CA Paris, 5e ch. B, 2 décembre 1994, n° 93-5985
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Sécurinfor (SA)
Défendeur :
Dard et fils (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Leclercq
Conseillers :
MM. Bouche, Le Fèvre
Avoués :
SCP Narrat Peytavi, Me Nut
Avocat :
Me Zeitoun Kernevez.
FAITS ET PROCEDURE
Par contrat du 26 novembre 1987 renouvelable annuellement par tacite reconduction sauf préavis de trois mois au moins avant l'échéance, la société Dard et fils, négociant en fruits et légumes, a confié à la société Impaq la maintenance de son matériel informatique. Le 19 février 1990 la société Impaq a donné son fonds de commerce en location-gérance à la société Sécurinfor. Ce contrat a été résilié par la société Dard et fils le 12 novembre 1990. La société Sécurinfor estime que le préavis de trois mois n'a pas été respecté et que la société Dard et fils lui doit en conséquence le paiement de la redevance pour la période du 25 novembre 1990 au 25 novembre 1991.
Le 5 août 1991 une ordonnance d'injonction de payer a été délivrée contre la société Dard et fils en faveur de la société Sécurinfor pour 12 890,65 F plus intérêts légaux à compter du 24 mai 1991 par le président du Tribunal de commerce de Créteil.
Sur opposition de la société Dard et fils, le Tribunal de commerce de Créteil, par jugement du 18 février 1992, a estimé que la clause ambiguë du contrat interdisant la cession du contrat sans le consentement de la société Impaq devait bénéficier également à la société Dard et fils et que celle-ci n'avait pas été informée de la location-gérance accordée à la société Sécurinfor et pouvait ainsi considérer l'offre de renouvellement du 13 novembre 1990 de cette société comme une proposition qu'elle était libre de refuser.
Le tribunal a déclaré en conséquence l'opposition de la société Dard et fils bien fondée et a débouté la société Sécurinfor de ses demandes.
La société Sécurinfor a interjeté appel par acte du 20 janvier 1993 ;
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusion signifiées le 21 juillet 1993 la société Sécurinfor demande à la cour de condamner la société Dard et fils à lui payer 12 890,65 F outre les intérêts de droit à compter du 24 mai 1991 et 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle soutient que la société Dard et fils était tenue de respecter le préavis prévu à l'article III du contrat, que la résiliation à laquelle elle a procédé, était nulle, qu'elle a toutefois pris acte de cette résiliation mais que la facture qu'elle a émise est due. Elle prétend qu'elle n'était pas tenue d'informer la société Dard et fils de la location-gérance pour la lui rendre opposable autrement que par une publication dans un journal d'annonces légales, ce qui a été fait le 9 mars 1990. Elle en conclut que les contrat en cours, dont la convention est litigieuse, se poursuivaient " de fait " entre les cocontractants du propriétaire du fonds et le locataire-gérant.
Par conclusions signifiées le 23 septembre 1994, la société Dard et fils demande à la Cour de constater l'extinction du contrat de location-gérance du fait de la liquidation judiciaire de la société Impaq et de dire la société Sécurinfor irrecevable en action faute de qualité à agir. Elle conclut subsidiairement à la confirmation du jugement, au débouté de l'appelante de toutes ses demandes et à sa condamnation en tout état de cause à lui payer 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle précise que la société Impaq a été déclarée en redressement judiciaire le 13 septembre 1990 puis en liquidation judiciaire le 25 octobre 1990 et qu'elle a " reçu sans aucune démarche préalable ni explication le 13 novembre 1990 un renouvellement du contrat de maintenance " signé par la société Sécurinfor qu'elle ne connaissait pas.
Elle soutient que selon les termes mêmes du contrat de location-gérance les éléments corporels et incorporels du fonds de commerce étaient restés la propriété du bailleur, dont la liquidation judiciaire a entraîné la résiliation du contrat de location-gérance. Subsidiairement elle prétend que le contrat de maintenance ne pourrait être cédé sans son consentement.
Sur quoi, LA COUR,
Considérant qu'aucune disposition législative ne prévoit que la liquidation judiciaire du bailleur entraîne automatiquement la cessation du contrat de location-gérance qu'il a pu consentir du fonds de commerce lui appartenant;
Que le locataire-gérant exploite le fonds à ses risques et périls;
Que la défaillance du propriétaire du fonds est sans effet sur cette exploitation; que la liquidation judiciaire n'entraîne pas la disparition de la personnalité morale de la société qui en est l'objet;
Que le fonds de commerce et le contrat de location-gérance lui-même sont des éléments d'actif qui doivent pouvoir être cédés dans le cadre des opérations de liquidation;
Considérant qu'il convient, dès lors qu'il est admis que la société Impaq a confié son fonds de commerce en location-gérance et que la location-gérance n'a pas été résiliée du fait de la liquidation judiciaire de la société Impaq, que les parties précisent à la Cour si les contrats et en particuliers le contrat de maintenance du matériel de la société Dard et fils étaient inclus dans les éléments loués ;
Qu'il suffirait en effet que cette inclusion qui n'est pas automatique, n'ait pas été contractuellement prévue ainsi que semblent le confirmer les neufs mois durant lesquels la société Sécurinfor n'est pas intervenue, pour que la société appelante ne puisse se prévaloir du contrat de maintenance en cause et qu'il soit sans intérêt de rechercher si la location-gérance a été ou non dûment publiée ;
Par ces motifs : Renvoie les débats au 14 avril 1995, Pour permettre aux parties de s'expliquer sur l'éventuelle inclusion du contrat de maintenance du 26 novembre 1987 dans la location-gérance du 19 février 1990, Fixe la nouvelle clôture au 17 février 1995, Réserve les dépens.