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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 20 mai 1994, n° 92-13024

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Automobiles Peugeot (SA)

Défendeur :

Ouest Automobiles (Sté), Cardiet, Soret (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leclercq

Conseillers :

MM. Bouche, Le Fèvre

Avoués :

Me Bourdais Virenque, SCP Roblin Chaix de Lavarene

Avocats :

Mes Micheli, Bourgeon.

T. com. Paris, 2e ch., du 21 avr. 1992

21 avril 1992

FAITS ET PROCÉDURE :

Jean Pierre Cardiet a acquis le 19 décembre 1989 au prix de 2 250 000 F la totalité des actions de la société Ouest Automobiles SOA, concessionnaire Peugeot à Quimperlé (Finistère). Compte tenu du caractère personnel du contrat de concession de quatre ans en cours, cette cession n'a pris effet que le 1er mai 1990, date à laquelle Jean Pierre Cardiet a signé avec la société Peugeot un contrat de concession d'une durée de 8 mois du 1er mai au 31 décembre 1990, suivi d'un nouveau contrat de concession d'une durée de 4 ans à compter du 1er janvier 1991 aux mêmes conditions.

Une annexe du contrat de concession accordait, par intervention de la société de financement des réseaux automobiles Sofira, filiale d'affacturage de Peugeot, des délais de paiement au concessionnaire pouvant atteindre 90 jours, sans agios pour les trente premiers jours. La Sofira devait recevoir paiement de tout véhicule vendu à la clientèle " immédiatement à la date de revente " ;

Au cours du printemps 1991 plusieurs véhicules ont été vendus par SOA sans que le prix d'achat à Peugeot en soit immédiatement versé à la Sofira. Peugeot a résilié le contrat de concession à effet rétroactif du 29 juin. SOA et Jean Pierre Cardiet, estimant que cette résiliation était abusive, ont demandé des dommages et intérêts.

Par jugement du 21 avril 1992 le Tribunal de commerce de Paris a déclaré abusive la résiliation du contrat de concession, a condamné Peugeot à payer 100 000 F de dommages et intérêts à Jean Pierre Cardiet pour préjudice moral, 500 000 F à SOA à titre de provision ainsi que 25 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, a nommé Maurice Deude, expert à la Cour d'appel de Rennes avec mission d'évaluer le montant du préjudice matériel subi par SOA et d'établir un projet d'arrêté de comptes entre les parties et a ordonné l'exécution provisoire de ces dispositions.

Peugeot a interjeté appel par acte du 4 juin 1992. L'expert a déposé son rapport le 30 juillet 1993 ;

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

Par conclusions signifiées le 2 octobre 1992, Peugeot demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de faire droit à sa demande reconventionnelle et de condamner SOA à lui payer la somme de 470 381,94 F (hors taxes) correspondant à sa créance portant sur les 5 véhicules neufs livrés en clientèle et non encore réglés et, pour le cas où la Cour ne s'estimerait pas suffisamment informée, de désigner un expert avec uniquement pour mission de déterminer le montant exact de sa créance sur SOA ;

- à titre subsidiaire pour le cas où la Cour confirmerait le jugement du tribunal de commerce en son principe, de réduire dans de très fortes proportions les sommes allouées à SOA et à Jean Pierre Cardiet, de condamner la SOA et Jean Pierre Cardiet solidairement et conjointement à verser à Peugeot la somme de 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Peugeot fait valoir que dans les quatre premiers mois de l'année 1991 sa part de marché sur le territoire concédé est tombé de 18,6 % en décembre 1990 à 11,1 % en avril 1991 et soutient que cette baisse des ventes n'est pas due à la guerre dite du Golfe ainsi que le prétend SOA, puisque la pénétration de Peugeot en Bretagne n'a perdu en moyenne qu'un dixième de point de décembre 1990 à avril 1991.

Peugeot reproche à SOA une politique de prix dangereuse allant jusqu'à la vente à perte et soutient que dès avril 1991 Sofira a constaté que SOA revendait des véhicules sans lui en régler aussitôt le prix. Peugeot précise qu'au cours d'un contrôle opéré le 6 juin 1991, Sofira a constaté que treize véhicules étaient vendus non réglés (" VNR ") et que le nombre des VNR tombait à 9 puis à 6 deux jours plus tard pour remonter à 8 le 19 juin et à 15 le 28 juin.

