CCE, 25 juillet 1974, n° 74-433
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Frubo
LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,
Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85, vu le règlement n° 17 du 6 février 1962 (1), et notamment son article 3, vu le règlement n° 26, du 4 avril 1962, portant application de certaines règles de concurrence à la production et au commerce des produits agricoles (2), et notamment son article 2, vu la demande présentée le 8 février 1968, conformément à l'article 3 paragraphe 2 b) du règlement n° 17, par l'entreprise Govers en Zonen à Amsterdam (Pays-Bas), vu la demande présentée le 2 janvier 1970, conformément à l'article 2 paragraphe 3 du règlement n° 26, par la Nederlandse Vereniging voor de Fruit-en Groetenimporthandel à La Haye (Pays-Bas) et par le Nederlandse Bond van Grossiers in Zuidvruchten en ander geïmporteerd fruit "Frubo" à la Haye (Pays-Bas), à l'égard de l'accord conclu en 1952 entre ces deux associations et révisé les 1er février 1961, 15 février 1965, 1er août 1968, 15 mars 1972 et 21 février 1974, vu la notification de ce même accord effectuée le 21 avril 1972 par les deux associations précitées, conformément à l'article 4 paragraphe 1 du règlement n° 17, vu la demande présentée le 5 octobre 1973, conformément à l'article 3 paragraphe 2 b) du règlement n° 17, par vingt-deux entreprises néerlandaises membres du Nederlandse Bond van Grossiers in Zuidvruchten en ander geïmporteerd fruit "Frubo", après avoir entendu les entreprises et associations d'entreprises intéressées, conformément à l'article 19 paragraphe 1 du règlement n° 17 et aux dispositions du règlement n° 99-63-CEE du 25 juillet 1963 (3), vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes recueilli, conformément à l'article 10 du règlement n° 17, le 26 avril 1974,
I
1. Considérant que en 1952 un accord concernant la vente aux enchères aux Pays-Bas des agrumes frais et des pommes et poires d'origine non européenne (ci-après dénommés "fruits") a été conclu entre la Nederlandse Vereniging voor de Fruit-en Groentenimporthandel (ci-après dénommée "association des importateurs") et le Nederlandse Bond van Grossiers in Zuidvruchten en ander geïmporteerd fruit "Frubo" (ci-après dénommé "association des grossistes") et que cet accord a été modifié successivement les 1er février 1961, 15 février 1965 et 1er août 1968 ;
Considérant que, à la suite d'une première communication de griefs qui leur a été adressée le 12 novembre 1969, les deux associations précitées ont modifié, le 15 mars 1972, certaines clauses de l'accord concernant notamment les conditions d'accès aux ventes aux enchères et qui, dans la communication des griefs, avaient été considérées comme incompatibles avec les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 ; qu'elles ont ensuite notifié à la Commission, le 21 avril 1972, l'accord ainsi modifié ; que, après réception de la deuxième communication des griefs qui leur a été adressée le 19 novembre 1973, les associations intéressées ont, le 21 février 1974, procédé à une nouvelle modification des dispositions de l'accord relatives à l'obligation de commercialiser les fruits exclusivement par l'intermédiaire des ventes aux enchères ;
Considérant que les dispositions principales de l'accord sont, après la dernière modification, les suivantes :
a) la participation aux ventes aux enchères qui ont lieu à Rotterdam est interdite sans l'autorisation de la "Commissie importveilingen" (commission des ventes publiques d'importation) qui est une commission chargée de veiller au respect des dispositions de l'accord et qui est composée de trois membres de l'association des importateurs et de trois membres de l'association des grossistes (articles 2, 3 et 54 de l'accord) ; les importateurs admis aux ventes aux enchères peuvent, cependant, autoriser des grossistes étrangers à participer à ces ventes aux enchères, toutefois, exclusivement pour des achats en transit (article 5) ;
b) l'autorisation de participer aux ventes aux enchères, en qualité de vendeur, est accordée sur demande à tout importateur établi dans la CEE qui :
