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Décisions

CCE, 7 décembre 1988, n° 89-93

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Verre plat

CCE n° 89-93

7 décembre 1988

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, vu le règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par l'acte d'adhésion de l'Espagne et du Portugal, et notamment ses articles 3 et 15, vu la demande présentée à la Commission, conformément à l'article 3 du règlement n° 17, par Industria Vetraria Alfonso Cobelli di Reggio Calabria, le 31 octobre 1986, accusant Società Italiana Vetro-SIV SpA, Fabbrica Pisana SpA et Vernante Pennitalia SpA d'avoir enfreint les règles de concurrence, vu la décision de la Commission, du 15 octobre 1987, d'engager, d'office et sur plainte, une procédure dans cette affaire, après avoir donné aux parties concernées l'occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission, conformément aux dispositions de l'article 19 paragraphe 1 du règlement n° 17 et du règlement n° 99-63-CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19 paragraphes 1 et 2 du règlement n° 17 du Conseil (2), après consultation du Comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, considérant les points de fait et de droit suivants :

I. LES FAITS

Introduction

(1) La présente décision fait suite à des vérifications entreprises en juillet et en octobre 1986, au titre de l'article 14 paragraphe 2 du règlement n° 17, auprès des trois producteurs italiens de verre plat et auprès d'un grossiste, ainsi qu'à des vérifications entreprises en janvier 1987, au titre de l'article 14 paragraphe 3 du même règlement, auprès des trois producteurs italiens. Entre les vérifications effectuées en 1986 et celles effectuées en 1987, l'Industria Vetraria Alfonso Cobelli di Reggio Calabria a présenté à la Commission, en date du 31 octobre 1986, une plainte, au titre de l'article 3 du règlement n° 17, visant à faire constater des infractions aux règles de concurrence commises par Società Italiana Vetro, Fabbrica Pisana et Vernante Pennitalia.

A. Le marché

1. Le produit

(2) Le produit faisant l'objet de la présente décision est le verre plat dans toutes ses variétés. Selon les procédés de fabrication utilisés, on distingue essentiellement trois types de verre plat :

- le verre étiré, qui se présente comme une feuille incolore et transparente, utilisée pour produire du verre à vitres,

- le verre coulé, qui se présente comme une feuille de surface inégale, non transparente, obtenue par laminage,

- le cristal, qui se présente comme une feuille transparente dont les deux faces sont d'un parallélisme presque parfait ; il peut être obtenu par coulée continue ou par le procédé float. Ce dernier procédé est le plus utilisé pour la production du verre plat.

(3) La production industrielle du verre float a commencé au début des années 60 : grâce à ses caractéristiques et à ses coûts de production relativement bas par rapport à la qualité, il a rapidement remplacé les autres types de verre. Actuellement plus de 90 % du verre plat est fabriqué au moyen du procédé float.

(4) Le verre plat peut être utilisé tel quel (par exemple verre à vitres) ou transformé (par exemple verre destiné au marché automobile, verre destiné au bâtiment, miroiterie, etc.) ; entre 70 et 80 % du verre produit est transformé, soit directement par les producteurs soit par des spécialistes. Le verre plat destiné au marché automobile, qui est exclusivement un verre transformé, est traité uniquement par les producteurs de verre ; en revanche, le verre plat destiné au bâtiment et à l'ameublement est transformé soit par les producteurs de verre, s'ils appartiennent à une intégration verticale, soit par des transformateurs indépendants.

(5) À l'intérieur du secteur, on peut distinguer deux marchés : d'une part, le marché automobile, ou, d'une manière plus générale, le secteur des transports, et, d'autre part, le marché hors automobile, lequel comprend principalement le secteur du bâtiment. Le premier marché comprend essentiellement le verre destiné à l'industrie automobile et, dans une moindre mesure, celui destiné aux chemins de fer, navires, ponts-roulants. Le second marché comprend, outre le vitrage pour bâtiment proprement dit, le verre d'ameublement, les miroirs, le verre destiné au secteur électroménager, etc.

Le marché automobile est approvisionné directement par les producteurs de verre ; le marché hors automobile est approvisionné, pour une très faible partie, par les producteurs de verre et normalement par le canal des grossistes, des grossistes-transformateurs et des transformateurs.

(6) Les tableaux en annexe 1 donnent l'évolution du marché italien du verre plat.

L'Italie constitue, avec l'Allemagne, un des plus importants marchés d'Europe : le marché italien représente, en fait, ± 20 % du marché européen, tant pour ce qui est du marché automobile que du marché hors automobile.

2. L'offre

(7) Dans la période considérée, les trois producteurs locaux, destinataires de la présente décision, ont pu satisfaire en moyenne 79 % de la demande italienne de verre hors automobile et 95 % de la demande italienne de verre automobile.

(8) Fabbrica Pisana SpA (en abrégé : "FP") est une filiale du groupe Saint-Gobain, qui figure parmi les plus importants groupes industriels du monde. Saint-Gobain possède en Italie, par l'intermédiaire de FP ou d'autres sociétés du groupe, les sociétés suivantes, présentes dans le secteur du verre : Luigi Fontana SpA, Balzaretti e Modigliani SpA, Home Glas SpA, Saint-Gobain Italiana Auto srl, Toscana Glas SpA, Flovetro SpA. Luigi Fontana SpA est le plus grand grossiste-transformateur du marché italien. FP possède, par l'intermédiaire de Toscana Glas, une ligne float à Pise et une ligne float en commun avec Società Italiana Vetro SpA (en abrégé : "SIV") à San Salvo, exploité par Flovetro, et est resté le seul producteur de verre coulé en Italie.

(9) SIV est une société contrôlée par la holding d'État EFIM. Elle possède une ligne float à San Salvo et une ligne float en commun avec FP à San Salvo, exploité par Flovetro. Depuis qu'elle a pris, en 1986, le contrôle de Veneziana Vetro, SIV a fermé les fours de verre étiré et les a remplacés par une ligne float qui est entré en production à la fin de 1987.

SIV possède les sociétés suivantes opérant dans le secteur du verre : Vetro Europa SpA en Italie et Sivesa en Espagne qui produisent du verre pour l'industrie automobile (ci-après : "verre automobile") ; Società Vetri Speciali à San Salvo qui produit des verres réfléchissants ; les sociétés de commercialisation du verre SIV- Deutschland à Francfort et SIV-France à Paris. Depuis 1986, elle contrôle la société belge de production de verre automobile, Splintex SA, filiale commune de SIV et Glaverbel, et a cédé à Glaverbel le contrôle de sa société productrice de miroirs Ilved.

(10) Vernante Pennitalia SpA (en abrégé : "VP") est une filiale du groupe américain PPG-Industries Inc., à Pittsburg (en abrégé "PPI"). Elle possède une ligne float à Cuneo et une ligne float à Salerno et contrôle la société Pennitalia Securglass qui produit du verre automobile.

Le groupe PPG a acheté, en 1982, à BSN, Boussois, une société de grande tradition dans le secteur verrier et ayant une position solide sur le marché français du verre automobile et hors automobile.

(11) Les parts de marché des trois sociétés, calculées sur la base des données figurant à l'annexe 2, s'établissent comme suit :

EMPLACEMENT TABLEAU

Au niveau européen, les parts de marché des trois sociétés ou des groupes auxquels elles appartiennent sont estimées à :

EMPLACEMENT TABLEAU

(12) Au niveau européen, le marché du verre plat est dominé par un oligopole étroit qui comprend, outre les groupes susmentionnés, Pilkington, Glaverbel (groupe Asahi) et Guardian. Il s'agit de groupes intégrés en amont de l'activité verre (produits réfractaires, carrières de sable silicieux, chimie de base) et en aval (transformation de fibres de verre et de verre plat).

Le degré de diversification géographique des six groupes en Europe est le suivant :

- Saint-Gobain est présent en France, Belgique, Allemagne, Italie, Espagne et Autriche et possède dix lignes float et demies au total,

- Pilkington est présent au Royaume-Uni, en Allemagne, en Suède et en Autriche et possède sept lignes float au total,

- PPG est présent en Italie et en France et possède quatre lignes float au total,

- Glasverbel est présent en Belgique, aux Pays-Bas et en Espagne et possède trois lignes float,

- SIV est présent en Italie, France, Allemagne et Espagne et possède deux lignes float et demies,

- Guardian possède une ligne float à Luxembourg et une autre en Espagne.

Selon les données du Groupement européen des producteurs du verre plat (en abrégé : "GEPVP"), la production communautaire a suffi amplement à satisfaire la demande dans les années 1980 à 1987, les exportations vers les pays tiers ayant toujours été supérieures aux importations en provenance des pays tiers. Selon les prévisions formulées par le GEPVP, en juin 1986 pour la Communauté à dix et valables jusqu'à 1996 et en juin 1987 pour la Communauté à douze et valables jusqu'à 1989, la demande communautaire de verre ne s'accroîtra, dans les hypothèses optimistes, que de 1 à 3 % par an. Le GEPVP prévoit donc que la situation de surcapacité productive, élevée au début des années 80, persistera, bien qu'atténuée, dans les années à venir.

D'après les indications fournies par FP, l'investissement moyen pour une ligne float de 150 000 tonnes par an représente environ 70,5 à 86 millions d'écus en site existant, et le double de ces montants en nouveau site. Dans ces conditions, il est à exclure que d'autres producteurs entrent, dans un avenir prévisible, dans le marché.

(13) Pour ce qui est du marché automobile, l'activité de transformation en tous ses aspects (feuilleté, trempé vertical, trempé horizontal) requiert des lignes de production différentes pour chaque technique (latéraux, pare-brise feuilleté, lunettes chauffantes), outre les outils nécessaires aux phases initiales de découpe et de façonnage et outre les opérations de formage et de trempe. Chaque ligne intègre de multiples opérations, différentes selon les lignes de produit. Ces lignes sont conçues spécialement en fonction des formes et des spécifications techniques définies par la demande. Il en résulte une obsolescence technique assez rapide, qui intervient au bout de sept à huit ans en fonction de l'évolution technique de la construction automobile.

Les formes et les spécifications techniques requises par les constructeurs automobiles entraînent des investissements importants tant au niveau de la production qu'à ceux de la recherche et du développement. D'après les indications fournies par FP, le coût d'une ligne de transformation est difficile à calculer, vu le caractère spécifique de chaque outil, mais peut être évalué à 40 millions d'écus pour la fabrication de garnitures pour 650 000 automobiles par an. Il s'ensuit que peu d'entreprises sont capables d'assumer les coûts et les risques de la transformation du verre automobile.

3. La demande

(14) La clientèle des producteurs de verre plat hors automobile est constituée de grossistes et de transformateurs. Environ 40 % de la demande passent directement des transformateurs aux producteurs ; les 60 % restants passent des grossistes aux producteurs. Les grossistes transforment eux-mêmes au moins la moitié du verre acheté, le restant étant vendu en faible quantité aux petits transformateurs et pour la plus grande part directement aux utilisateurs finals.

La transformation consiste dans la fabrication de verres de sécurité, verres isolants, miroirs, etc. Les transformateurs se trouvent souvent en concurrence avec les producteurs de verre plat qui ont intégré une activité de transformation. Parfois ces transformateurs sont dépendants du transfert de technologie de la part des producteurs de verre et fabriquent donc les produits transformés sous licence octroyée par leurs fournisseurs.

(15) La clientèle des producteurs de verre automobile est constituée des constructeurs automobiles. Avant de leur être vendu, le verre est transformé par les producteurs de verre ou par leurs filiales en fonction des modèles et des caractéristiques techniques requises par lesdits constructeurs.

Les relations entre producteurs verriers et constructeurs automobiles se déroulent de la façon suivante. Lorsque le bureau d'étude d'un constructeur définit un nouveau modèle, il est fait appel à un ou au maximum deux fournisseurs verriers qui sont chargés de la réalisation de pièces spécifiques. La géométrie du vitrage subit une évolution constante, d'abord au niveau du prototype, puis lors de la fabrication limitée en usine pilote. À ce stade les fournisseurs verriers sont payés sur base d'un tarif dit "prototype", qui est indépendant du modèle et qui tient compte uniquement du type de vitrage concerné. Lorsqu'il est décidé de passer au lancement commercial du nouveau modèle d'automobile, le constructeur fait appel à d'autres fournisseurs verriers auxquels les fournisseurs initiaux doivent totalement ou partiellement céder la place. Ces nouveaux fournisseurs reprennent alors les caractéristiques techniques et qualitatives du produit qui avaient été développées et mises au point par les premiers fournisseurs. C'est au stade de la commercialisation du nouveau modèle d'automobile que fournisseurs verriers et constructeurs automobiles négocient, normalement sur une base annuelle, prix et quantités.

(16) Le marché du verre non destiné au secteur automobile a été caractérisé, dans les années 1979 à 1983, par une chute de la demande, conjointement à la phase de récession de l'économie européenne. Depuis 1984, la demande a repris, permettant aux producteurs, surtout à partir du deuxième semestre de 1985, de réaliser des augmentations considérables de prix. Ainsi qu'il a été dit au point 12, la demande de verre devrait, selon les prévisions de la profession, augmenter, dans la prochaine décennie, de 1 à 3 % par an.

(17) Le marché du verre automobile est strictement lié à l'évolution du secteur de la construction automobile, qui a connu en Europe et en Italie, après le deuxième choc pétrolier, une phase de récession jusqu'en 1984. Ce n'est qu'à partir de 1985 qu'on a constaté une certaine reprise de la production qui s'est intensifiée en 1986 et en 1987. Selon les prévisions, l'augmentation de la demande de verre automobile, dans la prochaine décennie, devrait être inférieure à celle du verre non destiné au secteur automobile.

B. Le comportement des entreprises

4. Le marché du verre non destiné au secteur automobile

a) L'identité des tarifs

(18) Les trois producteurs italiens ont envoyé, à des dates rapprochées et parfois les mêmes jours (voir annexe 3) des tarifs identiques à leur clientèle italienne. L'initiative des modifications tarifaires n'a pas toujours été prise par le même producteur, mais tantôt par l'un tantôt par l'autre des trois producteurs.

(19) L'identité ou le rapprochement des dates d'envoi des tarifs à la clientèle n'a pas eu, comme il a été prétendu, un caractère fortuit, car les trois producteurs ont expédié le même jour ou dans un bref laps de temps au moins la moitié des tarifs examinés.