Peugeot se prévaut des dispositions de l'article XIV du contrat de concession qui autorise la résiliation pour le défaut de paiement sans distinction, selon l'appelant, entre défaut et retard de paiement. Peugeot soutient que les documents types adressés par Sofira aux concessionnaires établissent clairement que le prélèvement destiné à assurer le paiement du véhicule au constructeur doit être initié le jour même de la livraison au client. Peugeot ajoute que deux ordres de prélèvement bancaire ont été rejetés et en déduit que la Sofira était en droit d'exiger le 29 juin 1991 le paiement des 15 VNR par virement bancaire immédiat. Peugeot conteste toute accusation de brutalité, le contrat autorisant la résiliation par simple lettre recommandée sans mise en demeure.

Par conclusions signifiées le 16 novembre 1993, SOA et Jean Pierre Cardiet demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Peugeot avait résilié abusivement le 1er juillet 1991 le contrat de concession conclu avec SOA pour la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1994 et condamné Peugeot à payer à Jean Pierre Cardiet 100 000 F de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- évoquer pour le surplus au vu du rapport de l'expert Deude du 30 juillet 1993, et condamner Peugeot à payer à SOA 8 068 200 F en réparation de son préjudice matériel, sous déduction de la provision de 500 000 F déjà accordée,

- ordonner la compensation entre les condamnations mises à la charge de Peugeot et les 439 265,74 F dont SOA lui reste redevable,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à SOA la somme de 25 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et y ajoutant, condamner Peugeot au paiement d'une somme supplémentaire de 50 000 F hors taxes.

Les intimés maintiennent que le ralentissement de l'activité économique consécutif à la guerre du Golfe s'est traduit par une baisse substantielle des immatriculations toutes marques confondues sur le secteur concédé. Ils font observer qu'ils ont déféré à plusieurs demandes de règlement de VNR, qu'il ne restait plus que 5 VNR le 24 juin, que le vendredi 28 juin 1991 en début d'après midi Peugeot a refusé de recevoir un chèque de 1 255 127,87 F, que les bureaux de la Sofira étant fermés le samedi et l'agence du Crédit Agricole le lundi, l'ordre de prélèvement n'a pu être intégralement exécuté que le 2 juillet 1991 avec date de valeur au lundi 1 er juillet 1991 par le Crédit Agricole de Quimperlé et que Peugeot en a profité pour faire signifier abusivement par huissier le 1er juillet à 18 heures la résiliation du contrat de concession avec effet rétroactif au 29 juin à 14 heures et faire enlever la totalité des véhicules neufs en stock le 2 juillet 1991 à partir de 8 heures, sous contrôle d'huissier. Les intimés ajoutent que dès le 8 juillet 1991, Jean Pierre Cardiet très affecté psychologiquement, a protesté auprès de Peugeot contre le caractère brutal et abusif de la résiliation du contrat et a réclamé à Sofira un arrêté de comptes clair et précis ;

Les intimés contestent toute politique hasardeuse de prix et toute vente à perte. Ils soutiennent que le " défaut de paiement " susceptible de justifier une résiliation correspond à un " incident de paiement " et que dans le doute il convient de faire application de l'article 1162 du Code civil.

Ils reprochent à Peugeot d'avoir fondé la résiliation non pas sur un défaut de paiement mais sur la simple absence d'émission, soudainement exigée dans des circonstances qui n'en permettaient pas l'exécution, d'un virement bancaire certifié avant le 29 juin 1991 à 14 heures. Ils prétendent que les conditions même de la résiliation révèlent la mauvaise foi de Peugeot qui voulait évincer SOA de son réseau de concessionnaire et que le préjudice moral de Jean Pierre Cardiet, élu local, justifie pleinement les 100 000 F accordés.