- s'il n'est pas membre de l'association des importateurs, s'est engagé par écrit, vis-à-vis de cette association et de l'association des grossistes, à respecter les dispositions de l'accord, et
- a constitué en faveur de ces deux associations, si cette condition est exigée par la "Commissie importveilingen", une garantie bancaire de 10 000 florins (article 2) ;
c) l'autorisation de participer aux ventes aux enchères, en qualité d'acheteur, est accordée sur demande à tout grossiste en fruits et légumes établi aux Pays-Bas qui :
- s'il n'est pas membre de l'association des grossistes, s'est engagé par écrit, vis-à-vis de cette association et de l'association des importateurs, à respecter les dispositions de l'accord, et
- a exercé, pendant une année avant l'introduction de la demande, une activité de grossiste en agrumes et qui, en cette qualité, a commercialisé régulièrement ces produits durant ladite année (article 3) ;
ces conditions ne sont pas requises pour les grossistes non établis aux Pays-Bas et qui, donc, ne commercialisent pas régulièrement des agrumes dans ce pays ;
d) pour les importateurs et les grossistes admis à participer aux ventes aux enchères de Rotterdam, "il est interdit de commercialiser aux Pays-Bas, autrement que par le canal d'une vente aux enchères d'importation, les agrumes frais produits hors de la CEE ainsi que les pommes et poires non originaires d'Europe s'ils n'ont pas déjà été vendus à une vente aux enchères d'importation (article 9 paragraphe 1) ; une dérogation est faite à la règle qui précède dans le cas où les fruits visés au premier paragraphe sont achetés auprès d'un importateur ou d'un grossiste établi dans un autre pays membre de la CEE par lequel les fruits ont été effectivement acheminés, dédouanés et déchargés (article 9 paragraphe 2) (4) ; l'acheteur qui se prévaut de la disposition du paragraphe 2 doit à la demande de la "Commissie importveilingen" pouvoir démontrer que les conditions fixées dans ce paragraphe sont remplies (article 9 paragraphe 3") ;
e) cette obligation de vendre et d'acheter les fruits par l'intermédiaire d'une vente aux enchères d'importation ne s'applique pas aux transactions suivantes :
- ventes et achats en transit,
- ventes à des usines,
- ventes de fruits dont l'état est tel qu'ils ne peuvent raisonnablement être présentés aux ventes aux enchères,
- ventes de fruits doux, s'il s'agit de quantités minimes (article 11) ;
f) les ventes aux enchères de Rotterdam ont lieu régulièrement chaque semaine, le lundi, le mardi et le mercredi à 11 heures ; les fruits ne peuvent être mis en vente que si les quantités ont été communiquées à l'avance par carte de vente publique ou par inscription sur un catalogue ; la vente de quantités plus grandes n'est autorisée que si le dépassement de la quantité annoncée n'excède pas 20 % et si communication en a été faite avant le début de la vente ;
g) en ce qui concerne l'organisation de ces ventes aux enchères, l'accord prévoit, en outre, toute une série de dispositions de caractère technique relatives, entre autres, aux échantillons des fruits mis en vente (prélèvement et exposition) ; aux contrôleurs chargés de vérifier l'état des fruits, les quantités mises en vente et le prélèvement d'échantillons ; aux ventes dites "aveugles" qui désignent des ventes de fruits dont les échantillons n'ont pu être exposés à temps ; aux modalités de livraison des marchandises vendues ;
h) la "Commissie importveilingen" peut prendre les sanctions suivantes à l'égard de celui qui ne respecte pas les dispositions de l'accord :
- blâme,
- communication de l'infraction aux personnes liées par l'accord,
- amende pouvant aller jusqu'à 10 000 florins,
- interdiction, pendant une certaine période, de participer aux ventes aux enchères,
- exclusion des ventes aux enchères ;
2. Considérant que, jusqu'au 21 février 1974, les dispositions qui étaient prévues aux anciens articles 9 et 10 de l'accord interdisaient aux grossistes participant aux ventes aux enchères de Rotterdam d'approvisionner le marché néerlandais par des achats effectués dans les autres Etats membres de la Communauté, à l'exception des agrumes achetés à la vente aux enchères d'Anvers ;