L'égalité des modifications à la hausse des tarifs n'est pas la conséquence de l'homogénéité des produits et de l'existence d'une situation d'oligopole sur le marché. En effet, ainsi que FP et VP l'ont admis dans leurs mémoires en réponse, le producteur qui prend l'initiative d'une augmentation de prix court toujours le risque de ne pas être suivi par ses concurrents et donc de perdre des commandes et des parts de marché. C'est pour éviter un tel risque et pour éviter ce qui est arrivé à VP - qui a dû annuler, en novembre 1981, l'augmentation de prix annoncée au mois de septembre précédent parce que FP et SIV n'ont pas suivi la modification tarifaire de VP - que chaque producteur a pris la précaution de vérifier la disponibilité à la modification tarifaire des autres intervenants sur le marché. Après l'incident arrivé à VP en 1981, il n'est jamais plus arrivé qu'une hausse de prix ne soit immédiatement suivie par tous les producteurs et cela malgré le fait que, au moins jusqu'à la fin de 1983, la demande était en baisse et que, dans les années successives, une situation de surcapacité productive a continué à persister, malgré la croissance du marché.

b) L'identité des rabais

(20) Les trois producteurs ont appliqué aux tarifs des rabais identiques en fonction des catégories ou des niveaux dans lesquels les clients ont été classifiés. Alors que les tarifs ont été envoyés indistinctement à tous les clients, la classification des clients en catégories ou niveaux et la liste des rabais n'ont pas été divulguées.

Les rabais en pourcentage par catégories ou niveaux appliqués aux tarifs ont été les suivants :

- 1983 :

A : 10 + 5 + 15 + 5

B : 10 + 5 + 15

C : 10 + 5 + 8

- 1984 :

A : 10 + 5 + 15 + 5

B : 10 + 5 + 15 + 3

C : 10 + 5 + 15

- 1985 :

A : 10 + 5 + 15 + 5 + 5 + 4

B : 10 + 5 + 15 + 5 + 5 + 2,5

C : 10 + 5 + 15 + 5 + 5

(21) La coïncidence auprès de trois producteurs des échelles de rabais consentis aux clients ne s'explique pas par des facteurs objectifs, comme, par exemple, les quantités achetées auprès d'un producteur ou les conditions de paiement. En effet, ainsi qu'il a été admis à l'audition, chaque client achète normalement la plus grande partie de ses besoins auprès d'un fournisseur et répartit le restant de ses besoins parmi les autres producteurs, étant assuré que, quelles que soient les quantités qu'il va acheter auprès des différents fournisseurs, il obtiendra toujours les mêmes conditions. Ne peut être considéré comme pratique commerciale normale le fait que celui qui achète de grandes quantités auprès d'un fournisseur ait les mêmes rabais que celui qui achète des quantités minimes, surtout lorsqu'il s'agit de produits homogènes et banals, pour lesquels la seule concurrence possible, vu qu'une différence de qualité ou d'autre nature est à exclure, est celle sur les prix et les conditions de vente.

c) L'identité des clients les plus importants classifiés dans ces catégories ou niveaux

(22) Les clients les plus importants, c'est-à-dire ceux qui représentent plus de la moitié de la demande, ont été classés dans la même catégorie ou niveau lorsqu'ils se sont approvisionnés auprès de l'un ou de l'autre producteur [voir annexe 4 (3)]. On constate dans le tableau en annexe 4 deux exceptions parmi les vingt premiers clients et quelques exceptions parmi les clients moins importants, classés dans les listes A et B. Ces exceptions sont dues au fait que quelques producteurs, tels que VP, visent à privilégier les transformateurs ou parce que chaque producteur essaye de privilégier certains clients dans certaines régions, ainsi qu'il ressort d'une note manuscrite relative à une réunion entre SIV et FP du 30 janvier 1985 (voir point 27 ci-dessous).

La classification des clients en catégories ou niveaux n'a pas dépendu du volume d'achat de chaque client auprès d'un même producteur, mais du volume d'achat global de chaque client auprès de l'ensemble des producteurs.

Cette classification a été mise à jour plusieurs fois au cours des années prises en considération (voir tableau en annexe 5, qui n'a pu comprendre que la classification à partir de 1984).

(23) VP a nié l'existence chez elle d'une répartition en catégories des clients. Le fait de la non-existence d'une classification formelle ne signifie pas que VP n'a pas mis en pratique le système. Ce qui importe, ce n'est pas la forme, mais la réalité du comportement. D'ailleurs, VP admet, dans son mémoire en réponse, avoir pratiqué non seulement les mêmes tarifs et les mêmes rabais de base, mais aussi la même politique de prix que ses concurrents vis-à-vis des clients.

Les trois producteurs ont fait valoir que la répartition en catégories des clients répond à des critères objectifs propres à chaque entreprise tels que le volume des achats, la solvabilité, la gestion et le développement.

Si chaque entreprise affirme posséder ses propres critères, internes et secrets, en la matière, le client ne peut pas être le moyen de circulation de l'information d'un producteur à l'autre, car il ne peut pas connaître ces critères, mais uniquement le rabais qui lui a été accordé. Il n'est donc pas plausible que chaque client fasse circuler une information interne et secrète à chaque producteur pour permettre aux autres producteurs d'adapter leurs listes de clients dans un bref laps de temps, fût-ce même relatif, ou le même jour, comme c'est le cas pour les variations de listes de FP et de VP des 1er janvier 1984, 1er janvier 1985 et 1er août 1985.

Les tableaux contenus dans le mémoire en réponse de FP et l'observation de VP, selon laquelle elle a accordé des rabais élevés à un plus grand nombre de clients, confirment ce que la Commission avait affirmé dans la communication des griefs, à savoir que les différences de classement entre FP et SIV sont minimes (1 client sur 23 pour la liste A de 1985, 3 clients sur 25 pour la liste A de 1986) et que la plus grande différence qu'on rencontre chez VP est due au fait que ce producteur, qui n'a pas une activité de transformation comme FP et SIV, privilégie un certain nombre de transformateurs, alors qu'il pratique vis-à-vis des grossistes les plus importants la même politique de prix que ses concurrents.

Le tableau en annexe 4 prouve que les principaux grossistes sont classés par les trois producteurs dans la même catégorie.

Les observations de FP selon lesquelles le principal critère de classement serait le volume d'affaires réalisé auprès d'elle sont contredites par les faits suivants.

La comparaison des tableaux fournis par FP dans le mémoire en réponse montre que des clients qui ont acheté de plus grandes quantités auprès de FP sont classés en catégorie B alors que des clients qui ont acheté de moindres quantités sont classés en catégorie A. En outre, il y a 9 grossistes sur 23 en 1985 ([ . . . ]) et 8 grossistes sur 25 en 1986 ([ . . . ]) classés en catégorie A sans que leurs achats rentrent dans les fourchettes volume d'affaires produites par FP dans son mémoire.

d) Les éléments de concertation entre les producteurs

(24) L'égalité des tarifs et des échelles de rabais ainsi que l'uniformité de la classification des clients les plus importants en catégories ou niveaux est le résultat d'ententes entre les producteurs convenues directement au cours de rencontres, de réunions ou de contacts ou par l'intermédiaire du porte-parole des clients les plus importants.

Les preuves documentaires de ces ententes, qui ont été toutes communiquées avec la communication des griefs aux entreprises destinataires de la présente décision, sont énumérées ci-après.

(25) Au cours de la réunion du 12 juillet 1983 avec FP, Socover s'est plaint au représentant de FP du fait que SIV et VP n'avaient pas respecté les engagements vis-à-vis des grossistes en ce qui concerne les rabais et les conditions de paiement (note manuscrite de Socover du 12 juillet 1983). Les parties ont présenté trois interprétations de cette note. D'après la déclaration écrite de Socover, produite par VP, Socover se plaignait du fait que SIV et VP n'auraient pas respecté les engagements pris pour essayer d'obtenir de meilleures conditions de la part de FP. D'après FP, par contre, c'était elle qui se plaignait du fait que SIV et VP n'avaient pas respecté les engagements. Selon SIV, enfin, les engagements dont on parle dans la note sont les engagements de chaque producteur vis-à-vis de Socover.

La note mentionne, à l'évidence, des engagements sur les rabais ("échelles de rabais et supercrédit") de la part des trois producteurs vis-à-vis de tous les grossistes. En fait, Socover, porte-parole des grossistes, ne parle pas de non-respect des engagements vis-à-vis de lui, mais de tous les grossistes, ce qui est confirmé par le mémoire en réponse de FP qui écrit : "Fabbrica Pisana avait appris, par les opérateurs du verre, que la SIV avait, à cette époque, du verre en dépôt chez ses principaux clients grossistes : ceux-ci ont ainsi pu prélever du verre au tarif ancien durant les mois de mai et juin. Pour répondre à cette action, Vernante Pennitalia avait abaissé son prix pour le Planilux 4 mm à 4 640 lires italiennes en le vendant comme "deuxième choix".

(26) Le 30 octobre 1984, SIV et FP se sont réunis à Rome. Au cours de cette réunion, les décisions suivantes ont été adoptées : les verres coulés ne devaient pas être vendus à un prix inférieur à celui de FP ; une politique commune était adoptée pour le verre triple (note manuscrite de SIV du 30 octobre 1984).

(27) Au cours d'une réunion tenue à Rome le 30 janvier 1985, SIV et FP ont pris réciproquement acte du fait qu'elles respectaient les accords quant au fond et en particulier qu'elles respectaient les prix pour le verre clair. Par contre, en ce qui concerne les verres colorés et laminés, SIV a accusé FP de violer les dispositions du cartel par l'utilisation de petits expédients, tels que des rabais supplémentaires accordés à certains grossistes. SIV a proposé que chaque producteur ait ses clients privilégiés auxquels il accorderait des rabais supplémentaires (note manuscrite de FP du 30 janvier 1985). Pour sa part, SIV s'est engagé, en ce qui concerne les rabais et les clients classés en catégorie "super A", à pratiquer les mêmes conditions que les autres producteurs (note manuscrite de SIV du 30 janvier 1985).

(28) Le 28 mars 1985, FP s'est engagé, au cours d'une réunion, à céder à SIV 1 000 tonnes de verre coulé par mois. Les deux entreprises sont convenues que SIV ne vendrait pas ce verre coulé à seize clients, mentionnés dans une liste, réservés à FP (note manuscrite de FP du 28 mars 1985).

Ces seize clients réservés ne sont pas les affiliés Fontana, comme le prétend FP dans son mémoire en réponse aux griefs, soit parce que les affiliés Fontana sont au nombre de huit (Ouest-Est-Quentin-Centro-Vesuviana-Adriatica-Sud-Sarda) et non de seize, soit parce qu'on ne comprend pas le sens d'une réserve de clients qui sont par définition réservés parce que totalement contrôlés.

(29) Le 12 avril 1985, Socover a discuté avec FP de la possibilité de constituer des commissionnaires de vente dans chaque région. À cette occasion, Socover et FP ont discuté aussi de la répartition des commandes auprès des producteurs sur la base des deux dernières années (note manuscrite de Socover du 12 avril 1985).

(30) Au cours de la réunion entre Socover et FP du 10 juillet 1985, un dirigeant de FP a communiqué à Socover que FP était en train de se concerter avec les autres producteurs pour une augmentation de prix de 7 à 8 % à partir du mois d'octobre pour le verre clair et que les prix pour les verres colorés et coulés n'auraient pas subi de modifications. (Note manuscrite de Socover du 10 juillet 1985). Une augmentation de prix de 7,5 % a été effectivement communiquée en octobre par les trois producteurs à leurs clients.

(31) Au cours de la réunion entre Socover et SIV du 23 juillet 1985, le directeur commercial de SIV a annoncé à Socover que les producteurs préparaient ("on est en train de décider") une augmentation de prix de 10 % sur le float à partir du mois d'août et qu'ils auraient accordé une prime de fin d'année de 3 % à un certain nombre de clients préférentiels (note manuscrite de Socover du 23 juillet 1985). Une augmentation des prix de 8 % a été effectivement communiquée aux clients vers la fin de juillet par les trois producteurs. La prime annuelle de 3 % a été effectivement accordée par les trois producteurs à un certain nombre de clients préférentiels.

(32) Le 12 mars 1986 le directeur commercial et le directeur des ventes pour l'Italie de VP ont rencontré Socover à Milan et ont annoncé que VP aussi aurait adopté les augmentations de prix prévues par FP et SIV à partir du 1er avril 1986 (note manuscrite de Socover du 12 mars 1986).

VP a produit, dans son mémoire en réponse aux griefs, une déclaration écrite de Socover sur l'interprétation de cette note. Selon cette déclaration, Socover aurait informé VP du fait que SIV et FP auraient augmenté leurs prix avec effet immédiat et VP aurait répondu que vraisemblablement elle se serait conformée à une telle décision. Il est à observer, d'abord, que Socover pouvait à la limite connaître, à la date du 12 mars 1986, la décision de FP, puisque celle-ci avait expédié les nouveaux tarifs le 10 mars 1986, mais elle ne pouvait pas connaître une décision qui n'avait pas encore été adoptée par SIV, qui a expédié ses tarifs le 14 mars 1986. Ensuite, VP ne pouvait pas réagir immédiatement sur la base de deux informations, dont l'une pouvait être, à la limite, connue et l'autre non : l'alignement ne peut être annoncé que lorsque sont connues les données de référence.

D'une façon plus générale, VP a fait valoir qu'elle serait concernée uniquement par les références contenues dans les notes de Socover du 12 juillet 1983 et du 12 mars 1986 pour lesquelles elle a donné ses interprétations. Cet avis ne peut pas être partagé par la Commission. En effet, les notes de Socover sont explicites car elles mentionnent toujours des décisions adoptées par les trois producteurs.

En ce qui concerne les notes de SIV et FP, la note de SIV du 30 janvier 1985 ne mentionne pas, comme paramètre de référence pour les rabais, FP mais les autres, c'est-à-dire les trois producteurs ("nous ferons les mêmes conditions que les autres") ; la note de FP du 30 janvier 1985 ne parle pas d'accords entre FP et SIV, mais de l'existence d'un cartel entre les producteurs. La seule conclusion que l'on peut tirer de ce qui précède est que VP a participé moins directement que SIV et FP aux pratiques concertées, mais non qu'elle n'a pas pris part à ces pratiques.

(33) Ainsi qu'il sera dit plus en détail au chapitre 6, les échanges de produits entre les trois fabricants italiens sont aussi l'occasion de connaître les tarifs et les prix pratiqués par les concurrents ou de convenir du comportement à tenir sur le marché, ainsi qu'il ressort des faits ci-après énumérés.

Les prix des produits cédés ont toujours été fixés et successivement adaptés sur la base des modifications tarifaires des producteurs cédants.

Par lettre du 6 mars 1985, FP a reproché à SIV de ne pas avoir tenu les engagements convenus à Rome au sujet des conditions de vente des verres coulés cédés par FP à SIV.