Par conclusions signifiées le 14 janvier 1994 Peugeot confirme son argumentation, s'oppose à l'évocation estimant qu'elle priverait les parties du double degré de juridiction, demande à la Cour de débouter en conséquence les intimés de leur demande d'évocation et, à titre subsidiaire, d'ordonner la réouverture des débats pour lui permettre de conclure au fond au vu du rapport d'expertise.

Par conclusions signifiées les 11 février et 31 mars 1994 SOA, Jean Pierre Cardiet et Maître Soret intervenant en tant que représentant des créanciers de SOA en redressement judiciaire maintiennent leurs demandes antérieures et sollicitent en outre de la Cour qu'elle condamne Peugeot au paiement d'une provision complémentaire de 3 000 000 F, qu'elle enjoigne à Peugeot de conclure sur le rapport d'expertise et qu'elle renvoie les débats sur cet aspect du litige à une date à déterminer.

Par conclusions signifiées le 30 mars 1994, Peugeot demande à la Cour de débouter SOA, Jean Pierre Cardiet et Maître Soret ès qualités de leurs demandes et notamment de celle d'une provision complémentaire de 3 000 000 F, de lui adjuger le bénéfice de ses précédentes écritures en substituant à la condamnation de SOA, sur demande reconventionnelle, à lui payer 470 381,94 F hors taxes, la fixation de sa créance sur SOA à ce montant et de condamner SOA, Maître Soret ès qualités et Jean Pierre Cardiet solidairement et conjointement à lui verser 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur quoi, LA COUR,

Sur les conditions de la résiliation :

Considérant qu'en application de l'article 1134 du Code civil les conventions doivent être exécutées de bonne foi; que s'agissant d'un contrat de concession plaçant le concessionnaire dans la dépendance économique du concédant et conclu de surcroît à l'identique des contrats antérieurs afférents à la même concession et des contrats imposés aux autres concessionnaires d'un même réseau, la bonne foi implique que le concédant respecte les usages généraux du réseau et les tolérances habituellement accordées aux autres concessionnaires et n'applique pas à la lettre à un concessionnaire, pour des raisons d'opportunité économique ou d'antipathie personnelle, des clauses aussi rigoureuses que celle autorisant la résolution de la concession sans mise en demeure préalable;

Que l'annexe du contrat concernant l'intervention de la Sofira prévoit que le prix facturé au concessionnaire devra être payé par celui-ci à Sofira " immédiatement à la date de la revente " ;

Considérant que l'article 14 du contrat de concession accorde à Peugeot le droit d'arrêter les livraisons et, s'il le juge nécessaire, de résilier le contrat sans mise en demeure par simple lettre recommandée en cas d'inexécution de l'une quelconque de ses clauses ou d'agissements du concessionnaire de nature à porter au constructeur un préjudice matériel ou moral ; qu'il ajoute qu'il " en sera ainsi entre autres en cas de défaut de paiement notamment lorsque le concessionnaire aura laissé protester un effet accepté, n'aura pas payé un chèque ou verra un ordre de prélèvement bancaire rejeté ou en cas de cessation de paiement ou d'ouverture de procédure collective " ;

Considérant que Julien Annic qui avait exploité de 1981 à 1990 la concession Peugeot de Quimperlé et cédé à Jean Pierre Cardiet le contrôle de SOA, témoigne, par attestation versée aux débats, de ce que " la grande majorité des concessionnaires n'était pas pressée de régler les autos, que cet argent leur faisant un peu de trésorerie..., que le contrôleur Sofira constatait les règlements en retard et demandait en paiement immédiat...que l'on opérait lorsque les moyens financiers le permettaient, c'est à dire avec 2, 3 ou 4 jours de retard, ou l'on attendait une relance téléphonique de Paris ; entre temps nous avions livré d'autres voitures neuves qui nous faisaient un peu de trésorerie, je me souviens avoir eu ainsi 17 voitures de retard...A aucun moment, on ne m'a menacé de m'enlever le panneau de la marque...C'était la méthode de travail de la grande majorité des concessionnaires... " ;