3. Considérant que les fruits commercialisés par l'intermédiaire des ventes aux enchères de Rotterdam sont principalement des agrumes, les pommes et poires non européennes n'étant importées qu'en petites quantités ; qu'environ 80 % des agrumes consommés aux Pays-Bas passent par le canal des ventes aux enchères de Rotterdam ; que neuf importateurs établis aux Pays-Bas participent régulièrement à ces ventes en qualité de vendeurs et que les importateurs établis dans les autres Etats membres n'y participent que très rarement ; que le nombre des grossistes qui s'approvisionnent à ces ventes aux enchères est d'environ trois cent cinquante, ce qui représente la quasi totalité des grossistes ayant pour activité principale la commercialisation des fruits aux Pays-Bas ;
4. Considérant que les quantités d'agrumes commercialisées aux enchères de Rotterdam sont très importantes et qu'elles sont écoulées non seulement sur le marché néerlandais mais aussi sur le marché allemand et, dans une moindre mesure, sur les marché d'autres Etats membres de la CEE ; que les agrumes offerts à ces ventes aux enchères présentent un grand choix d'origines et de variétés et que les prix enregistrés y sont généralement inférieurs à ceux constatés dans les autres pays de la Communauté ; que, néanmoins, il n'est pas certain que les agrumes vendus à Rotterdam atteignent, pour toutes les origines, la même qualité ou le même degré de fraîcheur que ceux offerts sur les autres grands marchés d'importation de la CEE ; que cet aspect de la qualité et du degré de fraîcheur des fruits tendent à prendre une place de plus en plus déterminante dans le choix des consommateurs et des distributeurs néerlandais, du fait notamment de la concurrence croissante des agrumes espagnols qui peuvent être livrés sur le marché néerlandais beaucoup plus rapidement (chemins de fer) que les agrumes de provenances plus lointaines (bateaux) ; que, d'ailleurs, la Commission a pu constater qu'un certain nombre des grossistes admis à participer aux ventes aux enchères ne respectent pas toujours les dispositions de l'accord, puisqu'ils achètent occasionnellement des agrumes dans les pays tiers ou dans d'autres Etats membres de la CEE, sans passer par les ventes aux enchères de Rotterdam, ce qu'ils ne feraient pas en l'absence d'intérêts économiques valables ;
II
1. Considérant que les dispositions de l'accord qui a été conclu entre deux associations d'entreprises lient, en fait, directement les entreprises participant aux ventes aux enchères de Rotterdam et sont effectivement appliquées par elles ; que cet accord doit donc être considéré comme un accord entre entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1 du traité ;
2. Considérant que, dans sa version actuelle, l'accord comporte certaines dispositions qui ont pour objet et pour effet de restreindre la concurrence à l'intérieur du marché commun ; que, en effet, l'article 9 paragraphe 1 de cet accord interdit aux importateurs et aux grossistes autorisés à participer aux ventes aux enchères de Rotterdam de commercialiser, en dehors de ces ventes aux enchères, les agrumes produits dans les pays tiers et les pommes et poires produites hors d'Europe lorsque ces fruits sont destinés à la consommation néerlandaise et qu'ils n'ont pas encore été soit vendus ou achetés dans le cadre d'une autre vente aux enchères de fruits importés, soit achetés après dédouanement et déchargement (Voir note 4) auprès d'un importateur ou d'un grossiste établi dans un autre Etat membre ;
Considérant que, en fait, cette interdiction restreint essentiellement la liberté d'approvisionnement des grossistes participant aux ventes aux enchères de Rotterdam et donc leur capacité concurrentielle, puisqu'elle les empêche d'accéder eux-mêmes au rôle d'importateur et les contraint ainsi à s'approvisionner principalement aux ventes aux enchères de Rotterdam, lorsqu'il s'agit de fruits provenant de pays tiers et destinés à la consommation néerlandaise ; que, bien que l'article 9 paragraphe 1 n'exclût pas la possibilité de s'approvisionner également dans les autres ventes aux enchères de fruits importés existant dans la CEE, c'est-à-dire les ventes publiques d'importation d'Anvers