La note manuscrite de FP concernant des réunions entre SIV et FP des 23 et 30 avril 1985, au cours desquelles des cessions de produits ont été discutées, contient la mention suivante : "Prix que nous vous pratiquerons franco clients . . . Distribution (par région) . . . le 4, réunion pour compensation".

Les notes manuscrites FP relatives à des réunions entre SIV et FP des 16 décembre 1985 et 3 février 1986, au cours desquelles la répartition de la production de la filiale commune Flovetro a été débattue, contiennent les mentions suivantes : "deux éléments : prix de cession - répartition bénéfices", "Celui qui prélève davantage doit s'engager à ne pas perturber le marché".

(34) Les tarifs et les rabais concertés ont été effectivement appliqués. En effet, l'examen de certaines factures démontre qu'à un même client, qui a acheté des quantités considérablement différentes auprès d'eux, les trois producteurs ont pratiqué des prix et des rabais identiques. Les factures examinées ont été les suivantes :

- pour l'année 1983 : les factures de SIV n° 00866, 01450, 02885, 03912, 09701 ; les factures de FP n° 00594, 01208, 02824, 08883, 09580 ; les factures de VP n° 110040, 210321, 210475, 210629 ;

- pour l'année 1984 : les factures de SIV n° 04397, 11612, 11619, 11984, 11985 ; les factures de FP n° 01356, 10473, 12041 ; les factures de VP n° 110236, 110475, 11/3142, 11/3189, 11/3253, 11/3265 ;

- pour l'année 1985 : les factures de SIV n° 212, 325, 1752 ; les factures de FP n° 508, 773 ; les factures de VP n° 11/0733, 11/0742, 11/0778.

e) Les rapports entre les producteurs et les grossistes

(35) Les trois producteurs ont veillé à ce que leurs tarifs et rabais trouvent application aussi en aval.

La Commission avait reproché aux trois entreprises, par la communication des griefs et sur la base de la déclaration écrite du plaignant Cobelli, de s'être réunies à plusieurs reprises, en indiquant promoteurs, dates et lieux des réunions, avec des grossistes pour leur faire accepter et répercuter en aval les augmentations de prix. Étant donné que le plaignant n'a confirmé à l'audition ces réunions que de façon générique, la Commission n'en dispose pas de preuves directes à l'exception de celle de Catania du 17 avril 1986 entre FP, SIV, Fontana Sud, Callipo, Tortorici et ISV, qui a été admise par FP et SIV et qui aurait eu pour but de présenter le nouvel administrateur de Fontana Sud alors que la présence du représentant de SIV n'était pas prévue.

Toutefois, certains documents démontrent, d'une part, que quelques réunions entre les grossistes ont été promues à l'initiative des producteurs et que les producteurs réussissent à orienter, compte tenu aussi de l'identité de leurs tarifs et rabais, les choix commerciaux des grossistes et, d'autre part, confirment l'attente des clients sur l'identité des prix des producteurs.

(36) La note manuscrite de Socover du 12 juillet 1983 fait état des discussions entre le porte-parole des grossistes et FP sur les rabais et sur le non-respect de la part des autres producteurs des engagements pris.

Cette note montre que Socover est le moyen de transmission des messages des grossistes aux producteurs et des producteurs aux grossistes. En effet, Socover ne discute pas avec FP des conditions qui lui étaient réservées et qui pouvaient l'intéresser plus particulièrement, mais des engagements des producteurs vis-à-vis de tous les grossistes.

(37) Le 10 octobre 1984, une réunion entre un certain nombre de grossistes a eu lieu à Rome, à l'hôtel Sheraton. À la suite de cette réunion, le télex suivant a été envoyé, le 11 octobre 1984, aux producteurs : "Les soussignés confirment les commandes en note et passent les nouvelles commandes aux nouvelles conditions en tenant compte de toutes les sources d'approvisionnement . . . Les soussignés confirment leur volonté de coopérer à l'amélioration des prix sur le marché . . . [suivent les noms de vingt-huit clients]".

Le même 11 octobre 1984, le directeur des ventes de VP a rencontré Socover à Milan, ainsi qu'il ressort du compte rendu de mission du dirigeant de VP, annexé au mémoire en réponse.

Selon les producteurs, ce télex ferait uniquement état des intentions d'un groupe de clients de suivre une ligne de conduite imposée par les circonstances.

Le télex du 11 octobre 1984 manifeste de façon claire l'intention des signataires de coopérer avec les producteurs. En fait, ce télex affirme que les grossistes n'exerceront pas de pression sur les producteurs pour obtenir le report de la date d'application du nouveau tarif, qu'ils répartiront les commandes de façon à tenir compte des différentes sources de production et qu'ils coopéreront à l'amélioration des prix sur le marché. Les grossistes ne peuvent pas s'engager spontanément à de tels comportements alors qu'il devrait être de leur intérêt de pouvoir obtenir les meilleurs prix, de s'adresser de préférence aux fournisseurs qui leur accordent les meilleures conditions de vente et de réaliser une bonne marge bénéficiaire.

(38) La lettre de Socover, datée du 19 octobre 1984 et trouvée dans les bureaux de VP, contient la mention suivante : "Sur invitation des producteurs nous avons rédigé le tarif en annexe qui entrera en vigueur le 5 novembre prochain. Nous avons convoqué une réunion à laquelle nous avons invité tous les opérateurs du secteur pour mercredi 7 novembre à 10 h 30 auprès de Vetrounione à Milan . . . ". Par lettre du 20 novembre 1984, VP a contesté à Socover d'avoir formulé des invitations pour des réunions concernant la commercialisation.

À propos de cette lettre, dont le contenu n'a pas été contesté par FP et SIV dans leurs mémoires en réponse, VP a affirmé en avoir obtenu copie par un client, dont le nom a été effacé, et a produit une déclaration écrite de Socover qui dit : "Quant à la lettre sub (iii), elle fut envoyée à un certain nombre de grossistes/distributeurs, mais non sur invitation de VP. En effet, pour autant que je m'en souvienne, cette lettre ne fut jamais envoyée, pas même en copie, par Socover à VP et VP ne participa pas à la réunion mentionnée dans la lettre". Puisque Socover exclut uniquement que cette lettre fut envoyée sur invitation de VP, on devrait en déduire qu'elle fut envoyée seulement sur invitation des deux autres producteurs et cela malgré le fait que la lettre dit "sur invitation des producteurs [sans exclure aucun d'eux], nous avons rédigé le tarif en annexe qui entrera en vigueur le 5 novembre prochain". Socover exclut que VP, seulement elle, ait participé à la réunion à Milan le 7 novembre 1984. Toutefois, VP, pour démontrer qu'elle n'a jamais participé à des réunions, a produit, en annexe B de son mémoire en réponse, certains rapports mensuels des présences de ses fonctionnaires. Un de ces rapports montre que le directeur commercial de VP était en mission à Milan les 7 et 8 novembre 1984 et donc aussi le jour de la réunion convoquée par Socover.

(39) La note manuscrite de Socover du 12 avril 1985 fait état des discussions entre Socover et FP sur la constitution de commissionnaires de vente région par région et sur la répartition des commandes sur base historique des deux dernières années.

Aucun des producteurs n'a pris position sur le sens à donner à l'expression "répartition sur base historique des deux dernières années"contenue dans cette note, ni sur l'intérêt des grossistes de répartir leurs commandes, non pas en fonction des conditions offertes par chaque fournisseur, mais uniquement en fonction de données statistiques portant sur la période antérieure.

(40) La note manuscrite de Socover du 23 juillet 1985 fait état des discussions entre Socover et SIV sur l'attribution d'une prime de fin d'année de 3 % à un certain nombre de clients préférentiels. Concernant cette note, sur laquelle ni FP ni VP n'ont pris position, SIV a affirmé, dans son mémoire en réponse, qu'il s'agit de "l'usage habituel d'accorder en fin d'année un certain rabais à des clients qui ont atteint un certain niveau d'achats et qui ont été ponctuels dans les paiements". Ainsi qu'on peut le constater à la lecture de la note, celle-ci parle de clients préférentiels et non de clients qui ont acheté certaines quantités et paient ponctuellement leurs achats. En outre, elle fait état du fait qu'on annonce à un client, qualifié par FP de porte-parole de grossistes, non pas les rabais qui lui sont accordés mais le rabais accordé à des clients préférentiels. Il ne semble pas qu'on puisse qualifier de pratique commerciale courante et normale le fait que des fournisseurs confient à un client les rapports commerciaux entretenus avec d'autres clients.

(41) Le rapport de Fontana Est à sa maison mère FP, du 16 septembre 1985, sur la réunion des grossistes, du 31 juillet 1985, relate que tous les producteurs ont communiqué les augmentations de prix et que, sur la base de ces augmentations, les grossistes ont décidé du barème de revente.

Le rapport de Fontana Ovest à sa maison mère FP, du 23 septembre 1985, contient les remarques suivantes : "La clientèle semble disposée à accepter les cotations en augmentations . . . On souhaite de la part des producteurs un respect rigoureux des tarifs pour permettre une plus grande stabilité du marché"

L'autre rapport de Fontana Ovest, du 31 octobre 1985, sur la réunion des grossistes du 29 octobre 1985, après avoir fait état de l'adoption par les grossistes du barème de revente sur la base des nouveaux tarifs des producteurs, continue : "En ce qui concerne les producteurs, on est en train de réaliser l'augmentation . . . En tout cas tout le monde a communiqué les nouveaux prix . . . même si les termes sont un peu élastiques . . .".

Ces rapports de Fontana, loin d'avoir un caractère vague et indéterminé ou de révéler des orientations des grossistes, comme le prétendent les parties, font état de faits bien précis tels que l'attitude favorable des grossistes à l'égard des augmentations tarifaires des producteurs, la publication par les producteurs de tarifs identiques, le souhait des producteurs de respecter les tarifs afin de stabiliser le marché. Cela signifie que les producteurs, directement ou indirectement, orientent le marché en aval car une déstabilisation de ce marché pourrait avoir des conséquences nuisibles sur leur politique commerciale.

(42) Au cours de la réunion du 10 avril 1986, VP et Socover ont discuté de la constitution d'un club, composé de douze grossistes, pour la distribution des produits verriers. Les deux interlocuteurs ont exprimé l'intention d'en parler à FP et SIV la semaine suivante (note manuscrite de VP du 10 avril 1986).

5. Le marché du verre destiné au secteur automobile

(43) D'après les documents des entreprises, énumérés ci-après, SIV et FP sont convenus des prix et de la répartition de quotas au moins à partir de 1982. VP a participé aussi à ces ententes, tout au moins à partir de 1983, même si c'était de façon moins stricte que les deux autres producteurs.

a) Les accords et les pratiques concertées concernant le groupe Fiat

(44) Par note manuscrite du 26 octobre 1982, FP a transmis à SIV une note interne de la même date qui relate les pourcentages moyens d'augmentation des prix obtenus auprès de Fiat de 1978 à 1982 et des prévisions d'augmentations moyennes en application du contrat pour les années 1983 et 1984, signé entre Fiat et FP le 14 juin 1982.

D'autre part, la note interne de SIV du 11 novembre 1982 met en évidence que les pourcentages moyens d'augmentation obtenus par SIV sont les mêmes que ceux de FP. En ce qui concerne les quotas de SIV pour 1983, la note souligne que leur calcul ne tient pas compte de l'éventuel quota ultérieur de 2 % indirectement accordé à Paris à SIV pour 1983 et 1984, qu'un contrôle rigoureux des quotas effectifs est nécessaire pour la première monte et que, à la suite des accords pris, on s'achemine vers l'intégration avec la concurrence pour les lots de petites séries.

(45) À la suite des pressions exercées par Fiat sur ses fournisseurs pour obtenir une réduction des prix, le directeur commercial de SIV a écrit, dans la note interne n° 532 du 11 mai 1983, entre autres, ce qui suit : "5) Inévitable engagement de FP dans la concession de ces rabais et accélération du processus de réduction sans aucune contrepartie en terme de quotas de pénétration et avec exacerbation des rapports commerciaux avec la concurrence . . . B) . . . Pour agir dans cette optique il faut s'assurer du comportement analogue, sûr et rigoureux, de la part de la concurrence la plus qualifiée". La réduction de prix accordée par les trois producteurs FP, SIV et VP a été uniforme, 8 %, et à partir du 1er janvier 1984.

(46) La note manuscrite de SIV du 12 octobre 1983 fait état de ce qui suit : "Objet : IVECO - Suite à de récents événements liés au client en objet, j'estime opportun de communiquer ce qui suit et qui est lié au niveau prix SIV/St-Gobain/Penny sur les deux véhicules produits en plus grandes quantités, c'est-à-dire Gamma S et Gamma Z (suivant contrat 1983) :

EMPLACEMENT TABLEAU

NB : Pour le moment, en tout cas, nous avons réussi officieusement et à l'insu de la Dirca. Achats de Turin à maintenir notre quota à des niveaux moyens égaux à [ . . . ] % de fourniture."

(47) Au début de 1985 déjà, des discussions ont été entamées sur la manière de faire passer des augmentations de prix auprès du groupe Fiat.

La note manuscrite de SIV sur la réunion à Rome du 30 janvier 1985 entre SIV et FP contient la mention suivante : "Problème Fiat - augmentation de trous et chevaliers comme cheval de Troie dans Fiat pour augmentation prix". Les problèmes Fiat sont évoqués aussi au point 3 de la note manuscrite de FP sur la même réunion.

La note manuscrite de FP sur la réunion du 7 mai 1985 entre FP et SIV fait état de l'accord suivant : "Réunion Auto. Rencontre (président SIV) - du 1er juillet 1985 au 31 décembre 1985 + 7 % réel // du 1er janvier 1986 au 30 juin 1986, 5 % réel /- du 1er juillet 1986? . . . pour se retrouver un égal + 0 - Réaction Fiat nous la partagerons à 50 % au moins au niveau production. Réduction en commun des coûts".

Cet accord entre les deux producteurs est confirmé, selon la note manuscrite de FP, à la réunion entre SIV et FP du 23 mai 1985, réunion au cours de laquelle on fait état de l'accord de VP : "Accord Fiat + Alfa Romeo - + 7 % tout de suite ; + 5 % 1er janvier 1986 ; + X 2e sem. 1986. Accord Pennitalia". Au cours de la vérification, la question a été posée par écrit le 15 janvier 1987 au directeur des ventes du département automobile de savoir si VP avait été contacté ou avait eu des rencontres avec SIV et FP pour convenir ou suivre les augmentations de prix pour les verres auto ci-dessus rappelés. Ce directeur a demandé un temps de réflexion avant de répondre ; le lendemain 16 janvier 1987, il a répondu "non".

La note manuscrite de FP du 20 juin 1985 confirme en ces termes l'accord : "(directeur commercial de SIV) . . . Aides pour Fiat - 7 % - Diminution 3 % (d'après lui 1,5 %). Sauf les nouveaux modèles 2 %".

