Cass. soc., 17 octobre 2000, n° 98-43.474
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Abeille vie (Sté)
Défendeur :
Zeline
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Waquet
Rapporteur :
M. Soury
Avocat général :
M. Duplat
Avocats :
SCP Piwnica, Molinié.
LA COUR : - Attendu que M. Zeline a été engagé le 3 octobre 1994 par la société Abeille vie en qualité de conseiller financier ; que son contrat de travail prévoyait une période d'essai de six mois, renouvelable une fois ; que son employeur a rompu son contrat de travail le 17 août 1995 en se prévalant d'une rupture en cours de période d'essai ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour se voir appliquer le statut de VRP et obtenir paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans respect de la procédure ainsi que d'un rappel de salaire et d'une indemnité pour clause de non-concurrence fondée sur l'application du statut de VRP ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 28 avril 1998) de l'avoir condamné à payer au salarié une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement alors, selon le moyen, que la période d'essai fixée à une durée de six mois, renouvelable une fois, par la convention collective des producteurs salariés de base des services extérieurs de production des sociétés d'assurances, ne constitue pas une restriction illicite au droit pour le salarié de se prévaloir des règles légales et réglementaires applicables en cas de licenciement ; qu'en décidant que la période d'essai précitée était contraire à l'article L. 120-2 du Code du travail en ce qu'elle restreindrait le droit pour le salarié de bénéficier des textes légaux en matière de licenciement, la cour d'appel a violé les dispositions de ce texte, ensemble celles de l'article L. 122-14-7 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté l'existence d'un usage limitant à un mois, renouvelable, la durée maximale de la période d'essai applicable aux salariés non cadres ; qu'elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement d'un rappel de salaire alors, selon le moyen, que le salarié qui est lié à son employeur par un contrat comportant un horaire au moins égal à la durée hebdomadaire du travail, perçoit, s'il n'est pas apprenti, une rémunération au moins égale au SMIC ; qu'en allouant au salarié un rappel de salaire sur la base du SMIC, sans constater que celui-ci avait travaillé selon un horaire égal ou équivalent à la durée légale hebdomadaire de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-10 du Code du travail ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas des conclusions de la société Abeille vie que celle-ci ait soutenu devant les juges du fond que la durée hebdomadaire de travail du salarié était inférieure à la durée légale ; que nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié : - Vu l'article L. 751-1 du Code du travail ; - Attendu que pour débouter M. Zeline de sa demande tendant à se voir appliquer le statut de VRP, l'arrêt énonce qu'il a été engagé en qualité de conseiller financier avec pour mission de rechercher, solliciter et recueillir des souscriptions aux contrats offerts au public par la société Abeille vie ; qu'il devait exercer sa fonction à Paris et dans la région parisienne sans bénéficier d'exclusivité ; qu'il transmettait à son employeur les demandes de souscriptions de contrats qu'il faisait signer au client qu'il démarchait, accompagné du règlement de la première échéance ; que la décision d'établir ou non un contrat d'assurance était prise par la société ; que si M. Zeline remplissait et signait avec le client la demande de souscription, l'acceptation du contrat était signée par le directeur général de la société ; que la fonction de M. Zeline se limitait à la visite de clients démarchés et à une action de mise en valeur de contrats d'assurance vie ; que ne concluant pas lui-même de contrats, il n'exerçait pas l'activité essentielle d'un représentant statutaire qui prend et transmet des ordres ; qu'il n'a pas démontré qu'il disposait d'une clientèle attribuée qui aurait pu le conduire à des déplacements constants et l'exercice de sa fonction à l'extérieur de l'entreprise dans des secteurs précisément définis ; qu'il n'est donc pas recevable en sa demande de revendication du statut de VRP ;
Attendu, cependant, qu'aucune disposition légale n'empêche un démarcheur en assurances de relever du statut de VRP, dans la mesure où les conditions d'application de ce statut sont réunies; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le salarié se déplaçait hors du siège de l'entreprise pour visiter personnellement la clientèle à Paris et en région parisienne et qu'il transmettait à son employeur les ordres de souscription de contrats, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé le texte susvisé;
Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en sa disposition déboutant M. Zeline de sa demande tendant à se voir appliquer le statut de VRP, l'arrêt rendu le 28 avril 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.