et d'Hambourg, il s'avère, en fait, que ces deux autres ventes aux enchères n'offrent que de très faibles possibilités d'approvisionnement ; que, d'autre part, même si l'article 9 paragraphe 2 permet aux grossistes néerlandais d'effectuer des achats auprès d'entreprises établies dans d'autres Etats membres de la CEE, il faut remarquer que les conditions exigées pour de tels achats sont si restrictives qu'elles empêchent pratiquement la réalisation de telles opérations ; que, en effet, ces conditions impliquent que les grossistes néerlandais ne peuvent expédier aux Pays-Bas que les fruits en provenance de pays tiers qu'ils ont achetés dans d'autres Etats membres après dédouanement et déchargement (Voir note 4) dans ces pays ; qu'il reste par conséquent interdit à ces grossistes néerlandais d'expédier aux Pays-Bas des fruits en provenance de pays tiers qu'ils auraient importés eux-mêmes dans un autre Etat membre ou qui n'auraient pas été préalablement dédouanés et déchargés (Voir note 4) par un importateur ou par un grossiste établi dans un autre Etat membre ; que les effets restrictifs de ces conditions ne sont pas sensiblement modifiés par la suppression de l'obligation du déchargement dans un autre Etat membre, l'interdiction de commercialiser aux Pays-Bas des fruits en provenance de pays tiers que le grossiste néerlandais aurait lui-même importés dans un autre Etat membre restant entière ; qu'il apparaît donc que les dispositions de l'article 9 de l'accord restreignent effectivement la liberté d'approvisionnement des grossistes participant aux ventes aux enchères de Rotterdam et que ces restrictions sont particulièrement sensibles, puisque les grossistes concernés assurent la majeure partie de la distribution des agrumes destinés à la consommation néerlandaise;
Considérant que l'interdiction précitée a pour conséquence de restreindre également la liberté de vente à l'intérieur du marché commun des importateurs établis dans les autres Etats membres de la Communauté ; que, en effet, bien que l'accord n'interdit pas à ces importateurs de participer en tant que vendeurs aux ventes aux enchères de Rotterdam chaque fois qu'ils désirent écouler aux Pays-Bas une certaine quantité de fruits qui, par exemple, n'aurait pu être vendue à des prix rémunérateurs sur leur marché national, ces importateurs ne peuvent vendre directement, c'est-à-dire sans passer par les ventes aux enchères, aux grossistes néerlandais participant à ces ventes, des fruits qu'ils auraient eux-mêmes importés mais qu'ils n'auraient pas encore dédouanés et déchargés (Voir note 4) ; que, en d'autres termes, les dispositions de l'accord empêchent un importateur d'un autre Etat membre de la CEE d'acheminer directement - c'est-à-dire sans passer par les ventes aux enchères de Rotterdam - vers un grossiste néerlandais une partie d'une commande d'agrumes passée dans un pays tiers, lorsqu'il s'aperçoit qu'il ne pourra écouler la totalité de sa commande sur son marché national ;
3. Considérant que l'obligation imposée aux grossistes soumis aux dispositions de l'accord de s'approvisionner principalement, pour les fruits destinés à la consommation néerlandaise, dans les ventes publiques d'importation ainsi que la restriction à la liberté de vente qui en découle pour les importateurs des autres Etats membres sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres ; que, en effet, à l'exception des agrumes produits dans la Communauté (en fait les agrumes italiens), des fruits achetés aux ventes aux enchères d'Anvers ou d'Hambourg et des fruits en provenance de pays tiers achetés dans d'autres Etats membres de la CEE auprès d'entreprises qui ont déjà procédé au dédouanement et au déchargement (Voir note 4) de ces fruits, les grossistes soumis aux dispositions de l'accord ne peuvent pas importer sans passer par les ventes aux enchères de Rotterdam des fruits destinés à être consommés aux Pays-Bas ; que cette interdiction s'applique non seulement aux fruits achetés par les grossistes néerlandais dans les pays tiers et importés par eux-mêmes aux Pays-Bas, mais aussi aux fruits en provenance de pays tiers qui sont, soit achetés par ces grossistes néerlandais