission peut recueillir tous les renseignements nécessaires auprès des gouvernements et des autorités compétentes des Etats membres...", il convient de constater que cette disposition ne saurait servir de base légale à une décision contraignant le Royaume des Pays-Bas à instaurer le système de contrôle dont il est question dans la lettre attaquée.
72. Une compétence de la Commission pour adopter des décisions de nature à lier les Etats membres ne saurait être non plus tirée de la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle le traité impose aux Etats membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures législatives ou réglementaires susceptibles d'éliminer l'effet utile des articles 85 et 86 du traité (voir, par exemple, l'arrêt du 1er octobre 1987, Vereniging van Vlaamse Reisbureaus, 311-85, Rec. p. 3801, 3826). Cette obligation trouve son origine dans l'article 5 du traité, qu'il convient d'interpréter à la lumière des articles 3, sous f), et 85. Or, l'article 5 du traité ne confère pas à la Commission le pouvoir d'adresser aux Etats membres des décisions obligatoires (ordonnance du 30 septembre 1987, Brogher Industries, 229-86, précitée).
73. Il est vrai que l'article 89 habilite la Commission à prendre des décisions à l'égard des Etats membres pour constater des infractions au droit de la concurrence. Cette disposition transitoire ne vise cependant que les situations dans lesquelles des dispositions d'exécution des articles 85 et 86, telles que le règlement n° 17, font défaut.
74. En revanche, l'article 90, paragraphe 3, du traité a donné à la Commission compétence pour adresser des décisions appropriées aux Etats membres afin de veiller à ce que ceux-ci respectent les règles du traité, et, notamment, celles de l'article 90 en ce qui concerne les entreprises relevant du champ d'application de cette disposition.Il ressort cependant clairement de la lettre attaquée qu'elle n'a pas été fondée sur cette disposition.
75. Il y a donc lieu de constater que la lettre litigieuse ne repose pas sur une base juridique habilitant la Commission à adopter une décision qui pourrait lier le Royaume des Pays-Bas. Il s'ensuit qu'elle n'a pas produit d'effets juridiques obligatoires à l'égard de cet Etat membre.
76. Ce résultat ne saurait être infirmé par le fait que le Gouvernement néerlandais avait sollicité cette prise de position avec l'intention de s'y conformer et qu'il a scrupuleusement respecté les observations formulées dans la lettre litigieuse lorsqu'il a pris les mesures réglementaires nécessaires pour mettre en œuvre l'accord OPA. Ni l'intention des autorités néerlandaises de se conformer à la position que la Commission adopterait à l'égard de l'accord OPA, ni le fait qu'elles ont suivi à part entière les propositions contenues dans la lettre de Sir Léon Brittan n'impliquent que celle-ci ait créé une obligation juridique à cet effet.
77. Il convient d'ajouter que la lettre litigieuse ne saurait se voir reconnaître des effets obligatoires sur la base d'une règle de droit néerlandais qui empêcherait le Gouvernement d'autoriser la mise en œuvre de l'OPA tant que subsisteraient des doutes sur sa validité. Il n'appartient pas au Tribunal de se prononcer, en l'espèce, sur l'existence d'une telle règle, invoquée par les requérantes. A supposer cependant que le droit national interdise aux pouvoirs publics néerlandais d'adopter, en droit administratif interne, des mesures susceptibles d'entrer en conflit avec le droit communautaire, il y a lieu d'observer que l'application d'une telle règle relèverait de la compétence des autorités nationales. A cette fin, il leur incomberait d'apprécier, sous leur propre responsabilité, la compatibilité des mesures envisagées avec le droit communautaire.
78. Dans ce contexte, la prise de position de Sir Léon Brittan ne se présente pas comme une décision qui aurait eu pour effet de contraindre le Gouvernement néerlandais à refuser le "feu vert" à la version originelle de l'accord OPA, mais comme un acte dont les effets étaient comparables à ceux d'un avis et qui a pu être utilisé par les autorités nationales pour vérifier la validité de l'accord OPA. En effet, ce n'est pas une lettre de la Commission qui peut être à l'origine de doutes sur ce point ; la nullité d'un accord qui est contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité découlant, de plein droit, de l'article 85, paragraphe 2.
