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Décisions

CA Versailles, 5e ch. B, 8 juillet 1994, n° 20075-94

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Editions de Liesse (SA)

Défendeur :

Garry

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jeannoutot

Conseillers :

M. Costes, Mme Gautrat

Avocats :

Mes Menard, Poirier.

Cons. prud'h. Rambouillet, sect. encadr.…

5 avril 1993

La société Editions de Liesse (ci-après EDL) a régulièrement interjeté appel dès le 19 mai 1993 du jugement rendu le 5 avril 1993 par la formation de départage du Conseil de Prud'hommes de Rambouillet notifié le 5 juin, qui l'a condamnée à payer à Monsieur Garry les sommes suivantes :

- 93.800 F à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 187.600 F à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

- 262.640 F à titre d'indemnité de clientèle,

- 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

étant précisé que cette décision était exécutoire de plein droit, par application des articles R. 516-18 et R. 516-37 du Code du travail, dans la limite de 281.400 F correspondant à neuf mois de salaires calculés sur la base du salaire moyen des trois derniers mois, qui s'élevait à 31.266,66 F.

Par ordonnance de délégation du Premier Président rendue le 4 février 1994, cette affaire a été fixée prioritairement à l'audience du 6 mai 1994.

La société les Editions de Liesse (EDL) est une entreprise familiale créée en 1968, dont l'objet est l'édition et la recherche de financement des ouvrages de communication institutionnelle des collectivités territoriales.

Pour la réalisation de son objet, elle signe, avec les municipalités, cantons, départements ou régions, des conventions en vue de l'édition de publication dont le financement est assuré en tout ou partie par l'insertion d'encarts publicitaires recherchés par elle auprès des commerçants et fournisseurs désignés par la collectivité territoriale concernée.

Monsieur Philippe Garry a donc été engagé à partir du 1er janvier 1984 par la société EDL aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de représentant, avec pour missions d'effectuer pour son compte une prospection destinée à obtenir la prise d'ordres d'insertions publicitaires concernant tous types d'annonces aux fins d'insertions dans des revues municipales et cantonales que la société EDL édite en vertu de contrats conclus avec un certain nombre de municipalités. Sa dernière rémunération brute mensuelle s'élevait en mars 1992 à 17.443 F.

A compter de son embauche et jusqu'à la fin de l'année 1990, les rapports contractuels se sont déroulés sans incident. Le 14 juin 1991, l'employeur lui a adressé par écrit un rappel au respect des procédures de transmission des bons d'insertion, et le 28 janvier 1992 il lui a, à la suite d'une plainte de la Mairie de Saint-Dizier, adressé un nouveau courrier l'invitant à modifier son attitude.

Enfin, par courrier du 19 février 1992, les Editions de Liesse prenaient acte d'un nouveau retard dans la transmission des bons d'insertion dans le cadre de l'édition d'une publication pour la ville de Vitry-le-François, et s'interrogeaient sur son chiffre d'affaires qui avait baissé en quinze jours de 75.000 F.

Par courrier avec avis de réception du 31 mars 1992, sous la signature de Monsieur Brasselet, Maire-Adjoint, la ville de La Baule ayant fait savoir aux Editions de Liesse qu'elle avait été saisie d'une plainte d'un chef d'entreprise dénonçant les procédés de Monsieur Garry qui, se présentant comme employé de la ville, exerçait une pression intolérable auprès des fournisseurs qui ne souhaitaient pas souscrire de publicité dans la publication municipale, la convention d'édition signée le 4 juillet 1990 était rompue.

L'employeur convoquait alors Monsieur Garry par ailleurs mis à pied à titre conservatoire le 3 avril 1992, à un entretien préalable à un éventuel licenciement tenu le 10 avril 1992, à la suite duquel son licenciement pour faute grave lui était notifié par lettre du 13 avril 1992.

