CA Amiens, 5e ch. soc., 14 décembre 1995, n° 44-95
AMIENS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Piquant Burotic (SA)
Défendeur :
Samson
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Roussel
Conseillers :
MM. Descoubes, Perignon
Avocats :
Mes Lacombe, Sechet-Soule.
Par jugement en date du 20 septembre 1994 le Conseil de Prud'hommes de Beauvais a dit que M. Samson exerçait son activité en qualité de VRP, a requalifié le contrat de travail de M. Samson en statut VRP, a condamné la société Piquant Burotic à payer à M. Samson la somme de 9.414 F titre de commissions sur vente et la somme de 941 F 44 à titre de congés payés y afférents, la somme de 113.953 F à titre d'indemnité conventionnelle de la clause de non-concurrence et celle de 100 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La SA Piquant Burotic a régulièrement interjeté appel de cette décision, notifiée le 26 novembre 1994, le 9 décembre 1994.
LES FAITS :
M. Samson a été embauché le 10 septembre 1986 par la société Piquant Burotic en qualité d'attaché commercial.
Il a démissionné par lettre du 21 décembre 1992 avec dispense d'exécuter sou préavis à compter du 31 décembre 1992.
LES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société Piquant Burotic expose que M. Samson a été engagé en qualité d'attaché commercial, que son contrat de travail prévoyait une clause de non-concurrence sans contrepartie financière puisque la Convention Collective Nationale de la Bureautique n'en prévoit pas, que dans la profession tous les contrats sont des contrats d'attachés commerciaux, que M. Samson est entré chez un concurrent en tant que vendeur copieur, qu'il n'apporte pas la preuve d'une affectation dans le Nord, qu'il a travaillé dans l'Oise, que les contraintes financières de la clause de non-concurrence doivent être appliquées, que les éléments essentiels du statut de VRP ne sont pas remplis, que M. Samson n'avait pas un secteur fixe et a changé 4 fois de secteur en 6 ans ; que de même la condition d'exclusivité de service n'est pas remplie, que le complément de prime n'est pas justifié et que M. Samson doit être débouté de toutes ses demandes.
Elle sollicite 22.780 F au titre de l'indemnité prévue à l'article 4-6-3 du contrat de travail et 6.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
M. Samson fait valoir qu'il travaillait de façon exclusive pour la société Piquant Burotic, qu'il ne faisait aucune opération commerciale pour son propre compte, que son contrat prévoyait le secteur géographique, (Oise), le matériel vendu (photocopieurs), avec obligation de visiter la clientèle, de rechercher les commandes et de transmettre les ordres, qu'il exerçait une activité de VRP dans l'Oise, que la clause de non-concurrence prévue au contrat implique le versement d'une indemnité spéciale à défaut d'avoir été relevé de la clause dans les 15 jours de la rupture, qu'il sollicite de ce chef la somme de 113.953 F ; qu'il a conclu une vente avec l'UTC de Compiègne en juin 1992 sur laquelle il lui reste dû un solde de commissions de 9.414 F 40, outre la somme de 941 F 44 à titre de congés payés, qu'il n'a commis aucune violation de la clause de non-concurrence et que le jugement déféré doit être confirmé.
Il sollicite 6.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
SUR CE :
Attendu qu'il ressort des éléments de la cause que les premiers Juges ont fait une juste application de l'article L. 751-1 du Code du Travail en décidant que M. Samson exerçait une activité de VRP ; qu'il y a lieu d'adopter leurs motifs pertinents et de confirmer de ce chef le jugement déféré ;
Qu'il apparaît en effet que le contrat de travail en date du 1er septembre 1986 prévoyait en son article 4-6-1 une clause de non-concurrence limitée au département de l'Oise, que l'annexe 1 du contrat de travail définissait les produits commerciaux comme étant les photocopieurs et les télécopieurs, le secteur de prospection de M. Samson comme étant celui de "Creil" pour la période du 1er septembre 86 au 31 août 1987 ;
Que par la suite l'annexe 1 a été modifiée pour la période du 1er septembre 1989 au 10 décembre 1989 en ce qui concerne les produits commercialisés qui n'étaient plus que les "Photocopieurs", que le secteur restait celui de "Creil" ;
Que le 1er septembre 1991, un document intitulé "Pay Plan", signé de M. Samson a fixé pour l'exercice fiscal 91/92 le secteur de M. Samson à Compiègne.
