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Décisions

CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 15 novembre 1999, n° 3713-97

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

OSI (SA)

Défendeur :

Olympus Optical Co (Europa) GmbH (Sté), Scop (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Assié

Conseillers :

Mme Laporte, M. Fedou

Avoués :

SCP Fievet-Rochette-Lafon, SCP Bommart-Minault

Avocats :

Mes Ferrand-Tomasi, Lenouar.

T. com. Versailles, 4e ch., du 21 mars 1…

21 mars 1997

FAITS ET PROCEDURE

La société de droit allemand Olympus Optical Co Europa GmbH a concédé la distribution en France des produits de marque Olympus aux SA Scop et OSI.

La société Scop est depuis 1962 le distributeur exclusif de la plupart des produits Olympus en France dont à partir de 1965 les microscopes à usage industriel et opératoires tandis que la société OSI était depuis 1977 le distributeur exclusif des microscopes biologiques et médicaux ainsi que des accessoires qui leur sont associés.

En avril 1991, la société Scop est devenue filiale de la société Olympus.

Après avoir informé, le 6 janvier 1992, la société OSI de l'attribution à la société Scop de la distribution des analyseurs d'images dont elle était précédemment chargée, la société Olympus lui a fait part, le 28 février 1992, de son intention de confier à sa filiale l'intégralité de la gamme de ses produits à partir du 1er octobre 1992 et de mettre un terme à leurs relations commerciales à cette date.

Estimant la résiliation du contrat abusive, la société OSI a assigné les sociétés Scop et Olympus en paiement in solidum de dommages et intérêts devant le Tribunal de Commerce de Créteil.

Par jugement en date du 28 juin 1994, cette juridiction s'est déclarée incompétente envers la société Olympus au profit du Tribunal de Commerce de Versailles devant lequel la société OSI l'a assignée.

Parallèlement, la société Scop a formé contredit contre cette décision qui avait retenu sa compétence à son égard et la Cour d'Appel de Paris par arrêt du 8 février 1995 a estimé le Tribunal de Commerce de Versailles également compétent pour statuer sur le litige l'opposant à la société OSI, renvoyant l'affaire devant lui en application de l'article 97 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Tribunal de Commerce de Versailles, par jugement rendu le 21 mars 1997, a dit que la convention liant la société OSI à la société Olympus était un contrat de concession exclusive à durée indéterminée, débouté la société OSI de ses demandes sur le fondement de l'article L. 122-12 du Code du Travail ainsi que de l'ensemble de ses prétentions indemnitaires de ce chef et au titre des salariés embauchés par la société Scop, alloué aux sociétés Olympus et Scop chacune une indemnité de 10.000 F en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et condamné la société OSI aux dépens.

Appelante de cette décision à l'encontre de la société Scop et des sociétés Olympus Optical Co Europa et Olympus Optical GmbH, la société OSI s'est désistée de son recours envers cette dernière société et le Conseiller de la Mise en État, par ordonnance du 17 juin 1999, a constaté le caractère parfait de ce désistement.

Elle soutient que la rupture du contrat de distribution par la société Olympus est abusive en faisant valoir que cette dernière ne lui a pas consenti un délai de préavis suffisant et l'a laissée procéder, en toute connaissance de cause, à d'importants investissements immobiliers sans la prévenir de ses intentions.

Elle prétend avoir subi consécutivement un préjudice résultant de tous ces investissements propres à l'activité Olympus (11,4 millions de francs), de ceux afférents à son catalogue qu'elle a dû modifier (7,5 millions de francs), de la vente à vil prix d'une partie de son parc automobile (50.000 F), de la perte d'un élément essentiel de son fonds de commerce et du fruit de ses efforts qu'elle évalue à deux années de marge (28.985.000 F) ainsi qu'un préjudice moral et commercial.

Elle impute à la société Scop des agissements fautifs ayant trait à l'engagement et au débauchage de membres de son personnel formés par ses soins dont elle a dû assumer le coût financier et social, et aux conditions néfastes du déroulement du préavis que la société Scop lui a imposées à l'origine d'une perte de marge sur les affaires en cours et d'une perte sur les stocks.

Elle sollicite, en conséquence, la condamnation "solidaire" des intimées au paiement de la somme de 42.514.488 F avec intérêts de droit à compter de l'assignation ainsi que leur capitalisation, la désignation, le cas échéant, d'un expert aux fins de vérifier l'évaluation de son préjudice ainsi qu'une indemnité de 100.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les sociétés Olympus et Scop concluent à la confirmation intégrale du jugement déféré sauf à y ajouter une indemnité de 50.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour chacune d'elles.