Soutenant que le motif retenu comme constitutif de la faute grave, à savoir, l'incident dénoncé par les autorités municipales de La Baule n'avait pas un caractère réel et sérieux, et que contrairement aux énonciations du contrat de travail daté du 15 octobre 1988 mais en réalité de mai 1990, il devait bénéficier du statut de VRP défini à l'article L. 751-1 du code du travail, il a saisi le Conseil de prud'hommes pour faire condamner son employeur à lui payer :

- un solde de commissions,

- des indemnités de congés payés (sous déduction de l'abattement pour frais professionnels de 30 %) :

* au titre de l'année 1989/1990 : 28.000 F,

* au titre de l'année 1990/1991 : 30.400 F,

* au titre de l'année 1991/1992 : 31.200 F,

- une indemnité compensatrice de préavis : 70.000 F (sous déduction de l'abattement pour frais professionnels de 30 %),

- des dommages et intérêts pour activité réduite contraire ou inopérante au cours du premier semestre 1992 : 45.000 F,

- une indemnité pour rupture abusive : 250.000 F,

- une indemnité de clientèle : 500.000 F,

- une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile : 10.000 F.

La société Editions de Liesse a quant à elle soutenu que l'analyse de l'exercice des fonctions de Monsieur Garry, ducroire pour les ordres d'insertion qu'il prenait, non bénéficiaire d'un secteur déterminé de prospection, ne lui permettait pas de bénéficier du statut de VRP, et qu'ayant été rempli de ses droits à rémunération conformément aux clauses figurant au contrat de travail écrit signé le 15 octobre 1988 Monsieur Garry devait être débouté de ses demandes et condamné à titre reconventionnel, outre aux entiers dépens, à lui verser 56.000 F en réparation du manque à gagner consécutif à son comportement ayant entraîné la rupture du contrat signé avec la ville de La Baule, 2.185 F en remboursement de commission indûment perçues. Elle a enfin réclamé la restitution sous astreinte de 100 F par jour de retard de tout document lui appartenant, dont les listings et carnets de commandes en sa possession, et 5.000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont pour l'essentiel relevé, que s'il résultait des stipulations contractuelles que Monsieur Garry avait été embauché par la société anonyme Editions de Liesse en qualité de VRP non statutaire, étant expressément précisé qu'il ne pourrait se prévaloir ni d'un secteur déterminé, ni d'une clientèle particulière, il apparaissait cependant, en fait, des pièces figurant au dossier et des débats que durant l'exécution de son contrat de travail, Monsieur Garry avait particulièrement démarché les fournisseurs et entreprises des communes de Niort, Vitry le François, Saint-Dizier, Château Thierry et La Baule, et que par ailleurs, titulaire d'une carte d'identité professionnelle de représentant délivrée par la sous-préfecture de Saint-Germain, validée chaque année de novembre 1990 à novembre 1992, qui n'avait pu lui être délivrée que sur attestation de l'employeur, la société anonyme " Les Editions de Liesse " était mal fondée à lui contester sa qualité de VRP statutaire.

Le Conseil a ensuite, s'en tenant aux énonciations figurant dans la lettre de notification du licenciement, estimé que la preuve des motifs y figurant, en tous cas non rapportée à la date du licenciement ne l'avait pas non plus été lors des débats et dans les pièces figurant au dossier de l'employeur, Messieurs Brasselet et Mahé témoins ayant selon l'employeur été mis au courant du comportement fautif de Monsieur Garry, n'ayant, bien que régulièrement convoqués en qualités de témoins, pas comparu.

Les Prud'hommes ont ensuite appliqué les dispositions du statut des VRP, celles de la convention collective notamment l'article 14, et les clauses de rémunération prévues au contrat de travail, pour faire en partie droit aux réclamations du salarié.

Ils ont enfin, faute de preuve, débouté l'employeur de ses demandes reconventionnelles.