79. Il ressort de la correspondance entre le Gouvernement néerlandais et la Commission que le comportement de ce Gouvernement s'explique par le souci d'éviter, en adaptant volontairement la réglementation nationale de manière à se conformer à la position exprimée dans la lettre du membre de la Commission, le risque d'agir en violation du droit communautaire lors de la mise en œuvre de l'accord OPA. Le traité, notamment dans ses articles 155 et 189, premier alinéa, envisage d'ailleurs expressément une telle coopération volontaire entre les autorités nationales et les institutions communautaires en incluant, parmi les actes que peuvent adopter les institutions et notamment la Commission, les recommandations et les avis. Cette habilitation expresse à adopter des actes dépourvus de force obligatoire démontre que le respect volontaire des actes non contraignants des institutions est un élément essentiel dans la réalisation des buts du traité. il s'ensuit que le caractère non obligatoire d'une prise de position de la part d'une institution communautaire ne saurait être mis en question par le fait que le Gouvernement destinataire de l'acte s'y est conformé.
80. Il convient d'ajouter qu'il ne résulte ni du libellé ni du contenu de la lettre litigieuse qu'elle visait à produire des effets de droit quelconques.
81. Ainsi que la Commission l'a souligné, un indice à cet effet résulte de l'absence d'une décision collégiale de la Commission. A la différence des hypothèses dans lesquelles la Cour a reconnu la qualité d'acte attaquable à des lettres signées par des fonctionnaires de la Commission (voir, par exemple, l'arrêt du 15 mars 1967, Cimenteries/Commission, 8 à 11-66, Rec. p. 93), la lettre attaquée ne se présente ni comme la communication d'une décision prise par l'institution, ni comme ayant été écrite au nom de la Commission ou en vertu d'une délégation de pouvoir, système dont la Cour a reconnu la validité dans son arrêt du 23 septembre 1986(Akzo/Commission, 5-85, Rec. p. 2579, 2614). Elle apparaît davantage comme ayant été écrite par Sir Léon Brittan en son propre nom et dans le contexte d'un échange de vues entre hommes politiques.
82. En outre, le langage utilisé par Sir Léon Brittan pour indiquer au Gouvernement néerlandais les modifications au régime prévu par l'accord OPA qui lui paraissent souhaitables avant qu'une décision positive puisse être envisagée à l'égard dudit accord n'est pas celui d'un acte obligatoire. Ainsi, à propos de la fixation du taux de la prime d'incitation à 20 %, se borne-t-il à dire "je vous propose" (zstel ik u voor"). De même, en ce qui concerne l'instauration d'un système de contrôle, les termes employés indiquent-ils qu'il n'est pas envisagé d'imposer un tel système, mais que sa mise en place dépendrait de la coopération volontaire du Gouvernement néerlandais.
83. Pour toutes ces raisons, le Tribunal constate que la lettre adressée le 6 mars 1989 par Sir Léon Brittan aux deux secrétaires d'Etat néerlandais ne peut pas être qualifiée de décision à l'égard du Royaume des Pays-Bas.
2. Sur les effets des lettres attaquées à l'égard des requérantes
84. Il convient ensuite d'examiner si la lettre de Sir Léon Brittan, prise isolément ou bien conjointement avec les trois lettres du directeur Rocca visées à titre subsidiaire par le présent recours, constitue une décision à l'égard des requérantes.
85. A cet égard, il convient d'abord d'examiner la thèse soutenue par les requérantes, selon laquelle cette lettre contient une appréciation définitive de la version initiale de l'accord OPA au regard de l'article 85 du traité, de sorte que ses effets à l'égard des parties à l'accord sont identiques à ceux d'une décision d'interdiction prise conformément à l'article 3 du règlement n° 17, soit à une décision d'exemption, assortie de conditions restrictives, prise conformément à l'article 8, paragraphe 1, dudit règlement.
