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Décisions

CA Lyon, 3e ch., 17 mars 2000, n° 1998-02081

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Spie Tondella

Défendeur :

AD Investissement

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Karsenty

Conseillers :

Mme Robert, Martini

Avoués :

SCP Junillon-Wicky, SCP Dutrievoz

Avocats :

Me Le Breton, Forestier.

T. com. Lyon, du 3 mars 1998

3 mars 1998

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 12 mai 1995 a été signé entre la société Spie Tondella et la SARL AD Investissements un contrat de collaboration commerciale aux termes duquel la première confiait à la seconde le soin de représenter ses intérêts et de l'assister à l'occasion d'un appel d'offres lancé par la société Marignan Immobilier.

Il était convenu à l'article 4 du contrat que la rémunération de l'agent était fixée à 150 000 F HT.

Se prévalant de ce qu'outre cette somme de 150 000 F, avait été convenue une rémunération de 10% du montant des travaux supplémentaires éventuels relatifs au marché Marignan Immobilier et que, de plus, avait été conclu un contrat verbal pour l'obtention d'un marché lancé par la société Immobilière Rhone Alpes avec une rémunération de 2% du montant dudit marché, la société AD Investissements a établi entre le 12 août 1995 et le 28 juin 1996 cinq factures pour un montant total de 242 413,23 F TTC concernant le chantier Marignan Immobilier et une facture de 361 800 F TTC pour le chantier Immobilière Rhone Alpes.

La société Spie Tondella n'ayant accepté de régler que les deux factures représentatives de la somme de 150 000 F HT prévue au contrat du 12 mai 1995, la société AD Investissements l'a assignée, par acte du 3 avril 1997, en paiement de la somme de 423 313,23 F outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Par jugement du 3 mars 1998, le tribunal de commerce de Lyon a fait droit à cette demande en allouant à la demanderesse une indemnité de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La société Spie Tondella a relevé appel du jugement dont elle entend obtenir la réformation en faisant valoir que le contrat d'agent commercial étant de nature civile la preuve en cette matière obéit aux règles de l'article 1341 du code civil, qu'un écrit ou avenant au contrat était donc nécessaire, que la preuve ne peut être apportée par de simples attestations qui, de surcroît, ne sont pas probantes car émanant de personne qui sont en communauté d'intérêt avec la société AD Investissements ou qui sont ou ont été en conflit avec elle-même, que la lettre du 5 juillet 1996 a été fabriquée de toutes pièces par la société AD Investissements pour les besoins de la cause, qu'elle établit que les marchés passés par Immobilière Rhone-Alpes ne sont pas des marchés privés, qu'elle n'a jamais mandaté la société AD Investissements pour l'obtention du marché public lancé par la société Immobilière Rhone-Alpes. Elle demande donc à la Cour de débouter la société AD Investissements de toutes ses demandes et de la condamner à 50 000 F de dommages-intérêts pour procédure abusive et 20 000 F en application de l'article 700 du NCPC.

Pour demander la confirmation du jugement sauf à y ajouter la capitalisation des intérêts et la condamnation de l'appelante à 50 000 F de dommages intérêts pour propos diffamatoires et fautifs et 20 000 F au titre de l'article 700 du NCPC, la société AD Investissements soutient qu'elle peut faire la preuve de ses prétentions par tous moyens, que la loi du 25 juin 1991 n'exige aucun contrat écrit d'agent commercial, qu'en toute hypothèse elle entend simplement prouver l'existence d'une convention verbale conclue entre les parties postérieure à la convention écrite du 12 mai 1995, que son droit à rémunération complémentaire de 10% sur les travaux supplémentaires pour le marché Marignan Immobilier et à commission de 2% sur le montant HT du marché de travaux pour le chantier Immobilière Rhone-Alpes est établi par les témoignages précis et concordants de MM. Burckhart, Arpin, Truchot, Mehrenberger.

MOTIFS ET DECISION

Sur la demande relative au marché Marignan Immobilier

Attendu que la société AD Investissements se prévaut d'une convention verbale intervenue postérieurement à la convention écrite du 12 mai 1995 et portant sur une rémunération complémentaire de 10% calculée sur le montant des travaux supplémentaires;

Attendu que la société Spie Tondella n'est pas fondée à soutenir qu'en vertu du parallélisme des formes consacré par l'article 2 de la loi du 25 juin 1991 il appartenait aux parties de signer un avenant;

Que la loi du 25 juin 1991 et notamment son article 2 n'exige, en effet, aucun écrit;