dans les autres Etats membres avant qu'ils y aient été dédouanés et déchargés (Voir note 4), soit importés par eux-mêmes dans ces autres Etats membres ; que le fait que les grossistes participant aux ventes aux enchères de Rotterdam soient empêchés d'approvisionner le marché néerlandais avec des fruits qu'ils auraient d'abord importés eux-mêmes dans d'autres Etats membres, ou avec des fruits achetés librement auprès d'importateurs et de grossistes des autres Etats membres de la Communauté, est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres ; que, en outre, l'ensemble des restrictions imposées à la liberté d'approvisionnement des grossistes néerlandais (y compris l'interdiction d'effectuer des importations directes en provenance des pays tiers) porte atteinte à la structure de concurrence dans ce secteur du marché commun, en affaiblissant la position concurrentielle de ces grossistes vis-à-vis des importateurs et des autres grossistes de la Communauté, ce qui est susceptible d'exercer une influence sur les courants d'échanges entre Etats membres dans un sens pouvant nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre ces Etats ;
4. Considérant que, avant la dernière modification de l'accord qui n'est intervenue que le 21 février 1974, les dispositions prévues aux anciens articles 9 et 10 étaient encore plus restrictives que celles contenues dans le nouvel article 9 ; que, en effet, les anciennes dispositions de l'accord notifié interdisaient aux grossistes participant aux ventes aux enchères de Rotterdam d'effectuer, auprès d'entreprises établies dans les autres Etats membres de la Communauté, tout achat d'agrumes en provenance de pays tiers et de pommes ou poires d'origine non européenne, à l'exception des agrumes achetés à la vente aux enchères d'Anvers ;
5. Considérant que, dans la version actuelle de l'accord, aucune autre disposition ne semble susceptible de restreindre la concurrence d'une manière sensible et d'affecter le commerce entre Etats membres ; que, en particulier, le fait que l'autorisation de participer aux ventes aux enchères de Rotterdam, pour y acheter des fruits destinés au marché néerlandais, ne soit accordée qu'aux grossistes établis aux Pays-Bas et qui ont exercé pendant un an une activité de grossistes en agrumes ne peut être considérée comme une restriction sensible de la concurrence et susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres ; que, en effet d'une part, l'obligation d'avoir exercé pendant au moins un an une activité de grossiste est considérée comme remplie même si cette activité a été exercée dans un Etat membre de la CEE autre que les Pays-Bas ; que, d'autre part, d'après les renseignements obtenus par la Commission, le grossiste qui demande à être admis aux ventes aux enchères est considéré, par les associations intéressées, comme établi aux Pays-Bas lorsqu'il compte exercer et exercera effectivement une activité régulière de distributeur d'agrumes et autres fruits aux Pays-Bas ;
III
Considérant que, bien que les produits concernés par l'accord figurent dans l'annexe II du traité CEE, les dispositions de l'article 2 du règlement n° 26 ne peuvent, pour les raisons exposées ci-après, être appliquées ;
1. Considérant qu'il ne s'agit pas d'un accord conclu par des exploitants agricoles, associations d'exploitants agricoles ou associations de ces associations et qu'il ne peut donc être visé par la deuxième phrase du paragraphe 1 de l'article 2 du règlement n° 26 ;
2. Considérant que l'accord ne peut être considéré comme faisant partie intégrante d'une organisation nationale de marché, puisqu'une telle organisation de marché n'existe pas aux Pays-Bas ;
3. Considérant que l'accord ne peut être considéré comme étant nécessaire à la réalisation des objectifs énoncés à l'article 39 du traité parce que, comme il résulte des faits exposés ci-dessous, ses objectifs ne coïncident nullement avec ceux dudit article et que, même si ses objectifs coïncidaient avec ceux de l'article 39, l'accord en question, n'étant ni le seul ni le meilleur moyen pour les atteindre, ne pourrait non plus être considéré comme nécessaire à leur réalisation ; que, d'ailleurs, dans le secteur en cause, le Conseil a défini (5) un certain nombre de moyens pour atteindre les objectifs de l'article précité et que l'accord en question se situe en dehors de ces moyens, donc hors du contexte des objectifs de la politique commune menée dans le secteur des fruits et légumes ;