Elles réfutent l'argumentation de la société OSI en indiquant qu'elle ne rapporte pas la preuve de ses dires et ne justifie pas, en toute hypothèse, des préjudices allégués.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 juin 1999.

MOTIFS DE L'ARRET

Considérant que la société OSI ne discute plus en cause d'appel la qualification de la convention l'ayant liée à la société Olympus en contrat de concession exclusive à durée indéterminée.

Considérant que sous réserve de respecter un délai de préavis suffisant, un contrat de distribution à durée indéterminée peut être résilié à tout moment par l'une des parties et notamment par le concédant sans donner de motifs, cette résiliation ne devant cependant pas être abusive.

Considérant qu'en l'espèce, il ressort des termes de la lettre du 28 février 1992 émanant de la société Olympus rappelant la teneur d'une discussion antérieure intervenue le 3 décembre 1991 que dès cette date la société OSI a été informée des intentions du concédant de confier la distribution de l'intégralité de ses produits à la société Scop dont il avait pris une participation majoritaire en avril précédent.

Considérant qu'un tel délai de dix mois au total s'avère raisonnable et conforme aux usages commerciauxet qu'il était de nature à permettre au concessionnaire de prendre ses dispositions ainsi que de donner en temps utile une nouvelle orientation à ses activités, eu égard notamment à la part de 11 % de son chiffre d'affaires représentée par celle générée par l'exécution du contrat de concession.

Considérant que la société OSI ne rapporte pas la preuve du caractère prétendument abusif de la décision de la société Olympus de mettre un terme à leurs relations dans la mesure où celle-ci s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation normale de sa distribution par l'intermédiaire de la société Scop devenue sa filiale française et où elle ne justifie pas que lors de la construction de son nouveau siège social, elle ait conçu des surfaces réservées exclusivement à la société Olympus, ni qu'ils aient été spécifiques aux produits de cette dernière et ne démontre pas davantage que ces investissements aient été réalisés à la demande du concédant ou qu'ils soient insusceptibles d'être utilisés pour ses autres activités.

Considérant que la société OSI ne peut donc prétendre obtenir des indemnités en réparation des préjudices qui résulteraient de la prétendue rupture abusive du contrat de concession exclusivealors même qu'en toute hypothèse, le coût des investissements non fondés pour les motifs ci-dessus exposés n'est pas établi, la perte de clientèle alléguée ne saurait faire l'objet d'une indemnisation à son profit en sa qualité de concessionnaire, la profession n'ignore pas les raisons objectives de la décision de la société Olympus de résilier le contrat et qu'il n'est pas démontré que la société OSI ait été dans l'obligation de retirer ses anciens catalogues, ni justifié de la réalité et a fortiori des conditions de la vente invoquée d'une partie du parc automobile du concessionnaire.

Considérant que les griefs formulés à l'encontre de la société Scop ne sont pas non plus fondés.

Considérant en effet, que la société OSI ne produit aucune preuve du débauchage de deux de ses responsables de région et de deux de ses cadres commerciaux, tandis qu'elle a délié Monsieur Clappier, chef de produit, de son engagement de non-concurrence en faisant état dans une lettre transmise le 20 juillet 1992 à la société Scop d'un accord pour que son "transfert" ne pose pas de problèmes.

Que par ailleurs, le tribunal a, à juste titre, débouté la société OSI de sa demande fondée sur le coût des licenciements des salariés qui étaient attachés à la distribution des produits Olympus en raison du refus de la société Scop de les reprendre en vertu de l'article L. 122-12 du Code du Travail relevant que le changement de concessionnaire pour la distribution d'une marque ne suffisait pas, à lui seul, à caractériser le transfert d'une unité économique impliquant la mise en œuvre de ce texte et que la société OSI ne démontrait pas l'existence en son sein d'une unité économique distincte et indépendante disposant de moyens propres affecté à la distribution des produits Olympus.

Considérant enfin que la société OSI outre qu'elle ne démontre pas les pertes de marge et comptable lors de la cession de son stock, ne saurait utilement critiquer les termes d'un protocole d'accord en date du 10 septembre 1992 qui régissait la poursuite des affaires en cours et déterminait les conditions de rachat du stock auquel elle a librement et volontairement souscrit.

Considérant que le jugement déféré doit dès lors être entièrement confirmé.

Considérant que l'équité commande d'accorder à chacune des intimées une indemnité supplémentaire de 12.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Que la société OSI qui succombe en son appel, supportera les dépens.

Par ces motifs : statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions, condamne la SA OSI à verser à chacune des intimées une indemnité complémentaire de 12.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, La condamne aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la SCP Bommart-Minault, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.