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Décisions

CA Douai, 8e ch. civ., 6 février 1992, n° 4278-90

DOUAI

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Bracq (SA)

Défendeur :

Arnoux

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gondran de Robert

Conseillers :

Mmes Gosselin, Jean

Avoués :

SCP Carlier-Regnier, SCL Levasseur-Castille-Plateau

Avocats :

Mes Desenfans, Villain.

TGI Cambrai, du 31 mai 1990

31 mai 1990

I - Données devant la Cour

La décision attaquée

Le Tribunal de grande instance de Cambrai, par jugement du 31 mai 1990, auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et moyens des parties, s'est déclaré compétent et, avant-dire droit au fond,

- a fait injonction à la SA Bracq de conclure au fond,

- a ordonné une expertise comptable aux frais avancés de M. Léon Arnoux,

- a condamné la SA Bracq à payer à M. Léon Arnoux la somme de 50 266 F à titre de provision.

La procédure

Par déclaration en date du 29 juin 1990, la SCP Levasseur-Castille-Plateau, agissant au nom de la SA Bracq, a fait appel de cette décision ;

Par arrêt en date du 7 février 1991, la cour de céans a confirmé le jugement déféré sur la compétence, l'a réformé pour le surplus, en réservant les dépens.

Les prétentions de la SA Bracq :

Elle sollicite voir la cour :

- constater que M. Léon Arnoux exerçait les fonctions de mandataire libre,

- dire n'y avoir lieu à indemnité de rupture à son profit,

- dire n'y avoir lieu à rappel de commissions à son profit,

- dire n'y avoir lieu à expertise comptable,

Très subsidiairement, mettre à sa charge le coût d'une éventuelle mesure d'information,

- le condamner reconventionnellement à lui rembourser la somme de 70 519,36 F perçue indûment,

- le condamner à lui verser la somme de 10 000 F de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- le condamner à lui verser la somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- le condamner en tous les dépens, dont distraction.

Les prétentions de M. Léon Arnoux :

Il demande voir la Cour :

- juger que la SA Bracq est responsable de la rupture unilatérale de son contrat d'agent commercial,

- la condamner à lui payer la somme de 464 000 F, au titre de l'indemnité de rupture,

- la condamner à lui payer la somme de 62 251 F, à titre de provision à valoir sur les commissions,

- pour le surplus ordonner une expertise comptable à l'effet de vérifier dans la comptabilité de la SA Bracq l'ensemble des factures relatives aux commandes prises par ses clients directement à la SA Bracq,

- condamner la SA Bracq à lui payer la somme de 20 000 F en vertu des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- débouter la SA Bracq de toutes ses demandes,

- la condamner aux dépens dont distraction.

II. - Argumentation de la Cour

Attendu qu'aucun élément précis n'a été relevé quant à l'irrégularité formelle des appels, principal et incident, et que rien ne conduit la Cour à le faire d'office ; qu'il convient, en conséquence, d'en constater la recevabilité ;

Attendu que si M. Léon Arnoux ne justifie pas être sous contrat d'agent commercial avec la SA Bracq, en n'apportant pas notamment la preuve d'un contrat écrit à cette fin, les documents librement et contradictoirement débattus entre les parties montrent qu'existaient, entre les parties, un contrat d'intérêt commun, s'appuyant sur un réseau de clientèle, avec rétribution de l'agent par commissions liées aux chiffres d'affaires ; que, ne s'agissant pas d'un mandat libre, la SA Bracq doit réparation à M. Léon Arnoux si, comme en l'occurrence, elle a pris l'initiative, fautive, de révocation de sa procuration ;

Attendu, en effet, que le motif exposé dans le courrier daté du 2 mars 1989 n'est pas suffisant et sérieux ; que l'existence de conflits judiciaires entre M. Léon Arnoux et un de ses autres mandants, la maison Gillier, avec laquelle la SA Bracq tenait un stand d'exposition, n'étaient pas de nature, en soi, à interdire a priori l'accès à ce stand à M. Léon Arnoux, lieu privilégié de son travail, consistant à constituer ou renforcer une clientèle ; que les courriers de M. Léon Arnoux, postérieurs à cette interdiction, et ses légitimes interrogations font qu'il y a lieu de retenir que la rupture définitive de leur relation, par courrier de la SA Bracq du 3 mai 1989 a priori, est fautive et imputable à celle-ci ;

Attendu, dès lors, que les moyens contraires des parties sont inopérants ;

Attendu, quant au montant des indemnités, provisoires ou définitives, qu'il est utile de procéder au préalable à une expertise comptable aux frais avancés de M. Léon Arnoux, et de surseoir à statuer sur les autres demandes.

III - Décision de la Cour

Par ces motifs, LA COUR, disposant au nom du peuple français, 1/ Dit la SA Bracq responsable de la rupture du contrat de mandat d'intérêt général existant avec M. Léon Arnoux; 2/ Avant-dire droit, au fond, ordonne une expertise et désigne à cet effet en qualité d'expert M. Henri Delot - demeurant à Douai 59500 - 63 rue Morel, avec pour mission, de : - établir le taux de commission due, - établir le montant des commandes devant donner lieu à commission, - faire toutes observations sur le compte des parties; 3/ Ordonne la consignation, avant le 10 mars 1992, à la charge de M. Léon Arnoux, de la somme de 8 000 F, à valoir sur les frais et honoraires d'expertise; 4/ Rappelle (article 271 du Nouveau Code de Procédure Civile) qu'à défaut, la désignation de l'expert serait caduque et que l'instance devrait se poursuivre, sauf à ce qu'il soit tiré toute conséquence de l'abstention ou du refus de consigner; 5/ Dit que l'expert déposera son rapport, au greffe de la cour, avant le 14 avril 1992; 6/ Commet le magistrat chargé de la mise en état de la huitième chambre de la cour pour surveiller les opérations d'expertise; 7/ Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert sus-désigné, son remplacement sera effectué par simple ordonnance sur requête par le magistrat chargé de la mise en état; 8/ Réserve le dépens.