Considérant que deux des objectifs prévus à l'article 39 visent à accroître la productivité de l'agriculture de la Communauté et à assurer ainsi un niveau de vie équitable à la population agricole de la Communauté et qu'ils ne peuvent donc être invoqués comme buts poursuivis par l'accord sur les ventes aux enchères, puisque cet accord ne concerne que les importations de fruits produits à l'extérieur de la Communauté ; qu'il ne reste donc qu'à examiner si l'accord est nécessaire à la réalisation des objectifs suivants de l'article 39 :
- stabiliser les marchés (A),
- garantir la sécurité des approvisionnements (B),
- assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs (C) ;
A. Considérant que l'accord n'est pas nécessaire à la stabilisation du marché prévue à l'article 39 alinéa c) parce que, comme il résulte du contexte donné par les autres objectifs cités à l'article 39 et par les dispositions des articles 38 à 47 en général, cet objectif de stabilisation du marché vise l'adaptation de l'offre à la demande en vue d'assurer l'écoulement de la production communautaire à des prix rémunérateurs et qui ne soient pas soumis à de trop grandes fluctuations ; que cet objectif est donc différent des buts poursuivis par l'accord, puisque l'objet et les effets de cet accord sont, en fait, de concentrer la demande néerlandaise de fruits importés de pays tiers dans la Communauté sur l'offre des seuls importateurs participant aux ventes aux enchères de Rotterdam, ce qui n'a aucun rapport avec l'écoulement de la production communautaire ;
B. Considérant que l'accord n'est pas non plus nécessaire à la réalisation de l'objectif d'assurer la sécurité des approvisionnements prévue à l'article 39 alinéa d) ; que, en effet, cet objectif vise essentiellement à maintenir un certain degré de couverture des besoins de la Communauté par ses ressources propres, de manière à ne pas faire dépendre l'approvisionnement du marché communautaire de la seule importation de produits agricoles en provenance des marchés extérieurs ; que, par ailleurs, même si l'objectif prévu à l'alinéa d) de l'article 39 équivalait à "assurer un approvisionnement régulier du marché", il n'est pas nécessaire, pour obtenir un tel résultat, d'exclure de l'activité d'importation une partie des concurrents éventuels (en l'occurrence les grossistes) et d'obliger une autre partie (les vendeurs établis dans d'autres pays de la CEE) à suivre le circuit obligatoire des ventes aux enchères de Rotterdam ;
C. Considérant que l'accord n'est enfin pas nécessaire pour assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs au sens de l'article 39 alinéa e) ; qu'il faut d'abord remarquer que cette disposition ne constitue pas un objectif qui peut être isolé du contexte agricole et être poursuivi indépendamment des autres objectifs de l'article 39, puisqu'elle a essentiellement pour but d'éviter que, dans l'élaboration de la politique agricole commune, ne soit trop élargi, au détriment du consommateur, le champ d'application des autres objectifs prévus à l'article 39 ; que toutefois, même si un tel objectif pouvait être isolé de son contexte, il faudrait, pour qu'un accord puisse être considéré comme nécessaire à sa réalisation, pouvoir établir que c'est seulement grâce à lui que les consommateurs bénéficient de prix raisonnables ; qu'il n'est, cependant, pas possible d'affirmer que seul l'accord sur les ventes aux enchères permet de faire bénéficier les consommateurs de prix raisonnables parce qu'il peut, dans certains cas, entraîner un enchérissement des prix par rapport à ceux qui pourraient s'établir sur un marché de libre concurrence ; que, dans ce sens, il faut remarquer que l'accord en question exclut - à cause de l'obligation imposée aux grossistes néerlandais participant aux ventes aux enchères de Rotterdam de ne s'approvisionner que dans ces ventes aux enchères - une