Que Peugeot ne produit ni document ni attestation contraires susceptibles d'appuyer, dans la pratique contractuelle, son interprétation du contrat selon laquelle " immédiatement " signifiait le jour même de la revente, sans attendre ne serait ce que l'encaissement effectif du prix payé par le client ; que cette affirmation de Peugeot est au contraire démentie par plusieurs télex adressés par ses services aux concessionnaires fixant des dates de règlement à Sofira du prix des véhicules vendus avec un décalage de plusieurs jours par rapport aux ventes : 7 janvier 1991 pour les véhicules vendus en décembre, 6 mars pour les véhicules vendus en mars, 6 juin pour les véhicules vendus en mai ;

Qu'il est ainsi établi que l'usage dans le réseau Peugeot, à l'époque de la résiliation litigieuse, d'accorder aux concessionnaires pour les paiements une tolérance qui allait de quelques jours à quelques semainesselon la date de vente du véhicule dans le mois ; qu'au-delà du 30ème jour d'intervention de la société Sofira celle-ci prélevait des agios ; qu'un télex de rappel aux concessionnaires indique que les véhicules dont le règlement à Sofira n'aura pas été effectué ce jour, seront " défalqués des soutiens aux ventes, du deuxième acompte, taux 2 " ; qu'une sanction financière était donc habituellement appliquée aux retardataires et non la résiliation de la concession ; que Peugeot ne saurait ainsi soutenir que le retard de paiements reproché à SOA doit s'analyser pour ce concessionnaire et lui seul, à défaut d'autres éléments plus graves, en un défaut de paiement passible de la résiliation du contrat ;

Considérant qu'il résulte de l'exposé même de ses griefs que Peugeot qui a la charge de la preuve, ne pouvait reprocher à SOA jusqu'à fin juin 1991 que des retards de paiement de quelques jours, portant sur quelques véhicules et n'excédant apparemment pas les tolérances habituelles ;

Que le nombre des VNR avait été réduit de 13 à 6 sur intervention de la Sofira avant de remonter à 15 le 28 juin 1991 ; qu'il est d'autant moins établi que le retard était à cette date alarmant qu'un paiement de 1 255 126,87 F l'a quasiment effacé trois jours plus tard ;

Considérant que le 1er juillet 1991, Peugeot a adressé à SOA, sous la signature de Bernard Terquem, une lettre de résiliation du contrat de concession au seul motif que le 29 juin à 14 heures le concédant n'aurait pas reçu, ainsi qu'il l'avait exigé, un télex de la banque certifiant le virement de la totalité du prix des VNR ; que Peugeot reconnaît toutefois dans cette lettre avoir été informé par télécopie le 19 juin à 12 heures 04 qu'un ordre de virement d'1 255 126,87 F en faveur de Sofira, correspondant au montant exigé, avait été remis au Crédit Agricole, cette banque précisant seulement que l'opération serait effectuée sous réserve que le compte de SOA présente une provision suffisante ; que le Crédit Agricole a procédé au virement des fonds le 2 juillet valeur 1er juillet 1991 et précisé dans une lettre du 12 juillet 1991 que la réserve de son télex n'était qu'une précaution d'usage et ne pouvait constituer une présomption d'insolvabilité ; que Peugeot a feint de croire le contraire et maintenu de mauvaise foi cette fausse interprétation lorsque la Sofira a reçu les fonds et qu'elle-même a pu réaliser que la résiliation n'était plus justifiée ;

Considérant que Peugeot en contact très étroit depuis le 28 juin 1991 avec la direction de la SOA à laquelle elle imposait des exigences d'heure en heure, ne pouvait ignorer que l'agence concernée du Crédit Agricole était fermée les 30 juin et 1er juillet et que la confirmation du règlement ne pourrait lui parvenir au mieux avant le mardi 2 juillet ; que la société Peugeot automobiles qui avait déjà refusé le 28 juin un chèque d'1 255 126,87 F sans avoir l'assurance qu'il ne serait pas payé s'est empressé de rédiger la lettre de résiliation datée du 1er juillet 1991 et de la faire signifier le même jour à 18 heures sans attendre de savoir si l'ordre de virement qu'elle savait en cours était exécuté ;