Attendu que la société Spie Tondella n'est pas davantage fondée à se prévaloir de ce qu'en application de l'article 1341 du code civil il est interdit de prouver par témoignages ou présomptions contre et outre le contenu d'un écrit, dès lors que la société AD Investissements n'entend pas prouver contre et outre le contenu du contrat du 12 mai 1995 mais prouver l'existence d'une convention verbale distincte postérieure;

Attendu qu'en l'absence d'écrit obligatoire, la société AD Investissements peut faire la preuve de ses prétentions par tous moyens conformément aux dispositions de l'article 109 du code de commerce;

Attendu que la société AD Investissements s'appuie sur quatre attestations établies par M. Burckhart ex-salarié de la société Spie Tondella qui a attesté que M. Haumont directeur régional de la société Spie Tondella lui avait confirmé que les frais d'assistance commerciale de M. Denis s'élevaient à 150 000 F plus 10% sur les travaux modificatifs,

par M. Arpin maître d'œuvre en bâtiment qui a participé à des projets de montage avec M. Dents et qui a indiqué que lors d'une réunion de travail le 12 juin 1995 M. Mathias de Marignan Immobilier avait confirmé à M. Dents que M. Haumont s'était engagé à rémunérer celui-ci par une rémunération complémentaire de 10% sur les travaux supplémentaires,

par M. Truchot, directeur de la société Otra maître d'œuvre des travaux litigieux, qui a attesté que lors d'une réunion tenue le 16 mars 1995 en présence de M. Haumont et de M. Dents il avait été clairement mis en place entre Spie Tondella et AD Investissements une mission de collaboration commerciale pour laquelle cette dernière serait rémunérée par un montant forfaitaire de 150 000 F complété d'une commission de 10% sur travaux supplémentaires,

par M. Mehrenberger à l'époque directeur du développement chez Marignan Immobilier qui a indiqué avoir été informé de la mission confiée par Spie Tondella à AD Investissements rémunérée sur la base de 150 000 F HT forfaitaire complétée par une commission de 10% de travaux supplémentaires;

Attendu que ces attestations sont précises et circonstanciées et que rien ne justifie qu'elles soient écartées des débats;

Que le fait que M. Burckhart a été licencié le 1er septembre 1995 après le renouvellement d'une période d'essai de trois mois ne prouve pas que son attestation (qui concorde avec trois autres) aurait été guidée par un esprit de vengeance à l'égard de la société Spie Tondella;

Que si M. Arpin rapporte une conversation au cours de laquelle M. Haumont n'était pas présent, son attestation est néammoins corroborée par le contenu des autres; qued'autre part le fait que M. Arpin a cotoyé M. Dents à l'occasion de projets de montage d'opérations ne saurait caractériser une communauté d'intérêt susceptible de vicier son témoignage;

Qu'il n'est nullement établi que M. Truchot ait une communauté d'intérêt avec le gérant de la société AD Investissements pour nuire à la société SPIE Tondella;

Attendu qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de se pencher sur la force probante de la lettre du 5 juillet 1996, la société AD Investissements rapporte la preuve de ce que la société Spie Tondella avait donné son accord pour la rémunérer par une commission complémentaire de 10% sur les travaux supplémentaires, les developpements de l'appelante relatifs à son ratio bénéfice/chiffre d'affaires étant sans incidence sur l'existence de cet accord;

Sur la demande relative au marché Immobilière Rhone-Alpes

Attendu que rien n'imposait aux parties de signer un contrat écrit pour ce marché au motif qu'un tel contrat avait été signé pour le marché Marignan Immobilier;

Attendu que la preuve d'un accord prévoyant le paiement par la société Spie Tondella d'une commission de 2% calculée sur le montant HT du marché de travaux est apportée par le contenu des quatre attestations Burckhart, Arpin, Truchot et Mehrenberger dont la force probante ne saurait être contestée;

Attendu que la société Spie Tondella ne démontre pas davantage qu'en première instance le caractère de marché public du marché Immobilière Rhone Alpes excluant selon elle que la société AD Investissements ait pu jouer un rôle d'intermédiaire;

Attendu que le jugement sera, en conséquence, confirmé en toutes ses dispositions;

Attendu qu'il est équitable d'allouer à la société AD Investissements une somme de 15 000 F pour la dédommager des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de l'appel;

Attendu que la société AD Investissements n'établissant pas le préjudice résultant pour elle des commentaires faits pour sa défense dans ses conclusions par la société Spie Tondella doit être déboutée de sa demande de dommages intérêts;

Attendu que la capitalisation des intérêts sera ordonnée;

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris, Y ajoutant, Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil à compter du 5 novembre 1998 date de la demande, Condamne la société Spie Tondella à payer à la société AD Investissements une indemnité complémentaire de procédure de 15 000 F, Rejette les autres demandes des parties, Condamne la société Spie Tondella aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Dutrievoz avoués.