possibilité d'économies importantes dans les frais de distribution, celle qui pourrait résulter de la suppression d'un stade intermédiaire dans le circuit de distribution ; que, de plus, la concurrence qui serait faite aux importateurs par des grossistes effectuant des importations directes pourrait également contribuer à la réalisation d'un niveau de prix plus intéressant pour les consommateurs ; que, enfin, le fait que les vendeurs étrangers ne puissent pénétrer sur le marché néerlandais en vendant directement aux grossistes soumis aux dispositions de l'accord peut aussi avoir des effets anti- économiques, car le circuit qui en résulte pour de telles livraisons peut comporter des frais importants et rendre plus difficiles des livraisons rapides de produits frais ;
IV
1. Considérant que, en général, un système de ventes aux enchères peut permettre, par la concentration de l'offre et de la demande qui en résulte, une certaine diminution des frais de transport et de commercialisation pour les marchandises concernées ;que, dans le cas d'espèce, toutefois, ces avantages ne se manifestent régulièrement et d'une manière perceptible que pour les agrumes importés par bateau et provenant de pays lointains ;que, pour les autres provenances, et notamment pour les agrumes originaires d'Espagne, ces avantages sont pratiquement éliminés par les inconvénients résultant de la rigidité propre à ce système de distribution ;que, en effet, le fait que les ventes n'aient lieu que certains jours seulement de la semaine et que les marchandises doivent être accessibles à l'avance pour que des échantillons puissent être prélevés occasionne parfois des retards de plusieurs jours dans les livraisons aux détaillants ;que, ensuite, s'agissant de denrées périssables, le degré de fraîcheur des fruits et parfois même leur qualité souffrent de ces retards de livraison ;que, en outre, l'obligation de passer par Rotterdam peut provoquer des frais de transport supplémentaires quand il s'agit, par exemple, d'agrumes destinés à être livrés à des clients situés dans la partie méridionale des Pays-Bas ou dans dès régions frontalières ;que, enfin, dans l'appréciation des effets découlant d'une entente telle que celle en cause, il faut tenir compte de l'existence d'offres plus avantageuses que celles procurées par cette entente ;que l'existence de telles offres semble être réelle, vu le fait que certains grossistes soumis aux dispositions de l'accord préfèrent parfois s'approvisionner ailleurs qu'à Rotterdam, malgré les risques de sanctions qu'ils encourent ;que l'accord vise précisément à empêcher l'accès à ces offres aux membres de l'entente situés du côté de la demande ;que, en définitive, on ne peut pas exclure que des effets positifs découlent des ventes aux enchères de Rotterdam, mais seulement pour les offres d'agrumes et d'autres fruits qui y sont faites à des conditions plus avantageuses que celles faites ailleurs ;
2. Considérant que, pour le cas où les ventes aux enchères de Rotterdam permettent une amélioration de la distribution des agrumes importés aux Pays-Bas, il est possible que cette amélioration puisse profiter également, au moins en partie, aux utilisateurs, c'est-à-dire aux grossistes et, par l'intermédiaire de ceux-ci, aux détaillants et aux consommateurs ;
3. Considérant que, pour obtenir les avantages pouvant découler des ventes aux enchères de Rotterdam, il n'est pas indispensable d'obliger les grossistes et les importateurs autorisés à y participer à ne commercialiser aux Pays-Bas que par le canal de ces ventes les agrumes produits en dehors de la Communauté et destinés à la consommation néerlandaise ;que, en effet, la valeur économique d'un système de ventes aux enchères réside essentiellement dans les économies réalisées par rapport à une action dispersée des divers opérateurs concernés ; que, dans le cas d'espèce, cela se traduit surtout par des prix à l'importation plus avantageux, ce qui constitue déjà une incitation suffisante pour que les grossistes néerlandais continuent à s'approvisionner aux ventes aux enchères de Rotterdam ;