Que de surcroît à la date de la résiliation c'est à dire le 1er juillet et non le 29 juin la cause alléguée avait disparue ; que pour répondre aux prescriptions contractuelles, cette cause ne peut être en effet qu'un défaut de paiement et non pas la simple absence de réception d'un télex bancaire dépourvu d'ambiguïté que Peugeot exigeait en remplacement du chèque refusé ; que le virement a été opéré valeur 1er juillet 1991 ; qu'il en résulte qu'à l'heure de la signification de la résiliation le grief n'existait plus ;

Considérant que Peugeot a agi avec une extrême précipitation, comme si elle craignait qu'un paiement effectif lui ôte tout prétexte de résiliation, accumulant les exigences et les préparatifs insolites, écart de 4 jours y compris le week-end entre la réclamation et la résiliation, refus d'accepter un paiement par chèque présentable immédiatement, envoi, comme l'a relevé le tribunal, d'un camion de transport de véhicule dès le 28 juin, enlèvement du stock le 2 juillet à partir de 8 heures avant l'ouverture de la banque qui aurait permis d'avoir confirmation du paiement ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont relevé que la précipitation avec laquelle Peugeot a agi, impliquait que la décision d'éliminer jean Pierre Cardiet du réseau Peugeot avait été prise pour des raisons autres que celle alléguée;

Considérant qu'en définitive, la résiliation du contrat de concession par Peugeot est abusive, a été opérée de mauvaise foi, et se trouve dépourvue de cause; que Peugeot doit entière réparation de la faute commise;

Sur le préjudice moral :

Considérant que le ton de la lettre en date du 1er juillet 1991 signé Bernard Terquem est extrêmement brutale ; que la résiliation de la concession ne l'est pas moins ; que de tels événements et leurs conséquences humaines et financières et familiales ne peuvent qu'avoir un effet traumatisant sur celui qui en a été la victime ; que le dommage a été encore accru par le fait qu'ils ont eu lieu dans une ville de moyenne importance et concernaient un élu local et un chef d'entreprise dont la crédibilité politique et commerciale ont été nécessairement atteintes ; que le tribunal a fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Jean Pierre Cardiet ;

Sur l'évocation :

Considérant que la faculté d'évocation est offerte à la Cour expressément par l'article 568 du Code de procédure civile ; qu'elle ne constitue pas par elle-même une atteinte critiquable au principe du double degré de juridiction ; qu'en l'espèce les parties ont pleinement bénéficié de cette garantie sur la question essentielle de l'existence d'une faute dommageable commise par Peugeot dans la résiliation du contrat de concession ; qu'il ne reste plus qu'à faire les comptes entre les parties au vu notamment du rapport d'expertise de M. Deude ;

Considérant qu'il convient de ne pas retarder davantage la réparation du préjudice subi par SOA ; que compte tenu de l'importance des sommes réclamées, la décision de la Cour peut avoir une incidence sur le sort de cette entreprise en redressement judiciaire et sur le paiement de ces créanciers ; qu'il est donc de bonne justice d'évoquer l'affaire dans son entier pour lui donner une solution définitive.

Sur le rapport d'expertise :

Considérant que Peugeot n'a pas conclu sur le contenu du rapport d'expertise ; qu'il y a lieu de l'inviter à le faire rapidement ;

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Considérant qu'il serait inéquitable que SOA conserve la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposé présentement en appel ;

Par ces motifs : Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Evoquant, sur la réparation du préjudice subi par la société Ouest Automobiles, vu le rapport déposé par M. Maurice Deude le 30 juillet 1993, Ordonne la réouverture des débats sur ce point, Enjoint à la société des automobiles Peugeot de conclure sur le contenu du rapport, Fixe la clôture au 17 juin 1994 et les plaidoiries au 30 juin 1994, Condamne la société des automobiles Peugeot à payer à la société ouest automobiles la somme de 30 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Déboute les parties de leurs demandes contraires ou complémentaires en ce que celles-ci ne sont pas concernées par la réouverture des débats ; Condamne la société des automobiles Peugeot en tous dépens, à l'exception de ceux qui seront exposés postérieurement au présent arrêt et qui sont réservés, Admet la société civile professionnelle Roblin Chaix de Lavarene, titulaire d'un office d'avoué à la Cour au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.