86. La lettre du membre de la Commission indique que, selon toute probabilité, les effets anticoncurrentiels attachés à l'accord dans sa version originelle ne permettront pas l'octroi d'une exemption au titre de l'article 85, paragraphe 3, du traité. il ressort cependant des termes de cette lettre que l'examen de l'accord au regard du droit de la concurrence était toujours en cours. C'est ce qu'atteste notamment la réserve qui y est expressément faite des droits procéduraux des parties à l'accord OPA. Pour les requérantes, cette réserve signifie qu'elles ont le droit de recevoir une communication des griefs et de pouvoir y répondre avant que la Commission ne prenne, au titre de l'article 3 du règlement n° 17, une décision d'interdiction qui pourrait les lier juridiquement. Elle démontre en outre que le membre de la Commission n'envisageait nullement d'adopter, à l'égard des requérantes, une mesure équivalant à une décision d'interdiction en dehors du cadre du règlement n° 17.
87. Les lettres attaquées n'ont pas non plus produit des effets comparables à ceux d'une décision d'exemption assortie de conditions et de charges lesquelles, selon la jurisprudence de la Cour, sont susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation (voir l'arrêt du 23 octobre 1974, Transocean Marine Paint/Commission, 17-74, Rec. p. 1063, 1080). Lesdites lettres ne constituent, en effet, que le point de départ de l'examen de l'accord OPA, visant à déterminer si une telle exception pourra être accordée. Il s'ensuit que les modalités auxquelles la lettre de Sir Léon Brittan a subordonné la possibilité, en fin d'examen, d'une décision favorable ne peuvent pas être assimilées, quant à leurs effets, aux conditions inscrites, en vertu de l'article 8, paragraphe 1, du règlement n° 17, dans une décision d'exemption.
88. Il convient encore de rechercher si les lettres attaquées ont produit des effets juridiques à l'égard des requérantes en définissant de manière obligatoire les modalités de la mise en œuvre de l'accord OPA en ce qui concerne le taux de la prime d'incitation et l'instauration du système de contrôle.
89. A cet égard, il y a lieu de tenir compte du pouvoir de la Commission d'adopter, avant même qu'elle ne se prononce définitivement sur un accord qui lui a été notifié ou sur une plainte dont elle est saisie, des mesures provisoires en vue de parer à une situation de nature à causer un préjudice grave et irréparable à la partie plaignante ou intolérable pour l'intérêt général (voir, par exemple, l'ordonnance de la Cour du 17 janvier 1980, 792-789 R, Camera Care, précitée, Rec. p. 119, 130).
90. L'examen des lettres attaquées démontre cependant qu'elles ne peuvent pas être assimilées à des décisions instaurant de telles mesures provisoires à caractère obligatoire, mais qu'elles laissent aux parties à l'accord OPA toute liberté pour s'y conformer ou non. Cela vaut tant pour la modification du taux de la prime d'incitation que pour la mise en place du système de contrôle.
91. Il est vrai que Sir Léon Brittan, dans sa lettre du 6 mars 1989, envisageait la possibilité d'une adaptation, par les parties, des dispositions de l'accord OPA aux modalités qu'il proposait aux autorités néerlandaises.Cependant, cette modification de l'accord sur le plan du droit privé demeurait entièrement subordonnée au consentement des parties. Il ressort d'ailleurs de la lettre du directeur Rocca, en date du 4 avril 1989, que la requérante Nefarma a accepté de procéder à cette modification.
92. Il y a lieu d'ajouter que les deux lettres relatives au système de surveillance que le directeur Rocca a adressées aux requérantes les 4 et 28 avril 1989 ne changent rien au caractère volontaire de ce régime. La première de ces lettres se borne en effet à en préparer la mise en place en précisant les modalités du contrôle envisagé dans la lettre de Sir Léon Brittan. Si, par la lettre du 28 avril 1989, la Commission a demandé des renseignements précis à Nefarma et à ses membres, il convient cependant de relever que cette lettre ne correspond même pas aux exigences requises par l'article 11, paragraphe 3, du règlement n° 17 dans le cas d'une demande de renseignements non obligatoire. A plus forte raison, elle ne saurait être assimilée à une demande de renseignements par voie de décision contraignante au titre de l'article 11, paragraphe 5, dudit règlement.
