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Décisions

Cass. com., 27 février 1996, n° 94-15.507

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Relux (SA)

Défendeur :

Drimmer (SA), La Grande Surface de Millau (SA), Euromarché (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

M. Bertrand, SCP Le Bret, Laugier, SCP Tiffreau, Thouin-Palat, M. Blondel.

T. com. Millau, du 29 sept. 1992

29 septembre 1992

LA COUR : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Montpellier, 8 mars 1994), que la société Drimmer, qui a pour objet la création, la fabrication et la commercialisation de lampes en céramique, a, après avoir fait procéder à une saisie-contrefaçon, assigné pour contrefaçon d'un modèle de lampe en céramique, la société La Grande surface de Millau qui offrait à la vente ce modèle, la société Relux, importateur et distributeur de ce luminaire et la société Euromarché dont la société La Grande surface de Millau porte l'enseigne ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Attendu que la société Relux fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée pour contrefaçon alors, selon le pourvoi, que si une personne morale est présumée titulaire des deoits d'auteur sur une œuvre divulguée sous sa direction et en son nom, en l'absence de revendication de ses salariés, encore faut-il que la divulgation sous sa direction et en son nom soit établie ; qu'en statuant comme elle l'a fait, par des motifs se fondant exclusivement sur les conditions de création du modèle, sans aucunement relever que ce modèle aurait été divulgué, ni à plus forte raison qu'il l'aurait été sous la direction et le nom de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-2 et L. 113-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que la divulgation d'un modèle n'étant pas une condition de sa validité, la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche inopérante ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal : - Attendu que la société Relux fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée pour contrefaçon alors, selon le pourvoi, qu'en s'abstenant de toute constatation quant à la date de création du modèle Drimmer, et en ne constatant en conséquence nullement l'antériorité de cette création par rapport aux faits de contrefaçon retenus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1 et suivants et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu qu'il n'apparaît ni de l'arrêt ni des conclusions que le moyen tiré de l'absence de nouveauté ait été invoqué devant la cour d'appel ; d'où il suit que le moyen nouveau et mélangé de fait et de droit est irrecevable ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal pris en ses trois branches : - Attendu que la société Relux fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée au paiement de dommages et intérêts outre la confiscation des objets contrefaisants, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en mettant à sa charge une indemnité différente de celle mise à la charge des autres sociétés, cependant qu'elle ne relevait à son encontre aucune autre vente que celle des dix lampes contrefaisantes acquises par la société La Grande Surface de Millau, le seul fait d'avoir elle-même acquis quatre-vingt-seize lampes n'étant pas constitutif de contrefaçon, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;lors d'autre part, qu'en cumulant les indemnités mises à la charge des trois sociétés pour des faits de contrefaçon relatifs à des mêmes objets, cependant qu'une seule condamnation aurait due être prononcée, au besoin in solidum, la cour d'appel a de plus violé l'article 1382 du Code civil ; alors, enfin, qu'en ordonnat la confiscation des lampes contrefaisantes se trouvant entre ses mains et leur remise à la société Drimmer sans faire venir la valeur de ces objets en déduction des dommages et intérêts fixés, la cour d'appel a encore violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève que " la société Relux justifie avoir acquis auprès de la société espagnole Ceramicas Peralta quatre-vingt-seize lampes dont la référence correspond à celle des luminaires saisis auporès de la société La Grande Surface de Millau " ; qu'à partir de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que la commercialisation de ces lampes établie par les éléments de preuve, constituait un acte de contrefaçon ;

Attendu qu'après avoir retenu que les faits de contrefaçon commis par les trois sociétés en cause étaient d'importance distincte, la cour d'appel a pu déterminer pour chacune de ces sociétés la réparation du préjudice causé par elle ;

Attendu, enfin, qu'ayant apprécié le montant de la réparation du préjudice causé par la société Relux, la cour d'appel a pu ordonner la confiscation des objets contrefaits et saisis, sans encourir la critique du moyen ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident pris en ses deux branches : - Attendu que la société Euromarché fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée pour contrefaçon au paiement de dommages et intérêts alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'elle insistait sur la circonstance que l'activité de référencement consiste à négocier des conditions avantageuses de vente avec des fournisseurs dont une liste est établie et mise à jour, laquelle est communiquée à des distributeurs affiliés ; que cette activité de référencement se borne à mettre en relation fournisseurs et vendeurs, mais n'implique aucun acte d'achat ou de vente de tel objet déterminé, cependant que la contrefaçon ne peut frapper que le débit, l'exportation et l'importation d'ouvrages contrefaisants, débit, exportation et importation antinomiques avec l'activité d'une centrale de référencement, si bien qu'en jugeant que ladite centrale s'était rendue auteur d'actes de contrefaçon, la cour d'appel inscrit dans son arrêt des motifs inopérants et partant viole les articles L. 335-2 et L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle ; et alors, d'autre part, qu'elle insistait dans ses écritures d'appel sur le fait que par son activité de référencement, elle se bornait à négocier des conditions avantageuses de vente avec des fournisseurs dont une liste est établie et mise à jour, laquelle est communiquée à des distributeurs affiliés, le référencement consistant simplement à mettre en relation fournisseurs et vendeurs, mais n'impliquant aucun acte d'achat ou de vente ; que nonobstant la situation ainsi décrite, la cour d'appel affirme sans s'expliquer davantage quant à ce en caractérisant des actes d'achat de la société chargée du simple référencement, que celui-ci a néanmoins pour objet d'offrir à la vente les marchandises sélectionnées, en sorte que cette participation à la commercialisation, essentielle puisqu'elle la suscite, constitue bien un acte de contrefaçon, la cour d'appel ne s'expliquant pas davantage en l'état des écritures la saisissant sur le point de savoir si oui ou non l'activité de référencement postule la connaissance des produits distribués par le distributeur référencé ; qu'ainsi, en l'état des écritures la saisissant, la cour d'appel ne met pas à même la Cour de Cassation d'exercer son contrôle au regard des textes cités au précédent élément de moyen ;

Mais attendu qu'en retenant que la société Euromarché en procédant à un référencement des produits contrefaits sélectionnés par ses soins a joué un rôle d'intermédiaire entre la société La Grande surface de Millau et le distributeur, la cour d'appel a pu en déduire, répondant ainsi au moyen prétendument délaissé, qu'une telle activité constituait une participation essentielle à la commercialisation desdits produits et constituait un acte de contrefaçon ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches.

Par ces motifs : rejette les pourvois tant principal qu'incident.