Dans le dernier état de ses écritures, reprises et développées à l'audience, la société anonyme Editions de Liesse appelante principale, reprenant son argumentation de première instance, demande à la cour d'infirmer le jugement et statuant à nouveau :

- dire et juger que Monsieur Garry ne peut prétendre à la qualité de VRP statutaire,

- dire et juger que les faits commis par Monsieur Garry sont constitutifs d'une faute grave justifiant la rupture immédiate de son contrat de travail sans indemnité,

En conséquence,

- débouter Monsieur Garry de l'ensemble de ses demandes,

- accueillir la société Les Editions de Liesse en sa demande reconventionnelle et la dire bien fondée,

- condamner Monsieur Garry à lui payer la somme de 56.000 F en réparation du préjudice par elle subi,

- condamner Monsieur Garry au paiement d'une somme de 20.000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens.

Monsieur Garry, intimé à titre principal prie au contraire la Cour de confirmer le jugement dans ses dispositions ayant accueilli ses chefs de demande et par l'effet d'un appel incident, soutenant rapporter la démonstration de son bien-fondé :

- condamner la société EDL à lui régler :

* 107.197 F à titre de rappel de commissions,

* 114.889 F à titre de rappel de congés payés,

avec intérêts de droit à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes,

- élever le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 375.200 F avec intérêts de retard aux taux légal à compter du jugement de première instance sur la somme de 187.600 F et de l'arrêt à intervenir pour le surplus,

- ordonner la capitalisation des intérêts dus pour l'année entière, par application de l'article 1156 du Code civil,

- condamner la société EDL à régler à Monsieur Garry 15.000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Sur quoi, LA COUR,

SUR L'APPLICATION DU STATUT DE VRP À MONSIEUR GARRY :

Considérant que Monsieur Garry soutient avoir, dès son entrée au sein de la société des Editions de Liesse, exercé des fonctions de représentant conformément au statut prévu à l'article L. 751-1 du code du travail, et que contrairement à ce qu'affirme l'employeur, le contrat de travail à durée indéterminée de VRP non statutaire n'avait pas été signé le 15 octobre 1988 mais seulement en mai 1990, ainsi qu'il prétend le démontrer par la production d'un projet de contrat qui aurait été transmis par télécopie fin mai 1990 ; qu'en présence d'une opposition des parties sur l'application du statut de VRP, les premiers juges étaient bien, contrairement à ce qu'invoquent les Editions de Liesse, fondés en application de l'article 1156 du Code civil à rechercher la commune intention des parties au travers de l'analyse des conditions d'exécution du contrat de travail ;

Considérant que dès lors qu'il est vérifié dans les faits que le représentant exerce son activité dans les conditions énoncées par l'article L. 751-1, la qualification contraire donnée contractuellement par les parties à leurs rapports devient inopérante ;

Mais considérant qu'il n'est pas en l'espèce contesté par Monsieur Garry, représentant, qu'il était ducroire des ordres d'insertion qu'il recueillait auprès de la clientèle; qu'il prenait ainsi pour partie la responsabilité des ordres qu'il transmettait à son employeur en les cautionnant, ce qui constitue une activité commerciale personnelle, exclusive du bénéfice du statut de VRP, et ce d'autant que contrairement à ce qu'il prétend, ladite clause avait bien effectivement été mise en œuvre au courant des mois de mars 1990, janvier et juillet 1991 ainsi qu'en attestent les relevés versés aux débats par l'appelante ;

Considérant de surcroît, qu'il ressort également des débats d'audience et des documents produits et notamment du contrat de travail de 1988, que Monsieur Garry, était susceptible d'exercer son activité sur toute l'étendue du territoire national, que la clientèle qu'il prospectait de manière non exclusive, était constituée de l'ensemble des collectivités territoriales; que fournissant ainsi sa prestation sans détermination d'un quelconque secteur, Monsieur Garry ne pouvait de ce second chef non plus et contrairement aux énonciations du jugement être considéré comme remplissant les conditions prévues à l'article L. 751-1 susvisé; qu'en effet à cet égard, tant l'affiliation à la caisse IRP et VRP, que les mentions sur les bulletins de paye et la remise de la carte professionnelle demeurent sans effet en présence d'une exécution effective de fonctions insusceptibles de permettre l'application du statut légal;

