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Décisions

Cass. soc., 2 mars 1994, n° 88-43.739

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Coopérateurs de Champagne (SA)

Défendeur :

Lenglet (époux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Waquet

Rapporteur :

M. Frouin

Avocat général :

M. Kessous

Avocat :

Me Boulloche.

Paris, du 27 avr. 1988

27 avril 1988

LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 avril 1988), que M. et Mme Lenglet ont signé le 30 mars 1983 avec la société Les Coopérateurs de Champagne un contrat de co-gérance, mandataire non salarié, pour l'exploitation d'une succursale de maison d'alimentation ; qu'un "manquant marchandises et emballages" ayant été constaté, les époux Lenglet ont signé le même jour une reconnaissance de dette et se sont engagés à régler le déficit ; que, faute de règlement, la société a constaté la résiliation du contrat le 7 mai ; que les époux Lenglet ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement à titre d'indemnité de préavis, de complément de salaire et de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement et licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que la société Les Coopérateurs de Champagne fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Lenglet et à Mme Lenglet une certaine somme chacun à titre d'indemnité de délai-congé, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en application du contrat de mandat régissant les parties, la résiliation sans délai et sans indemnité était encourue en cas de déficit d'un inventaire, non remboursé à la société mandante dans un délai de 8 jours ; qu'ainsi, en privant d'effet une clause licite du contrat de mandat pour décider que la rupture de celui-ci serait sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt attaqué a violé les articles 1134 et 1984 du Code civil, 7 et 8 du contrat du 30 mars 1983 et L. 781-1 et 2, L. 782-7 du Code du travail ; et alors, d'autre part, qu'en ne recherchant pas si le déficit constaté dans un inventaire de gérance non salariée d'une coopérative n'était pas de nature à rendre impossible la continuation de l'exécution du contrat de mandat, même pendant la durée du congé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

Mais attendu que, selon l'article L. 782-7 du Code du travail, les gérants non salariés de succursales de maisons d'alimentation de détail bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale dont ce texte ne donne pas une énumération limitative ; qu'il s'ensuit qu'ils bénéficient des dispositions des articles L. 122-4 et suivants du Code du travail relatives à la résiliation du contrat de travail, et notamment de celles de l'article L. 122-6 du même code ;

Et attendu qu'ayant relevé que l'employeur avait notifié le licenciement avec un effet différé, la cour d'appel a pu décider que le comportement des époux Lenglet ne constituait pas une faute grave rendant impossible la continuation de leur activité pendant la durée du préavis ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Les Coopérateurs de Champagne reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Lenglet et à Mme Lenglet une autre somme chacun à titre de complément de salaire alors, d'une part, que les dispositions relatives au SMIC étant incluses dans le titre IV du livre 1er du Code du travail et non dans le titre III de ce même livre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 782-3 du Code du travail ; et alors, d'autre part, qu'en prenant uniquement en considération le minimum garanti par le contrat de mandat du 30 mars 1983, sans égard à la rémunération perçue par les époux Lenglet et aux avantages en nature dont ils bénéficiaient, notamment en ce qui concerne le logement assuré gratuitement, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le rappel de salaire mis à la charge de la société Les Coopérateurs et violé, en cela, les articles 1134 du Code civil, L. 782-3, L. 140-1 et suivants et L. 141-1 et suivants du Code du travail ;

Mais attendu, en premier lieu, que si les accords collectifs peuvent déterminer la rémunération minimum garantie des gérants non salariés compte tenu de l'importance de la succursale et des modalités d'exploitation de celle-ci, il demeure qu'en application de l'article L. 782-3 du Code du travail, la rémunération convenue ne peut jamais être inférieure au SMIC ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que les époux Lenglet avaient disposé d'avantages en nature dont il aurait fallu tenir compte dans le calcul de leur rémunération, a constaté que les gérants n'avaient pas perçu la rémunération minimum garantie par la législation en vigueur ; que le moyen ne saurait être accueilli ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.