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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. com. B, 6 octobre 2000, n° 96-18225

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Assurances du Crédit Namur (SA)

Défendeur :

Maximoise Distribution Champion (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ellul

Conseillers :

MM. Astier, Stern

Avoués :

SCP Blanc - Amsellem - Mimran, SCP de Saint Ferreol - Touboul

Avocats :

Me Marin, SCP Hébert - Coutelier L. - Coutelier F.

T. com. Brignoles, du 2 juill. 1996

2 juillet 1996

Faits et procédure :

La Société "Cheville Sisteronnaise de l'Agneau" (Sté CSA), qui, en 1986 avait souscrit un contrat d'assurance crédit insolvabilité auprès de la Cie "Assurances du Crédit Namur" (Sté Namur) a entretenu des rapports de fournisseur à client avec la SA "Maximoise Distribution Champion" (Sté MDC) Sociétaire de la SA Codec.

Dans le cadre de ces rapports la Sté CSA avait signé une "fiche d'accord circuit direct" auprès de la Sté Codec agissant en tant que centrale de référencement.

La Sté Codec a été mise en redressement judiciaire le 9 Août 1990.

Dans le cadre de cette procédure collective, la Sté Namur agissant en qualité de mandataire de la Sté CSA a déclaré une créance d'un montant de 1.333.493,50 F ramené ultérieurement à 653.970,83 F.

Par courrier du 28 Août 1992, la Sté Namur a été informée que la créance qu'elle avait déclarée avait été admise à concurrence de 631.789,89 F.

Par exploit du 28 Septembre 1994 la Sté Namur, se déclarant subrogée dans les droits de la Sté CSA a fait assigner la Sté MDC en paiement de la somme principale de 108.243,35 F représentant un solde de factures émises par la Sté CSA à l'intention de la Sté MDC demeurées impayées.

Par jugement du 2 Juillet 1996 le Tribunal de Commerce de Brignoles a débouté la Sté Namur de ses prétentions et l'a condamnée à payer à la Sté MDC la somme de 2500 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Sté Namur a interjeté appel de ce jugement.

Dans des conclusions déposées le 13 Septembre 1996, la Société appelante soutenant qu'elle était régulièrement subrogée à la Société CSA et que la déclaration de créance faite dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'égard de la Sté Codec ne lui interdisait pas d'agir contre la Sté MDC bénéficiaire des marchandises faisant l'objet des factures litigieuses, a demandé à la Cour :

- de réformer le jugement entrepris,

- de condamner la Sté MDC à lui payer :

1) la somme principale de 108.243,35 F,

2) la somme de 10.000 F à titre de dommages et intérêts

3) la somme de 15.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans des conclusions déposées le 22 Mai 1997 la Société intimée a fait valoir :

- que les demandes de la Sté Namur étaient irrecevables,

- que la Société appelante ne disposait pas d'un droit d'agir contre la concluante,

- que la Sté Namur ne justifiait pas du bien fondé de la créance qu'elle invoquait,

- qu'il résulte du mécanisme du circuit direct qu'avait mis en place la Sté Codec, que le seul débiteur de la Sté CSA se trouvait être la Sté Codec; qu'en ayant déclaré une créance dans le cadre de la procédure collective la Sté Namur avait reconnu cette circonstance.

La Sté MDC a demandé à la Cour :

- de débouter la Sté Namur de ses prétentions,

- de confirmer le jugement entrepris,

- de condamner en outre la Sté Namur à lui payer 6000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dans des conclusions en réponse déposées le 31 Juillet 1997, la Sté Namur a soutenu qu'elle était valablement subrogée dans les droits de la Sté CSA, que la créance qu'elle invoquait à l'encontre de la Société intimée était fondée, et que le circuit direct mis en place par Codec n'exonérait pas la Société intimée de son obligation au paiement.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la recevabilité de l'appel n'a pas été discutée; que les éléments soumis à l'appréciation de la Cour ne permettent pas d'en relever l'irrégularité;

Attendu sur la recevabilité des demandes de la Sté Namur que pour la contester, la Sté MDC soutient qu'au jour de l'assignation la Société appelante ne disposait pas d'une quittance subrogative, celle-ci ne lui ayant été remise que le 20 Mars 1995;

Attendu cependant :

- que dans une attestation datée du 5 Novembre 1997 le Directeur de la Sté CSA indique que cette société a été indemnisée, par les soins de la Sté Namur le 13 Juin 1991 de sa créance à l'encontre de la Sté MDC; que cette attestation a été régulièrement communiquée à la société intimée qui ne l'a pas contestée; qu'il résulte de cette attestation qu'au jour de l'assignation, la Sté Namur, qui avait rempli ses obligations d'assureur dans le cadre du contrat d'assurance crédit souscrit par la Sté CSA était légalement subrogée à cette société,

- qu'en tout état de cause la Sté CSA a délivré une quittance subrogative à la Sté Namur le 20 Mars 1995; qu'au jour où le premier juge a statué la fin de non recevoir tirée d'une prétendue absence de subrogation avait été régularisée,