La note interne n° 090 de SIV, du 24 juin 1985, rappelle indirectement l'application des accords susdits : "Jeudi 20. 6 dernier nous avons terminé les négociations avec Fiat Auto pour le second semestre 1985 . . . Nous rappelons brièvement les termes de ces accords. 1) Augmentation de 7 % pour tous les véhicules, augmentation de 2 % pour les nouveaux modèles, c'est-à-dire Y 10, Thema et 154. Compte tenu du fait que ces derniers modèles auront une incidence dans les prochains mois de 14,5 % - environ, l'augmentation pondérée théorique est de 6,3 %. 2) date d'application de cette augmentation : 1. 7. - 31. 12. 1985". L'augmentation moyenne de 6,3 % a été appliquée par SIV et FP alors que VP a appliqué une augmentation de 6 %, soit une différence négative de 0,3 %.

D'autres variations tarifaires, uniformes en termes de pourcentage, ont été appliquées aux dates suivantes : le 15 décembre 1985 par SIV et VP, le 20 décembre 1985 par FP ; le 1er mai 1986 par FP, le 15 mai 1986 par SIV, le 1er septembre 1986 par VP ; le 1er décembre 1986 par SIV et FP.

Auprès de Alfa Romeo aussi une augmentation uniforme de 2 % pour le second semestre 1985 et des augmentations successives uniformes ont été obtenues ; FP et SIV les ont appliquées avec effet rétroactif à partir du 1er septembre 1985 et VP dix mois plus tard.

(48) Les trois producteurs ont procédé à des cessions réciproques de produits (détaillées au chapitre 6) avec l'objectif de garder, chacun, ses propres quotas de pénétration ou d'atteindre les quotas convenus avec les concurrents.

- SIV-FP. D'après les données fournies par les deux producteurs, FP a vendu à SIV les quantités suivantes des produits non transformés pour automobile :

(...) tonnes en 1982, (...) tonnes en 1983, (...) tonnes en 1984, (...) tonnes en 1985, (...) tonnes en 1986, et SIV a vendu à FP (...) tonnes en 1985 et (...) tonnes en 1986. Concernant les produits transformés pour automobiles, les cessions suivantes ont été effectuées : FP a cédé à SIV (...) tonnes en 1983, (...) tonnes en 1984, (...) tonnes en 1985, (...) tonnes en 1986; SIV a cédé à FP (...) tonnes en 1982, (...) tonnes en 1983, (...) tonnes en 1984, (...) tonnes en 1985.

La note manuscrite de FP du 25 juin 1985 contient la mention suivante : "SIV échange produits, en particulier ceux que nous achetons en France".

La note interne de FP du 31 octobre 1985 fait état de ce qui suit : "Il apparaît que SIV pourrait avoir besoin de ± 500 000 carreaux latéraux de préférence dans le 1er semestre 1986. Les véhicules en question pourraient être : Uno, Ritmo Regata, Thema Croma, Alfa 33 . . . La commande pourrait nous parvenir au mois de novembre (note manuscrite en marge : oui). À cette occasion, j'ai vérifié qu'il n'y aurait pas de difficultés à nous fournir 40 000 lucarnes par an pour la Y 10". Le contenu de cette note est confirmé par une autre note interne de FP datée du 8 novembre 1985. D'autre part, la note interne de FP du 4 mars 1986 mentionne les quantités qui sont en production en 1986 pour le compte de SIV.

La note manuscrite de FP du 17 décembre 1985 contient la mention suivante : "Rapports Fiat hypothèse SIV FP [...], SIV [...], autres [...]. SIV n'a pas de capacités de production. FP a capacités pour [...] % Fiat : [...] % directe, [...] % pour SIV en sous-traitance". L'essentiel du contenu de cette note est confirmé par une autre note manuscrite de FP du 23 janvier 1986 : "Réunion politique Auto : aujourd'hui nous [...] % SIV [...] % ... FP [...] % garanti (aujourd'hui [...] %). Les diminutions sont compensées par cessions à SIV à prix Fiat franco destination ... "89D0093.1

- VP-SIV. D'après les données fournies par les deux producteurs, les cessions ont porté sur les quantités suivantes. VP a vendu à SIV des produits non transformés pour auto pour [...] tonnes en 1984, [...] tonnes en 1985, [...] tonnes en 1986 et SIV a vendu à VP [...] tonnes en 1983, [...] tonnes en 1984, [...] tonnes en 1985. En ce qui concerne les produits transformés pour auto VP a cédé à SIV [...] tonnes en 1984 et [...] tonnes en 1985.

Les notes internes de VP des 14 février 1986, 28 avril 1986, 3 juin 1986, 13 juin 1986, 13 octobre 1986 et les échanges de télex entre VP et SIV en date des 28 mars 1986, 15 mai 1986, 20 juin 1986, 25 juin 1986, 11 juillet 1986, 25 août 1986 font état des accords intervenus selon lesquels VP, avec l'aide aussi de sa société soeur française Boussois, produira pour SIV [...] tonnes de vert auto et [...] tonnes de vert plus auto en 1987, [...] tonnes de vert auto et [...] tonnes de vert plus auto en 1988.

- FP-VP. Les données produites par les deux producteurs ne sont pas concordantes ; par conséquent, les données des deux producteurs sont reproduites, celles de VP étant reproduites entre parenthèses. FP a vendu à VP des produits non transformés pour automobiles pour [... (...)] tonnes en 1982, [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986. D'autre part, les notes internes de VP des 13 décembre 1985, 7 janvier 1986 et 18 février 1986 et les échanges de télex entre FP et VP en date des 19 décembre 1985, 20 décembre 1985, 7 janvier 1986, 9 janvier 1986, 10 janvier 1986 font état de l'accord intervenu selon lequel FP produira pour VP [...] tonnes de clair auto 2,5 mm, [...] tonnes de verre clair auto 2 mm, [...] m2 de vert normal auto.

(49) FP est en possession de tableaux mécanographiques pour 1985, premier et second semestres, pour 1986, pour 1987, qui reprennent, modèle par modèle et globalement, les quantités que chaque producteur a fournies dans les années 1985 et 1986 et fournira en 1987 au groupe Fiat et les quotas en pourcentage que ces fournitures représentent. Les tableaux pour 1985 ne sont pas datés, ceux pour 1986 et 1987 portent la date du 20 octobre 1986. On transcrit les quotas globaux pour les années en question : premier semestre 1985 : FP [...] %, SIV [...] %, PPG (VP) [...] %, Splintex [...] % ; second semestre 1985 : FP [...] %, SIV [...] %, PPG [...] %, Splintex [...] % ; 1986 : FP [...] %, SIV [...] %, PPG [...] %, Splintex [...] % ; 1987 : FP [...] %, SIV [...] %, PPG [...] %, Splintex [...] %.

(50) Les trois producteurs ont contesté qu'il y ait eu entre eux concertation sur les prix et sur les quotas, les accusations de la Commission reposeraient sur une mauvaise interprétation des documents.

La situation en Italie du marché du verre auto est caractérisée par la position dominante de Fiat. Fiat, comme tout autre constructeur automobile, attribue à chaque fournisseur des pourcentages globaux de fourniture sur la base de considérations tenant compte des prix, de sa capacité technique, du service offert. Ce pourcentage global est rediscuté bilatéralement à l'occasion de la négociation pour la mise à jour des tarifs. Les pourcentages d'attribution globaux ainsi définis sont transformés en pourcentages d'attribution par modèle de voiture. Les confirmations adressées par Fiat à ses fournisseurs de verre auto mentionnent explicitement le quota alloué par ce constructeur au fournisseur concerné pour le modèle en question.

Au cours des négociations, Fiat a l'habitude de révéler la cotation la plus favorable, dans le but d'amener les fournisseurs concurrents à s'aligner. Ceci conduit inévitablement à un alignement de prix. Contrairement à l'hypothèse émise par la Commission, Fiat informerait aussi fréquemment chacun de ses fournisseurs des quotes-parts de fournitures allouées aux concurrents. En somme, le système conduirait à une transparence totale du marché. Dans ces conditions, la concertation entre les producteurs ne serait pas nécessaire.

En ce qui concerne les échanges de produits, la Commission n'aurait pas apporté la preuve que ces échanges sont préordonnés dans le but d'une répartition de marché entre les producteurs. En outre, les produits échangés seraient les verres de base et ce ne serait qu'exceptionnellement que les échanges porteraient sur les produits transformés.

(51) La Commission ne peut pas partager les arguments avancés par les producteurs. En effet :

i) Il est exact que Fiat jouit, en tant qu'acheteur de verre auto, d'une position de quasi-monopole en Italie ; toutefois, son pouvoir contractuel est grandement limité par l'étroitesse d'offres alternatives sur le marché. En effet, l'offre européenne de verre auto est contrôlée par un oligopole qui comprend, outre Saint-Gobain, PPG et SIV, fournisseurs actuels de Fiat Pilkington et quelques petits producteurs.

ii) Sur les quotas d'attribution, il est vrai que Fiat, comme tout constructeur automobile, mentionne dans les confirmations des commandes le quota alloué au fournisseur concerné. Mais ce quota alloué n'est qu'une indication et non une attribution définitive, qui n'engage ni le constructeur auto, ni le fournisseur, toute variation étant possible pendant la période contractuelle, soit à l'initiative du constructeur automobile, soit à l'initiative du fournisseur. La circonstance que cette indication n'engage pas le constructeur est démontrée par deux faits reportés par VP dans son mémoire en réponse : lors de la réduction de 8 % sur les prix négociés avec Fiat, celle-ci a réduit d'office pour le contrat en cours le quota alloué à VP (annexe P du mémoire en réponse de VP) ; la lettre de confirmation de commande de Fiat à VP du 3 juillet 1985 (annexe E du mémoire en réponse de VP) dit textuellement : ". . . En ce qui concerne les programmes de livraison à court terme, ainsi qu'il vous a été dit, il n'est pas possible de définir des pourcentages d'attribution qui nous engagent . . ."

Le fait que cette indication n'engage pas le fournisseur est démontré par l'affirmation de FP contenue à la page 33 de son mémoire en réponse : "Les fournisseurs sont limités par leurs capacités techniques de transformation, selon leurs meilleures estimations. Il se peut que cette estimation n'ait pas été correcte, ou encore que le fournisseur verrier ne puisse livrer les volumes que représente sa quote-part en pourcentage, lorsque les ventes d'un modèle dépassent ce qui avait été prévu". D'autre part, si vraiment le constructeur automobile attribuait des quotes-parts immuables et définitives pendant la période contractuelle, les fournisseurs ne devraient se soucier d'aucun danger de non-respect des quotas alloués et ne devraient pas sentir le besoin de se concerter à ce sujet ou de s'échanger des produits pour garder leurs quotas. Les documents mentionnés aux points 44 à 48 démontrent le contraire : "un contrôle rigoureux des quotas effectifs pour la première monte est nécessaire ... on s'achemine vers l'intégration avec la concurrence pour les lots de petites séries"(note de SIV du 11 novembre 1982) ; "... accélération du processus de réduction sans aucune contrepartie en terme de quotas de pénétration ... il faut s'assurer du comportement analogue, sûr et rigoureux, de la part de la concurrence la plus qualifiée" (note de SIV du 11 mai 1983) ; SIV peut montrer que malgré ses prix plus élevés il a pu maintenir, à l'insu de la direction des achats (et pourtant on affirme que c'est Fiat qui attribue les quotes-parts), ses quotas (note de SIV du 12 octobre 1983) ; les cessions de produits transformés et non transformés montrent le souci de l'aide réciproque pour garder les quotas. Quant aux tableaux mécanographiques, mentionnés au point 49, la Commission considère qu'ils ne viennent pas de Fiat et qu'ils n'ont pas non plus été établis sur la base des données fournies par Fiat. Comme l'affirme VP à la page 28 de son mémoire en réponse, les négociations avec Fiat portent sur des pourcentages en pièces et non en mètres carrés et VP comptabilise ces pourcentages en pièces, alors que les tableaux en possession de FP expriment des pourcentages en mètres carrés ; même si l'on pouvait imaginer que les tableaux pour 1985, non datés, et pour 1986, datés du 20 octobre 1986, étaient établis par une estimation qui, étant faite ex-post, pouvait être assez précise, on ne pourrait en dire de même pour le tableau de 1987, car à la date du 20 octobre 1986, rien n'est définitif et précis pour l'année suivante.

iii) La Commission ne conteste pas qu'au cours de négociations commerciales un acheteur puisse révéler une cotation plus favorable, vraie ou supposée, dans le but d'amener les fournisseurs concurrents à s'aligner. Ceci ne veut toutefois pas dire que tous les fournisseurs pratiquent les mêmes conditions et que tous les fournisseurs se trouvent, vis-à-vis d'un même acheteur, sur un pied d'égalité, car la position de chaque fournisseur est fonction de son poids productif et commercial (gamme plus complète, produits spéciaux, niveau de service supérieur). Ceci ne veut pas dire non plus qu'un acheteur dominant puisse imposer un alignement à tous ses fournisseurs sur l'offre la plus favorable ou qu'il puisse facilement s'adresser à des fournisseurs étrangers pour obliger les offrants locaux à baisser leurs prix, car, ainsi qu'il a été admis à l'audition orale, le constructeur automobile réclame de plus en plus un service just on time, qui peut être plus facilement offert par les verriers locaux, qui disposent d'une structure sur place, plutôt que par un verrier étranger qui doit se donner une structure, et qui, parmi les verriers disposant de la structure nécessaire, avantage en termes de quantités à fournir et de prix ceux qui possèdent une structure plus solide et, en même temps, plus souple.

En tout état de cause, quels que soient les types de rapports qui s'instaurent entre un acheteur dominant et ses fournisseurs, il est établi que SIV, FP et VP se sont concertés entre eux pour décider de l'attitude à tenir vis-à-vis du groupe Fiat. Ainsi FP a transmis à SIV, par note du 26 octobre 1982, les prévisions d'augmentations de prix contenues dans le contrat signé entre FP et Fiat le 14 juin 1982. La réduction de prix de 8 %, dont il est question dans la note du 11 mai 1983 de SIV, a été convenue et appliquée par les trois producteurs. VP prétend que la mention "il faut s'assurer du comportement analogue, sûr et rigoureux, de la part de la concurrence la plus qualifiée"contenue dans la note de SIV ne la concerne pas parce que, avec [ . . . ] % de fournitures à Fiat, elle était à considérer comme un concurrent marginal et non "qualifié".

