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Décisions

CA Paris, 1re ch. D, 10 octobre 2001, n° 2001-09847

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Technovrac (Sté)

Défendeur :

CEPI (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulon

Conseillers :

M. Lachacinski, Mme Percheron

Avocats :

Mes Meurin, Felici.

T. com. Meaux, du 24 avr. 2001

24 avril 2001

La société Technovrac, spécialisée dans la revente, l'installation et la réparation de silos, reprochant à la société de droit italien CEPI de ne pas lui avoir livré les marchandises qu'elle lui avait commandées, l'a assignée le 23 juillet 1999 devant le tribunal de commerce de Meaux en résiliation du contrat de concession exclusive en date du 24 mars 1990 survenue le 24 mars 1990 [sic], subsidiairement en résiliation judiciaire dudit contrat aux torts exclusifs de la société CEPI qui devra être condamnée à lui payer, notamment les sommes à titre de dommages-intérêts de 4 112 367,81 francs en réparation du préjudice commercial, de 300 000 francs pour procédure abusive et de 40 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par jugement du 24 avril 2001, le tribunal a fait droit à l'exception soulevée par la société CEPI sur le fondement des dispositions de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles et s'est déclaré incompétent au profit des juridictions italiennes.

LA COUR,

Vu le contredit formé le 23 mai 2001 par lequel la société Technovrac revendique l'application de la loi française ainsi que la compétence du tribunal de commerce de Meaux aux motifs que contractuellement liée à la société CEPI depuis le 24 mars 1990, les dispositions de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles sont applicables au contrat de distribution des produits, lequel s'est exécuté en France;

Vu les dernières écritures du 11 septembre 2001 par lesquelles la société CEPI, à titre principal, soulève l'irrecevabilité du contredit formé en dehors du délai de quinze jours prévu par l'article 82 du nouveau Code de procédure civile et sollicite la condamnation de la société Technovrac à lui payer la somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile, à titre subsidiaire, conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et à la condamnation de l'auteur du contredit à lui payer la somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Sur quoi,

- Sur la recevabilité du contredit

Le délai de quinze jours pour former contredit ayant pour point de départ le prononcé du jugement ne peut commencer à courir qu'autant que la date à laquelle le jugement devait être rendu a été porté à la connaissance des parties.

Il ne résulte d'aucune mention du jugement déféré, ou de tout autre élément, que les parties ont été effectivement informées de cette date, de sorte que le contredit n'est pas tardif, rien n'établissant que son auteur a eu connaissance du jugement plus de quinze jours avant la date à laquelle il a été formé.

Il s'ensuit que le contredit est recevable.

- Sur la compétence

La société CEPI étant domiciliée en Italie, la compétence doit être déterminée au regard des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 dont l'article 5-1 prévoit que le défendeur domicilié sur le territoire d'un État contractant peut, en matière contractuelle, être attrait, dans un autre État contractant, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée.

Ce lieu se détermine conformément à la loi qui régit l'obligation litigieuse selon les règles du conflit de la juridiction saisie.

En vertu de l'article 4 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Il est présumé que ce pays est celui où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle. Toutefois, si le contrat est conclu dans l'exercice de l'activité professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est situé son principal établissement.

En l'espèce, la prestation caractéristique, à savoir l'obligation de livrer le matériel commandé par la société Technovrac était à la charge de la société italienne, dont il est constant qu'elle avait, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle en Italie.

Il s'ensuit que la loi applicable au contrat litigieux est la loi italienne.

Il résulte des termes de l'article 1327 alinéa 1 du Code civil italien, tel qu'il résulte de la traduction non contestée produite aux débats, que " pour le cas où, sur requête de l'offrant ou selon la nature de l'affaire ou des usages, la prestation doit être exécutée sans réponse préalable, le contrat est conclu au moment et dans le lieu du commencement d'exécution ".

En conséquence, l'obligation de la société CEPI de fournir les marchandises à la société Technovrac naissait lors de chaque réception de chaque commande à son siège social en Italie.

Au regard de l'article 2 de la Convention de Bruxelles, le litige relève donc de la compétence des juridictions italiennes.

C'est donc à bon droit que le tribunal de commerce de Meaux s'est déclaré incompétent.

Le contredit sera en conséquence rejeté.

La société Technovrac devra verser à la société CEPI la somme de 5 000 francs au titre de ses frais irrépétibles.

La société Technovrac n'ayant pas agi en justice de manière dilatoire ou abusive, la demande formée par la société CEPI sur le fondement de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile doit être rejetée.

Par ces motifs : déclare le contredit recevable, mais mal fondé, renvoie les parties à mieux se pourvoir, déboute la société CEPI de sa demande fondée sur l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Technovrac à payer à la société CEPI la somme de 5 000 francs au titre de l'article de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, dit que la société Technovrac supportera les frais du contredit.