Considérant qu'il convient en conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens des parties, d'infirmer sur ce point le jugement entrepris et de retenir que Monsieur Garry a, au service de la société anonyme Editions de Liesse, toujours exercé ses fonctions de représentant dans des conditions ne lui permettant pas de bénéficier du statut de VRP ;

SUR LE LICENCIEMENT :

Considérant que l'énonciation des motifs, dans la lettre de notification du licenciement, fixe les limites du litige, et détermine le champ d'appréciation qu'attribue au juge l'article L. 122- 14-3 du code du travail ;

Considérant que la lettre de notification, en date du 13 avril 1992 est ainsi libellée : " Nous vous confirmons donc votre congédiement pour faute grave à compter de la présentation du présent courrier au motif suivant :

- Monsieur Brasselet, Maire adjoint de la ville de La Baule a été saisi d'une plainte d'un chef d'entreprise dénonçant vos procédés qui consistent à vous présenter comme un employé de la ville de La Baule, et d'autre part, tenter d'exercer une pression intolérable auprès de ce fournisseur qui ne souhaitait pas souscrire de publicité dans le document de la ville de La Baule ;

- Monsieur Brasselet ne pouvant cautionner de telles méthodes nous demande de vous signifier de cesser immédiatement votre prospection et lui remettre la lettre accréditive que vous possédez ;

De votre comportement, il résulte une rupture de coopération entre notre société et la Mairie de La Baule " ;

Considérant que la lettre de plainte de Monsieur Brasselet, en date du 31 mars 1992, qui relate les faits, mentionne " Je regrette d'avoir à interrompre notre coopération sur ce projet, qui déjà en 1991, ne nous avait pas donné entière satisfaction " ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société EDL, la rupture de sa collaboration avec la municipalité de La Baule n'est pas uniquement due au comportement estimé fautif de Monsieur Garry ;

Considérant que la cour doit, comme les premiers juges, relever le caractère imprécis de la dénonciation, tant quant à l'identité de son auteur, que dans la consistance de la pression qualifiée d'intolérable ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que ni lors de l'entretien préalable, ni à la date de son licenciement, Monsieur Garry n'en a eu connaissance ; que cela est, comme l'on pertinemment relevé les premiers juges, confirmé par un courrier postérieur, du 5 mai 1992, adressé par Monsieur Mahé, directeur d'agence de la CISE Ouest à Monsieur Brasselet dans lequel il s'exprime dans les termes suivants :

" Il paraît important de vous confirmer par écrit notre entretien téléphonique concernant l'approche déplorable de la personne chargée de démarcher les annonceurs pour agenda scolaire.

Cette personne se présentant de la mairie de La Baule prétendait que les clients de la commune qui n'acceptaient pas de financer une annonce, pouvaient en subir les conséquences !

J'ai eu l'occasion de dire à cette personne par téléphone que je vous informerai de ce début de chantage " ; qu'il ressort effectivement de ce courrier que le chef d'entreprise évoque dans les motifs du licenciement peut être Monsieur Mahé, directeur d'agence de la CISE Ouest, mais qu'il convient de relever que Monsieur Garry, en possession d'une lettre accréditive de la mairie de La Baule, n'avait en aucun cas besoin de se faire passer pour un de ses employés, qu'en tous cas, une lettre de dénonciation imprécise, contenant des allégations non justifiées et au surplus postérieures à un licenciement, prononcé, suivant ses termes suite à une communication téléphonique entre le rédacteur et l'employeur de Monsieur Garry ne peut en aucun cas constituer la preuve de la faute qui l'a motivé ;

Qu'il convient de relever que cette preuve, en tous cas non rapportée à la date du licenciement, ne l'a pas non plus été lors des débats et dans les pièces figurant au dossier de l'employeur ;

Que Messieurs Brasselet et Mahé, convoqués en qualité de témoin n'ont pas comparu devant les Prud'hommes ;

