Cass. soc., 26 janvier 2000, n° 97-43.884
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Wurth France (SA)
Défendeur :
Defossez
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Roux-Cocheril
Rapporteur :
M. Texier
Avocat général :
M. Duplat
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin.
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu que M. Defossez a été embauché le 1er août 1985 par la société Wurth France en qualité de VRP exclusif, sa rémunération comportant une partie fixe et une commission sur le chiffre d'affaires ; que son contrat de travail a fait l'objet de plusieurs avenants successifs ; que, le 8 août 1988, il a été promu chef de secteur ; que, le 26 avril 1991, il a été convoqué par l'employeur qui se plaignait des mauvais résultats de son équipe, et a accepté de redevenir VRP ; qu'à la suite de l'imposition par l'employeur de nouveaux quotas qu'il a refusés, il a saisi la juridiction prud'homale, estimant que son contrat de travail avait été modifié et qu'il avait été licencié, alors que l'employeur soutenait qu'il avait démissionné ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Reims, 10 juin 1997) de l'avoir condamné à verser à M. Defossez une indemnité de licenciement, un complément d'indemnité de préavis ainsi qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que les lettres adressées par M. Defossez n'apportaient pas la preuve d'une volonté claire et non équivoque de démissionner sans s'expliquer sur la circonstance qu'après avoir informé son employeur, par lettre du 11 juillet 1991, que leurs relations contractuelles prendraient fin le 26 juillet 1991, le salarié avait effectivement cessé toute activité à compter de cette date, et maintenu sa position malgré les courriers de la société Wurth l'invitant expressément à effecuter le préavis dont il était tenu ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa position au regard des articles 1134 du Code civil et L. 122-4 du Code du travail ; alors, d'autre part, qu'il incombait à la cour d'appel de se prononcer sur la nature de la mesure prise par l'employeur le 26 avril 1991 ; qu'en constatant tout à la fois que la fixation de nouveaux quotas de vente en augmentation qui touche directement la rémunération du salarié ne pouvait être unilatéralement arrêtée par l'employeur, qui devait recevoir l'accord exprès du représentant pour la mettre en œuvre et que le refus par le salarié de continuer le travail après un changement de ses conditions de travail décidé par l'employeur constituait un manquement de M. Defossez à ses obligation contractuelles que la société Wurth avait la faculté de sanctionner en procédant au besoin à son licenciement, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de déterminer le fondement juridique de sa décision qu'ainsi, elle n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'application des règles de droit relatives au régime de la rupture du contrat de travail et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-4 du Code du travail ; alors, ensuite, qu'à supposer que la rupture, faisant suite au refus du salarié d'accepter la modification de ses conditions de travail, s'analyse en un licenciement, celui-ci n'était pas nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en déclarant M. Defossez bien fondé dans sa demande de dommages-intérêts, après avoir pourtant retenu elle-même que son refus de continuer le travail constituait un manquement à ses obligations contractuelles que la société Wurth avait la faculté de sanctionner en procédant à son licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-1 du Code du travail ; alors, ensuite, qu'en se fondant sur le seul fait que la lettre de la société Wurth du 24 juillet 1991 ne comporterait pas de motivation justifiant la rupture pour décider que le licenciement de M. Defossez était dépourvu de cause réelle et sérieuse tout en constatant par ailleurs que la rupture était intervenue le 14 mai 1991, date à laquelle la société Wurth a accusé réception par un courrier circonstancié du refus du salarié d'accepter les clauses de l'avenant à son contrat, et sans s'expliquer sur les motifs précis invoqués dans cette lettre, la cour d'appel a de nouveau violé l'article L. 122-14-3 ensemble l'article L. 122-14-2 du Code du travail ; et, alors, enfin, que la société Wurth faisait valoir dans ses conclusions d'appel que les quotas ainsi convenus pour le second semestre de l'année 1991 étaient tout à fait réalisables par le salarié, eu égard à son expérience et à son ancienneté, comme en attestait le fait q'une dizaine de vendeurs d'expérience comparable les avaient effectivement réalisés pour la période considérée ; qu'en s'abstenant de répondre à ces écritures de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait, par plusieurs courriers, refusé l'avenant au contrat de travail qui lui était proposé, puis avait saisi le conseil de prud'hommes du différend qui l'opposait à l'employeur, a exactement décidé qu'il n'avait pas manifesté une volonté claire et non équivoque de démissionner ;
Attendu, ensuite, qu'ayant relevé que la fixation de nouveaux quotas de vente touchait directement à la rémunération du salarié, la cour d'appel a pu décider que le salarié pouvait refuser cette modification de son contrat de travail et décider que le licenciement, fondé uniquement sur le constat de ce refus, ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.