Cette interprétation de VP est démentie par l'interprétation qu'en donne SIV, auteur de la note, qui ne parle pas de concurrence qualifiée ou marginale, mais tout simplement de concurrence. En effet, dans le mémoire en réponse de SIV, on peut lire : "Alors que l'expression "s'assurer du comportement analogue de la part de la concurrence" n'est qu'une résolution, très logique de la part du directeur commercial, qui manifeste l'intention de résister comme il le peut à des impositions excessives de réduction".

Les augmentations de prix pour le second semestre 1985, le premier et le second semestres 1986 ont été discutées et convenues entre les trois producteurs. D'après VP, le fait que la note manuscrite de FP du 23 mai 1985 mentionne "Accord Pennitalia" ne signifie rien et en tout cas rien ne prouve que la mention soit digne de confiance. En outre, la correspondance avec Fiat des 28 juin 1985 et 3 juillet 1985 contredirait la note manuscrite de FP. Enfin la coïncidence de la date de variation tarifaire du 15 décembre 1985 avec celle de SIV serait la conséquence de ce qui avait été convenu avec Fiat par la correspondance des 28 juin 1985 et 3 juillet 1985. De l'avis de la Commission, la mention "Accord Pennitalia"est digne de confiance parce que l'adhésion de VP à l'accord sur les augmentations de prix pour les trois semestres concernés a été traduite, pour l'essentiel, dans les faits. Les lettres citées par VP ont un tout autre contenu que celui mentionné par VP : la lettre de VP à Fiat du 28 juin 1985 ne contient aucun engagement de prix de la part de VP, mais seulement une disponibilité à laisser inchangés les prix pour 1985, à condition que VP puisse doubler ses fournitures ; la lettre de Fiat à VP du 3 juillet 1985 ne contient pas, elle non plus, des engagements de Fiat sur des quotas de fournitures ni sur les prix, mais uniquement une prise d'acte de la possibilité de VP de maintenir ses cotations concurrentielles (non plus basses) ; ces lettres ne contiennent aucune mention sur les dates de variations tarifaires et elles ne mentionnent non plus aucun accord sur les prix entre Fiat et VP.

iv) Les éléments factuels qui démontrent que les cessions réciproques de produits visent à la répartition du marché sont essentiellement les suivants.

Les cessions sont chaque année importantes et, ainsi qu'il ressort des documents cités au point 48, elles ne sont pas des dépannages. Ces cessions ont porté globalement, pour les produits non transformés, sur [...] tonnes en 1982, [...] tonnes en 1983, [...] tonnes en 1984, sur [...] tonnes en 1985, [...] tonnes en 1986, c'est-à-dire sur des pourcentages compris entre [...] et [...] % de l'autoconsommation globale pour auto des trois producteurs, et, pour les produits transformés, sur [...] tonnes en 1982, [...] tonnes en 1983, [...] tonnes en 1984, [...] tonnes en 1985, [...] tonnes en 1986.

Les notes et documents cités au point 48 mentionnent expressément le fait que FP travaille en sous-traitance pour SIV des produits transformés.

Les cessions portent notamment sur des épaisseurs et des couleurs qui ne sont pas fabriquées par tel ou tel autre producteur et visent à permettre aux trois producteurs de disposer de toute la gamme des produits. Or, la possibilité de disposer de toute la gamme donne un avantage concurrentiel qui est annulé si les trois producteurs font en sorte qu'il n'y ait pas de désavantage entre eux à ce sujet. Qu'une gamme plus complète donne un avantage concurrentiel est confirmé par FP dans son mémoire en réponse : "Les fournisseurs ne peuvent résister à cette pression (de l'acheteur) que dans la mesure où ils possèdent un avantage concurrentiel objectif sur leurs concurrents (gamme plus complète, produits spéciaux, niveau de service supérieur), pouvant être déterminant pour le constructeur".

b) Les accords et les pratiques concertées concernant le groupe Piaggio

(52) SIV et FP se sont mis d'accord, au moins à partir de 1983, pour la répartition des fournitures et les prix à pratiquer à Piaggio.

La note interne de FP du 12 décembre 1984, trouvée, au cours des vérifications, auprès de FP et de SIV, fait état des accords suivants : "La situation à la fin de 1982 était la suivante : Quotas : Saint-Gobain ± [...] %, SIV ± [...] %. Prix : (suit le tableau des prix Saint-Gobain et des prix SIV) ... À la suite des contacts avec (le fonctionnaire SIV) à la fin de cette année-là, on avait convenu de procéder selon les lignes suivantes : 1) SIV aurait continué à ne pas fournir le modèle 6011. 2) On considérait comme objectifs à atteindre une division [...] des quotas relatifs aux autres modèles. 3) On convenait des augmentations différenciées afin de pousser Piaggio à répartir les commandes pour chaque pièce de manière non uniforme pour atteindre l'objectif du point 2). En définitive, l'accord prévoyait ... la situation suivante [suit le tableau des prix convenus et à pratiquer à partir du 1er mars 1983 et du 1er septembre 1983] ... L'accord était en substance respecté mais la situation ne changeait guère (en fin d'année ± [...] % S.G., ± [...] % SIV). Compte tenu de ce fait, à la fin de 1983 on convenait toujours avec (le fonctionnaire de SIV), toujours en vue de la distribution des quotas [ . . . ], que pour 1984 Saint-Gobain aurait augmenté les prix de 4 % à partir du 1er mars et de 3,5 % à partir du 1er septembre, tandis que SIV aurait augmenté les prix de façon différenciée à partir du 1er juillet [suit le tableau des augmentations convenues] ... En réalité, cet accord n'a jamais été respecté ... SIV avait déjà accepté de renvoyer l'augmentation à septembre-octobre... Nous avons donc été obligés d'accepter de retarder l'augmentation du 1er mars au 1er juin ... Il faut signaler que j'ai toujours tenu préventivement au courant SIV de toutes mes initiatives vis-à-vis du client ..."

La note interne de FP a évidemment été envoyée à SIV puisque le membre concerné du personnel de SIV a écrit, le 28 décembre 1984, la note suivante : "Je me réfère à la note de Saint-Gobain du 12 décembre 1984 ayant le même objet ... 1) Aucun commentaire particulier sur le contenu des pages 1, 2 et 3, qui résument de façon exhaustive et précise nos accords précédents que SIV a toujours respectés. 2) Me référant à la page 4 - premier alinéa - je dois rappeler que [le membre du personnel de SIV] ... a été toujours en contact avec [le membre du personnel de FP] et a fait remarquer que les pressions de Piaggio nous avaient obligés à accepter de retarder jusqu'à novembre 1984 l'augmentation demandée et que, en tout cas, cette augmentation (± 4 %) aurait dû être considérée seulement comme une base pour le contrat 1985. Notre télex n° 3048 du 6 décembre 1984 à Piaggio ... confirme totalement ce qui a été exprimé ci-dessus ... Pour conclure, je confirme qu'il y a toujours eu des contacts entre [deux membres du personnel de SIV et deux membres du personnel de FP]. Enfin, je dois rappeler que, au cours d'un entretien téléphonique au début de décembre entre [un membre du personnel de FP et un membre du personnel de SIV], ce dernier communiqua au premier le texte de notre télex n° 3048 ..."

Les accords en question ont trouvé application, ainsi qu'il ressort de la note de SIV. En effet, SIV et FP ont modifié les prix : pour 1983, le 1er mars et le 1er septembre ; pour 1984 : FP le 1er mars (avec renvoi au 1er juin, comme il est dit dans la note du 12 décembre 1984) et le 1er septembre, SIV le 1er janvier (comme il est dit dans la note du 28 décembre 1984) et le 1er septembre, SIV le 1er novembre (comme il est dit dans la note du 28 décembre 1984) ; pour 1985 : FP le 1er mars et SIV le 1er mai ; pour 1986 : FP le 1er avril et SIV le 1er mai.

6. Les échanges de verre entre les producteurs

(53) De grandes quantités de verres sont échangées par contrats entre les trois producteurs. Ces échanges ont pour but de permettre à chaque producteur de disposer de toute la gamme des produits, même de ceux qu'il ne fabrique pas, et de garder ses quotas de marché. Ils sont aussi le moyen de se répartir les marchés et les clients et de connaître les tarifs et les prix pratiqués par les concurrents ainsi qu'on peut le constater par les documents et les faits ci-dessous.

(54) Échanges SIV-VP. D'après les données fournies par les deux producteurs, les échanges de verre auto et non-auto ont eu pour objet les quantités suivantes. Les données n'étant pas concordantes, celles fournies par VP seront indiquées entre parenthèses. SIV a vendu à VP [... (...)] tonnes en 1982, [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986. VP a cédé à SIV [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986.

Par lettre du 16 septembre 1986, qui fait suite à une série de réunions et d'échanges de télex entre SIV et VP, SIV a passé à VP les commandes suivantes : pour l'année 1986 : [...] tonnes de float vert auto, [...] tonnes de float clair grosses épaisseurs, [...] tonnes de float vert plus ; pour l'année 1987 : [...] tonnes de float vert auto, [...] tonnes de float vert plus, [...] tonnes de float clair grosses épaisseurs ; pour l'année 1988 : [...] tonnes de float vert auto et [...] tonnes de float vert plus. En ce qui concerne le verre non destiné au secteur auto, la lettre contient la mention suivante : "Les prix seront réajustés sur la base des modifications du tarif national".

(55) Échanges VP-FP. D'après les données fournies par les deux producteurs, celles de VP étant indiquées entre parenthèses, les cessions réciproques pour verre auto et verre non-auto ont porté sur les quantités suivantes. VP a cédé à FP [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1986. FP a vendu à VP [... (...)] tonnes en 1982, [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986. Les télex des 19 février 1985, 20 décembre 1985 et 28 février 1986 et la note interne de VP du 3 avril 1986 donnent la spécification exacte des échanges pour 1986 ; VP cède à FP [...] tonnes de bronze "bâtiment"; FP cède à VP [...] tonnes de gris "bâtiment", [...] tonnes de clair auto et [...] m2 de vert auto. Les prix du verre non destiné au secteur auto sont réajustés sur la base des modifications des tarifs respectifs.

(56) Échanges FP-SIV. D'après les données fournies, FP a vendu à SIV les quantités suivantes de verre coulé, les données de SIV étant indiquées entre parenthèses : [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986.

Les échanges de float auto et non-auto ont porté sur les quantités suivantes (les données SIV sont entre parenthèses). FP a cédé à SIV [... (...)] tonnes en 1982, [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986. SIV a cédé à FP [... (...)] tonnes en 1982, [... (...)] tonnes en 1983, [... (...)] tonnes en 1984, [... (...)] tonnes en 1985, [... (...)] tonnes en 1986.

Les échanges de notes, les comptes rendus et les notes manuscrites montrent que les prix des produits cédés sont établis et successivement réajustés sur la base des modifications tarifaires des cédants, que ces prix sont établis en fonction de la destination des produits cédés au marché national et aux marchés étrangers bien individualisés, que, même dans le cas de cession pour le marché national, la destination des produits est individualisée par région et par utilisation.

- Échanges de télex du 18 octobre 1984 et du 20 octobre 1984 et lettre de FP à SIV du 18 décembre 1984 : "Float clair grosses épaisseurs normales destinées à l'exportation ... [...] tonnes ; ambre exclusivement destiné à l'argenture [...] tonnes ; bronze exclusivement destiné à l'argenture [...] tonnes ; vert plus auto de l'étranger [...] tonnes ..."

- Le contrat signé le 18 janvier 1985 contient la clause suivante : "Le prix de vente susdit sera automatiquement augmenté au cours de l'année par les mêmes majorations apportées aux prix de vente et qui seront rendues publiques par les tarifs de Fabbrica Pisana".

- Note manuscrite de SIV sur une réunion entre SIV et FP le 30 octobre 1984 : "Problèmes résolus : Float clair, épaisseurs normales pour exportation [...] tonnes 1er septembre 1984 - 31 décembre 1985. Bronze pour argenture ... gris Italie ... vert plus auto ... Coulés ... Il ne doit pas être vendu à prix inférieur de FP. Laminés (surtout verres doubles) - [ directeur général de FP ] - Souhait (à propos) d'une politique de répartition en usine au lieu de faire transformer - pour le verre triple faire une politique commune".

- Lettre de FP à SIV du 6 mars 1985 : "... Je me vois dans l'obligation de vous faire part de mon insatisfaction sur la façon dont votre entreprise gère la commercialisation des verres coulés fournis par nous. Au cours de la dernière réunion à Rome vous étiez convenus que pour aucune raison les vendeurs SIV n'auraient dû pratiquer des conditions qui auraient pu porter atteinte aux bonnes règles d'une concurrence normale ..."

- Note manuscrite de FP sur une réunion entre SIV et FP le 28 mars 1985 : "Coulés - 1°) OK pour fournir. 2°) prix + 3 % sur le produit à partir du 1er avril. 3°) [...] tonnes/mois. 4°) Clients - 16 clients réservés à nous selon liste en notre et en leur possession".

- Après les réunions des 23 et 30 avril 1985, la note manuscrite de FP du 30 avril 1985 fait état des décisions suivantes adoptées par FP et SIV : "Prix que nous vous pratiquerons franco client ... Quantité totale [...] tonnes/mois. Distribution : Piémont 3 %, Lombardie 11 %, Trente 1 %, Emilie-Romagne 8 %, Toscane 10 %, Abruzze Molise 3 %, Latium 4 %, Campanie 24 %, Povilles 14 %, Calabre 10 %, Sicile 5 %, Sardaigne 3 %, le 4 réunion pour compensation".

- Note manuscrite de FP du 4 juin 1985 : "[ directeur commercial de SIV ] - [...] tonnes/mois - Continuité - Facturer directement à l'étranger. GV tout 4 mm. Cotation 84 FF = 209,63 - 370 Lit/kg, toute épaisseur + 4,8 % pour le rapport FF il dira (?) une variation de 2 % nous l'appliquons automatiquement ... Laminés il voudrait (?) + 3 % ..."

- Note manuscrite de FP du 16 décembre 1985 (Réunion SIV) : "[ Le directeur général de SIV ] parle de [...] tonnes en + pour eux ... deux éléments : prix de cession-répartition bénéfice". Se référant à ces cessions, la note manuscrite de FP sur une réunion entre FP et SIV le 3 février 1986 contient l'expression suivante : "Celui qui prélève davantage doit s'engager à ne pas perturber le marché".

(57) D'après les producteurs, les fournitures en verre de base seraient économiquement nécessaires pour des raisons inhérentes à la structure du secteur. Chaque producteur ne pourrait pas produire toutes les couleurs et les épaisseurs, car le passage d'une couleur à l'autre et d'une épaisseur à l'autre comporte des temps morts de production qui entraînent des coûts. Il serait donc normal qu'il y ait des cessions de produits d'un producteur à l'autre pour que chaque producteur puisse disposer de toute la gamme. De plus, il faudrait tenir compte des exigences techniques d'arrêts et d'entretiens périodiques des fours qui comportent des arrêts de production et donc la nécessité de s'approvisionner en produit de base.

