Cass. com., 13 décembre 1994, n° 92-19.055
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Pontois
Défendeur :
ECCF (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Conseiller Rapporteur :
M. Gomez
Avocat général :
M. Raynaud
Conseiller :
M. Nicot
Avocat :
SCP Monod.
LA COUR : - Donne acte à M. Pontois de son désistement envers M. Horel ès qualités et M. Carrive ; - Sur le moyen unique pris en ses deux branches : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 29 mai 1992), que la société Entre Computer Centers International Inc. (société ECCI) a développé aux Etats-Unis un réseau de franchisés dans le domaine de la micro-informatique adapté aux petites et moyennes industries et s'est intéressée au marché européen à partir de 1984 ; que le 31 mai 1985, M. Jean-Marie Egea a signé un contrat de franchise pour la création et l'exploitation d'un centre de location et de vente de ce type de matériel à Toulouse ; que ce centre a été ouvert en mai 1986 par la société Infotech, créée à cette fin par MM Pontois et Egea, respectivement président et directeur général, que la société ECCI a renvoyé le contrat signé le 6 août 1986 ; que M. de Loth, en qualité de liquidateur de la société Infotech, en redressement judiciaire depuis le 23 juin 1987 et en liquidation judiciaire depuis le 20 novembre 1987 et M. Pontois ont assigné la société ECCI en nullité de leur contrat pour dol et défaut de cause ;
Attendu que M. Pontois fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que constitue une manœuvre dolosive la publicité faite par un franchiseur promettant la communication d'un savoir-faire, lorsqu'il n'a aucune connaissance originale ou utile dans le secteur prospecté par les futurs franchisés ; qu'en se fondant, pour écarter le dol, sur le fait que les documents censés transmettre la méthode et les secrets de la réussite commerciale de la société ECCI ne contenaient pas d'indications mensongères, tout en constatant qu'il ne s'agissait que de compilations d'ouvrages courants totalement inadaptées au marché français, ce dont il résultait que les publicités tapageuses par lesquelles la société ECCI avait proposé de transmettre un savoir-faire qu'elle ne détenait pas, constituaient des manœuvres dolosives, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1116 du Code civil ; alors, d'autre part, que la cause du contrat fait défaut quand les avantages spécifiquement attachés à la nature du contrat, et ayant déterminé l'engagement de l'une des parties, sont inexistants ; que, comme il le faisait valoir dans ses conclusions d'appel, le contenu substantiel d'un contrat de franchise comporte non seulement l'usage d'un signe distinctif mais aussi la transmission d'une expérience et d'un savoir-faire, ainsi que la fourniture de produits ou de services et qu'en l'espèce ces deux derniers éléments ayant fait défaut, le contrat de franchise était vide de sa substance ; qu'en se fondant, pour retenir que le contrat de franchise avait une cause, sur des circonstances inopérantes, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les éléments déterminants du contrat de franchise ayant fait défaut, le contrat n'était pas sans cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que M. Pontois n'invoque que "des publicités tapageuses et des perspectives fallacieuses" sans faire état d'aucun acte du franchiseur antérieurement à la date de signature du contrat ; qu'à partir de ces constatations, la cour d'appel a décidé, par l'appréciation souveraine des preuves, que l'existence de manœuvres dolosives n'était pas rapportée ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève, d'un côté, qu'il n'est pas contesté que la société ECCI a mis au point un savoir-faire qui a fait, à l'étranger la preuve de son efficacité et que l'échec de son application en France résultait non pas de l'inanité intrinsèque de ce savoir-faire mais de l'état du marché défavorable à la commercialisation de l'informatique entre 1985 et 1986 et, d'un autre côté, que la documentation fournie à la société Infotech devait lui permettre sans avoir à procéder à des recherches et sans disposer d'une expérience personnelle, d'acquérir immédiatement les connaissances utiles dans la gestion commerciale, technique et financière dans le secteur de la micro-informatique ; qu'à partir de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, en retenant que la société ECCI avait transmis un savoir-faire utile à la société Infotech, a décidé que le contrat de franchise n'était pas nul pour défaut de cause et a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.