Considérant, en outre, que, en l'absence de l'obligation précitée, pour d'autres raisons encore les grossistes néerlandais ne seraient pas amenés à importer directement des quantités d'agrumes telles que, par la réduction progressive des avantages procurés par les ventes aux enchères de Rotterdam, elles provoquent finalement la disparition de ce système de commercialisation ; que, notamment, il est pratiquement exclu qu'ils se livrent à des importations par bateau d'agrumes en provenance de pays lointains parce que, d'une part, ils ne disposent pas des moyens et des connaissances nécessaires pour procéder à ce genre d'importations et que, d'autre part, les conditions offertes aux ventes aux enchères de Rotterdam sont, en général, plus avantageuses que celles qu'ils pourraient obtenir eux-mêmes ; que, par contre, il serait possible que certains grossistes effectuent, par exemple, des achats en Espagne ou sur les autres marchés d'importation de la CEE, chaque fois qu'ils bénéficieraient de prix plus intéressants que ceux de Rotterdam ou, à égalité de prix, chaque fois qu'ils pourraient obtenir des livraisons plus rapides ou un état de fraîcheur des fruits plus élevé ; que c'est donc uniquement quand les avantages procurés par les ventes aux enchères de Rotterdam seront inférieurs à ceux que pourront obtenir les grossistes sur d'autres marchés que ces derniers seront incités à faire des importations directes ; que, d'ailleurs, c'est seulement à ce genre d'importations directes que certains grossistes tentent de se livrer actuellement sans, toutefois, que cela provoque des perturbations sensibles dans le fonctionnement des ventes aux enchères de Rotterdam ;
Considérant que, en définitive, pour toutes les raisons exposées ci-avant, l'obligation figurant à l'article 9 de l'accord n'est pas indispensable pour obtenir les avantages découlant de l'accord ;
4. Considérant que, la troisième condition d'applicabilité de l'article 85 paragraphe 3 n'étant pas remplie, il n'est pas nécessaire d'examiner si la quatrième l'est ; que, néanmoins, il convient de remarquer que l'accord, en provoquant une importante concentration de la demande néerlandaise d'agrumes auprès des ventes aux enchères de Rotterdam, élimine ou rend plus difficile la concurrence directe sur le marché néerlandais d'une partie substantielle de l'offre de ces produits de la part des vendeurs établis dans les autres pays de la CEE,
A ARRÊTE LA PRESENTE DECISION :
Article premier
Les dispositions prévues à l'article 9 de l'accord conclu entre la Nederlandse Vereniging voor de Fruit- en Groentenimporthandel à la Haye (Pays-Bas) et le Nederlandse Bond van Grossiers in Zuidvruchten en ander geïmporteerd fruit "Frubo" à la Haye (Pays-Bas) et relatif à l'organisation de ventes aux enchères pour les agrumes et d'autres fruits importés aux Pays-Bas, ainsi que le fait d'appliquer ces dispositions, sont en infraction avec l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne.
Article 2
La déclaration d'inapplicabilité demandée par les intéressés au titre du paragraphe 3 de l'article 85 précité est refusée.
Article 3
Les associations d'entreprises citées à l'article 1er, ainsi que les entreprises figurant dans l'annexe à la présente décision, sont tenues de mettre fin sans délai aux infractions constatées.
Article 4
La présente décision est destinée à la Nederlandse Vereniging voor de Fruit- en Groentenimporthandel à la Haye (Pays-Bas) et au Nederlandse Bond van Grossiers in Zuidvruchten en ander geïmporteerd fruit "Frubo", ainsi qu'aux entreprises participant aux ventes aux enchères de Rotterdam et qui sont citées en annexe (6).
ANNEXE
(1) JO n° 13 du 21.2.1962, p. 204-62.
(2) JO n° 30 du 20.4.1962, p. 993-62.
(3) JO n° 127 du 20.8.1963, p. 2268-63.
(4) Le 24 juin 1974, les associations en cause ont communiqué par télex à la Commission que, lors de leurs prochaines assemblées générales, il sera proposé la suppression du mot "déchargés" et qu'entretemps, en anticipant cette décision formelle, la condition du déchargement ne sera plus exigée.
(5) Règlement (CEE) n° 1035-72 du Conseil du 18.5.1972 (JO n° L. 118 du 20.5.1972) ; règlement (CEE) n° 2511-69 (JO n° L. 318 du 18.12.1969).
(6) Entreprises participant aux enchères de Rotterdam
<74-433 TAB 1.doc>