Quant aux cessions de produits transformés, il serait illusoire de penser que le cédant puisse profiter d'une carence en produits du cessionnaire pour placer les produits auprès de l'utilisateur, parce que le cessionnaire, en cas de refus du cédant, essayera de s'approvisionner auprès d'autres concurrents.

Les cessions n'auraient pas un caractère systématique parce qu'elles répondraient à des besoins ponctuels.

Enfin les destinations géographiques ou d'utilisation dont on trouve trace dans certains documents seraient indispensables pour définir la qualité du produit et fixer son prix de vente.

(58) i) Ainsi qu'elle l'a dit dans la communication des griefs aux entreprises, la Commission n'entend pas mettre en cause les cessions réciproques de produits en cas de dépannage (renouvellement d'outils de production, arrêts pour entretien des fours, satisfaction de demandes ponctuelles), mais, ainsi qu'il est relevé dans la présente affaire, les échanges systématiques de produits convenus sur de longues périodes et qui constituent une conséquence du choix de politique industrielle et commerciale opéré par les producteurs dans le cadre d'autres ententes et/ou d'autres accords restrictifs de concurrence.

La Commission ne peut pas partager l'avis des producteurs selon lequel ces cessions seraient économiquement nécessaires. Ainsi que les producteurs l'affirment, les cessions visent à donner la possibilité à chacun d'eux de disposer à tout moment de la gamme des produits, annulant ainsi l'avantage économique dérivant de la spécialisation de chacun.

En effet, qu'il s'agisse de spécialisation pour telle ou telle autre épaisseur ou telle ou telle autre couleur, les cessions réciproques annulent l'avantage de la spécialisation et visent à placer artificiellement tous les producteurs sur un pied d'égalité, empêchant ainsi que la clientèle puisse bénéficier, en termes économiques, de la position privilégiée du point de vue productif et commercial détenue par chaque producteur. Les cessions réciproques conduisent, en fait, ainsi que le démontre l'uniformité des tarifs et des rabais des trois producteurs, à un marché plat et uniforme. D'ailleurs, pour éviter que la clientèle puisse individualiser le fabricant du produit cédé et donc s'y adresser directement, le cessionnaire ne dévoile que rarement et sur demande expresse éventuelle du client, comme l'a admis VP à l'audition orale, l'origine du produit vendu.

ii) Quant aux cessions des produits transformés, l'argument avancé par les producteurs ne répond pas à la réalité des faits. En effet, si ce que les producteurs affirment est vrai, à savoir que chaque produit transformé, notamment pour auto, doit répondre à certaines spécifications techniques et de dessins imposés par l'utilisateur, on ne voit pas comment le producteur qui manque d'un produit donné pourrait se procurer le produit en dehors du cercle restreint des fournisseurs du produit en question, car ceux qui ne sont pas fournisseurs de ce produit n'ont pas les outils préparés pour sa fabrication. C'est donc à l'intérieur du groupe des fournisseurs actuels que peuvent se réaliser les cessions. Par conséquent, celui qui cède des produits renonce à élargir sa part de marché et permet au cessionnaire de garder la sienne, car, ainsi qu'on l'a dit au point 51, les quotes-parts attribuées par l'utilisateur sont indicatives et elles n'engagent ni les fournisseurs, ni l'utilisateur.

iii) Contrairement à ce que les producteurs affirment, les échanges de produit sont, de l'avis de la Commission, systématiques. En effet, bien qu'à côté de contrats d'échanges à durée pluriannuelle coexistent des contrats à durée annuelle, ces contrats doivent être situés dans le contexte d'une politique commerciale qui, ainsi que l'admettent les producteurs, est connue et qui est toujours appliquée. Cela signifie que le producteur qui a besoin d'un produit est toujours assuré, compte tenu de la pratique répandue, qu'il sera en mesure de s'approvisionner chez ses concurrents.

Cela est d'autant plus vrai que les échanges ne portent pas sur des quantités marginales mais sur des tonnages importants. Or, ces grandes quantités ne pourraient pas être échangées sans l'existence d'un système bien établi.

Et pour que le système fonctionne, l'existence d'un accord-cadre formel n'est pas nécessaire, comme le prétendent les parties, car la constatation d'une pratique commerciale courante et répétée suffit à donner un caractère systématique aux cessions. L'importance des cessions réciproques de float des trois producteurs est démontrée par le pourcentage qu'elles ont représenté chaque année par rapport à la production de chaque producteur :

EMPLACEMENT TABLEAU

La moyenne pour les cinq années des ventes réciproques des trois producteurs a représenté [...] % de leur production globale, alors que la moyenne pour les cinq années de leurs achats réciproques a représenté [...] % de leur production.

Si l'on considère le verre coulé, on constate que FP, qui est resté depuis début 1984 le seul producteur en Italie, a cédé à ses concurrents italiens des quantités qui ont représenté les pourcentages suivants par rapport à ses ventes totales de ce produit : [...] % en 1983, [...] % en 1984, [...] % en 1985, [...] % en 1986.

iv) en ce qui concerne la nécessité d'indiquer les destinataires géographiques ou d'utilisation, il y a lieu de remarquer que le verre a été défini, par les mêmes producteurs, comme un produit homogène et banal, tellement homogène qu'il est impossible d'en individualiser le fabricant. S'il en est ainsi et compte tenu du fait que le produit est cédé à un autre professionnel qui est en mesure d'en déceler les défauts et les qualités, on ne comprend pas la raison d'être d'une destination préalable, d'autant plus que, puisque l'identification du fabricant est impossible sur la base du produit, le cédant ne peut craindre aucune responsabilité du fait du produit. De plus si le produit, quel que soit le fabricant, présente la même homogénéité, son prix de cession ne peut pas être fonction de la destination géographique ou d'utilisation mais uniquement du fait qu'il s'agit de produit de premier choix ou de second choix.

II. APPRÉCIATION JURIDIQUE

A. Article 85 paragraphe 1

(59) Selon l'article 85 paragraphe 1 du traité, sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises ou toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction et à répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(60) Les accords et les pratiques concertées décrits ci-dessous tombent sous l'interdiction de l'article 85 paragraphe 1 et les entreprises en cause sont des entreprises au sens dudit article, puisqu'elles exercent des activités économiques dans les secteurs de la production, de la transformation et de la vente du verre plat.

7. Les ententes et les pratiques concertées concernant le verre non destiné au secteur automobile

(61) La publications de tarifs identiques dans un court laps de temps, sinon à la même date, l'existence d'échelles de rabais identiques et de listes et de catégories identiques de clients bénéficiant de ces conditions sont le résultat d'ententes et de pratiques concertées entre les producteurs en cause. En effet, les documents et notes sur les réunions et sur les rencontres mentionnées au chapitre 4 démontrent que FP, SIV et VP se sont entendus ou tout au moins concertés, au moins à partir de 1983 et jusqu'à 1986, pour appliquer des prix et des conditions de vente uniformes, et que la thèse suivant laquelle l'identité des tarifs et des conditions de vente ne serait que la conséquence de l'homogénéité des produits et de l'existence d'une situation d'oligopole sur le marché ne correspond pas à la réalité des faits.

(62) La Commission ne peut pas partager l'avis de certains producteurs sur la notion d'accord ou d'entente.

Pour qu'une restricition constitue un accord ou une entente au sens de l'article 85 paragraphe 1, il n'est nullement nécessaire que cet accord ou cette entente détermine entre les parties un état de contrainte légale. L'accord ou l'entente existe dès lors que les parties s'entendent sur une pratique qui limite ou est susceptible de limiter leur liberté commerciale en déterminant les lignes de leur action ou de leur abstention réciproque sur le marché. Aucune sanction contractuelle n'est requise. Il n'est pas nécessaire que l'accord soit établi par écrit.

Dans le cas d'espèce, ainsi qu'il a été expliqué aux points 18 à 33, les notes de Socover des 12 juillet 1983, 12 avril 1985, 10 juillet 1985, 23 juillet 1985 et 10 mars 1986 et les notes de SIV et FP du 30 janvier 1985 font état de l'existence d'ententes entre les trois producteurs pour les tarifs et les conditions de vente, et les notes et les documents de SIV et FP des 30 octobre 1984, 6 et 28 mars 1985, 12, 23 et 30 avril, 16 décembre 1985 et 3 février 1986 font état au moins d'ententes entre SIV et FP sur les prix et les conditions de vente convenues à l'occasion de la cession des produits, ententes qui ne peuvent expliquer leur efficacité que dans un marché déjà cartellisé.

(63) Les producteurs affirment que la Commission n'a pas fourni la preuve de réunions ou d'ententes entre les trois producteurs en cause ayant pour objet l'égalité des tarifs ou des conditions de vente, mais uniquement la preuve de contacts bilatéraux entre tel ou tel autre producteur et un grossiste. Ainsi qu'on a pu le constater, la Commission a fourni la preuve de réunions entre les producteurs et a démontré que les notes de Socover ainsi que les notes de SIV et FP font état d'ententes préalables entre les trois producteurs. Mais même si la thèse des producteurs correspondait à la réalité, il n'en resterait pas moins que la publication pour une longue période de tarifs identiques, l'existence de mêmes échelles de rabais et l'application aux mêmes clients de conditions de vente uniformes ne pourraient que résulter de pratiques concertées, soit directement entre les trois producteurs, soit par l'intermédiaire du porte-parole des grossistes.

Bien que la notion d'accord ou d'entente soit distincte de celle de pratique concertée, il arrive que la collusion présente des éléments de l'une et l'autre forme de coopération illicite. En développant une notion de pratique concertée distincte, le traité vise à empêcher que les entreprises ne contournent l'application de l'article 85 paragraphe 1 en s'entendant sur des modalités contraires à la concurrence et non assimilables à un accord ou à une entente, en s'informant, par exemple, mutuellement à l'avance de l'attitude envisagée par chacun, afin que chacun puisse régler son comportement commercial en sachant que ses concurrents agiront de la même manière (4).

Dans son arrêt du 16 décembre 1975 (5), la cour a dit pour droit que les critères de coordination et de coopération définis par la jurisprudence de la cour doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence et selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le marché.

S'il est exact que cette exigence d'autonomie n'exclut pas le droit des entreprises de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou escompté de leurs concurrents, elle s'oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre elles ayant pour objet ou pour effet, soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent, soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on est décidé, ou que l'on envisage, d'adopter soi-même sur le marché.

Or, même si on ne veut pas qualifier d'ententes le contenu des notes et documents de SIV et FP et des notes de Socover, il n'y a pas de doutes que ces notes et documents font état de la collusion entre les trois producteurs, quelle que soit la forme précise que le comportement collusoire a revêtu en l'occurrence, car les trois producteurs ne pouvaient pas ne pas connaître le poids des mots lorsqu'ils affirment "nous ferons les mêmes conditions que les autres", "nous violons les dispositions du cartel", ". . . doit s'engager à ne pas perturber le marché", ou que Socover, défini par les producteurs eux-mêmes comme porte-parole des grossistes, pouvait être utilisé, comme il l'a été souvent, comme moyen de transmission du comportement envisagé ou escompté sur le marché d'un producteur à l'autre.

D'autre part, même si, à la limite, les trois entreprises pouvaient justifier, ce qui n'est pas le cas, la connaissance à travers la clientèle des tarifs des concurrents, qui sont publics, elles ne pourraient pas légitimement avancer une telle justification pour la connaissance de documents, tels que les échelles de rabais et les listes des clients bénéficiant de ces rabais, qui sont définis par les entreprises elles-mêmes comme étant des documents internes gardés jalousement secrets. Si à cela l'on ajoute le fait que ces entreprises ont modifié dans quelques cas le même jour et le plus souvent dans un bref laps de temps la classification des clients en catégories ou niveaux, force est de constater que la thèse des parties est sans fondement.

(64) Les réunions entre les grossistes les plus importants, promues et/ou organisées par les producteurs, sont le résultat, ainsi qu'il ressort des points 35 à 42, d'ententes ou de pratiques concertées entre FP, SIV et VP, ayant pour but d'orienter, dans un sens conforme à leurs intérêts concertés, les politiques d'achat et de ventes des grossistes, lesquels, à cause de leur dépendance économique, ne réussissent pas à se soustraire au pouvoir et aux actions pénétrantes des producteurs. Si les grossistes n'étaient pas obligés d'effectuer leurs choix commerciaux dans des réunions collégiales dans lesquelles la manifestation de la libre détermination de chacun est freinée ou empêchée par le fait que les réunions sont promues à l'initiative des producteurs, qui veulent ainsi souligner qu'ils agissent de commun accord, et par la présence directe ou indirecte (les sociétés de commercialisation contrôlées par les producteurs) des producteurs et des autres grossistes, qui sont leurs concurrents naturels, ils pourraient exercer individuellement des pressions sur les producteurs et diriger, donc, leurs achats vers le producteur ou les producteurs qui offrent des conditions de vente plus intéressantes, bouleversant ainsi les équilibres de marché voulus par les producteurs. Les réunions collégiales servent justement à éviter de telles pressions, à permettre aux producteurs de se contrôler réciproquement et de manifester leur comportement uniforme et à consolider, par conséquent, les équilibres et les structures de marché convenus.

(65) Le fait que quelquefois tel ou tel autre producteur est accusé de ne pas respecter les engagements et de violer le cartel, et le fait que quelque producteur applique avec retard prix et conditions convenus relèvent en fait de l'existence des ententes ou des concertations susmentionnées qui constituent, par leur nature, des infractions à l'article 85. En outre, même si les ententes n'étaient pas intégralement respectées, cela ne signifie pas qu'elles n'ont pas eu une influence sensible sur le comportement des entreprises.

(66) Ces ententes et pratiques concertées entre entreprises qui fabriquent des produits identiques constituent de graves restrictions de concurrence au sens de l'article 85 paragraphe 1. Par ces ententes et ces pratiques, les entreprises en cause se sont en effet engagées à limiter en substance leur autonomie de comportement vis-à-vis de la clientèle et elles ont agi de façon à ce que les clients les plus importants s'alignent sur leurs décisions et qu'ils n'aient pas la possibilité d'adopter librement leurs décisions en matière commerciale. Les effets de ces restrictions sont d'autant plus sensibles que FP, SIV et VP contrôlent ± 79 % du marché interne italien. Par le comportement contesté, les entreprises ont réduit, dans le chef des acheteurs, la possibilité de bénéficier d'une concurrence entre les producteurs locaux, compte tenu de leur part globale de marché malgré les importations. En outre, compte tenu des risques sur la régularité des approvisionnements, les acheteurs les plus importants, grossistes et transformateurs, peuvent difficilement se passer des fournitures des producteurs établis en Italie.

