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Décisions

Cass. com., 10 mai 2000, n° 97-17.268

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Totem auto (SARL)

Défendeur :

Lada France (SA), Financière Poch (Sté), Crédit mutuel de Villeurbanne (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Grimaldi (conseiller doyen faisant fonctions)

Rapporteur :

Mme Tric

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Ghestin, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez.

T. com. Paris, 10e ch., du 2 août 1995

2 août 1995

LA COUR : - Donne acte à la société Totem auto de son désistement envers la société Crédit mutuel de Villeurbanne ; - Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 4 avril 1997), que la société Totem auto (la société STA) a conclu, le 9 juillet 1991, trois contrats de concession automobile avec la société Poch, devenue Lada France, filiale de la société Financière Poch ; qu'invoquant le caractère erroné des informations fournies en vue de la signature des contrats et l'absence d'exécution de bonne foi de ceux-ci, elle a assigné la société Lada France en indemnisation de son préjudice ;

Attendu que la société STA reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'elle avait soutenu dans ses conclusions d'appel que quinze jours seulement après avoir signé le contrat de concession, la société Lada France avait adressé à tous ses concessionnaires une lettre les informant de la diminution des objectifs de 30 à 50 % ; qu'elle en déduisait que la société Lada France n'avait pu ignorer, lors de la conclusion du contrat, les informations sur la baisse du taux de pénétration de la marque en France et, par conséquent, qu'elle savait que les chiffres avancés dans les documents précontractuels étaient erronés ; qu'en se bornant à affirmer que la fourniture délibérée de renseignements erronés n'était pas établie, sans rechercher si l'envoi de la lettre circulaire annonçant une baisse importante des objectifs quelques jours après la conclusion du contrat n'avait pas été déterminée par les informations connues à cette date par la société concédante, la cour d'appel n'a pas répondu au moyen des conclusions de la société STA en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que la société STA avait invoqué dans ses conclusions d'appel les lettres qu'elle avait adressées à la société Lada France et au transporteur, la société Ortrans, pour se plaindre de ce que les véhicules commandés n'avaient pas été livrés ou avaient été livrés en retard et, la plupart du temps, dans un état déplorable ; qu'en énonçant que la société STA ne pouvait invoquer le mauvais état des véhicules dès lors qu'elle n'avait pas exprimé de réserves auprès du transporteur ou du centre de préparation, sans tenir compte des conclusions établissant l'existence des plaintes adressées directement par la société STA à son cocontractant et au transporteur, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors, ensuite, que l'inexécution ou l'exécution défectueuse du contrat est de nature à justifier la demande en réparation formée par le cocontractant qui en est victime ; que l'arrêt a reconnu l'existence des retards dans la livraison des véhicules commandés par la société STA ; qu'en écartant le grief adressé à la société Lada France au motif inopérant que cette situation s'expliquait par l'origine des véhicules qui étaient fabriqués en Russie où la ponctualité n'est pas assurée, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; et alors, enfin, que faute d'avoir recherché si les parties contractantes étaient convenues de ne donner aux dates de livraison prévues qu'un caractère indicatif en raison de l'aléa des livraisons en provenance de Russie, la cour d'appel, qui constatait que les retards de livraison n'étaient pas imprévisibles, ne pouvait exclure tout droit à indemnisation de la société STA sans entacher sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1147 et 1148 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que les informations préalables exigées par la loi du 31 décembre 1989 et définies par le décret du 4 avril 1991 ont bien été fournies le 19 juin 1991 et que, parmi elles, figurait la statistique des véhicules montrant une évolution défavorable des ventes; qu'il retient que, dès le 22 mai 1991, la société STA avait disposé d'une étude du seuil de rentabilité sur laquelle elle a eu largement le temps de se pencher, avec la compétence d'un professionnel averti de la distribution automobile; que par ces motifs desquels il résulte que la circulaire invoquée par la société STA n'était pas en contradiction avec les éléments préalables fournis, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument délaissées;

Attendu, d'autre part, que pour décider que la société STA ne pouvait invoquer le mauvais état des véhicules, l'arrêt retient, sans méconnaître l'objet du litige, que des réserves n'ont pas été faites sur ce point, d'où il ressort que si un courrier a bien été adressé par la société STA à son cocontractant et au transporteur pour se plaindre de l'état très déplorable d'un véhicule, la procédure contractuelle de réserves n'avait pas été respectée, ce que la société STA ne contestait pas ;

Attendu, ensuite, que l'arrêt a souverainement estimé les retards de livraison de véhicules non fautifs en retenant leur caractère limité et prévisible pour un professionnel qui ne peut ignorer que la ponctualité n'est pas assurée pour des véhicules fabriqués en Russie ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel, devant laquelle ce moyen n'était pas soutenu, n'était pas tenue de rechercher si les parties contractantes étaient convenues de ne donner aux dates de livraison prévues qu'un caractère indicatif ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.