Attendu dans ces conditions, que les demandes formées par la Société appelante sont recevables;

Attendu sur le droit d'agir de la Sté Namur, que pour lui dénier ce droit la Sté MDC expose que la quittance subrogative n'est pas concomitante au paiement;

Attendu cependant que l'assureur de crédit, qui a rempli ses obligations bénéficie d'une subrogation légale (article 22 de la loi n° 72650 du 11 Juillet 1972); que les dispositions de l'article 1250 du Code Civil invoquées par l'intimée ne sont applicables qu'en matière de subrogation conventionnelle;

Qu'en l'espèce la quittance subrogative du 20 Mars 1995 a eu pour seul effet de compléter la subrogation légale qui bénéficiait à la Sté Namur depuis le 13 Juin 1991;

Que la Sté Namur est donc en droit d'agir contre la Société intimée;

Attendu sur le bien fondé de la créance invoquée par la Sté Namur :

- que cette Société verse aux débats une série de factures adressées, en Juin et Juillet 1990 par la Sté CSA à la Sté MDC,

- que cette Société produit également un relevé de compte faisant apparaître que partie des factures susvisées a été réglée (à concurrence de 99.652,54 F sur un total de 207.895,89 F),

Attendu que la Sté MDC soutient que la Sté Namur ne justifie pas des livraisons correspondant aux factures demeurées impayées pour lesquelles la Société appelante a indemnisé la Sté CSA ;

Attendu cependant :

- que la Sté MDC ne conteste pas avoir reçu les factures litigieuses; qu'elle ne justifie d'aucune protestation à réception de l'une ou l'autre de ces factures, alors par ailleurs qu'elle a réglé une série d'autres factures émises durant la même période,

- que dans ses conclusions de première instance la Sté MDC n'a soulevé aucune critique sur le bien fondé des factures litigieuses; qu'elle soutenait seulement que l'indemnité versée par la Sté Namur à la Sté CSA était inférieure au montant des factures impayées (moyen non repris en cause d'appel),

Attendu dans ces conditions que la contestation tardive et non explicitée par la Société intimée des factures litigieuses, acceptées à réception, ne saurait être retenue;

Attendu enfin sur l'incidence du "circuit direct" mis en place par la Sté Codec, dans les rapports entre les parties qu'il doit être observé, à l'examen dudit accord :

- que cette convention ne saurait emporter novation par substitution de débiteur; que cet accord a pour seul objet de régler les relations du fournisseur avec la centrale de référencement (Codec), l'opération de vente "proprement dite se réalise entre le fournisseur et le client de la centrale de référencement"; que le contrat de vente n'étant pas affecté par cette convention le fournisseur conserve les actions résultant dudit contrat à l'encontre du client,

- que cette convention ne comporte aucun mandat donné par le fournisseur à la centrale de référencement pour le recouvrement des sommes dues par le client,

- que cette convention institue en fait une garantie complémentaire donnée par la centrale de référencement qui, en payant les relevés des factures émises par les fournisseurs à l'adresse de leurs clients, se porte garante de la solvabilité de ses clients; que cette garantie a pour contrepartie le règlement d'une commission par le fournisseur,

Attendu dans ces conditions que la Sté MDC ne saurait donc être fondée à invoquer cet accord de "circuit direct" pour dénier sa qualité de débitrice à l'égard de la Sté CSA subrogée par la Sté Namur;

Que la circonstance que la Sté CSA a par l'intermédiaire de la Sté Namur déclaré une créance dans le cadre de la procédure collective de la Sté Codec ne saurait constituer une renonciation de sa part à agir contre la Sté MDC qui reste son débiteur au titre des contrats de vente intervenus entre ces parties; qu'au surplus la Société intimée n'établit pas que la créance déclarée par la Sté CSA incluait la créance présentement invoquée contre elle;

Attendu ainsi que les moyens soulevés par la Société intimée pour s'opposer à la demande justifiée de la Sté Namur ne sauraient être retenus; que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions et qu'il sera fait droit à la demande en paiement du principal;

Attendu que la demande de dommages et intérêts de la Sté Namur n'est pas justifiée; qu'elle en sera déboutée;

Attendu sur la Sté Namur a engagé en cause d'appel des frais irrépétibles dont il serait inéquitable de lui laisser supporter la charge intégrale; qu'il convient de lui allouer de ce chef la somme de 5000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Attendu que la Sté MDC qui succombe sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et condamnée aux dépens;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort ; Reçoit l'appel de la Sté Namur ; Déclare ses demandes recevables ; Au fond, infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau, condamne la Sté MDC à payer à la Sté Namur : 1) la somme principale de 108.243,35 F (cent huit mille deux cent quarante trois francs trente ciq centimes), 2)la somme de 5000 F (cinq mille francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Déboute la Sté Namur de sa demande en paiement de dommages et intérêts compensatoires ; Déboute la Sté MDC de sa demande formée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Condamne la Sté MDC aux dépens, ceux d'appel recouvrés par la SCP d'avoués BLANC, conformément aux dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,