8. Les accords et les pratiques concertées pour le verre automobile

(67) Les faits et documents énumérés au chapitre V prouvent à l'évidence que FP et SIV, de 1982 à 1986, et FP, SIV et VP, de 1983 à 1986, se sont mis d'accord ou tout au moins concertés sur les prix à pratiquer à l'égard du groupe Fiat, et de 1982 à 1987 sur la répartition du marché, éliminant ainsi toute incertitude quant à leur comportement réciproque.

Les accords et les pratiques concertées entre FP et SIV, qui arrivent à la définition, jusqu'au détail, des prix, à la répartition, jusqu'aux pièces particulières, des fournitures, à la répartition des bénéfices ou des pertes liés à la réaction du client, constituent des infractions beaucoup plus graves que celles mises en œuvre avec la coopération de VP.

Le comportement de VP constitue aussi cependant une infraction. Il n'y a pas de doutes, en effet, que VP a participé aux ententes ou pratiques concertées sur les prix, ainsi qu'il ressort des notes de SIV et de FP et du fait qu'il a appliqué, de manière ponctuelle, les modifications tarifaires, même si c'est avec un écart de 0,3 % en moins dans un cas et avec quelque retard dans d'autres cas. Il n'y a pas de doutes non plus que VP a participé aux ententes relatives à la répartition des fournitures ainsi qu'il ressort des tableaux mécanographiques en possession de FP et du fait qu'il a activement travaillé et travaille des produits non transformés et transformés pour le compte de ses concurrents.

Il est peu vraisemblable qu'un fournisseur apprenne les augmentations de prix de ses concurrents par le client, parce que si celui-ci a tout intérêt à communiquer les diminutions de prix, il n'en a aucun à communiquer les augmentations. En fait, il a tout intérêt à rompre le front des fournisseurs pour obtenir des prix divers en fonction de la force contractuelle de chacun d'eux. Même s'il était vrai qu'au cours de la négociation avec le client un fournisseur puisse obtenir des indications sur les offres de ses concurrents, il n'en resterait pas moins que les conditions pratiquées par chaque fournisseur seraient fonction de la force contractuelle de chacun, de la gamme des produits offerts et du service et que même un client en position dominante ne pourrait pas ne pas tenir compte, dans la fixation des conditions d'achat, de ces données objectives. En tout état de cause, le fait est certain que FP, SIV et VP se sont concertés avant toute négociation avec le groupe Fiat, soit dans le cas de diminution des prix, soit dans le cas d'augmentation.

Enfin, il n'est pas vraisemblable que le client soit à l'origine des quotas ou soit le moyen de circulation de l'information sur les quotas parce qu'on ne voit pas quel pourrait être l'intérêt du client à faire circuler des informations sur l'origine et les pourcentages de ses fournitures. De telles informations sont, au contraire, jalousement gardées comme secret d'entreprise. Le fait que le client mentionne, dans les confirmations des commandes, le quota alloué pour le modèle en question au fournisseur concerné ne signifie pas que ce quota soit définitif ni que le client communique à chaque fournisseur les quotas alloués aux autres fournisseurs. Les quotas attribués individuellement à chaque fournisseur par le client sont uniquement des quotas indicatifs qui n'engagent ni le client ni le fournisseur, toute variation étant possible. En outre, les pourcentages négociés avec le client sont exprimés en pièces alors que les tableaux en possession de FP expriment des pourcentages en mètres carrés. Il s'ensuit, donc, que l'attribution de quotas définitifs et détaillés n'est pas le fait du client mais le résultat de la répartition des fournitures convenue entre les trois producteurs.

(68) Les documents mentionnés au chapitre 5 démontrent que FP et SIV se sont mis d'accord ou concertés, de la fin de 1982 à 1986, sur les prix à pratiquer à Piaggio et sur les quantités et les pièces que chacun d'eux aurait fournies.

Par ces accords et pratiques, qui constituent des infractions caractérisées, les deux producteurs ont mis au point une stratégie à long terme tendant à inciter le client en question à répartir ses commandes en fonction de leur décision, éliminant ainsi dans le chef de Piaggio, par le système des prix différenciés, toute possibilité économique de choix de ses sources d'approvisionnement.

Un tel comportement est d'autant plus grave que FP et SIV ont effectivement mis en pratique leurs accords, les ont adaptés, en cours d'exécution, aux circonstances du moment et les ont prorogés au-delà de la période prévue au début.

(69) Les accords et pratiques concertées ci-dessus constituent des restrictions qui restreignent la concurrence au sens de l'article 85 paragraphe 1. Par ces accords et pratiques, les producteurs en question ont créé une situation de marché telle à exclure ou, tout au moins, à réduire au minimum toute forme de concurrence entre eux. Ces accords et pratiques, en effet, ont permis aux intéressés de rechercher et d'atteindre un équilibre de prix et de débouchés à un niveau différent de celui qui aurait pu se produire dans une situation normale de concurrence et de cristalliser les positions de marché respectives. Les effets des restrictions mises en œuvre par les producteurs en cause sont sensibles du fait que FP et SIV contrôlent plus de 80 % du marché italien du verre auto et que FP, SIV et VP contrôlent ± 95 % de ce marché. À cause des comportements contestés, les utilisateurs ont été privés de la possibilité de bénéficier de la concurrence entre les producteurs locaux, vu la prépondérance des ventes de ces derniers sur le marché considéré malgré les importations. En outre, il faut prendre en considération le fait que, pour être assurés de la régularité des approvisionnements, les utilisateurs ne peuvent pas se passer des fournitures des producteurs établis en Italie.

9. Les accords relatifs aux échanges de verre entre les producteurs

(70) Les accords et contrats, explicités au chapitre 6, relatifs aux échanges systématiques de verre entre les trois producteurs, constituent des restrictions sensibles de la concurrence au sens de l'article 85 paragraphe 1, car ils privent les parties de leur autonomie de comportement et de leur faculté de s'adapter individuellement aux circonstances. En effet, par ces accords et contrats, chaque producteur renonce à tirer profit, par un surcroît de ventes directes à la clientèle, de la carence de produit des autres fabricants, de sa capacité productive, de sa spécialisation et de sa capacité technique de transformation, en se mettant, à son tour, à l'abri d'un tel risque dans le cas inverse.

Au moment même où une incursion d'une partie sur le marché d'une autre serait particulièrement aisée, compte tenu de l'identité des produits, et où une partie peut profiter de sa spécialisation pour s'imposer dans les segments de marché qui l'intéressent le plus, elle doit, au contraire, renoncer à ces types de comportement et détourner une part de sa production d'un écoulement normal pour la livrer à un concurrent. D'autre part, le concurrent bénéficiaire de l'échange se trouve, vis-à-vis du producteur cédant, dans une situation de dépendance telle qu'il n'affectera jamais ou il ne pourra pas destiner, comme certains documents énumérés au chapitre 6 le prouvent, à une action concurrentielle le produit reçu en exécution des accords et des contrats.

Ainsi qu'il ressort des documents énumérés au chapitre 6, ces accords et contrats visent, en définitive, à la répartition des débouchés et de la clientèle entre les producteurs en cause et à éviter toute modification des positions respectives dans les divers segments du marché et les éventuelles pressions des utilisateurs. Dans le secteur du verre auto, la répartition du marché et de la clientèle va quelquefois très loin : certains producteurs s'accommodent de travailler en sous-traitance pour leurs concurrents, qui possèdent la technique et les usines de transformation, dans le seul but d'arriver à une répartition des quotas de fourniture auprès de chaque client.

10. L'affectation du commerce entre États membres

(71) Les restrictions de concurrence décrites aux chapitres 7, 8 et 9 sont aptes à affecter de façon sensible le commerce intracommunautaire.

Les ententes sur les prix concernent aussi des produits importés par SIV d'autres États membres, par FP d'autres sociétés du groupe Saint-Gobain, par VP de la société soeur française Boussois. Les ententes sur les prix ont, donc, aussi pour objet des produits d'origine communautaire.

Les accords relatifs aux échanges de verre concernent aussi des produits des trois entreprises en cause destinés à l'exportation. Ils ont, par conséquent, pour effet d'empêcher que chaque producteur puisse développer librement ses ventes dans les États membres.

En outre, les accords relatifs aux échanges de produits et les ententes sur les prix et sur la répartition de quotas et de marché influent sur les ventes réalisables en Italie grâce aux importations d'articles produits dans les pays limitrophes. En effet, ces pratiques déterminent une structure de conditions commerciales uniformes distincte de la structure de conditions différenciées qui eût normalement prévalu si la concurrence n'avait été restreinte et, donc, détournent les flux commerciaux interétatiques du cours qu'ils eussent suivi en leur absence. En établissant ces conditions uniformes, les destinataires de la présente décision, qui représentent ± 79 % du marché italien du verre non-auto et ± 95 % du marché du verre auto et qui contrôlent une grande partie des sources d'approvisionnement externes, ont porté atteinte aux structures de concurrence effectives. Il s'ensuit que ces accords et ces ententes ont des effets sensibles sur les échanges interétatiques en consolidant des compartimentations de caractère national qui font obstacle à l'interpénétration économique voulue par le traité.

B. Article 85 paragraphe 3

(72) Les accords et pratiques concertées objet de la présente décision ne peuvent pas bénéficier de l'exemption prévue au paragraphe 3 de l'article 85 parce qu'ils n'ont pas été notifiés, conformément à l'article 4 paragraphe 1 du règlement n° 17, et parce qu'ils ne rentrent pas parmi les exemptions prévues au paragraphe 2 dudit article.

(73) D'autre part, la Commission estime que même si ces accords et pratiques avaient été notifiés, les conditions pour l'application de l'article 85 paragraphe 3 ne seraient pas réunies. En effet, on ne voit pas comment des ententes de prix et de répartition de marché peuvent contribuer à améliorer la production et la distribution ou contribuer au progrès technique, ni quel peut être le profit réservé aux utilisateurs par ces ententes. En outre, ces ententes donnent la possibilité aux entreprises en cause d'éliminer, sur le marché italien, la concurrence pour une partie substantielle des produits en question.

C. Article 86

(74) Au sens de l'article 86, est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci.

(75) FP, SIV et VP sont des entreprises au sens de l'article 86.

11. Le marché en cause

(76) Le marché pris en considération pour la présente décision est celui du verre plat. À la différence du verre creux qui est en concurrence avec d'autres produits tels que, par exemple, les boîtes en aluminium, les boîtes de fer blanc, les boîtes en carton particulièrement traité, les boîtes en plastique, le verre plat n'est pas substituable, sauf pour deux utilisations, avec d'autres produits pour les diverses utilisations auxquelles il est destiné. En effet, si l'on exclut les utilisations pour les serres et les vérandas, pour lesquelles le verre plat se trouve en concurrence avec le plastique, dans les limites toutefois où des nécessités particulières d'éviter la dispersion thermique ne se manifestent pas, il n'a pas de produits concurrents pour toutes les autres utilisations. Qu'il soit destiné aux vitres pour voitures ou pour bâtiment, aux miroirs, aux verres réfléchissants, aux verres isolants, aux verres laminés ou blindés, le verre plat n'est pas remplaçable par d'autres produits.

Le verre plat doit, par conséquent, être considéré comme un marché spécifique parce que, compte tenu de ses propriétés mécaniques, thermiques, optiques, décoratives et du rapport qualité/prix, il est apte, dans ses diverses utilisations, à satisfaire des besoins constants et il n'est pas interchangeable ni substituable, sauf pour deux utilisations, par d'autres produits.

(77) Du point de vue géographique, l'Italie, partie substantielle du marché commun, doit être considérée comme le marché approprié dans lequel mesurer la concurrence.La localisation géographique des unités de production est un facteur vital pour l'industrie du verre. En effet, bien que le coût de transport ne soit pas un obstacle insurmontable pour la commercialisation au-delà des frontières du verre plat, il est sûrement un facteur très important parce que, plus la distance entre centre de production et points de livraison augmente, plus le système logistique devient critique et plus la compétitivité du produit diminue. Il s'ensuit que, s'il est vrai que chaque producteur destine à l'exportation une partie de sa production, il est aussi vrai que cette partie est limitée par rapport aux quantités destinées au marché interne parce que, si l'on veut garantir la rentabilité de l'entreprise, on ne peut destiner au-delà des frontières que les quantités produites aux coûts marginaux. Les producteurs locaux sont, par conséquent, conscients qu'une certaine concurrence peut provenir de l'extérieur mais que cette concurrence est quantitativement limitée et qu'ils restent maîtres de la plus grande partie du marché interne. Si en plus, comme dans le cas en examen, la plus grande partie des sources d'approvisionnement situées en dehors d'Italie sont contrôlées par les groupes auxquels appartiennent les producteurs locaux, le risque de concurrence pour les quantités limitées dont on a parlé diminue encore.

L'importance logistique et économique de la localisation géographique des unités de production a comme conséquence que les utilisateurs ne peuvent essentiellement compter, pour la régularité des fournitures, que sur les producteurs locaux. Il en résulte que la possibilité de pressions que les utilisateurs peuvent exercer sur les producteurs locaux est limitée, soit en ce qui concerne les quantités, soit dans le temps : en ce qui concerne les quantités parce que, ainsi qu'on l'a vu, la disponibilité de produits étrangers est réduite ; dans le temps parce que, même si un utilisateur réussit à acheter une partie importante des produits étrangers disponibles, il pourra se passer des produits nationaux pour une période de temps très limitée et seulement s'il n'a pas la nécessité de la continuité des fournitures, mais, une fois terminé le stock de produits étrangers ou s'il y a nécessité d'approvisionnements réguliers, il sera obligé de s'adresser au marché interne pour ses approvisionnements.

Il ressort de ce qui précède que le marché italien est le marché géographique en cause parce qu'il est le lieu nécessaire de rencontre de l'offre et de la demande pour au moins quatre cinquièmes de la consommation interne.

12. La position dominante collective

(78)FP, SIV et VP, en tant que participants d'un oligopole étroit, disposent d'un degré d'indépendance par rapport aux pressions concurrentielles qui les met en mesure de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective en ne devant pas notablement tenir compte des comportements des autres participants au marché.

(79) La position dominante collective de FP, SIV et VP résulte des éléments suivants :

Les parts de marché de ± 79 % pour le verre non destiné au secteur auto et de ± 95 % pour le verre automobile, détenues ensemble, suffisent à elles seules à conférer à FP, SIV et VP une position dominante sur le marché italien du verre plat. Ces parts de marché sont assez stables depuis plusieurs années.