93. Contrairement aux allégations des requérantes, les lettres du directeur Rocca ne démontrent d'ailleurs pas que la lettre de Sir Léon Brittan ait reflété le point de vue de la Commission en tant qu'institution. Il est vrai que le directeur Rocca s'est référé, dans ses lettres, à des décisions futures de la Commission. Cependant, cela n'implique pas que la Commission avait déjà pris, dans le passé, une décision. Ni Sir Léon Brittan ni le directeur Rocca ne se sont référés, dans leurs lettres, à une décision que l'institution aurait prise précédemment.
94. En revanche, l'obstacle juridique qui a empêché la mise en œuvre de l'accord OPA tel qu'il avait été conclu à l'origine par les parties a tenu au fait que les autorités néerlandaises ont modifié le cadre réglementaire dans lequel l'accord devait s'insérer, notamment la réglementation relative à la prime d'incitation, conformément aux indications contenues dans la lettre de Sir Léon Brittan. Ces mesures réglementaires prises par les autorités nationales lient effectivement les requérantes.
95. Il convient cependant de rappeler que le Tribunal a constaté, ci-dessus, que ces mesures ont été prises volontairement et en l'absence d'une décision de la Commission ayant produit des effets juridiques à l'égard du Gouvernement néerlandais. Il s'ensuit que les effets contraignants qui découlent, pour les requérantes, des actes pris par les autorités nationales ne sont pas imputables à la Commission et ne sauraient, dès lors, être considérés comme des effets produits par les lettres attaquées.
96. Les dites lettres sont donc dépourvues d'effets obligatoires à l'égard des requérantes.
3. Sur la protection juridictionnelle due aux particuliers
97. Les requérantes ont encore fait valoir que la protection juridictionnelle due aux particuliers ne serait pas suffisamment garantie si le Tribunal admettait que la Commission puisse procéder, aux fins de l'application du droit de la concurrence, à une concertation avec les autorités nationales, débouchant sur des mesures obligatoires pour les justiciables sr le plan national, sans que ses prises de position dans ce cadre soient soumises à un contrôle par le juge communautaire.
98. A cet égard, il y a lieu d'observer que la protection juridictionnelle que revendiquent les requérantes viserait, en substance, à obtenir du Tribunal une constatation relative à la compatibilité de leur accord avec le droit communautaire de la concurrence et au bien-foncé de la position prise par Sir Léon Brittan dans sa lettre du 6 mars 1989. Or, une telle forme de protection juridictionnelle n'est pas prévue par l'article 173 du traité. S'il est vrai que les dispositions concernant le droit d'agir des justiciables ne sauraient être interprétées restrictivement (voir l'arrêt de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25-62, Rec. p. 197, 222), ce serait cependant outrepasser les limites de l'interprétation du traité que d'accueillir un recours qui serait étranger à cette disposition.
99. Pour toutes ces raisons, le Tribunal constate que la lettre adressée le 6 mars 1989 par Sir Léon Brittan au secrétaire d'Etat néerlandais aux affaires économiques et à son homologue du ministère du Bien être, de la Santé publique et de la Culture, prise isolément ou conjointement avec les trois lettres du directeur Rocca, en date du 16 mars et des 4 et 28 avril 1989, visées à titre subsidiaire par le présent recours, n'a produit d'effets juridiques obligatoires ni à l'égard du Royaume des Pays-Bas, ni à l'égard des requérantes et que, dès lors, une décision susceptible de recours fait, en l'espèce, défaut.
100. Il convient donc de rejeter le présent recours comme irrecevable sans qu'il y ait lieu d'examiner la question de savoir si la lettre que Sir Léon Brittan a adressée au Gouvernement néerlandais concerne directement et individuellement les requérantes.
Sur les dépens
101. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable mutatis mutandis à la procédure devant le Tribunal en vertu de l'article 11, troisième alinéa, de la décision du Conseil du 24 octobre 1988, précitée, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Les parties requérantes ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la Commission et de les condamner solidairement aux dépens. N'ayant pas conclu sur ce point, la partie intervenante supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre),
déclare et arrête :
1. Le recours est rejeté comme irrecevable.
2. Les parties requérantes sont condamnées solidairement aux dépens, à l'exception des dépens exposés par la partie intervenante qui seront supportés par celle-ci.