Cass. com., 10 mai 1994, n° 92-14.464
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Eve parfums (SA)
Défendeur :
Chanel (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Gomez
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
Mes Vuitton, Capron.
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses trois branches : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Rennes, 26 février 1992), que la société Chanel a conclu avec la société Eve parfums exploitant une parfumerie, un contrat de distributeur agréé dont l'une des clauses porte interdiction de revendre à tout négociant ou collectivité ; que la société Chanel a fait constater que des produits portant la marque et provenant de distributeurs agréés au nombre desquels figurait la parfumerie Eve parfums, étaient revendus par un tiers non agréé ; que la société Chanel après avoir dénoncé le contrat avec ces distributeurs a assigné la société Eve parfums pour obtenir la restitution du stock, du matériel de vente et de démonstration ; que la société Eve parfums a reconventionnellement demandé la condamnation de la société Chanel pour rupture abusive de contrat ;
Attendu que la société Eve parfums fait grief à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable de la rupture abusive du contrat et d'avoir rejeté sa demande de dommages et intérêts fondée sur la rupture abusive du contrat par la société Chanel, alors, selon le pourvoi, d'une part que la responsabilité contractuelle d'un distributeur agréé ne peut être engagée en l'absence d'une faute prouvée ; que, dès lors, en retenant, en l'espèce, la responsabilité contractuelle de la société Eve parfums sur la base de simples présomptions de manquement à ses obligations contractuelles, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; alors, d'autre part, que pour le mêmes motifs, la Cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, qu'en l'absence de faute prouvée du dépositaire agréé, la rupture brutale du contrat de distribution par le distributeur est abusive ; qu'en l'espèce, en l'absence de faute prouvée de la part de la société Eve parfums, en refusant d'accueillir sa demande de dommages-intérêts eu égard à la rupture abusive du contrat de distribution par la société Chanel, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt, après avoir rappelé qu'il incombait à la société Chanel de démontrer la faute imputée à son revendeur agréé, a relevé que sept articles portant le numéro d'identification de la société Eve parfums avaient été retrouvés chez un revendeur non agréé, que ces articles avaient été commandés par la société Eve parfums qui ne soutenait pas ne pas les avoir reçus, et que les documents saisis chez le revendeur non agréé faisaient apparaître que ces articles avaient été acquis à un prix supérieur au prix de gros, mais inférieur au prix de vente au public ; que de ces constatations et appréciations souveraines des éléments de preuve, la Cour d'appel a retenu que les produits litigieux avaient été acquis par le revendeur non agréé auprès de la société Eve parfums, et pu déduire que celle-ci avait commis une faute dans l'exécution du contrat la liant à la société Chanel; d'où il suit que le moyen, pris en ses trois branches, n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.