FP, SIV et VP font partie de groupes ayant des dimensions multinationales et qui contrôlent plus de la moitié de la production et de l'offre communautaire de verre plat destiné au secteur automobile et au secteur non-automobile. Elles sont, donc, en grande partie protégées de la concurrence qui, dans les limites explicitées au paragraphe 76, pourrait venir de l'extérieur. Le contrôle direct de l'offre interne et le contrôle indirect de l'offre provenant de l'extérieur donnent à ces trois entreprises la possibilité de pratiquer une politique commerciale non dépendante de l'évolution du marché et des conditions de concurrence.

Le fait que ces trois entreprises ont dû supporter des actions concurrentielles même continues de quelque producteur communautaire et des actions concurrentielles ponctuelles de la part de producteurs non communautaires ne contredit pas la conclusion susdite. En effet, ainsi que l'a affirmé la cour de justice dans les affaires United Brands et Hoffmann-La Roche (6), la position dominante n'exclut pas l'existence d'une certaine concurrence ni présuppose que le producteur ou les producteurs qui la détiennent aient éliminé toute possibilité de concurrence. D'autres producteurs peuvent leur faire une concurrence active sans pour autant qu'un tel comportement leur soit préjudiciable et que les entreprises perdent leur position d'entreprises en position dominante. À ce propos, le fait que, malgré les efforts, les entreprises concurrentes n'ont pas réussi à affaiblir la position des trois entreprises sur le marché italien et le fait que FP, SIV et FP ont, donc, consolidé leurs parts de marchés sont des indices significatifs de dominance.

L'importance des investissements demandés pour l'exercice de cette industrie et la prévision d'une faible augmentation de la demande pour la prochaine décennie ne laissent pas entrevoir une modification structurelle des conditions de marché ni que de nouveaux producteurs s'introduisent sur le marché.

Ces entreprises se présentent sur le marché comme une seule entité et non avec leur individualité.

Ainsi qu'il ressort de ce qui a été dit aux points 35 à 42, les trois producteurs entretiennent en commun des liens particuliers avec un groupe de grossistes qui sont les plus importants distributeurs de verre en Italie, ils en provoquent les réunions, il mettent tout en œuvre pour leur faire accepter les modifications tarifaires et pour que ces modifications soient répercutées en aval de manière uniforme afin d'éviter que d'éventuelles décisions individuelles des grossistes puissent être à l'origine de pressions commerciales sur chaque producteur conduisant à des modifications des équilibres de marché.

Les décisions économiques des trois producteurs manifestent un degré élevé d'interdépendance en matière de prix et conditions de vente, de rapports avec la clientèle et de stratégies commerciales.

Les trois entreprises ont, en outre, établi entre elles, au plan de la production, des liens structurels à travers les échanges systématiques de produits, ainsi qu'il a été dit au chapitre 6. Ces échanges constituent, d'une part, le résultat de la carence structurelle de certaines entreprises en produit de base ou en certains produits transformés et, d'autre part, l'expression en même temps que l'instrument de leur volonté permanente d'éviter que cette situation ne se traduise par des modifications de leur position relative sur le marché et du rapport de force existant entre elles.

13. L'abus de position dominante collective

(80) FP, SIV et VP ont abusé de leur position dominante collective sur le marché italien du verre plat, qui constitue une partie substantielle du marché commun.

Le comportement commercial de FP, SIV et VP, décrit aux points 18 à 34, 43 à 47, 49 et 52, constitue une exploitation abusive de position dominante collective parce qu'elle restreint dans le chef des utilisateurs la possibilité de choix en ce qui concerne les sources d'approvisionnements et limite les débouchés des autres producteurs communautaires de verre plat.

À travers leurs comportements, les entreprises en cause ont recours à des moyens différents de ceux sur lesquels repose la concurrence normale entre produits ou services, qui se base sur les prestations des opérateurs économiques, affaiblissant encore le degré de concurrence sur un marché dans lequel, précisément à cause de la présence de ces entreprises en position dominante collective, celui-ci est déjà réduit.

(81) Les comportements adoptés par FP, SIV et VP, mentionnés aux points 18 à 34, 43 à 47, 49 et 52, constituent aussi des abus au sens de l'article 86 du traité CEE parce qu'ils sont incompatibles avec l'objectif poursuivi par l'article 3 point f) du traité, qui prévoit un régime de concurrence non faussée à l'intérieur du marché commun.

En ce qui concerne, en particulier, les points a) et b) de l'article 86, les trois producteurs ont privé les clients de la possibilité de mettre en concurrence les fournisseurs en matière de prix et de conditions de vente et ont limité les débouchés par la fixation de quotas de vente pour le verre auto, cristallisant ainsi les positions de marché acquises et limitant l'accès au marché des producteurs concurrents.

(82)Le comportement de FP, SIV et VP, qui a pour effet de porter atteinte aux structures de la concurrence dans le marché du verre plat, est, pour les raisons explicitées au chapitre 10, de nature à affecter le commerce entre États membres au sens de l'article 86.

D. Article 15 paragraphe 2 du règlement n° 17

(83) Sur la base de ce qui précède, la Commission estime devoir infliger des amendes au sens de l'article 15 paragraphe 2 du règlement n° 17 aux trois entreprises qui ont commis des infractions à l'article 85 paragraphe 1 à travers des accords, des ententes et des pratiques concertées applicables en Italie pour le verre auto et non-auto et concernant les prix et les conditions de vente, la répartition de marché et les échanges de produits, et, en même temps, en abusant de leur position dominante collective, des infractions à l'article 86 points a) et b).

(84) Pour déterminer le montant des amendes, la Commission a pris en considération les éléments suivants :

a) La violation simultanée par les mêmes comportements de deux dispositions du traité (concours idéal d'infractions) pose le problème du cumul ou du non-cumul des amendes pour les deux infractions. En l'absence de toute disposition expresse en matière de cumul d'amendes contenu dans le droit communautaire et, en particulier, dans l'article 15 paragraphe 2 du règlement n° 17, la Commission estime que la règle du non-cumul est d'application et, donc, que seules les amendes pour l'infraction plus grave doivent être infligées aux entreprises. Dans le cas d'espèce, compte tenu du fait que la notion de position dominante collective est utilisée pour la première fois dans l'application de l'article 86, la Commission estime qu'il n'y a pas lieu d'infliger d'amendes au titre de l'article 86 ;

b) La durée des infractions. Les infractions ont été de relativement longue durée.

En ce qui concerne le verre non destiné au secteur automobile, la Commission estime que les ententes et les pratiques concertées sur les prix et conditions de vente et celles destinées à orienter les choix commerciaux des grossistes les plus importants ont existé, tout au moins sous ses formes les plus graves, du 1er juin 1983 au 10 avril 1986.

Concernant le verre destiné au secteur automobile, la Commission estime que : les accords et les pratiques concertées sur les prix, concernant le groupe Fiat, ont existé, sous ses formes les plus graves, entre FP et SIV du 26 octobre 1982 au 1er décembre 1986 et entre FP, SIV et VP du 11 mai 1983 au 1er décembre 1986 ; les accords et les pratiques concertées sur les quotas, concernant le groupe Fiat, ont existé entre FP, SIV et VP du 1er janvier 1982 au 30 juin 1987 ; les accords et les pratiques concertées sur les prix et les quotas, concernant le groupe Piaggio, ont existé entre FP et SIV du 1er janvier 1983 au 1er mai 1986 et sous ses formes les plus graves du 1er janvier 1983 au 28 décembre 1984. Concernant les échanges de produits, la Commission estime que les accords entre FP, SIV et VP ont existé du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1986 ;

c) Gravité des infractions. La nature des infractions, qui sont du type traditionnel et sur la qualification desquelles, à la lumière de l'article 85, il n'y a pas de doutes, l'importance économique des entreprises intéressées et la position qu'elles détiennent sur le marché italien portent à considérer ces accords et pratiques concertées comme étant particulièrement graves.

La Commission n'a pas la certitude que ces infractions ont cessé. Mais même si les entreprises ont mis fin aux infractions, ceci n'est pas arrivé spontanément, mais suite à l'intervention de la Commission.

De plus les trois entreprises sont récidivistes. En effet, par décision 81-881-CEE de la Commission (7), elles ont été condamnées pour infraction à l'article 85 ;

d) Circonstances atténuantes. Pour modérer le montant des amendes, la Commission a tenu compte du fait que, de 1979 à 1983, pour le verre non destiné au secteur auto, et de 1979 à 1984, pour le verre destiné au secteur auto, il y a eu des périodes de chute de la demande et que, en conséquence, les entreprises ont subi des pertes.

(85) Pour déterminer le montant des amendes à infliger aux diverses entreprises, la Commission a tenu compte du rôle joué par chacune dans les accords et pratiques concertées - le rôle joué par VP ayant été beaucoup moins important que celui joué par FP et SIV -, du laps de temps pendant lequel elles ont participé à l'infraction, de leurs livraisons respectives de verre ainsi que du chiffre d'affaires total de chacune,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION :

Article premier

Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIV SpA, Vernante Pennitalia SpA ont enfreint les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE en participant :

a) Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA, SIV et Vernante Pennitalia SpA, du 1er juin 1983 au 10 avril 1986, à des ententes et pratiques concertées sur les prix et les conditions de vente et à des ententes et pratiques concertées ayant pour but d'orienter les politiques d'achat et de vente des grossistes les plus importants dans le secteur du verre plat non destiné au secteur automobile ;

b) Fabbrica Pisana SpA et Società Italiana Vetro-SIN SpA, du 26 octobre 1982 au 1er décembre 1986, Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA du 11 mai 1983 au 1er décembre 1986 à des accords et pratiques concertées sur les prix à pratiquer au groupe Fiat dans le secteur du verre plat destiné au secteur automobile ;

c) Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA, du 1er janvier 1982 au 30 juin 1987, à des accords et pratiques concertées relatifs à la répartition des quotas pour les fournitures au groupe Fiat dans le secteur du verre plat destiné au secteur automobile ;

d) Fabbrica Pisana SpA et Società Italiana Vetro-SIN SpA, du 1er janvier 1983 au 1er mai 1986, à des accords et pratiques concertées relatifs aux prix et aux quotas de fournitures à appliquer au groupe Piaggio dans le secteur du verre plat destiné au secteur automobile ;

e) Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA, du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1986, à des accords d'échanges de produits dans le secteur du verre plat dans le but d'arriver à une répartition de marché.

Article 2

Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA ont enfreint les dispositions de l'article 86 du traité CEE en abusant de leur position dominante collective par leurs comportements consistant à priver les clients de la possibilité de mettre en concurrence les fournisseurs en matière de prix et de conditions de vente et à limiter les débouchés par la fixation de quotas pour le verre auto :

a) Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA du 1er juin 1983 au 10 avril 1986 pour le verre plat non destiné au secteur automobile ;

b) Fabbrica Pisana SpA et Società Italiana Vetro-SIN SpA, du 26 octobre 1982 au 1er décembre 1986, Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA et Vernante Pennitalia SpA du 11 mai 1983 au 1er décembre 1986 pour les prix du verre plat automobile destiné au groupe Fiat ;

c) Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA, du 1er janvier 1982 au 30 juin 1987, pour les quotas de fournitures de verre plat automobile destiné au groupe Fiat ;

d) Fabbrica Pisana SpA et Società Italiana Vetro-SIN SpA, du 1er janvier 1983 au 1er mai 1986, pour les prix et les quotas de fournitures de verre plat automobile destiné au groupe Piaggio.

Article 3

Fabbrica Pisana SpA, Società Italiana Vetro-SIN SpA et Vernante Pennitalia SpA mettent fin immédiatement aux infractions commentées (si elles ne l'ont pas déjà fait) et s'abstiennent à l'avenir, dans le cadre de leur secteur "verre plat", de tout accord ou pratique concertée susceptible d'avoir un objet ou effet identique ou similaire, y compris tout échange de renseignements du type généralement couvert par le secret professionnel qui leur permettrait de suivre l'exécution de tout accord exprès ou tacite ou de toute pratique concertée se rapportant au prix ou au partage de marché.

Article 4

Les amendes suivantes sont infligées aux entreprises visées par la présente décision, en raison des infractions constatées à l'article 1er :

- Fabbrica Pisana SpA une amende de 7 millions d'écus,

- Società Italiana Vetro-SIV SpA une amende de 4,7 millions d'écus,

- Vernante Pennitalia SpA une amende de 1,7 million d'écus.

Article 5

Les amendes infligées à l'article 4 sont payables dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision au compte bancaire suivant :

a) compte n° 9.130.707 - Commission des Communautés européennes - Bruxelles - ECU - (pour paiement en écus), Istituto Bancario S. Paolo di Torino, 156, Piazza S. Carlo, I-10121 Torino ;

b) compte n° 26952-018 - Commission des Communautés européennes - Bruxelles (pour paiement en lires italiennes), Cassa di Risparmio delle Province Lombarde, Via Monte di Pietà, 8, I-20121 Milano.

Les montants de ces amendes portent intérêt de plein droit à compter de l'expiration du délai précité, au taux appliqué par le Fonds européen de coopération monétaire à ses opérations en écus le premier jour ouvrable du mois au cours duquel la présente décision a été adoptée, majoré de trois points et demi, soit 11 %.

En cas de paiement en monnaie nationale des destinataires, la conversion sera effectuée au taux du jour précédant le jour de versement.

Article 6

Sont destinataires de la présente décision :

- Fabbrica Pisana SpA - Direzione Generale - Via E. Romagnoli, 6 - I-20146 Milan,

- Società Italiana Vetro-SIV SpA - I-66050 S. Salvo (Chieti),

- Vernante Pennitalia SpA - Corso Aurelio Saffi, 37 - I-16128 Gênes.

La présente décision forme titre exécutoire, conformément à l'article 192 du traité CEE.

(1) JO n° 13 du 21. 2. 1962, p. 204-62.

(2) JO n° 127 du 20. 8. 1963, p. 2268-63.

(3) Cette annexe se réfère aux années 1985 et 1986. Pour les années précédentes, il n'a pas été possible d'élaborer des tableaux parce que des producteurs n'ont pas été en mesure de fournir des informations complètes.

(4) Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 14 juillet 1972, affaire 48-69, ICI - Commission, Recueil de la jurisprudence 1972, p. 619.

(5) Affaires jointes 40 à 48, 50, 54 à 56, 111, 113 et 114-1973, Suiker Unie - Commission, Recueil de la jurisprudence 1975, p. 1663.

(6) Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 14 février 1978, affaire 27-76 United Brands, Recueil de la jurisprudence 1978, p. 207. Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 13 février 1979, affaire 85-76 Hoffmann-La Roche, Recueil de la jurisprudence 1979, p. 451.

(7) JO n° L 326 du 13. 11. 1981, p.32.

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