Que le 17 février 1992, il était précisé à M. Samson que les villes de Crépy-en-Valois, Saintives, Bethisy Saint-Pierre, Bonneuil-en-Valois et Morienval ne faisaient plus partie de son secteur ;
Que le 1er septembre 1992 le secteur d'activité de M. Samson était à nouveau celui de Creil ;
Que si quelques opérations ont été faites par M. Samson à Beauvais, il n'est pas établi qu'il ait travaillé de façon régulière sur le secteur de Beauvais ;
Attendu que s'il est constant que selon l'article 1-2-1 du contrat de travail de M. Samson son secteur pouvait être modifié par l'employeur, les modifications apportées ont été en l'espèce très limitées puisque M. Samson a toujours travaillé dans le département de l'Oise et pendant plus de 5 ans sur le secteur de Creil; que le fait que pendant un an son secteur a été celui de Compiègne ne constitue pas une modification suffisamment importante pour exclure l'application du statut de VRP à M. Samson;
Attendu par ailleurs que le fait que M. Samson ait barré la clause de contrat de travail précisant qu'il devait consacrer toute son activité professionnelle au service de son employeur s'explique par l'obligation de résidence incluse dans cette clause ; que cette exclusion acceptée par l'employeur n'est pas de nature à écarter en l'espèce l'application de statut de VRP ; qu'il n'est d'ailleurs ni allégué ni justifié que M. Samson ait travaillé pour un autre employeur pendant la durée de son contrat de travail ;
Attendu que le fait que M. Samson ait eu un contrat "d'attaché commercial" est sans incidence sur la qualification qu'il convient de donner au contrat compte tenu des éléments de faits de la cause ;
Attendu que le contrat de travail prévoyant une clause de non-concurrence, pendant 2 ans, dans le département de l'Oise, la qualification de VRP de M. Samson implique en application du statut conventionnel de VRP, le versement d'une indemnité spéciale pendant la durée d'interdiction de concurrence sauf pour l'employeur à relever le salarié de cette clause dans les 15 jours suivant la rupture et sauf violation de cette clause par le salarié;
Attendu qu'il est constant que la société Piquant Burotic n'a pas dénoncé ladite clause dans les formes légales;
Attendu que les éléments de la cause n'établissent pas la violation par M. Samson de cette clause ;
Qu'il ressort, en effet, d'un certificat de travail de la société Setra que M. Samson a été employé par elle du 4 janvier 1993 au 4 mai 1993 en qualité d'attaché commercial ; qu'une lettre de cette société en date du 11 février 1993, adressée à la société Piquant Burotic précise que M. Samson était chargé de la commercialisation des produits d'arts graphiques exclusivement et non des photocopieurs ou télécopieurs ;
Que l'attestation de M. Boniface précisant avoir recruté M. Samson en tant que vendeur copieur n'apporte aucune précision sur les fonctions effectivement exercées par M. Samson au sein de la société Setra ;
Que de même les attestations de MM. Sene et Launoy n'indiquent pas que M. Samson ait commercialisé auprès d'eux d'autres produits que des articles d'arts graphiques ;
Attendu qu'il apparaît, dans ces conditions, que la violation par M. Samson de la clause litigieuse n'est pas établie ;
Attendu qu'il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a fixé compte tenu des éléments de la cause notamment du salaire de M. Samson, à 113.953 F l'indemnité due en application de l'article 17 de la Convention Collective Nationale des VRP ;
Attendu que les premiers Juges ont également fait une juste appréciation des faits de la cause en allouant à M. Samson la somme de 9.414 F 40 à titre de rappel de commissions et celle de 941 F 44 à titre de congés payés y afférents ;
Qu'il ressort en effet d'un bon de commande du 24 juin 1992 que M. Samson a conclu cette vente et que les éléments de la cause n'établissent pas qu'il s'agisse d'une "affaire de direction" ; que M. Benizri, chef des ventes, atteste au contraire que cette commande devait compter pour le paiement d'une commission ordinaire au profit de M. Samson ;
Que la société Piquant Burotic conteste la valeur probante de ces pièces sans apporter d'éléments précis ;
Attendu que les premiers Juges ont également fait une juste application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour la procédure d'appel ;
Que la société Piquant Burotic doit être déboutée de sa demande reconventionnelle et condamnée aux dépens ;
Par ces motifs, LA COUR : Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare l'appel recevable en la forme, Au fond, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Déboute les parités du surplus de leurs prétentions, Condamne la société Piquant Burotic aux dépens d'appel.