Qu'en conséquence il y a lieu de considérer que la preuve de la faute ayant justifié le licenciement de Monsieur Garry n'est pas rapportée par la société anonyme Editions de Liesse, les courriers et pièces adressés sur ce point à la Cour après la clôture des débats ne pouvant être pris en compte ;

Considérant qu'il échet en conséquence de confirmer, sur l'absence de motif réel et sérieux du licenciement de Monsieur Garry, le jugement de départage entrepris ;

SUR LES CONSÉQUENCES DU LICENCIEMENT :

Considérant que c'est par une exacte appréciation des dispositions contractuelles relatives à la fixation des éléments de la rémunération de Monsieur Garry, que le jugement lui a alloué une indemnité compensatrice de préavis représentant trois mois de salaire, après déduction des frais professionnels soit la somme de 93.800 F ;

Considérant que Monsieur Garry, licencié sans motif réel et sérieux, après plus de trois années de présence au sein de la société EDL, a subi un très important préjudice qui est allé en s'aggravant depuis le jugement du 13 avril 1993, puisqu'il justifie se trouver, une année plus tard, toujours au chômage ; qu'est ainsi justifié sur ce point en son principe son appel incident, la Cour jugeant équitable d'élever à la somme de 250.000 F le montant des dommages-intérêts destinés à réparer son préjudice ;

Considérant toutefois que VRP non statutaire, Monsieur Garry ne peut bénéficier de l'indemnité de clientèle instituée au profit des VRP par l'article 14 de la Convention collective ; que la décision prud'homale doit être sur ce point infirmée ;

Considérant que le jugement déféré a justement relevé que " le contrat de travail de Monsieur Garry stipule que les congés payés sont inclus dans les commissions " et que dans ces circonstances, " Monsieur Garry doit être débouté " ; qu'ainsi, Monsieur Garry n'a droit effectivement à aucune indemnité de congés payés ;

Considérant que le jugement a également débouté Monsieur Garry de sa demande de dommages et intérêts pour activité réduite imposée au motif qu'il ne rapportait pas la preuve que la réduction de son activité au cours du premier trimestre 1992 provenait particulièrement de l'employeur, et non de contraintes extérieures ;

Considérant que devant la cour, Monsieur Garry prétend sans jamais en justifier, que la société Les Editions de Liesse a volontairement réduit son activité pour minorer le montant de ses commissions auxquelles il aurait droit ; que le déboutement de ce chef prononcé en première instance doit être confirmé ;

Considérant que le contrat de travail stipule que les congés payés sont inclus dans les commissions ; que cependant il convient de relever que contrairement aux dispositions légales, ils n'apparaissent pas à part dans les bulletins de salaire ; que pourtant, Monsieur Garry informé de ses droits n'en a jamais réclamé le paiement, se soumettant ainsi aux dispositions de son contrat de travail ; que Monsieur Garry en sera comme en première instance débouté ;

Considérant enfin qu'il ne rapporte pas la preuve que la réduction de son activité au cours du premier trimestre 1992 provient particulièrement de l'employeur et non des contraintes extérieures ; que le déboutement de ce chef doit être maintenu ;

Mais considérant que Monsieur Garry verse en cause d'appel un certain nombre de pièces, et notamment les copies des bons d'insertions d'où il résulte que lui serait dû au titre du solde de commissions une somme de 107.197 F se décomposant comme suit :

- Ville de Talant : Monsieur Garry serait créancier, à tout le moins, d'une somme de 6.872 F correspondant aux bons d'insertions versés aux débats ainsi que d'une somme de 3.375 F, soit un total de 10.247 F,

- Ville de Vitry-le-François : bons d'insertion : 8.610 F, insertions dans la lettre du Député Marne Actualités de Vitry-le-François : 68.750 F, soit un total de 73.350 F,

- Ville de Niort : bons d'insertion concernant le magazine " Vivre à Niort " : 19.500 F,

soit un total général de 107.197 F, sous réserve d'autres ordres dont il ne détiendrait pas les insertions à savoir les insertions faites :

- au Bulletin Municipal d'informations de la ville de Talant des années 1992 et 1993,

- dans la lettre du député Marne Actualités de Vitry-le-François pour la même période, étant précisé que ce document lui a été communiqué lors de l'établissement du projet de contrat d'agent commercial et correspond en fait aux commandes directes intervenues sur ce secteur,

- au magazine " Vivre à Niort " ;

Considérant que la société des Editions de Liesse conteste catégoriquement rester devoir des rappels sur commissions ; que les parties contraires en fait, ne fournissant pas à la Cour les éléments d'information suffisants pour apprécier ce chef de la demande de Monsieur Garry, il est nécessaire d'organiser une mesure d'expertise dans les conditions précisées au dispositif du présent arrêt ;

Considérant que les Editions de Liesse pas plus qu'en première instance, ne fournissent à la Cour d'élément de preuve susceptible de démontrer la réalité du préjudice qu'elles allèguent avoir subi du fait des agissements de Monsieur Garry ; que la cause réelle de son licenciement n'étant pas justifiée, elles seront également déboutées de leur demande reconventionnelle ;

Considérant enfin que c'est par appréciation exempte de reproche que les Prud'hommes ont fixé à 10.000 F l'indemnité allouée à Monsieur Garry sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ; que la Cour estime que l'équité commande de lui accorder de ce chef une indemnité complémentaire d'un montant de 10.000 F, les Editions de Liesse, succombant principalement dans leurs prétentions supportant les dépens ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit les appels, principal de la société anonyme des Editions de Liesse et incident de Monsieur Garry, interjetés contre le jugement de la section Encadrement du Conseil de Prud'hommes de Rambouillet du 5 avril 1993, Statuant à nouveau, Infirmant le jugement, dit que Monsieur Garry ne peut bénéficier du statut de VRP défini à l'article L. 751-1 du code du travail, Confirme l'absence de motif réel et sérieux de son licenciement prononcé le 13 avril 1992, Infirme le jugement en ce qu'il accorde l'indemnité de clientèle prévue par l'article 14 de la Convention collective des VRP, Elève à 250.000 F (deux cent cinquante mille francs) le montant des dommages-intérêts que devront payer les Editions de Liesse à Monsieur Garry en réparation du préjudice résultant de son licenciement abusif, Déboute, sauf en ce qui concerne le rappel sur commissions, les parties de leurs demandes, Surseoit à statuer sur ledit rappel de commissions, organise une mesure d'expertise, désigne Madame Annick Leroy née Pellion, demeurant 15, square Jean Lurcat 78190 Trappes, téléphone : 30.62.83.49 pour y procéder avec mission, les parties entendues : de procéder à l'examen de leurs dossiers et de toutes autres pièces jugées utiles à l'information de la Cour, à l'effet de déterminer si un rappel de commissions reste dû à Monsieur Garry. Dans l'affirmative, fournir à la Cour les éléments permettant d'en déterminer l'assiette et d'en calculer le montant, plus généralement procéder à toutes auditions et analyses de documents nécessaires à l'accomplissement de la présente mission, Désigne Monsieur Michel Jeannoutot, magistrat de la Chambre, pour suivre les opérations d'expertise, Dit que l'expert déposera le rapport de ses opérations au Greffe de la Cour, après avoir remis un exemplaire aux parties pour le 15 novembre 1994, Fixe à 8.000 F (huit mille francs), le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que Monsieur Garry devra dans le mois de la notification du présent arrêt consigner au secrétariat greffe de la Cour, Renvoie la cause et les parties à l'audience du lundi 23 janvier 1995, à 9 heures, salle 4 porte F, pour qu'il soit statué au fond après dépôt du rapport de l'expert, Fait injonction aux parties de se mettre en état pour cette date, Dit que la notification du présent arrêt vaudra pour les parties convocation pour l'audience de renvoi, Confirme pour le surplus les autres dispositions du jugement et y ajoutant : Condamne la société anonyme Editions de Liesse à payer à Monsieur Garry une allocation complémentaire de 10.000 F (dix mille francs) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, La condamne aux dépens.